La lettre juridique n°197 du 12 janvier 2006 : Fiscalité internationale

[Jurisprudence] Les dispositions de l'article 164 C du CGI sont-elles contraires aux principes communautaires de liberté d'établissement et de liberté de circulation des capitaux ? (1ère partie)

Réf. : CE, 9° et 10° s-s., 27 juillet 2005, n° 244671, Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie c/ Mme Cohen (N° Lexbase : A1284DKR)

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N3004AKH

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[Jurisprudence] Les dispositions de l'article 164 C du CGI sont-elles contraires aux principes communautaires de liberté d'établissement et de liberté de circulation des capitaux ? (1ère partie). Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3208023-jurisprudencelesdispositionsdelarticle164cducgisontellescontrairesauxprincipescommunaut
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le 07 Octobre 2010

Dans un arrêt du 27 juillet 2005, le Conseil d'Etat s'est prononcé sur la conformité des dispositions de l'article 164 C du CGI aux principes communautaires de liberté d'établissement et de liberté de circulation des capitaux. Bien qu'il ait considéré que les citoyens communautaires résidant à Monaco et disposant d'une habitation en France ne pouvaient utilement invoquer ces principes, dans leur ancienne version, pour soutenir qu'ils faisaient l'objet d'une discrimination vis-à-vis des citoyens français placés dans la même situation, sa décision laisse ouverte la question de savoir si la nouvelle version de ces principes, en particulier celle du principe de liberté de circulation des capitaux, pourrait s'appliquer à l'ensemble des citoyens communautaires résidant à Monaco et disposant d'une habitation en France. Si tel était le cas, tous les résidents concernés, et non plus seulement quelques-uns d'entre eux, pourraient, désormais, échapper totalement à l'imposition sur le fondement de l'article 164 C du CGI (cf. Les dispositions de l'article 164 C du CGI sont-elles contraires aux principes communautaires de liberté d'établissement et de liberté de circulation des capitaux ? (2ème partie) N° Lexbase : N6349AKD). I. L'application de la jurisprudence "Biso" crée actuellement une discrimination entre les ressortissants communautaires au regard de l'article 164 C du CGI,  selon que ces ressortissants peuvent ou  non se prévaloir d'une clause de non-discrimination d'origine conventionnelle

Dans son arrêt "Biso" du 11 juin 2003 (CE, 9° et 10° s-s., 11 juin 2003, n° 221075, Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie c/ M. et Mme Biso N° Lexbase : A8676C8T) (1), le Conseil d'Etat s'est prononcé sur la conformité des dispositions de l'article 164 C du CGI aux clauses de non-discrimination contenues dans les conventions fiscales bilatérales conclues entre la France et deux autres Etats membres de l'Union européenne (Grande-Bretagne et Italie).

Le Conseil a, en particulier, jugé que, dans le cas où une convention fiscale bilatérale limite son champ d'application aux seuls résidents et comporte une clause de non-discrimination en fonction de la nationalité sans référence à la résidence, il résulte de la combinaison de ces stipulations que la clause de non-discrimination n'est applicable qu'aux nationaux des Etats contractants résidant dans l'un d'entre eux (2). En revanche, dans le cas où une convention fiscale bilatérale ne limite pas son champ d'application aux résidents des Etats contractants et comporte une clause de non-discrimination en fonction de la nationalité sans référence à la résidence, il résulte de la combinaison de ces stipulations que la clause de non-discrimination est applicable aux nationaux des Etats contractants, qu'ils résident ou non dans l'un d'entre eux (3). Enfin, le Conseil a jugé que dans le cas où la clause de non-discrimination, en fonction de la nationalité figurant dans une convention fiscale bilatérale, précise qu'elle est applicable aux nationaux des Etats contractants qu'ils soient ou non résidents de l'un d'entre eux, cette clause leur est applicable, même s'ils ne résident pas dans l'un des Etats contractants (4).

Concrètement, en imposant un ressortissant anglais ou un ressortissant italien résidant à Monaco sur un revenu forfaitaire égal à trois fois la valeur locative réelle de ses habitations en France (CGI, art. 164 C), l'administration fiscale française l'impose différemment d'un ressortissant français résidant à Monaco qui n'aurait pas été soumis à la même imposition compte tenu des stipulations du paragraphe 1 de l'article 7 de la convention franco-monégasque du 18 mai 1963 (N° Lexbase : L6726BHL). Cette différence d'imposition, dans la mesure où elle ne résulte que d'une différence de nationalité (5), viole les clauses de non-discrimination contenues dans la convention franco-britannique du 22 mai 1968 (N° Lexbase : L6745BHB) et dans la convention franco-italienne du 5 octobre 1989 (N° Lexbase : L6706BHT). La violation de clause de non-discrimination en fonction de la nationalité entraîne la décharge de l'imposition établie sur le fondement de l'article 164 C du CGI.

En tant qu'elle subordonne l'applicabilité des dispositions de l'article 164 C du CGI à la rédaction des conventions fiscales bilatérales conclues par la France, la jurisprudence "Biso" présente le paradoxe, en même temps qu'elle fait bénéficier à certains citoyens de l'Union européenne du principe conventionnel de non-discrimination contenu dans la convention conclue par la France avec l'Etat dont ils sont les ressortissants, de créer de nouvelles discriminations à l'encontre d'autres citoyens communautaires. En bref, en supprimant la discrimination existant entre les ressortissants français et certains ressortissants des autres Etats membres de l'UE, cette jurisprudence déplace la discrimination entre ces derniers. C'est, ainsi, qu'en l'état actuel de la rédaction des conventions fiscales bilatérales conclues par la France avec les Etats dont ils relèvent, il a été jugé que seuls les ressortissants britanniques, italiens (6) et belges (7) résidant à Monaco pouvaient détenir un bien immobilier en France sans pour autant être assujettis à une imposition forfaitaire égale à trois fois la valeur locative réelle de ce bien.

En revanche, il a été jugé que les ressortissants portugais (8), allemands (9) et finlandais (10) étaient légalement assujettis à cette imposition, dans la mesure où, du fait de leur résidence à Monaco, ils ne pouvaient pas se prévaloir de la clause de non-discrimination contenue dans la convention fiscale conclue par la France avec l'Etat de leur nationalité.

Il faut, en outre, à cette discrimination intra-communautaire individuelle, ajouter l'existence d'une discrimination intra-communautaire "conjugale". En effet, dans l'arrêt "Biso", le Conseil d'Etat a, également, jugé qu'il suffisait que l'un des membres du foyer fiscal entre dans le champ de l'article 164 C du CGI et qu'il dispose d'une ou plusieurs habitations en France, pour que l'imposition soit légalement établie au nom du foyer sur le fondement de cet article. Dès lors, il existe presque autant de discriminations que de nationalités qui peuvent composer le couple : si, par exemple, un couple entièrement britannique ou italo-britannique ou encore belgo-britannique échappe à l'application de l'article 164 C du fait d'une ou de deux clauses de non-discrimination favorables, il en ira différemment pour un couple, par exemple, germano-britannique, ou italo-portugais. Il s'avère, ainsi, que la jurisprudence "Biso" a eu pour effet de multiplier les discriminations fondées sur la seule nationalité des citoyens communautaires résidant à Monaco.

II. En revanche, bien qu'ils résident dans un pays tiers, tous les ressortissants communautaires domiciliés à Monaco et disposant d'une habitation en France entrent dans le champ d'application du principe de non-discrimination et des libertés garantis par le Traité CE

Dans la mesure où les clauses de non-discrimination d'origine conventionnelle et bilatérale ne permettent pas, en général, d'éviter les discriminations entre citoyens français et autres citoyens communautaires résidant à Monaco et disposant d'une habitation en France, il paraît, donc, nécessaire de se tourner vers les principes de non-discrimination d'origine communautaire, lesquels valent nécessairement pour l'ensemble des citoyens de l'Union européenne. En bref, seul un principe communautaire de non-discrimination en fonction de la nationalité pourrait systématiquement (11) faire obstacle à l'application des dispositions de l'article 164 C du CGI aux citoyens communautaires résidant à Monaco et disposant d'une habitation en France. Toutefois, encore faut-il identifier la nature et l'objet de la discrimination ou, plus précisément le champ d'application de cette discrimination.

Nous avons parlé de principes communautaires de non-discrimination et non du principe communautaire de non-discrimination dans la mesure où il faut distinguer, parmi les dispositions prohibant toute discrimination en fonction de la nationalité des citoyens communautaires, entre un principe général de non-discrimination, d'une part, et des principes particuliers de non-discrimination, d'autre part, ceux-ci valant pour les libertés spécifiques garanties par le traité CE. Il importe, donc, d'examiner si l'un de ces principes pourrait être de nature à faire obstacle à l'application des dispositions de l'article 164 C du CGI à tous les citoyens communautaires résidant à Monaco et disposant d'une habitation en France. Nous le ferons en particulier à la lumière d'un arrêt récent du Conseil d'Etat, qui a confronté ces principes et ces dispositions (12). Dans cet arrêt (13), le Conseil d'Etat a, en effet, jugé que si les impôts directs ne relèvent pas de la compétence de la Communauté européenne, les Etats membres doivent exercer leur compétence fiscale dans le respect du droit communautaire et, notamment, des libertés d'établissement et de circulation des capitaux qui ont, en matière fiscale, un effet direct dans chaque Etat membre.

Avant d'examiner si ces derniers peuvent, en particulier, invoquer utilement les articles du Traité relatifs à la liberté d'établissement et à la liberté de circulation des capitaux, il importe de préciser que le principe de non-discrimination, quant à l'exercice de ces libertés, nous paraît tout à fait applicable à des citoyens communautaires résidant à Monaco et disposant d'une habitation en France. En effet, les critères territoriaux d'application du principe communautaire de non-discrimination ont été dégagés par la Cour de justice dans l'affaire "Walrave" (16). La Cour de justice, dans le cadre d'une espèce relative à la mise en oeuvre du principe de libre circulation des travailleurs, a ainsi jugé que : "le principe de non-discrimination, tel qu'il est exprimé, entre autres, dans l'article 48 du Traité et dans le règlement 1612/68 (Règlement (CE) n° 1612/68 du Conseil, 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté N° Lexbase : L9271BHT) [...] s'impose pour une appréciation de tous rapports juridiques, dans toute la mesure où ces rapports juridiques, en raison soit du lieu où ils sont établis soit du lieu où ils produisent leurs effets, peuvent être localisés sur le territoire de la Communauté", étant précisé que le principe communautaire de non-discrimination a vocation à s'appliquer à l'ensemble des matières régies par le traité même si l'espèce jugée concernait l'application du principe de libre circulation des travailleurs (17). Il résulte de cette décision que la détermination de l'application du principe communautaire de non-discrimination à une situation juridique déterminée dépend de la localisation de cette situation ou de ses effets sur le territoire communautaire.

Par suite, les principes communautaires de non-discrimination sont applicables aux citoyens communautaires résidents d'Etats tiers, dès lors que la situation juridique est localisée, ou produit ses effets, sur le territoire d'un Etat membre. Or, il nous semble que la situation juridique des citoyens communautaires résidant à Monaco et disposant d'une habitation en France peut être regardée comme étant localisée ou comme produisant ses effets sur le territoire français. Il existe, donc, pour ces derniers un lien de rattachement suffisant au territoire communautaire, lien qui permet d'identifier l'exercice d'une liberté garantie par le Traité et d'invoquer dans ce cadre le principe communautaire de non-discrimination, afin de neutraliser l'application des dispositions de l'article 164 C du CGI. Au total, pour un citoyen communautaire résidant dans un Etat tiers comme Monaco, la disposition en France d'une habitation permet de caractériser l'exercice de l'une des libertés garanties par le Traité.

Le principe général de non-discrimination est issu de l'actuel article 12 du Traité CE qui prévoit que, dans le domaine d'application du Traité, et sans préjudice des dispositions particulières qu'il prévoit, est interdite toute discrimination exercée en raison de la nationalité. Toutefois, dans la mesure où les impôts directs comme l'impôt sur le revenu ne relèvent pas de la compétence de la Communauté européenne, seuls les contribuables dont la situation met en jeu une liberté de circulation protégée par le Traité CE peuvent invoquer utilement l'article 12 de ce Traité. En d'autres termes, les citoyens communautaires résidant à Monaco et disposant d'une habitation en France ne peuvent se borner à invoquer cet article pour faire obstacle à l'application à leur encontre des dispositions de l'article 164 C du CGI. Il leur faut, donc, se prévaloir, en outre, d'une atteinte à l'une des libertés protégées par le Traité.

III. Les ressortissants communautaires domiciliés à Monaco et disposant d'une habitation en France ne peuvent invoquer le principe communautaire de liberté d'établissement issu de l'article 43 CE pour faire obstacle à l'application des dispositions de l'article 164 C du CGI

Définie à l'article 43 (ex-52) , "disposition fondamentale du Traité", la liberté d'établissement emporte pour les ressortissants d'un Etat membre, sur le territoire d'un autre Etat membre : "l'accès aux activités non salariées et leur exercice, ainsi que la constitution et la gestion d'entreprises dans les conditions définies par la législation du pays d'établissement pour ses propres ressortissants. La suppression des restrictions à la liberté d'établissement s'entend aux restrictions à la création d'agences, de succursales ou de filiales par les ressortissants d'un Etat membre établis sur le territoire d'un autre Etat membre" (18). Dans l'arrêt précité du 27 juillet 2005 (20), le Conseil d'Etat a jugé que les dispositions de l'article 52 du traité CE (devenu, après modification article 43 CE), qui posent le principe de la liberté d 'établissement des ressortissants d'un Etat membre dans un autre Etat membre n'étaient pas applicables à des impositions ne relevant pas de l'exercice d'une activité non salariée ou de la gestion d'une entreprise. Dans ses conclusions, le commissaire du Gouvernement L. Vallée a rappelé les dispositions de l'article 43 avant d'indiquer que cet article ne concernait pas "l'acquisition aux fins d'usage ou de placement de résidences privées à Monaco".

Relevons par ailleurs que dans une affaire assez récente (20), consacré à la compatibilité avec le principe de liberté d'établissement de l'article 167 bis du CGI qui permet à l'administration fiscale d'imposer les plus-values latentes constatées sur des participations substantielles lorsque le contribuable concerné transfère son domicile hors de France, la CJCE a jugé que "le principe de la liberté d'établissement posé par l'article 52 du Traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'un Etat membre institue, à des fins de prévention d'un risque d'évasion fiscale, un mécanisme d'imposition des plus-values non encore réalisées, tel que celui prévu à l'article 167 bis du code général des impôts français, en cas de transfert du domicile fiscal d'un contribuable hors de cet Etat".

Le cas soumis à la Cour de justice, dans cette espèce, concernait un contribuable français, parti s'installer en Belgique. Le requérant avait simplement précisé dans ses observations qu'il avait transféré son domicile fiscal en Belgique, afin d'y exercer son activité professionnelle, sans apporter d'autre précision, notamment sur le caractère non salarié de cette activité, étant rappelé que l'article 43 concerne l'accès aux activités non salariées et leur exercice. Or, malgré le doute suscité par l'imprécision de la situation du requérant, en particulier s'agissant du caractère salarié ou non de son activité professionnelle, la CJCE n'a pris soin de se prononcer ni sur l'inapplicabilité ou l'applicabilité du principe de liberté d'établissement à un établissement purement personnel, c'est-à-dire non strictement lié à l'exercice d'une activité professionnelle, ni sur l'inapplicabilité ou l'applicabilité du principe de liberté d'établissement à un établissement lié à l'exercice d'une activité professionnelle salariée.

La Cour de justice relève ainsi, au point 42 de l'arrêt, que la liberté d'établissement vise à assurer le bénéfice du traitement national dans l'Etat membre d'accueil et s'oppose à ce que l'Etat d'origine entrave l'établissement de ses propres ressortissants dans un autre Etat membre.

Elle ajoute, ensuite, aux points 43 et 44, que l'interdiction des restrictions à la liberté d'établissement s'entend même des restrictions de faible portée, l'interdiction s'appliquant, notamment, aux dispositions fiscales. Au total, la Cour a censuré une entrave fiscale à l'exercice de la liberté d'établissement, dans le cas d'un transfert de domicile fiscal, sans véritablement caractériser en l'espèce, l'exercice de cette liberté, du moins dans son acception économique.

Deux questions se posent donc : d'une part, faut-il voir dans cette décision les prémisses d'une extension du principe de liberté d'établissement à un principe plus général de liberté d'installation qui inclurait l'établissement à titre personnel et non dans un cadre strictement économique ? D'autre part, à supposer que la réponse à cette première question soit affirmative, cette extension du principe de liberté d'établissement pourrait-elle bénéficier aux citoyens communautaires résidant à Monaco et disposant d'une habitation en France ? S'agissant de la première question, il nous semble difficile de considérer que la CJCE a entendu implicitement étendre la portée du principe de la liberté d'établissement, et ce pour deux raisons. La première est que la situation sur laquelle elle s'est prononcée concernait l'exercice d'une activité professionnelle dans un Etat membre : aussi le transfert du domicile fiscal de France vers la Belgique ne pouvait-il être assimilé à une installation à titre personnel dans ce dernier Etat. En bref, la Cour ne s'est pas prononcée sur le seul changement de résidence, mais elle a pris en compte les motivations économiques, en particulier professionnelles de ce changement de résidence. La seconde raison est que les stipulations de l'article 43 CE, à moins d'être modifiées, font explicitement obstacle à l'extension du principe de liberté d'établissement à un principe plus général de liberté d'installation qui inclurait l'établissement à titre personnel et non dans un cadre strictement économique. Or, on voit mal comment la Cour pourrait s'affranchir d'un texte qu'elle a pour fonction d'appliquer et dont elle a pour but d'assurer la primauté. Au fond, la seule incertitude concerne la nature de l'activité professionnelle justiciable du principe de liberté d'établissement : dans l'arrêt précité, la Cour n'a pas exclu l'extension de ce principe des activités non salariées aux activités salariées, alors même qu'aucune précision n'était donnée sur la nature de l'activité professionnelle du contribuable en cause.

La réponse à la première question étant négative, il n'y a, donc, pas lieu de se pencher plus avant sur l'application du principe de liberté d'établissement aux citoyens communautaires résidant à Monaco et disposant d'une habitation en France. Aussi l'analyse de l'arrêt du 11 mars 2004 rendu par la CJCE confirme-t-elle le bien-fondé de la solution rendue par le Conseil d'Etat dans l'arrêt précité du 27 juillet 2005 : le principe de liberté d'établissement ne peut s'appliquer à l'acquisition par un citoyen communautaire d'une habitation dans un autre Etat membre que celui dont il a la nationalité.

Précisons, cependant, pour terminer, qu'à supposer même que le principe de liberté d'établissement soit un jour étendu à un principe plus général de liberté d'installation, cela n'aurait aucune conséquence pour la situation des citoyens communautaires résidant à Monaco et disposant d'une habitation en France. En effet, "l'installation" à titre personnel dans un autre Etat membre de l'UE suppose, il nous semble, le transfert du domicile fiscal dans cet Etat : or, ces derniers, en acquérant une habitation en France, ne transfèrent pas pour autant leur domicile fiscal dans ce dernier Etat mais restent domiciliés fiscalement à Monaco. Aussi, l'acquisition d'une habitation en France par un citoyen communautaire résidant à Monaco ne suffit-elle pas à caractériser une "installation en France".

Pour la 2ème partie de cet article, lire ([LXB=N6349AKD])

Frédéric Dieu
Commissaire du Gouvernement près le Tribunal administratif de Nice

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