La lettre juridique n°992 du 18 juillet 2024 : Procédure prud'homale

[Brèves] Harcèlement moral et preuve déloyale : recevabilité d’un enregistrement clandestin

Réf. : Cass. soc., 10 juillet 2024, n° 23-14.900, F-B N° Lexbase : A22185PT

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par Lisa Poinsot

le 17 Juillet 2024

Un enregistrement clandestin peut servir à prouver le harcèlement moral quand cette preuve est indispensable à l’exercice du droit à la preuve de la victime et que l’atteinte aux droits de l’employeur est proportionnée.

Faits et procédure. Soutenant avoir subi un harcèlement moral, la salariée saisit la juridiction prud’homale de demandes tendant au paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral et licenciement abusif.

La cour d’appel (CA Montpellier, 29 juin 2022, n° 22/00555 N° Lexbase : A272679T) juge que l’enregistrement clandestin réalisé par la salariée de son entretien avec son employeur constitue une preuve irrecevable en ce qu’il est contraire au principe de la loyauté dans l’administration de la preuve, de sorte qu’il est écarté des débats.

En écartant cette preuve des débats, la cour d’appel déboute la salariée de ses demandes au titre du harcèlement moral et du licenciement.

La salariée forme un pourvoi en cassation.

Rappel. Le droit de la preuve peut justifier la production d’un élément de preuve obtenu de manière déloyale dès lors que cette production :

  • est indispensable à l’exercice de ce droit. L’élément produit doit être le seul permettant de prouver le fait allégué ;
  • ne porte pas une atteinte disproportionnée à d’autres droits, comme le droit au respect de la vie privée et personnelle, par rapport à l’objectif qu’elle poursuit.

Les juges du fond doivent ainsi vérifier ces conditions (Cass. ass. plén., 22 décembre 2023, n° 20-20.648 N° Lexbase : A27172AU et n° 21-11.330 N° Lexbase : A27232A4, publiés au bulletin ; Cass. soc., 17 janvier 2024, n° 22-17.474, F-B N° Lexbase : A35522EB).

Solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse et annule la décision de la cour d’appel puisque cette dernière n’a pas satisfait son obligation résultant des articles 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme N° Lexbase : L7558AIR et 9 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1123H4D. Cette obligation n’est en effet pas satisfaite lorsque les juges du fond se bornent à apprécier le caractère indispensable du procédé par lequel l’élément a été obtenu.

En pratique, il faut ainsi distinguer la question de la licéité de l’obtention d’un élément probatoire de la question de la recevabilité de la production de ladite preuve devant une juridiction. Ainsi, en cas de contentieux et de demande d’éviction d’une preuve, il semble préférable de contester la production aux débats plutôt que de remettre en cause son obtention.

Par ailleurs, en cas d’aménagement probatoire spécifique, comme en l’espèce en matière de harcèlement moral, le caractère indispensable de la production doit s’apprécier à l’égard de la preuve des faits qui permettent de présumer son existence et non le fait en lui-même.

En l’espèce, la salariée invoquait le défaut de formation sur son nouveau poste de travail, le fait qu’elle ait été sanctionnée à de plusieurs reprises ainsi que les éléments médicaux.

Pour aller plus loin :

 

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