Réf. : Proposition de loi relative à la simplification du droit, version du 25 octobre 2007
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par Anne-Laure Blouet Patin, Rédactrice en chef du pôle "Presse"
le 07 Octobre 2010
Le chapitre Ier, concernant les particuliers, qui regroupe les articles 2 à 5, comprend, d'une part, une mesure destinée à accroître les droits des citoyens vis-à-vis de la justice et de l'administration, et, d'autre part, diverses mesures concrètes destinées à simplifier la vie quotidienne des citoyens.
Ainsi, l'article 2 de la proposition de loi vise à permettre à une personne d'être assistée ou représentée, devant diverses juridictions, par son concubin ou la personne avec laquelle elle a conclu un pacte civil de solidarité. L'article 4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques (N° Lexbase : L6343AGZ), a attribué aux avocats le monopole de l'assistance et de la représentation en justice sous réserve, d'une part, des compétences reconnues aux avoués près les cours d'appel et aux avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, et, d'autre part, des règles spécifiques en vigueur à la date de la publication de la loi. Ainsi, les parties se défendent en principe elles-mêmes devant le tribunal d'instance mais peuvent être assistées ou représentées par un avocat, par leur conjoint, par leurs parents ou alliés en ligne directe ou en ligne collatérale jusqu'au troisième degré inclus ou par une personne exclusivement attachée à leur service personnel ou à leur entreprise (NCPC, art. 827 N° Lexbase : L1995DK4). Ces dispositions ont, ensuite, été rendues applicables aux procédures devant le juge de l'exécution (article 10 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991, portant réforme des procédures civiles de l'exécution N° Lexbase : L9124AGZ) et devant les juridictions de proximité (article 7 de la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002, d'orientation et de programmation pour la justice N° Lexbase : L6903A4G). Des règles similaires, elles aussi prévues avant la publication de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, existent pour le tribunal paritaire des baux ruraux (NCPC, art. 884 N° Lexbase : L3187ADE), le conseil de prud'hommes (C. trav., art. R. 516-5 N° Lexbase : L0651ADH), le tribunal du contentieux de l'incapacité, le tribunal des affaires de sécurité sociale et la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail (CSS, art. L. 144-3 N° Lexbase : L8970HW7).
Néanmoins, tout ce corpus de règles ne prévoit pas la possibilité, pour une partie à un litige, d'être assistée ou représentée par son concubin ou la personne avec laquelle elle a conclu un pacte civil de solidarité. Cette possibilité n'existe actuellement implicitement que devant le tribunal de commerce, devant lequel les parties ont la faculté de se faire assister ou représenter par toute personne de leur choix (NCPC, art. 853 N° Lexbase : L1796ADU).
Selon le Rapport n° 36 (2007-2008) de M. Bernard Saugey, fait au nom de la commission des lois, déposé le 17 octobre 2007, "cette situation a été dénoncée tant par le Médiateur de la République, dans son rapport annuel pour 2006, que par l'Association nationale des juges d'instance, au nom des évolutions de la société : près d'un couple sur six vit aujourd'hui en concubinage, contre moins de 3 % en 1970, et huit pactes civils de solidarité sont signés chaque année quand cent mariages sont célébrés. Au total, 280 775 pactes civil de solidarité ont été enregistrés (et un peu plus de 38 000 dissous) entre 1999 et 2006".
Dans sa rédaction initiale, l'article 2 de la proposition de loi tendait à modifier directement les articles 828 et 884 du Nouveau Code de procédure civile, afin de permettre aux parties d'être assistées ou représentées par leur concubin ou leur partenaire d'un pacte civil de solidarité devant les juridictions d'instance et de proximité -par extension, et sauf en matière de saisie immobilière, devant le juge de l'exécution- ainsi que devant le tribunal paritaire des baux ruraux. Dans sa version issue des travaux sénatoriaux, il est précisé que "par dérogation au premier alinéa de l'article 4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, les parties peuvent se faire assister ou représenter devant le tribunal d'instance, la juridiction de proximité ou en matière prud'homale par leur concubin ou la personne avec laquelle elles ont conclu un pacte civil de solidarité". De plus, plusieurs articles ont été rajoutés par les sénateurs visant à renforcer les droits des personnes qui se voient notifier une opposition administrative (article 2 bis) et à garantir l'égalité des droits des créanciers et des débiteurs d'aliments (ex-conjoints, ascendants, descendants) dans l'accès à l'information fiscale (article 2 ter).
L'article 3 de la proposition de loi de simplification du droit entend supprimer le contrôle par les caisses d'allocations familiales de la réalisation d'examens médicaux postnataux. Cet article modifie l'article L. 533-1 du Code de la sécurité sociale (N° Lexbase : L0215DPN et voir les conditions relatives aux examens médicaux de la mère et de l'enfant N° Lexbase : E3083BDK), afin de supprimer les dispositions subordonnant le versement de l'allocation de base de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) à la passation par l'enfant des examens médicaux obligatoires donnant lieu à l'établissement d'un certificat de santé. Les examens médicaux concernés sont au nombre de trois ; ils doivent intervenir respectivement dans les huit jours de la naissance, au cours du neuvième mois et au cours du vingt-quatrième mois (C. santé publ., art. R. 2132-2 [LXB= L3290DK3]). Le médecin qui les a pratiqués doit établir le certificat de santé correspondant à l'âge de l'enfant et l'adresser, dans un délai de huit jours, au médecin responsable du service de la protection maternelle et infantile du département de résidence des parents ou de la personne chargée de la garde de l'enfant, dans le respect du secret médical et par envoi confidentiel (C. santé publ., art. R. 2132-3 [LXB= L6495HIE]). Jusqu'en 2006, le médecin devait également établir une attestation d'examen et la remettre au père, à la mère ou à la personne ayant la garde de l'enfant, à charge pour ceux-ci d'adresser ce document à leur organisme débiteur de prestations familiales. Ces obligations ont été supprimées par le décret n° 2006-463 du 20 avril 2006, relatif aux certificats de santé de l'enfant (N° Lexbase : L3910HIN).
L'article 4 envisage, quant à lui, de supprimer le certificat médical prénuptial. L'obligation faite aux futurs époux de se soumettre à un examen médical préalable a été instituée par les lois des 16 décembre 1942 et 29 juillet 1943, dont les principes ont été repris par l'ordonnance n° 45-2770 du 2 novembre 1945, sur la protection maternelle et infantile. En conséquence, sont donc supprimées les dispositions de l'article 63 du Code civil (N° Lexbase : L1216HWX) prévoyant que la publication des bans ou, en cas de dispense d'une telle publication, la célébration du mariage par l'officier de l'état civil, est subordonnée à l'accomplissement de plusieurs formalités, parmi lesquelles la remise, pour chacun des futurs époux, d'un certificat médical datant de moins de deux mois "attestant, à l'exclusion de toute autre indication, que l'intéressé a été examiné en vue du mariage". De même, sont abrogés les articles L. 2121-1 (N° Lexbase : L1390HWE) et L. 2121-2 (N° Lexbase : L3748DLE) du Code de la santé publique qui renvoient au pouvoir réglementaire le soin de fixer la liste des examens devant être pratiqués par le médecin chargé de délivrer le certificat médical prénuptial, et qui disposent qu'à l'occasion de cet examen, un test de dépistage de l'infection par le virus de l'immuno-déficience humaine doit être proposé aux futurs conjoints, après information sur les risques de contamination, et prévoient la remise d'une brochure d'éducation sanitaire à chacun des futurs conjoints en même temps que le certificat médical.
L'article 5 de la proposition de loi supprime l'exigence d'un récépissé des services fiscaux pour la déclaration qu'un certain nombre d'organismes, notamment les sociétés d'assurances et les banques, sont tenus de faire à l'occasion de l'ouverture d'une succession et modifie, par là même, le Code général des impôts (CGI, art. 805 N° Lexbase : L8300HLY et 806 N° Lexbase : L2562HN9). Afin de permettre à l'administration fiscale de procéder aux recoupements nécessaires au contrôle de la sincérité des déclarations de succession, l'article 805 et le I de l'article 806 du Code général des impôts font obligation aux "sociétés, compagnies d'assurances et tous autres assureurs français et étrangers, qui auraient assuré contre le vol ou contre l'incendie, en vertu d'un contrat ou d'une convention en cours à l'époque du décès, des bijoux, pierreries, objets d'art ou de collection, situés en France et dépendant d'une succession qu'ils sauraient ouverte, ou appartenant au conjoint d'une personne qu'ils sauraient décédée d'en faire la déclaration à la direction des services fiscaux du département de leur résidence dans la quinzaine qui suit le jour où ils ont connaissance du décès" ; et aux "administrations publiques, établissements ou organismes quelconques soumis au contrôle de l'autorité administrative, sociétés ou compagnies, prestataires de services d'investissement, changeurs, banquiers, escompteurs, officiers publics ou ministériels ou agents d'affaires qui seraient dépositaires, détenteurs ou débiteurs de titres, sommes ou valeurs dépendant d'une succession qu'ils sauraient ouverte d'adresser, soit avant le paiement, la remise ou le transfert, soit dans la quinzaine qui suit ces opérations, à la direction des services fiscaux du département de leur résidence, la liste de ces titres, sommes ou valeurs".
Ces articles prévoient qu'un récépissé de ces déclarations doit être donné à leurs auteurs. Selon les rapporteurs de la proposition de loi, cette suppression permettrait, non seulement à l'administration fiscale de réaliser des économies, mais surtout d'accélérer le versement, par les organismes d'assurances et les banques, des sommes dues aux ayants droit des défunts.
Lors de l'examen du texte, les sénateurs ont adopté un amendement (article 5 bis) ayant pour objet de modifier l'article 28-1 du Code civil (N° Lexbase : L2678ABS), afin de prévoir l'apposition automatique, sur l'extrait avec filiation de l'acte de naissance d'une personne, ou d'un acte dressé pour en tenir lieu, d'une mention relative à sa nationalité. Les dispositions proposées reprennent celles que le Sénat avait déjà adoptées lors de l'examen de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007, portant réforme de la protection juridique des majeurs (N° Lexbase : L6046HUH) mais que le Conseil constitutionnel avait censurées en raison de leur absence de lien avec la réforme initialement prévue par le Gouvernement (décision n° 2007-552 DC, du 1er mars 2007 N° Lexbase : A4014DU9).
Le fonctionnement de la justice est également visé par la proposition de loi. En effet, son article 11 envisage le recours à la visioconférence devant les juridictions judiciaires. Le recours à la visioconférence n'a, jusqu'à présent, été autorisé que devant le juge pénal et a connu un développement progressif. Introduite à titre provisoire par l'article 32 de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001, relative à la sécurité quotidienne (N° Lexbase : L7960AUD), cette possibilité a été pérennisée par la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002, d'orientation et de programmation pour la justice (N° Lexbase : L6903A4G) et a vu son champ d'application s'élargir en 2004 (loi n° 2004-204 du 9 mars 2004, portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité N° Lexbase : L1768DP8), 2005 (loi n° 2005-47 du 26 janvier 2005, relative aux compétences du tribunal d'instance, de la juridiction de proximité et du tribunal de grande instance N° Lexbase : L5285G7U) et 2007 (lois n° 2007-291 du 5 mars 2007, tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale N° Lexbase : L5930HU8 et n° 2007-297 du 5 mars 2007, relative à la prévention de la délinquance N° Lexbase : L6035HU3).
Il est donc proposé d'insérer un article L. 111-12 dans le Code de l'organisation judiciaire autorisant la tenue d'audiences devant les juridictions judiciaires dans plusieurs salles d'audience reliées directement par un moyen de télécommunication audiovisuelle garantissant la confidentialité de la transmission.
Les dispositions de ce nouvel article L. 111-12 du Code de l'organisation judiciaire, dont les modalités d'application devraient être fixées par décret en Conseil d'Etat, seraient applicables à l'ensemble des audiences, civiles ou pénales, sous réserve, toutefois, des règles particulières de la procédure pénale.
Les sénateurs ont adopté un amendement (article 12 bis) ayant pour objet de substituer le Nouveau Code de procédure civile à l'ancien. Selon le rapport du Sénat, seul reste en vigueur un titre de l'ancien Code de procédure civile relatif à la prise à partie des magistrats non professionnels.
L'objet de l'article 12 bis est donc d'intégrer ces dispositions, en les modifiant, dans la partie législative du Code de l'organisation judiciaire.
Enfin, il est à noter que la proposition de loi opère 126 abrogations explicites de dispositions législatives devenues désuètes ou sans objet, parmi lesquelles l'on peut citer, entre autres, la loi des 27 novembre et 1er décembre 1790, portant institution d'un tribunal de cassation et réglant sa composition, son organisation et ses attributions, la loi n° 60-1373 du 21 décembre 1960, fixant les conditions dans lesquelles les mineurs de fond des mines de combustibles minéraux solides accompliront leurs obligations militaires, le décret-loi du 30 octobre 1935 portant réglementation de la vente par camions-bazars, ou, encore, la loi du 6 décembre 1928, relative à la réglementation de l'abattage du châtaignier.
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