Réf. : Cass. civ. 3, 25 avril 2007, n° 03-16.362, M. Gérard Dahan, FS-P+B (N° Lexbase : A0161DWU)
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N0742BB4
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par Marine Parmentier, Avocat à la cour d'appel de Paris
le 07 Octobre 2010
Au soutien de son pourvoi, M. D. faisait valoir l'inopposabilité de la cession de parts sociales au tiers créancier. Il rappelait, notamment, que les formalités de l'article 1690 du Code civil n'avaient pas été respectées, pas plus que celles de l'article 52 du décret du 3 juillet 1978 (N° Lexbase : L1814A4X). Il en concluait donc que le créancier social ne pouvait le rechercher après avoir vainement mis en demeure la société de payer.
Rappelons, en effet, qu'il résulte des textes précités que la cession de parts sociales n'est opposable aux tiers qu'après accomplissement des formalités rendant la cession opposable à la société (c'est-à-dire soit par signification par un huissier, soit par l'acceptation de la société dans un acte authentique ou, si les statuts le prévoient, un transfert sur les registres de la société) et après publication. La publicité de la cession de parts est accomplie par dépôt, en annexe au registre du commerce et des sociétés, de deux copies authentiques de l'acte de cession, s'il est notarié, ou de deux originaux, s'il est sous seing privé.
La Cour de cassation a fait une interprétation stricte de ces règles légales, jugeant, notamment, que viole l'article 1690 du Code civil, la cour d'appel qui retient que le représentant légal de la société et associé a participé à l'acte de cession comme une partie qui s'oblige par la formule usuelle "lu et approuvé", manifestant ainsi la volonté de la société et de la communauté des associés d'accepter la cession et en déduit, qu'en dépit de l'omission des formalités prescrites, l'acte de cession est opposable à la société au regard des statuts et de l'article 1690 du Code civil (Cass. civ. 3, 11 octobre 2000, n° 99-10.108, Société civile immobilière France-Corse c/ Consorts Tomasi N° Lexbase : A7793AH4, Bull. civ. III, n° 162).
De même a-t-elle énoncé qu'un associé, tiers à la cession de parts sociales, ne peut invoquer son existence que si cette cession a été notifiée à la société ou acceptée par celle-ci conformément aux statuts et a fait l'objet d'une publicité légale (Cass. civ. 1, 24 mars 1998, n° 95-17.801, M. Philippe Catier et autre c/ M. Pierre Le Beguec et autres, inédit N° Lexbase : A5486CZ9).
En matière d'opposabilité de la cession aux tiers, il avait été jugé que l'acte de cession de parts sociales d'une SCI qui n'avait pas été déposé en annexe au registre du commerce et des sociétés était inopposable au créancier nanti (CA Paris, 13 mars 1997, Dr. Sociétés 1997, n° 100).
Dans l'arrêt rapporté, la Cour de cassation fait une lecture plus souple du formalisme légal requis pour l'opposabilité de la cession de parts sociales aux tiers. Elle retient que les statuts modifiés font état de la qualité d'associé du cessionnaire. Elle précise que ces statuts modifiés avaient fait l'objet d'un dépôt au greffe du tribunal de grande instance, l'extrait K bis de la société mentionnant le nom du nouvel associé depuis cette date. Bien plus, la Cour de cassation rappelle que le nouvel associé avait été désigné en qualité de gérant de la société civile.
En conséquence, elle approuve les juges du fond qui avaient retenu que le créancier social pouvait se prévaloir de l'article 1857 du Code civil (N° Lexbase : L2054ABP) et donc agir contre le cessionnaire des parts sociales.
Cette solution, qui va dans le sens d'un assouplissement des formalités requises pour l'opposabilité des cessions de parts sociales (notamment aux tiers), nous paraît fondée, notamment, eu égard à la qualité de gérant de l'associé cessionnaire des parts sociales. En effet, l'article 1849 du Code civil (N° Lexbase : L2046ABE) prévoit spécifiquement que, dans ses rapports avec les tiers, le gérant engage la société par les actes entrant dans l'objet social. Dès lors qu'il disposait du pouvoir d'engager la société vis-à-vis des tiers, Monsieur D., cessionnaire des parts sociales, ne pouvait valablement se retrancher derrière une absence de signification et de publication de la cession de ses parts sociales pour prétendre que les tiers créanciers ne pouvaient agir directement contre lui en cas de défaillance de la société.
Un tel argumentaire encourait la sanction des tribunaux.
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