La lettre juridique n°396 du 27 mai 2010 : Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Questions à...] Réforme de la TVA immobilière : les incidences pratiques pour les professionnels de l'immobilier - Questions à Yves-Charles Zimmermann, Avocat à la cour, Cabinet Veil Jourde

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[Questions à...] Réforme de la TVA immobilière : les incidences pratiques pour les professionnels de l'immobilier - Questions à Yves-Charles Zimmermann, Avocat à la cour, Cabinet Veil Jourde. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3210883-questions-a-reforme-de-la-tva-immobiliere-les-incidences-pratiques-pour-les-professionnels-de-limmob
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par Anne-Lise Lonné - Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition fiscale

le 07 Octobre 2010

L'article 16 de la loi de finances rectificative pour 2010 (loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 N° Lexbase : L6232IGW) réforme l'ensemble des règles en matière de TVA immobilière selon le double objectif de simplification et de mise en conformité avec le droit communautaire. Après une présentation générale de cette réforme publiée dans nos colonnes il y a quelques semaines (lire Guy Quillévéré, La France met en conformité le régime de la TVA immobilière avec le droit communautaire N° Lexbase : N7259BN8), nous vous proposons de revenir sur ses incidences pratiques pour les professionnels de l'immobilier, sous l'oeil avisé de Maître Yves-Charles Zimmermann, Avocat à la cour, Cabinet Veil Jourde. Lexbase : Quelles sont les implications de la réforme du point de vue des marchands de biens ?

Yves-Charles Zimmermann : La réforme de la TVA immobilière, opérée par l'article 16 de la loi de finances rectificative pour 2010 ("la loi"), a supprimé le régime spécifique des marchands de biens. Parallèlement, les formalités particulières qui pesaient sur les marchands de biens ont également été abrogées, de même que les sanctions et droit de communication y attachés.

Ainsi, la déclaration d'existence, à souscrire dans le délai d'un mois à compter du commencement des opérations de marchand de biens et, surtout, la tenue d'un répertoire à colonnes, présentant au jour le jour, sans blanc ni interligne et par ordre de numéros, tous les mandats, promesses de ventes, actes translatifs de propriété, et d'une manière générale, tous actes se rattachant à la profession de marchand de biens (CGI, art. 852 N° Lexbase : L8697HLP), ne sont plus requis. Ces dispositions s'appliquent, à défaut d'indication particulière dans la loi, à compter du 11 mars 2010 pour les opérations réalisées à compter de cette date.

Les "anciens" marchands de biens doivent, cependant, conserver le répertoire, tenu jusqu'au 11 mars 2010, dans la limite du délai de prescription fiscale.

Outre la disparition de leur régime, l'activité d'achat-revente d'immeubles réalisée par les anciens marchands de bien est directement impactée par la réforme de la TVA immobilière.

Les opérations réalisées par ces professionnels relèvent, désormais, du droit commun de la TVA, tel que prévu par la loi pour les opérations immobilières.

Rappelons, également, que la loi a assoupli le régime des achats en vue de la revente, cette dernière devant désormais intervenir dans les cinq ans de l'acquisition (contre quatre avant la réforme). La loi l'a également généralisé puisque ce régime, qui ne concernait jusqu'à présent que les marchands de biens est, depuis le 11 mars 2010, applicable de plein droit par toute personne assujettie à la TVA. Ainsi, tout acquéreur assujetti à la TVA peut dorénavant prendre l'engagement de revendre le bien immobilier pour bénéficier de droits d'enregistrement au taux réduit de 0,715 %.

Lexbase : La réforme de la TVA immobilière est-elle, selon vous, favorable du point de vue des promoteurs ?

Yves-Charles Zimmermann : La réforme de la TVA immobilière a, notamment, clarifié le redevable de la taxe qui est désormais, et dans tous les cas, la personne qui réalise l'opération imposable, à savoir le vendeur. Ainsi, l'exception qui permettait à l'acquéreur, auparavant, dans certaines conditions, d'être le redevable de la TVA, a été abrogée. Cette exception était, notamment, utilisée par les promoteurs se portant acquéreurs de terrains entrant pour la première fois dans le champ d'application de la TVA par l'engagement de construire qu'ils souscrivaient. De ce fait, les promoteurs pouvaient auto-liquider la TVA sans aucun décaissement de ladite TVA.

La réforme a ainsi mis fin à cette particularité ; l'engagement de construire ne conditionnant plus l'application de la TVA, celle-ci sera toujours due au vendeur d'un terrain à bâtir lorsque ce dernier est un assujetti. L'acquéreur devra ainsi décaisser le montant de la TVA due au vendeur. Les promoteurs devront, donc, désormais, financer le montant de la TVA. Ceci représente pour ces derniers un coût financier, pouvant être évalué au prix de l'argent sur la période courant entre le paiement du prix et l'imputation de la TVA déductible ou le remboursement du crédit de TVA par le Trésor.

L'impact pour les promoteurs dépendra essentiellement de leur propre organisation, ceux faisant appel à des véhicules ad-hoc de construction-vente par projet étant plus pénalisés, puisque la situation au regard de la TVA est déterminée au niveau de chaque entité juridique (et non pas au niveau du groupe, la notion de groupe de TVA n'existant pas en France, contrairement à certains autres pays européens).

A noter que cet effort financier dépendra essentiellement de la situation du vendeur assujetti du terrain à bâtir, la TVA étant due sur le prix total lorsque le terrain avait ouvert droit à déduction lors de son acquisition par le vendeur, ou bien sur la marge dans le cas contraire.

Rappelons, enfin, en matière de droits d'enregistrement, que les promoteurs, lors de l'acquisition de terrains à bâtir, sont redevables du seul droit fixe de 125 euros en contrepartie de l'engagement de construire dans un délai de quatre ans.

La réforme a introduit une certaine souplesse qui n'existait pas jusqu'à présent, dans la mesure où, en cas d'acquisitions successives par des personnes assujetties, l'engagement pris par le cédant peut être repris par l'acquéreur (auquel s'impose alors le délai imparti initialement).

Enfin, les commentaires à paraître de l'administration sont particulièrement attendus au regard des facultés qui semblent offertes aux assujettis de se délier de leurs engagements et, notamment, la faculté pour un assujetti tenu à un engagement de construire d'y substituer un engagement de revendre.

Lexbase : Dans quelle mesure un professionnel peut-il optimiser sa situation par le biais de l'exercice des options à la TVA prévues dans le cas des opérations exonérées ?

Yves-Charles Zimmermann : Dans le cadre de la réforme de la TVA immobilière, la loi a introduit la possibilité pour les opérations réalisées par les assujettis dans le cadre de leur activité économique, lorsqu'elles ne sont pas taxables de plein droit, d'y être imposées sur option. Tel est notamment le cas des terrains non à bâtir et des immeubles autres que les immeubles neufs.

Bien que les conditions et modalités pratiques de l'application de cette mesure n'ont pas encore fait l'objet d'un décret, il semble que l'option devrait pouvoir être exercée (ou non) par les différents assujettis pour chaque opération prise individuellement.

Le choix de l'option leur permettra de choisir le régime fiscal applicable à une opération en fonction de son contexte, notamment, la qualité de l'acquéreur, le régime appliqué en amont, le montant éventuel de TVA antérieurement déduite à régulariser, le montant des charges nécessaires à la réalisation de l'opération.

Cette étude au cas par cas devrait, également, permettre d'éliminer dans le futur le renchérissement "artificiel" de certains biens provenant de la rémanence de taxe (par exemple la TVA à régulariser prise comme un élément du prix) lorsque l'acquéreur peut intégralement (ou partiellement) déduire la taxe.

Cette souplesse introduite par la loi devrait finalement permettre aux professionnels de bénéficier pleinement du mécanisme de neutralité de la TVA.

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