Le Quotidien du 18 juillet 2024 : Procédure civile

[Brèves] Fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action : un moyen de défense à l’appel principal qui n’a nul besoin de faire l’objet d’un appel incident

Réf. : Cass. civ. 2, 4 juillet 2024, n° 21-21.968, F-B N° Lexbase : A68285MT

Lecture: 4 min

N0033B3M

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Brèves] Fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action : un moyen de défense à l’appel principal qui n’a nul besoin de faire l’objet d’un appel incident. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/110489610-breves-fin-de-nonrecevoir-tiree-de-la-prescription-de-laction-un-moyen-de-defense-a-lappel-principal
Copier

par Yannick Ratineau, Maître de conférences à l’Université Grenoble Alpes, Co-directeur de l’Institut d’Études Judiciaires de Grenoble, Co-directeur du BACAGe (Bulletin des arrêts de la cour d’appel de Grenoble), Centre de Recherches Juridiques – EA 1965

le 17 Juillet 2024

La fin de non-recevoir fondée sur la prescription de l'action, soulevée par l'intimé à l'occasion de l'appel d'un jugement ayant condamné en paiement les appelants, constitue un moyen de défense à l'appel principal, qui n'a pas à faire l'objet d'un appel incident.

Faits et procédure. Les consorts X. ont assigné Mme M. devant un tribunal de grande instance en paiement d'une certaine somme. Par jugement du 7 juin 2019, ce tribunal, devant lequel Mme M. a opposé la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action, a, dans le dispositif de son jugement, débouté les demandeurs. Les consorts X. ont relevé appel de ce jugement, et devant la cour d’appel, Mme M. a invoqué, dans ses dernières conclusions, la prescription de l’action intentée par les consorts X.

Par arrêt en date du 18 juin 2021 (CA Colmar, 18 juin 2021, n° 19/03148 N° Lexbase : A56344WL), la cour d’appel de Colmar, après avoir indiqué que la prescription invoquée par Mme M. dans le corps de ses dernières conclusions ne fait pas l'objet d'un appel incident dans le dispositif de celles-ci, de sorte que la cour n'est pas saisie de cette fin de non-recevoir sur laquelle elle n'a pas à statuer, a infirmé en toutes ses dispositions le jugement rendu en première instance et condamné Mme M. à faire droit aux demandes des consorts X., condamné aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel, ainsi qu’au paiement d’une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile N° Lexbase : L5913MBM Mme M. Un pourvoi en cassation est alors formé par Mme M.

Problématique. Constitue en principe une fin de non-recevoir, tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, notamment lorsque le droit d’agir du demandeur est prescrit. Il appartient aux parties qui ont intérêt de soulever les fins de non-recevoir, et elles peuvent le faire en tout état de cause, sauf s’il en est disposé autrement (CPC, art. 123 N° Lexbase : L9280LTU) ; simplement, la partie peut être condamnée au paiement de dommages-intérêts lorsqu’elle s’est abstenue à des fins dilatoires de la soulever plus tôt.

De fait, l’on peine à comprendre, d’une part, comment les juges d’appel ont pu considérer que la fin de non-recevoir fondée sur la prescription du droit d’agir de l’intimé, soulevé à l'occasion de l'appel d'un jugement ayant condamné en paiement l’appelante, devait faire l’objet d’un appel incident pour saisir la cour d’appel de cette question, et d’autre part, la raison pour laquelle ce point n’a manifestement pas été contesté dans le pourvoi formé à l’encontre de l’arrêt d’appel, contraignant ainsi la Cour de cassation à le relever d’office.

Solution. Énonçant la solution susvisées, au visa des articles 122 N° Lexbase : L1414H47 et 123 N° Lexbase : L9280LTU du Code de procédure civile, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel de Colmar en rappelant que, selon le premier de ces textes, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée, et selon le second, que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il en soit disposé autrement.

Pour la Haute juridiction, il en résulte que la fin de non-recevoir, invoquée par un intimé pour s'opposer à l'appel principal, en vue de déclarer la demande irrecevable, constitue un moyen de défense et peut être proposée en tout état de cause jusqu'à ce que le juge statue.

Ainsi, en retenant qu'elle n'était pas saisie de la fin de non-recevoir opposée par l'intimée, au motif que la prescription, invoquée dans le corps des conclusions de Mme M, n'avait pas fait l'objet d'un appel incident dans le dispositif de celles-ci, alors qu'elle était saisie de la fin de non-recevoir proposée par l'intimée, tirée de la prescription de l'action, moyen de défense opposé à l'appel principal, qui n'avait pas à faire l'objet d'un appel incident, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

newsid:490033

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus