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N2919ALP
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par Pierre-Michel Le Corre, Professeur des Universités, Directeur du Master Droit de la Banque de la Faculté de Toulon et du Var
le 07 Octobre 2010
La loi du 26 juillet 2005 (loi n° 2005-845, de sauvegarde des entreprises N° Lexbase : L5150HGT) a apporté deux innovations majeures dans le cadre des procédures de liquidation judiciaire.
La première tient à la possibilité d'arrêter en cette phase un plan de cession, ce qui conduira à retarder, du fait de la nécessaire surveillance de son exécution, la clôture de la liquidation judiciaire.
La seconde, dont l'objectif avoué est, au contraire, l'accélération de la clôture de la liquidation, tient à la création d'une liquidation judiciaire simplifiée.
Les dispositions concernant la procédure de liquidation judiciaire simplifiée, issue de la loi du 26 juillet 2005, s'appliquent aux procédures en cours, lors de l'entrée en vigueur de la loi (loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005, art. 191-1, décret n° 2005-1677 du 28 décembre 2005, art. 361 N° Lexbase : L3297HET).
La jurisprudence n'est pas encore formée sur cette question, mais rapidement les praticiens se sont interrogés sur ce corps de règles. Il n'est, dès lors, pas étonnant que la Cour de cassation ait été saisie pour avis sur l'application de ces textes, par le TGI de Thonon les Bains. La question posée est la suivante : "de la rédaction combinée de l'article L. 641-2, alinéa 2, du Code de commerce (N° Lexbase : L4045HBG), aux termes duquel la procédure de liquidation judiciaire simplifiée est applicable s'il résulte du rapport établi par le liquidateur que les trois conditions prévues audit article sont réunies, et de l'article L. 644-2 du même code (N° Lexbase : L3947HBS) relatif aux modalités de réalisation des biens du débiteur lorsque le tribunal décide de l'application des règles de la liquidation judiciaire simplifiée, faut-il admettre le caractère obligatoire de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée ou doit-on considérer, qu'en raison du retour, à tout moment, toujours possible en application des dispositions de l'article L. 644-6 du Code de commerce (N° Lexbase : L4140HBX), à la procédure normale, le tribunal dispose de la faculté, si les circonstances de l'espèce le justifient, de ne pas faire application de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée ?".
Dans son avis du 10 juillet 2006, la Cour de cassation répond que "l'application de la liquidation judiciaire simplifiée prévue par l'article L. 641 2, alinéa 2, du Code de commerce est une faculté dont le tribunal peut faire usage dès l'ouverture de la procédure".
Cette réponse nous semble sans surprise.
Rappelons, d'abord, que la liquidation judiciaire simplifiée n'est accessible qu'à certaines entreprises. Trois critères cumulatifs ont été posés par l'article L. 641-2, alinéa 2 : l'absence d'immeuble à réaliser, le non-dépassement d'un certain nombre de salariés au cours des six mois précédant l'ouverture de la procédure -et l'absence de prononcé de la liquidation judiciaire-, et le non-dépassement d'un certain chiffre d'affaires, ces deux derniers critères devant être précisés par décret.
Le seuil prévu pour le chiffre d'affaires hors taxes est de 750 000 euros (décret du 28 décembre 2005, art. 223, al. 1). Le seuil prévu pour le nombre de salariés employés par le débiteur est fixé à 5 (décret du 28 décembre 2005, art. 223, al. 1).
Lorsque les critères d'application de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée seront réunis, le tribunal dispose d'une simple faculté d'appliquer les règles de la liquidation judiciaire simplifiée. Ce caractère facultatif avait été affirmé lors des travaux parlementaires (Rapp. J.-J. Hyest, n° 335, p. 366). La lettre des textes apparaît en ce sens. Une circulaire ministérielle l'avait déjà préconisé, en indiquant que la juridiction "en apprécie souverainement l'opportunité" (Circ. 9 janvier 2006 N° Lexbase : L3711HP7, JCP éd. E, 2006, 1306).
L'intérêt de l'avis de la Cour de cassation est qu'il va au-delà de la question posée. En effet, la Cour de cassation croit bon de résoudre une autre grande difficulté d'interprétation du texte : celle de savoir si le tribunal a la possibilité d'appliquer, dès le jugement de liquidation judiciaire, les règles de la liquidation judiciaire simplifiée. Elle répond positivement et sans ambiguïté : c'est une faculté "dont le tribunal peut faire usage dès l'ouverture de la procédure".
Appliquer immédiatement les règles ne nous semblait pas faire difficulté en cas de conversion de la sauvegarde ou du redressement en liquidation judiciaire. En effet, il n'y avait pas, alors, place au rapport du liquidateur envisagé par l'article L. 641-2, alinéa 1, du Code de commerce, duquel résultent les informations sur l'existence des critères d'application des règles de la liquidation judiciaire. Il a, en effet, un lien indissoluble entre ce rapport du liquidateur et les critères de la liquidation judiciaire simplifiée. Ce lien est d'ailleurs tellement évident que l'article 312 du décret du 28 décembre 2005 prévoit que, c'est au vu du rapport du liquidateur que le tribunal décide d'appliquer les règles de la liquidation judiciaire simplifiée.
On pouvait donc penser, à la lecture des textes et à leur coordination, que deux situations méritaient d'être distinguées : le cas de la liquidation judiciaire immédiate nécessitant un rapport et semblant rendre impossible l'application des règles de la liquidation judiciaire simplifiée avant communication au tribunal de ce rapport et le cas de la liquidation judiciaire prononcé sur conversion, cas dans lequel il n'y a pas besoin de rapport, ce qui rend possible alors l'application immédiate, dans le jugement prononçant la liquidation judiciaire, des règles de la liquidation judiciaire simplifiée.
La Cour de cassation a estimé que ces deux cas n'avaient pas à être distingués. Certes, elle n'a pas explicitement réglé le cas du jugement prononçant la liquidation judiciaire sur conversion. Mais un raisonnement a fortiori s'impose de toute évidence.
La Cour de cassation ne peut qu'être approuvée d'éviter les complications procédurales stériles dans une procédure dite simplifiée.
Depuis la loi du 10 juin 1994 (loi n° 94-475, relative à la prévention et au traitement des difficultés des entreprises N° Lexbase : L9127AG7), l'action en revendication exercée par le propriétaire d'un meuble dans la procédure collective, qui tend à faire reconnaître opposable son droit de propriété et à lui permettre la reprise du bien, est enfermée dans un mécanisme à double détente.
Dans une première phase, il appartient au propriétaire, dans les trois mois de la publication du jugement d'ouverture au Bodacc, de présenter une demande en acquiescement de revendication à l'organe compétent. Toutefois, si le contrat est en cours au jour du jugement d'ouverture, ce même délai est décalé à la date de l'arrivée du terme ou de la résiliation du contrat. A partir de la réception de la demande, l'organe compétent dispose d'un délai d'un mois pour accepter ou non la demande, c'est-à-dire pour acquiescer ou non à celle-ci. S'il n'acquiesce pas à la demande, soit parce qu'il ne répond pas à celle-ci, soit parce qu'il répond négativement dans le délai, le propriétaire doit, dans une deuxième étape, saisir le juge-commissaire d'une requête en indication, dans le mois qui suit l'expiration du mois imparti au mandataire de justice pour répondre, et cela même si l'organe compétent a répondu avant l'expiration de ce délai. A priori donc, à la lecture des textes, le propriétaire ne peut présenter sa requête avant expiration du délai imparti à l'organe compétent pour répondre.
En l'espèce, un propriétaire a saisi, le 11 décembre 2001, le liquidateur d'une demande en revendication de marchandises puis il a saisi par requête le juge-commissaire, le 21 décembre. Le juge-commissaire a fait droit à la demande, l'ordonnance ayant été confirmée à la suite du recours formé devant le tribunal par le liquidateur. La cour d'appel va confirmer le jugement et c'est dans ce contexte que le liquidateur se pourvoit en cassation. La Cour de cassation va rejeter en ces termes le pourvoi : "l'arrêt retient exactement que si le juge-commissaire ne peut accueillir la requête en revendication lorsque le délai prévu à l'article 85-1 du décret du 27 décembre 1985 dont dispose le mandataire pour répondre à la demande présentée devant lui n'est pas expiré, il peut, cependant, en application des dispositions de l'article 126 du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L2072AD4), statuer sur la requête dès lors que la cause d'irrecevabilité a disparu à la date où il statue ; [...] ayant constaté qu'aucun acquiescement n'avait été notifié à la société L. par le liquidateur et que le délai dont dispose ce dernier pour répondre expirait le 14 janvier 2002, l'arrêt en déduit, à bon droit, que le 22 février 2002, date à laquelle le juge-commissaire a statué, la cause d'irrecevabilité avait disparu".
L'importance de cet arrêt n'échappera pas aux praticiens. La solution qu'il pose n'est pas absolument nouvelle. Elle avait, en effet, été adoptée par certaines juridictions du fond qui avaient estimé que, si la requête en revendication est présentée en même temps que la demande en acquiescement, la cause d'irrecevabilité de la requête a disparu si le juge-commissaire statue après expiration du délai imparti au mandataire de justice pour répondre (CA Paris, 3ème ch., sect. B, 22 janvier 1999, n° 98/12189, Me Michel Chavaux c/ Société OCP Répartition N° Lexbase : A0360DI8, D. Affaires 1999, p. 340 ; RTD civ. 1999, p. 441, obs. P. Crocq ; RTD com. 2000, p. 179, obs. A. Martin-Serf ; CA Paris, 5ème ch., sect. A, 22 mars 2005, n° 03/00975, Société OCP Répartition SA c/ Maître Philippe Bleriot N° Lexbase : A7383DHW, Gaz. proc. coll. 2005/2, p. 44, obs. E. Le Corre-Broly). Cette solution n'avait jamais été explicitement adoptée par la Chambre commerciale de la Cour de cassation, qui avait, pour sa part, eu à connaître de l'hypothèse légèrement différente de celle de la présente espèce, puisque la demande au mandataire et la requête avaient été présentées simultanément. La Cour de cassation avait alors mis en avant, d'une part, le fait que la demande en acquiescement au mandataire de justice est un préalable obligatoire et, d'autre part, que si, dans le mois de cette demande, le propriétaire n'a pas eu d'accord sur sa demande, il doit, à peine de seconde forclusion, saisir dans le même délai le juge-commissaire (Cass. com., 28 janvier 2004, n° 01-03.240, F-D N° Lexbase : A0328DBR).
L'intérêt de l'arrêt commenté n'en est que plus grand, en ce que, s'il ne constitue pas un revirement de jurisprudence de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, faute d'identité de situations, la solution est, néanmoins, nouvelle au stade de la Cour de cassation et c'est pourquoi, afin que nul n'en ignore la solution, la Cour a décidé qu'il serait publié à son bulletin. L'arrêt est, en effet, affublé des lettres FS-P+B.
La solution ne peut qu'être approuvée.
Au plan de l'orthodoxie juridique, la solution n'est pas douteuse. La présentation d'une requête au juge-commissaire avant l'heure est une cause d'irrecevabilité de la demande en revendication. Pour sa part, l'article 126 du Nouveau Code de procédure civile dispose que, "dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue".
En l'espèce, la requête en revendication a été présentée au juge-commissaire avant expiration du délai du mois imparti au liquidateur pour se positionner sur la demande en revendication. La requête était donc irrecevable au moment de sa présentation. Toutefois, en l'espèce, lorsque le juge-commissaire a statué, le délai du mois imparti au liquidateur pour répondre à la demande en acquiescement était expiré et ce dernier n'avait pas apporté de réponse. La cause d'irrecevabilité avait donc bien disparu au moment où le juge-commissaire a statué. Ce n'est donc qu'une application stricte de l'article 126 du Nouveau Code de procédure civile à laquelle s'est livrée la Cour de cassation.
Au plan de l'opportunité, la solution ne peut également que recevoir l'approbation. En réformant le régime de l'action en revendication, le législateur du 10 juin 1994 avait entendu simplifier la tâche des propriétaires. Or, le mécanisme institué obligeant ce dernier à une double démarche, loin d'être une simplification, introduit une complication sérieuse de la procédure. Toutes les occasions de simplifier sont donc bonnes. Mais que le praticien ne s'y trompe pas. La simplification ici apportée est loin d'être complète. En effet, elle présuppose que le juge-commissaire ne statue pas avant l'expiration du délai imparti à l'organe compétent pour se positionner. S'il venait à statuer avant expiration de ce délai, la cause d'irrecevabilité de la demande n'aurait pas disparu au jour de sa décision et l'action en revendication serait déclarée irrecevable. En revanche, si après saisine du juge-commissaire, l'organe compétent pour répondre sur la demande en revendication apporte une réponse négative, l'article 126 du Nouveau Code de procédure civile permettra de réparer la malfaçon procédurale commise par le propriétaire.
Le mécanisme de revendication à double détente institué par la loi du 10 juin 1994 est toujours d'actualité sous l'empire de la législation de sauvegarde des entreprises. La solution ici posée par la Cour de cassation sous l'empire de la législation antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises pourra donc continuer à prospérer sous l'empire de la loi du 26 juillet 2005.
Etre administrateur sans apparaître officiellement comme tel, telle est la figure à laquelle ont eu à réfléchir successivement la cour d'appel de Versailles, dans une affaire qui a déjà fait l'objet de commentaires fournis et passionnés (CA Versailles, 13ème ch., 29 avril 2004, n° 03/04439, Monsieur Claude Chouraqui c/ Maître Didier Ségard, Rev. dr. bancaire et fin. 2004/4, p. 271, note F.-X. Lucas ; Bull. Joly 2004/10, p. 1201, §§ 245, note A. Constantin et Y. Lévy ; JCP éd. E., 2005, Jur. 32, p. 35, note M.-J. Campana ; Dr. sociétés novembre 2004, p. 20, n° 188, note J.-P. Legros. Adde Ph. Delebecque, L'administrateur de fait par personne interposée : une notion à définir, JCP éd. E, 2005, comm. 234, p. 220) et la Cour de cassation.
Par le passé, les établissements de crédit, qui prenaient des participations, directement ou par l'intermédiaire de filiales, dans des sociétés anonymes, avaient pris l'habitude d'intervenir directement en demandant leur nomination au sein du conseil d'administration. Cependant, à la suite d'affaires retentissantes -on pense spécialement à l'affaire "Nasa Electronique" (CA Paris, 3ème ch., sect. A, 18 juin 1991, JCP éd. E, 1991, I, chron. 87, n° 4, obs. A. Viandier et J.-J. Caussain ; Bull. Joly 1992, p. 277, § 82, note A. Couret)-, la qualité d'administrateur, dirigeant de droit de société anonyme, a été excipée contre l'établissement de crédit et, sur cette base, certains ont été lourdement condamnés à combler l'insuffisance d'actifs révélée dans les sociétés dirigées. Un établissement de crédit, dirigeant de droit est, pour s'exprimer au sein du conseil d'administration de la SA, tenu de désigner un préposé qui était alors qualifié de représentant permanent de la personne morale. Les textes régissant l'action en comblement de passif permettent de frapper non seulement le dirigeant de droit, c'est-à-dire l'établissement de crédit, mais également son représentant permanent, personne physique. Aussi, après quelques condamnations retentissantes, les établissements de crédit ont-ils eu le choix suivant : la première possibilité est qu'ils ne fassent plus partie du conseil d'administration des sociétés dans lesquelles ils ont directement, ou par l'intermédiaire de filiales, pris des participations. Leur investissement est alors sans contrôle de leur part, ce qui est pour le moins gênant et surtout ne correspond pas à la préoccupation normale d'un investisseur. Une autre possibilité a été utilisée, celle consistant en la nomination d'un préposé au sein du conseil d'administration, l'établissement de crédit n'étant plus alors dirigeant de droit et le préposé n'étant pas le représentant permanent de la personne morale dirigeante, mais bien le dirigeant de droit lui-même. C'est le schéma qui avait été mis en place dans l'affaire commentée.
La cour d'appel de Versailles avait condamné la banque, employeur des deux personnes, dirigeant de droit de la société sous procédure collective, à combler l'insuffisance d'actifs, en retenant que les personnes qui figuraient comme dirigeants dans le conseil d'administration d'une société n'étaient présentes que pour servir les intérêts du dirigeant de fait. La Cour de cassation, dans l'arrêt rapporté, va rejeter le pourvoi en ces termes en rendant un arrêt de principe : "de même qu'en vertu de l'article L. 624-2 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises (N° Lexbase : L7041AIM), les fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actifs d'une société en redressement ou liquidation judiciaires peuvent engager la responsabilité des personnes morales dirigeantes et celle de leurs représentants permanents, de même peut être déclarée responsable de ces fautes, sur le fondement de l'article L. 624-3 du même code (N° Lexbase : L7042AIN), la personne morale qui, sans être dirigeant de droit de la société en redressement ou liquidation judiciaire, a exercé en fait, par l'intermédiaire d'une personne physique qu'elle a choisie et qui a agi sous son emprise, des pouvoirs de direction sur la société".
La notion de dirigeant de fait par interposition de personnes est ainsi consacrée par la Cour de cassation. Elle s'inscrit parfaitement dans le concept classique de la direction de fait. Le dirigeant de fait est bien celui "qui accomplit en toute indépendance des actes positifs de direction et de gestion" (Cass. com., 15 mars 2005, n° 03-19.577, F-D N° Lexbase : A3066DHZ ; Cass. com., 7 mars 2006, n° 04-20.355, F-D N° Lexbase : A5027DNI, Gaz. proc. coll. 2006/3, p. 47, obs. T. Montéran).
Si la solution est sévère pour l'établissement de crédit, elle n'est cependant pas décalée au regard de la législation. En effet, le législateur lui-même, en droit des sociétés, utilise le concept d'interposition de personnes. Les articles L. 241-9 (N° Lexbase : L6414AIE), L. 245-16 (N° Lexbase : L6467AID) et L. 246-2 (N° Lexbase : L4007HBZ) du Code de commerce punissent d'une peine d'amende et de prison certaines infractions relatives à la constitution des sociétés à responsabilité limitée, des infractions relatives aux valeurs mobilières émises par les sociétés par actions et des infractions communes aux diverses formes de sociétés par actions. Le premier de ces textes (art. L. 241-9) prévoit que "les dispositions des articles L. 241-2 à L. 241-6 (N° Lexbase : L3102DYK) sont applicables à toute personne qui, directement ou par personne interposée, aura, en fait, exercer la gestion d'une société à responsabilité limitée sous le couvert ou au lieu et place de son gérant légal". Le deuxième de ces textes (art. L. 245-16), prévoit que "les dispositions du présent chapitre visant le président, les administrateurs, directeurs généraux et les gérants de sociétés par actions sont applicables à toute personne qui, directement ou par personne interposée, aura, en fait, exercé la direction, l'administration ou la gestion desdites sociétés sous le couvert ou au lieu et place de leurs représentants légaux". Enfin, le dernier de ces textes (art. L. 246-2) énonce que "les dispositions des articles L. 242-1 à L. 242-29 et des articles L. 243-1 et L. 243-2 (N° Lexbase : L6446AIL) visant le président, les administrateurs ou les directeurs généraux de sociétés anonymes et les gérants de société en commandite par actions sont applicables à toute personne qui, directement ou par personne interposée, a, en fait, exercer la direction, l'administration ou la gestion desdites sociétés sous le couvert ou au lieu et place de leurs représentants légaux". Ces trois textes prennent en compte l'interposition de personnes pour retenir la qualification de dirigeant. Ainsi, il apparaît qu'il n'y a pas de difficulté à utiliser l'interposition de personnes, en droit des sociétés, dans le cadre des procédures collectives pour affiner la notion de dirigeant de fait.
La Cour de cassation ne retient pas la seule qualité de salariés des deux personnes placées par la banque au conseil d'administration de la société au sein de laquelle une participation avait été prise. Plus largement, elle vise la personne physique qu'elle a choisie et qui a agi sous son emprise. La solution est donc incontestablement plus large que celle qui se cantonnerait au simple visa de salariés et peut signifier que, quelle que soit la qualification de l'intéressé, par exemple un mandataire, la même solution pourrait être retenue, dès lors qu'il est démontré que cette personne reçoit des instructions dans le cadre de son mandat d'administrateur.
La question pourrait se poser de savoir si, la personne morale qui figure, par le biais de ses préposés, au conseil d'administration d'une société, ne doit pas plutôt être considérée comme un dirigeant de droit. C'est, en effet, à cette solution que devrait aboutir le constat d'une interposition de personnes, qui ne constitue qu'une figure particulière de la simulation.
Cet arrêt, dont la solution pourra difficilement être ignorée -il s'agit d'un arrêt P+B+I+R- semble en tout cas sonner le glas de certaines pratiques bancaires, au demeurant fort compréhensibles. A moins que cette solution jurisprudentielle, qui semble bien aller à rebours de l'évolution du droit de la responsabilité bancaire, à l'heure où l'article L. 650-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L4139HBW) pose un principe d'irresponsabilité du fournisseur de crédit, ne trouve un écho dans un statut particulier du capital risque, qui pourrait être légitimé par la volonté d'éviter sa disparition...
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