La lettre juridique n°972 du 1 février 2024 : Salaire

[Brèves] Participation aux résultats : conformité de l’interdiction de contester le calcul du montant des bénéfices à la Constitution

Réf. : Cons. const., décision n° 2023-1077 QPC, du 24 janvier 2024 N° Lexbase : A80152GX

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par Lisa Poinsot

le 31 Janvier 2024

L’interdiction de remise en cause du bénéfice de l’entreprise à l’occasion d’un litige relatif au calcul de la réserve spéciale de participation est conforme à la Constitution et ne porte pas atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif.

La saisine. La Cour de cassation a décidé de transmettre, par décision du 25 octobre 2023 (n° 23-14.147, FS-B N° Lexbase : A33471PN), la question prioritaire de constitutionnalité suivante :

La question posée. « L’article L. 3326-1 du Code du travail N° Lexbase : L1228H9D méconnaît-il les droits et libertés que la Constitution garantit, notamment les articles 4 N° Lexbase : L1368A9K et 16  N° Lexbase : L1363A9D de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 et les articles 6 et 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, en ce qu’il :

  • interdit de remettre en cause le bénéfice net d’une entreprise après l’attestation du commissaire aux comptes ou de l’inspecteur des impôts, même en cas de fraude, et ;
  • prive ainsi les salariés ou leurs représentants de toute voie de recours permettant de contester utilement le calcul de la réserve de participation et ;
  • conduit au surplus à neutraliser les accords passés au sein de l’entreprise dans le cadre de la détermination de la réserve de participation ? ».

La Haute juridiction estime que cette disposition légale pourrait être considérée comme portant une atteinte substantielle au droit à un recours juridictionnel effectif.

Le Conseil constitutionnel rappelle la jurisprudence constante de la Cour de cassation selon laquelle les montants certifiés par l’attestation ne peuvent être remis en cause dans un litige relatif à la participation quand bien même l’action du demandeur est fondée sur la fraude ou l’abus de droit invoqués à l’encontre des actes de gestion de l’entreprise (v. Cass. soc., 29 janvier 2013, n° 12-11.875, FS-P+B N° Lexbase : A6281I4E ; Cass. soc., 9 février 2010, n° 08-11.338, F-D N° Lexbase : A7686ER4 ; Cass. soc., 8 décembre 2010, n° 09-65.810, F-P+B N° Lexbase : A9116GML).

Le raisonnement. Le Conseil constitutionnel souligne, en premier lieu, que cette attestation a pour seul objet de garantir la concordance entre le montant du bénéfice net et des capitaux propres déclarés à l’administration fiscale et celui utilisé par l’entreprise pour le calcul de la réserve spéciale de participation. Ainsi, en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu éviter que les montants déclarés par l’entreprise et vérifiés par l’administration fiscale, sous le contrôle du juge de l’impôt, puissent être remis en cause, devant le juge de la participation, par des tiers à la procédure d’établissement de l’impôt. Ce faisant, il a poursuivi un objectif d’intérêt général.

En second lieu, le Conseil constitutionnel souligne que l’administration fiscale, qui contrôle les déclarations effectuées pour l’établissement des impôts, peut, le cas échéant sur la base de renseignements portés à sa connaissance par un tiers, contester et faire rectifier les montants déclarés par l’entreprise au titre du bénéfice net ou des capitaux propres, notamment en cas de fraude ou d’abus de droit liés à des actes de gestion. Dans ce cas, une attestation rectificative est établie aux fins de procéder à un nouveau calcul du montant de la réserve spéciale de participation.

La solution. Le Conseil constitutionnel juge que les dispositions contestées ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit à un recours juridictionnel effectif de sorte qu’elles doivent être déclarées comme conformes à la Constitution.

Autrement dit, le contrôle du montant du bénéfice net est opéré par l’administration fiscale et non par des tiers qui peuvent néanmoins fournir des renseignements à l’administration de sorte qu’est conforme à la Constitution l’interdiction de contester les attestations d’inspecteurs des impôts ou de commissaires aux comptes sur le montant du bénéfice fiscal et des capitaux propres de l’entreprise lors d’un litige sur la participation.

Pour aller plus loin :

  • lire G. Auzero, De l'impossible contestation des montants du bénéfice net et des capitaux propres établis par le commissaire aux comptes ou l'inspecteur des impôts, Lexbase Social, janvier 2011, n° 422 N° Lexbase : N0405BRG ;
  • v. ÉTUDE : La participation aux résultats de l’entreprise, Le règlement des litiges en matière de participation, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E1054ET9.

 

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