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N1843BHQ
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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication
le 27 Mars 2014
Nous disons "incongruités", car il aura fallu l'intervention de la plus Haute formation de la Cour de cassation pour mettre les points sur les "i"... trémas. Car diacritique il y a en la matière. Par souci de cohérence, le législateur de 1958 a ouvert l'option de l'action civile devant le juge pénal, de manière à ce que le juge répressif condamne et évalue le préjudice ainsi subi par la société à l'occasion d'une infraction, mais également celui causé à la victime directe ou indirecte de cette même infraction. S'ouvraient aux justiciables deux voies de réparation de leur préjudice, devant le juge civil ou devant le juge pénal avec l'assentiment nécessaire du ministère public. Justice plus cohérente, plus rapide, au régime de la preuve facilité par le concours du ministère public, la réparation du préjudice civil devant le juge pénal aura tôt fait de faire grincer les dents, à partir du moment où la patrimonialisation de ce préjudice se lovait sur la pénalisation de la responsabilité civile.
La patrimonialisation du préjudice et par conséquent sa transmissibilité ne pose guère de problème d'appréhension, lorque des héritiers demandent la réparation du préjudice matériel que leur auteur aurait subi avant sa mort : matériel pour matériel -autrement dit pécuniaire pour pécuniaire-. "Les hommes oublient plus facilement la mort de leur père que la perte de leur patrimoine" (Machiavel, Le Prince). Il en va, tout de même, différemment, du préjudice moral dont la patrimonialisation aura été, certes clairement, mais plus difficilement, imposée par la Haute juridiction le 30 avril 1976, rejointe tardivement par le Conseil d'Etat, le 29 mars 2000.
Restait pourtant une question de poids : si les héritiers peuvent demander réparation devant le juge pénal pour le préjudice subi par le de cujus, est-ce à la condition que ce dernier ait lui-même actionné la juridiction répressive avant sa mort ou cette patrimonialisation est-elle indépendante de la volonté expresse ou tacite (par l'action du ministère public non contestée) de la victime directe ?
C'est à cette question délicate que l'Assemblée plénière a répondu, en conditionnant le droit à réparation des héritiers, à l'action préalable du de cujus ou du ministère public. Le droit moral, c'est-à-dire peu ou prou la volonté du défunt de poursuivre ou non l'auteur de l'infraction, est ainsi préservé ; et la patrimonialisation du préjudice civil ainsi limitée.
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