Réf. : Loi n° 2004-439, 26 mai 2004, relative au divorce (N° Lexbase : L2150DYB)
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N2243ABP
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par Sophie Duval, Juriste-fiscaliste
le 07 Octobre 2010
Il est désormais prévu par l'article 229 du Code civil (N° Lexbase : L1052ABL) quatre cas de divorce (cf. Aperçu rapide sur l'adoption par le Parlement de la réforme du divorce, Lexbase Hebdo n° 122 du 26 mai 2004 - édition affaires N° Lexbase : N1705ABR) :
- le divorce par consentement mutuel ;
- le divorce par acceptation du principe de la rupture du mariage ;
- le divorce par altération définitive du lien conjugal ;
- et le divorce pour faute.
La loi sur le divorce réserve, par ailleurs, plusieurs articles aux prestations compensatoires. Bien qu'ayant fait l'objet d'une grande refonte en 2000 (loi n° 2000-596 du 30 juin 2000 N° Lexbase : L0672AIQ), des ajustements s'imposaient. En effet, la précédente réforme soulevait de nombreuses difficultés dans la pratique qu'il convenait de corriger. Le régime fiscal des prestations compensatoires a donc été, de nouveau, modifié, sur deux points : le champ d'application de la réduction d'impôt liée aux prestations compensatoires versées en capital est élargi et les droits d'enregistrement sont allégés.
Cette réforme des procédures de divorce entrera en vigueur à compter du 1er janvier 2005. Ainsi, l'ensemble des dispositions issues de cette loi s'appliquera aux procédures introduites à compter du 1er janvier 2005 et aux procédures en cours à cette date. Toutefois, les nouvelles règles ne s'appliqueront pas aux procédures de divorce sur demande conjointe, lorsque la convention temporaire aura été homologuée avant le 1er janvier 2005, aux procédures de divorce contentieux, lorsque l'assignation aura été délivrée avant cette même date.
1. Les différentes modalités de versement de la prestation compensatoire à compter de 2005
La prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible. Elle a un caractère forfaitaire et ne peut être révisée qu'exceptionnellement.
Depuis la loi de 2000, la prestation compensatoire doit en principe être versée sous forme de capital. Au vu des nouvelles dispositions de la loi sur le divorce, ces versements peuvent prendre plusieurs formes :
- versement d'une somme d'argent,
- attribution de biens en propriété ou d'un droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation ou d'usufruit.
Ce n'est qu'à titre exceptionnel que le juge peut, par décision spécialement motivée, en raison de l'âge ou de l'état de santé du créancier ne lui permettant pas de subvenir à ses besoins, fixer la prestation compensatoire sous forme de rente.
A compter de 2005, la prestation compensatoire pourra également être mixte, c'est-à-dire qu'elle pourra prendre, pour partie, la forme d'un capital et, pour le restant, celle d'une rente.
2. Régime d'imposition applicable aux différentes formes de prestations compensatoires
Pour favoriser le règlement rapide des prestations compensatoires sous forme de capital, la loi du 30 juin 2000, a prévu un régime fiscal plus attrayant pour les contribuables qui versent ce capital, dans les 12 mois du prononcé du jugement définitif. Ce régime de faveur qui prend la forme d'une réduction d'impôt est jusqu'à présent réservé aux prestations en capital versées sous forme de sommes d'argent. Elle est étendue, à compter de 2005, aux contribuables qui s'acquittent de la prestation compensatoire par attribution de biens ou qui obtiennent la conversion de la rente en capital. Cet avantage fiscal reste toutefois toujours subordonné à la condition que ces prestations soient versées ou attribuées sur une période égale au plus à 12 mois.
2.1. Versement de sommes d'argent
- Versements échelonnés sur une période inférieure à 12 mois : la loi du 30 juin 2000 a innové en instaurant, pour les contribuables domiciliés en France, une réduction d'impôt calculée sur le montant des sommes d'argent versées sous forme de capital au profit de leur ex-conjoint en paiement de la prestation compensatoire .
Mais, seuls ouvrent droit à cet avantage, les versements effectués en une seule fois ou de façon échelonnée au cours d'une période ne pouvant excéder 12 mois à compter de la date à laquelle le jugement de divorce est passé en force de chose jugée. Pour le bénéficiaire, la prestation compensatoire ne constitue pas un revenu et n'est donc pas soumis à l'impôt sur le revenu.
- Versements échelonnés sur une période supérieure à 12 mois : lorsque comme le prévoit la loi, le contribuable ne disposant pas de liquidités immédiates est autorisé par le juge à verser le capital sur une durée supérieure à 12 mois, les versements sont exclus de la réduction d'impôt et suivent le régime des pensions alimentaires. Ils sont par conséquent déductibles chez le débiteur et imposables chez le bénéficiaire de la prestation compensatoire. Afin d'éviter que cette imposition ne s'avère trop pénalisante pour le créancier, le versement en une fois du capital en cause est assimilé à un revenu exceptionnel. En revanche, les sommes admises en déduction ne peuvent pas constituer de déficit reportable sur les années ultérieures. En outre, la déduction est subordonnée à la condition que le contribuable soit en mesure de justifier par tout moyen et sur demande de l'administration, de la réalité des sommes exposées en déduction.
Le régime d'imposition de ces deux types de versements de sommes d'argent n'a pas été modifié par la loi de 2004.
2.2. Attribution de biens ou droits
L'article 26 de la loi relative au divorce de 2004 étend la réduction d'impôt aux nouvelles modalités de paiement de la prestation compensatoire. Cet avantage sera donc accordé aux contribuables qui s'acquitteront de la prestation compensatoire, conformément à la convention de divorce homologuée par le juge ou au jugement de divorce, en attribuant à l'ex-conjoint : des biens en propriété, un droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation ou d'usufruit.
Ces biens ou droits devront, dans ce cas, également être attribués dans les 12 mois à compter de la date à laquelle le jugement de divorce sera passé en force de chose jugée.
Cette nouvelle disposition améliore très sensiblement la situation des contribuables ayant recours à l'abandon de biens ou l'attribution de droits pour s'acquitter de leur prestation compensatoire, car, dans le régime actuel, ces prestations en nature ne donnent droit à aucune réduction, ni déduction pour le débiteur.
2.3. Conversion de la rente en capital
Le principe posé par la loi de 2000 étant que la réduction d'impôt ne s'applique qu'aux prestations compensatoires versées exclusivement sous forme de capital, elle n'est donc pas accordée lorsque la prestation compensatoire est versée pour partie sous forme de rente. C'est ainsi que, lorsque le débiteur de la rente viagère demande au juge de substituer un capital à la rente, il ne peut prétendre à aucune réduction d'impôt dans la mesure où le montant de ses versements sous forme de rente avait été déduit de son revenu imposable.
A compter de 2005, lorsque le débiteur demandera au juge la conversion en capital de tout ou partie de la rente, sous forme de somme d'argent, où, comme cela lui sera possible après cette date, sous forme d'attribution de biens en toute propriété ou d'un droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation, ou d'usufruit, ce capital versé ou attribué ouvrira également droit à la réduction d'impôt. Attention, ces versements ou l'attribution des biens ou droits devront, en tout état de cause, être effectués au cours des 12 mois à compter de la date à laquelle le jugement de divorce est passé en force de chose jugée (CGI, article 199 octodecies-I, 3e al.).
2.4. Prestations compensatoires mixtes
La loi ne remet pas en cause le principe selon lequel, lorsqu'il s'agit d'une prestation compensatoire mixte, la réduction d'impôt n'est pas applicable à la fraction de la prestation versée sous forme de capital.
2.5. Prestations compensatoires versées sous forme de rente
Les prestations compensatoires versées sous forme de rente suivent le régime des pensions alimentaires. Quelle que soit la forme du divorce, Elles sont déductibles du revenu global du débiteur et imposable entre les mains du bénéficiaire. Leur régime n'a pas été modifié par la loi du 26 mai 2004.
3. Calcul de la réduction d'impôt
3.1. Versement somme d'argent et prestations en nature
La réduction d'impôt est égale à 25 % de la base, limitée à 30 500 euros, constituée par le montant des versements effectués ou la valeur des biens ou droits attribués, telle qu'elle a été fixée dans la convention ou le jugement de divorce. La réduction d'impôt maximale s'élève donc à 7 625 euros.
Le plafond de 30 500 euros est déterminé par rapport à une période de 12 mois maximum. Lorsque les versements sont répartis sur 2 années civiles (sans évidemment être échelonnées sur une période supérieure à 12 mois), le plafond applicable au titre de la première année s'obtient en multipliant le plafond global de 30 500 euros par le rapport entre le montant des versements effectués cette année et le montant des versements prévus.
3.2. Conversion de rente en capital
En cas de conversion de tout ou partie de la rente en capital, la réduction d'impôt est calculée sur le montant du capital total reconstitué, plafonné à 30 500 euros et retenu dans la proportion existant entre le capital dû à la date de la conversion et le capital total reconstitué à cette même date.
Le capital total reconstitué est égal à la valeur du capital versé ou attribué à la date de la conversion, majoré de la somme des rentes versées jusqu'au jour de la conversion et revalorisées en fonction de la variation de l'indice moyen annuel des prix à la consommation constatée entre l'année de versement de la rente et celle de la conversion.
Attention, le bénéfice de la réduction d'impôt lors d'une conversion de rente en capital peut s'avérer être un cadeau piégé. En effet, vu le mode de calcul exposé ci-dessus, cette réduction d'impôt risque souvent d'être fiscalement désavantageuse par rapport à la déduction des versements. Dans ce cas, le débiteur de la prestation compensatoire aura donc intérêt à fractionner ses versements sur un période de plus de 12 mois afin de déduire ces sommes de son revenu imposable. Mais elles seront alors imposables entre les mains du bénéficiaire, ce qui pourra être une source de conflit entre les ex-époux !
4. Allégement des droits d'enregistrement
Enfin, la loi du 26 mai 2004 modifie sur plusieurs points les dispositions existantes en matière de droits d'enregistrement. Compte tenu de ces aménagements, voici les règles applicables à compter du 1er janvier 2005.
4.1. Versements sous forme de sommes d'argent
Comme aujourd'hui, lorsqu'elles prennent la forme d'une rente ou de versements d'une somme d'argent échelonnés sur une période de plus de 12 mois, les prestations compensatoires ne rendent pas exigibles les droits de mutation.
4.2. Versements sous forme de biens de communauté ou indivis
Les versements en capital provenant de biens de communauté continuent à être soumis aux droits de mutation à titre gratuit dans les conditions applicables aux donations entre époux . Il en est de même des prestations compensatoires en capital versées au moyen de biens indivis entre les deux époux séparés de biens et acquis pendant le mariage.
4.3. Versements sous forme de biens propres
Les prestations compensatoires en capital provenant de biens propres du conjoint débiteur sont jusqu'à présent soumis aux droits de mutation à titre gratuit. Cette imposition s'applique également aux prestations compensatoires en capital versées au moyen de biens indivis entre les deux époux mariés sous le régime de la séparation et acquis avant leur union. La loi met fin à ce régime de perception des droits de mutation gratuit dans ces cas.
A compter de 2005, en cas de versements de biens propres ou bien indivis acquis par époux séparés de biens avant le mariage, ces prestations compensatoires seront juste soumises à un droit fixe de 75 euros. Ce droit s'appliquera, dans les mêmes conditions, en cas de conversion en capital de la rente effectuée sur demande de l'époux débiteur ou de la succession au décès de l'époux débiteur.
Enfin, ce nouveau régime vise les prestations compensatoires prenant la forme de versements de sommes d'argent sur une période de 12 mois. Les versements échelonnés sur une période plus longue demeurent exonérés de droit d'enregistrement.
Attention, en cas d'attribution d'un bien ou droit immobilier, c'est la taxe de publicité foncière de 0,60 % qui est due.
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