Le Quotidien du 17 juillet 2024 : Entreprises en difficulté

[Brèves] Précision sur le destinataire de la déclaration de créance au sein d’une société de mandataires judiciaires

Réf. : Cass. com., 3 juillet 2024, n° 23-10.067, F-B N° Lexbase : A57995MQ

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[Brèves] Précision sur le destinataire de la déclaration de créance au sein d’une société de mandataires judiciaires. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/110139341-breves-precision-sur-le-destinataire-de-la-declaration-de-creance-au-sein-dune-societe-de-mandataire
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par Vincent Téchené

le 16 Juillet 2024

► Un mandataire judiciaire associé exerçant au sein d'une société, qui ne peut exercer sa profession à titre individuel, exerce ses fonctions au nom de la société. Dès lors, est régulière la déclaration de créance adressée à l’un des mandataires qui exerce ses fonctions au sein de la même société que le mandataire judiciaire désigné par le tribunal pour conduire la mission de la débitrice.

Faits et procédure. Pour la compréhension de la solution, on retiendra uniquement qu’une société a été mise en liquidation judiciaire. L'avis de cette décision, publié au Bodacc, indiquait aux créanciers que la société BTSG, devenue BTSG², était désignée en qualité de liquidateur et que la mission était confiée à M. E., les déclarations de créances devant être envoyées au [Adresse 4] à [Localité 10] (92).

Une déclaration de créance unique a été adressée à la « société Becheret-Thierry-[E]-[K], mandataires judiciaires, [Adresse 1] ».

La cour d’appel (CA Aix-en-Provence, 13 octobre 2022, n° 20/05541 N° Lexbase : A95168P7) a déclaré la déclaration de créance irrégulière. C’est dans ces conditions qu’un pourvoi a été formé, les demandeurs soutenant que la déclaration de créance, expédiée dans le délai légal à l'un quelconque des associés d'une société de mandataires judiciaires disposant d'un mandat de justice, est régulière.

Décision. La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa des articles L. 622-24 N° Lexbase : L4595IZ9, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2014-326, du 12 mars 2014 N° Lexbase : L7194IZH, R. 622-24 N° Lexbase : L0896HZ9, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2014-736, du 30 juin 2014 N° Lexbase : L5913I3E, R. 814-83 N° Lexbase : L2005HZB, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2017-796, du 5 mai 2017 N° Lexbase : L2521LE4, R. 814-84 N° Lexbase : L2006HZC et R. 814-85 N° Lexbase : L2007HZD du Code de commerce.

Ainsi la Cour rappelle que :  

  • il résulte des deux premiers de ces textes (C. com., art. L. 622-24 et R. 622-24), qu'à partir de la publication du jugement d'ouverture, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement à ce jugement, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans un délai de deux mois ;
  • selon le troisième de ces textes (C. com., art. R. 814-83), le mandat de justice est exercé par la société de mandataires judiciaires, le juge désignant celui ou ceux des associés qui conduiront la mission au sein de la société et en son nom ;
  • et il résulte des deux derniers (C. com., R. 814-84 et R. 814-85), qu'un mandataire judiciaire associé exerçant au sein d'une société, qui ne peut exercer sa profession à titre individuel, exerce ses fonctions au nom de la société.

Or, pour déclarer les créances litigieuses inopposables à la liquidation judiciaire, l'arrêt d’appel a retenu qu'ils disposaient d'un délai expirant le 4 août 2019 pour déclarer leurs créances au liquidateur dont l'identité et l'adresse étaient mentionnés dans l'avis paru au Bodacc, soit la société BTSG avec mission conduite par M. [E], [Adresse 4], alors que la déclaration de créance datée du 26 mai 2009 a été adressée à M. [K] au [Adresse 1] à [Localité 9], soit à un destinataire et à une adresse ne correspondant pas au liquidateur désigné.

La Haute juridiction censure l’arrêt d’appel : en statuant ainsi, alors que M. [E] et M. [K] exerçaient l'un et l'autre leurs fonctions de mandataires judiciaires au sein de la société désignée liquidateur, de sorte que la déclaration de créance adressée à l'un d'eux, au siège de la SCP ou à l'un de ses bureaux annexes, était régulière, la cour d'appel a violé les textes visés.

Observations. La solution retenue dans l’arrêt rapporté va dans le même sens qu’un précédent jurisprudentiel : la déclaration de créance faite à l'intention d'un mandataire membre d'une SCP, alors qu'un autre mandataire de la SCP avait été nominalement désigné pour conduire la mission, est sans incidence, la déclaration étant bien faite entre les mains de la SCP (Cass. com., 30 juin 2009, n° 08-13.680, F-D N° Lexbase : A5815EI9). On rappellera, en outre, que la désignation par le tribunal de deux mandataires judiciaires, en précisant la mission plus particulièrement confiée à chacun d'eux, est sans incidence sur la fonction dont est légalement investi cet organe de la procédure, de sorte que la déclaration de créance peut être faire indifféremment à l’un ou l’autre des mandataires désignés (Cass. com., 30 mai 2006, n° 05-14.248, F-P+B N° Lexbase : A7610DPK ; Cass. com., 16 janvier 2007, n° 05-15.912, F-D N° Lexbase : A6162DTE).

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les modalités et le contenu de la déclaration de créance, Le destinataire de la déclaration de créance, in Entreprises en difficulté (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E0260EXW.

 

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