Il y a quelque chose de "reptilien" avec le droit des successions. Entendons-nous bien, il n'est nullement question, ici, de revenir sur l'épreuve que constitue le décès d'un proche, ainsi que le règlement de sa succession ; mais, il faut reconnaître que le domaine, même du point de vue juridique, demeure, à travers les âges -à l'image d'un gêne récessif-, passionnel, si l'on en juge la pérennité des dispositions obsolètes y afférentes. "
Les règles sur la manière de liquider les successions n'ont pratiquement pas changé depuis 1804. Elles sont complexes, peu efficaces et insuffisamment adaptées aux réalités économiques de l'entreprise" ; le couperet est lourd, mais symptomatique de l'urgence déclarée en entête du projet de loi, à réformer le droit des successions et des libéralités. La loi du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins n'avait que toiletté certains aspects précis de la liquidation successorale, mais les dispositions relatives à l'option des héritiers, à l'administration et au partage des successions, c'est-à-dire l'essentiel du règlement successoral, n'avaient pas été modernisées. Après consultations des éminents Professeurs Jean Carbonnier et Pierre Catala, ainsi que du notariat, grâce aux résultats d'une enquête réalisée à l'initiative de la Chancellerie, la loi tant attendue a été adoptée le 13 juin 2006 et publiée au Journal officiel le 24 juin. Cette loi marque l'obsolescence des dispositions issues du Code de 1804 et peu remaniées par la suite, si bien que les difficultés afférentes au règlement patrimonial de la succession sont légions et témoignent de l'attachement séculaire des français à une certaine rigueur et sévérité des règles qui encadrent la transmission des patrimoines. Issues de la Révolution française, il faudra attendre une autre révolution, celle des moeurs et de l'économie mondialisée, et attendre deux cents ans, pour que soit mieux respectée la volonté de celui qui souhaite transmettre son patrimoine, en particulier lorsque l'ensemble des héritiers s'accordent avec cette volonté, c'est-à-dire pour que soit mieux respectée la liberté individuelle du citoyen. Ainsi, la réforme introduit dans le Code civil les pactes successoraux qui permettront aux héritiers et à celui dont ils ont vocation à hériter de s'accorder sur les conditions de transmission des biens, et, si nécessaire, de déroger à certaines règles de la réserve héréditaire. Dans le même souci de liberté, la réforme étend le champ d'application des donations-partage, actuellement limité aux héritiers de premier rang, aux héritiers de générations différentes, ainsi qu'aux autres héritiers présomptifs. La procédure de partage de successions a été largement réformée afin de fluidifier son déroulement et d'éviter autant que possible le recours au partage judiciaire. Le droit civil a fait sa révolution ; mais qu'en est-il du droit fiscal ? Pas de règlements successoraux sans droits d'enregistrement ou droits de succession, alors quels impacts cette loi va-t-elle avoir sur la fiscalité successorale ? A vrai dire, il semble que ce soit le droit civil qui suive la tendance fiscale vers une modernisation des pratiques et par là-même des esprits. Conçus comme un des piliers de l'égalité des chances républicaine et de la redistribution nationale, les droits de succession tendent, pourtant, à devenir une espèce en voie de disparition, tant l'attractivité patrimoniale de la France doit être de mise, tant le dynamisme de l'économie passe par la disparition des freins dogmatiques, notamment, à la reprise et au développement des entreprises. La majorité des successions est exonérée d'impôt, les autres sont, désormais, exonérables pour peu que l'on soit assisté d'un bon conseiller. Mais, la fiscalité successorale n'a pas dit son dernier mot et, à l'image du débat relatif à l'impôt de solidarité sur la fortune, ne semble pas prête d'abdiquer. C'est pourquoi, il est intéressant de s'attacher aux derniers remous civils de droit des successions, afin d'envisager les influences qu'ils vont avoir sur le développement de la fiscalité successorale, en attendant une nouvelle révolution fiscale. Les éditions juridiques Lexbase vous proposent, ainsi, cette semaine, de lire le commentaire de
Daniel Faucher, Consultant au CRIDON de Paris,
Loi portant réforme des successions et des libéralités : conséquences fiscales.
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