Réf. : Cass. civ. 2, 27 mars 2025, n° 22-15.464, FS-B N° Lexbase : A42290CM
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N1983B3T
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par Alexandre Autrand, doctorant, Université de Limoges, école doctorale Gouvernance des Institutions et des Organisations, Observatoire des Mutations Institutionnelles et Juridiques
le 31 Mars 2025
La Cour de cassation clarifie sa jurisprudence sur la définition de l’acte qui constitue une diligence interruptive de péremption. Désormais, elle considère que cet acte s’entend de l’initiative d’une partie, manifestant sa volonté de parvenir à la résolution du litige, prise utilement dans le cours de l’instance. Elle affirme que ces nouvelles conditions sont appréciées souverainement par le juge.
Faits et procédure. Un bail a été conclu entre une association et une société. Le 22 octobre 2014, l’association décide d’assigner une première fois la société, en paiement de sommes du fait d’équipement défectueux. Le 22 décembre 2014 la société est assignée une seconde fois par l’association, en raison du départ contraint de cette dernière. Les deux procédures ont été jointes par un juge de la mise en état, le 6 avril 2016. Ensuite, le juge de la mise en état a ordonné la radiation de la procédure du rôle du tribunal, le 9 octobre 2019. L’affaire a été réinscrite le 3 juin 2020 par l’association. Dans une ordonnance du 9 juillet 2021, le juge de la mise en état a débouté la société de sa demande tendant à voir constater la péremption de l’instance et à déclarer l’instance éteinte. La société décide alors d’interjeter appel sur cette décision, devant la cour d’appel de Paris. Cette dernière statue sur ce recours, dans un arrêt du 23 février 2022 (CA Paris, pôle 5, chambre 3, 23 février 2022, n° 21/15643 N° Lexbase : A77537NH). L’association décide d’attaquer cette décision devant la Cour de cassation.
Pourvoi/Appel. La demanderesse au pourvoi fait grief à l’arrêt d’infirmer l’ordonnance rendue le 9 juillet 2021 par le juge de la mise en état, et de juger que l’instance était périmée et de constater son extinction. Au soutien de son pourvoi, l’association affirme que constitue une diligence interruptive tout acte qui manifeste la volonté d’une partie de continuer l’instance. De ce fait, le courrier envoyé au juge par le conseil d’une partie, pour l’informer de l’échec de la tentative de médiation, et lui demander de rétablir l’affaire au rôle et de convoquer les parties à une prochaine audience, manifeste la volonté de cette partie de continuer l’instance. Or, la cour d’appel considère que le courrier adressé au juge par le conseil de l’association, dans lequel il est demandé le rétablissement de l’affaire, ne constitue pas une diligence interruptive de péremption. Les juges du fond considèrent que ce courrier ne fait pas progresser l’instance, et que cette dernière s’est trouvée périmée le 3 juillet 2020. En statuant ainsi, alors que ce courrier manifestait la volonté de continuer l’instance et constituait une diligence interruptive de péremption, l’association considère que la cour d’appel a violé l’article 386 du Code de procédure civile N° Lexbase : L2277H44.
Solution. Au visa des articles 2 N° Lexbase : L1108H4S, 3 N° Lexbase : L1111H4W et 386 du Code de procédure civile, la Cour de cassation approuve l’argumentation de l’association. Après avoir rappelé la lettre de ces articles, la Haute juridiction considère qu’il résulte de ces textes qu’il appartient aux parties, sauf lorsque la direction de l’instance leur échappe, d’accomplir les actes sous les charges qui leur incombent pour éviter la péremption de l’instance. De ce fait, le juge saisi par une partie d’un incident de péremption ou qui se saisit d’office de cet incident doit rechercher si la péremption est acquise ou non, au regard des diligences accomplies. Après avoir rappelé sa jurisprudence sur la définition de l’acte qui constitue une diligence interruptive de péremption, la cour constate que certaines décisions mettent l’accent sur la volonté des parties manifestée par l’acte, alors que d’autres sont fondées sur la nature intrinsèque de l’acte. Au regard de cette confusion dans sa jurisprudence, la cour décide de clarifier cette dernière. Désormais, elle considère que la diligence interruptive du délai de péremption s’entend de l’initiative d’une partie, manifestant sa volonté de parvenir à la résolution du litige, prise utilement dans le cours de l’instance. La Haute juridiction affirme que ces nouvelles conditions dépendent de la nature de l’affaire et de circonstances de fait, et elles sont appréciées souverainement par le juge du fond. Ainsi, les juges du droit considèrent que la cour d’appel a statué par des motifs impropres à caractériser l’absence de diligences interruptives de péremption. Par conséquent, l’arrêt de la cour d’appel de Paris est cassé et annulé en toutes ses dispositions.
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