Le Quotidien du 26 octobre 2023 : Contrats et obligations

[Brèves] Résiliation de contrat : quand la gravité du manquement du débiteur dispense le créancier de toute mise en demeure

Réf. : Cass. com., 18 octobre 2023, n° 20-21.579, FP-B+R N° Lexbase : A08341N9

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 26 Octobre 2023

► Si, en application des articles 1224 et 1226 du Code civil, le créancier peut, à ses risques et périls, en cas d'inexécution suffisamment grave du contrat, le résoudre par voie de notification, après avoir, sauf urgence, préalablement mis en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable, une telle mise en demeure n'a pas à être délivrée, lorsqu'il résulte des circonstances qu'elle est vaine.

La précision est d’importance, justifiant que l’arrêt soit promis à la plus large publication.

Faits et procédure. Le litige opposait une société A ayant pour activité la taille et le façonnage du calcaire et du marbre, à une société B, spécialisée dans l'installation et l'entretien de machines et équipements mécaniques (matériel de levage et élévation), à laquelle elle avait fait appel durant plusieurs années.

En décembre 2016, la société A avait accepté un devis proposé par la société B relatif à une prestation de maintenance sur une scie comptant comme l'un de ses équipements majeurs. En dépit de différentes interventions sur cet outil, la société A avait indiqué être insatisfaite des réparations ou réglages effectués par la société B et les relations entre les parties s’étaient dégradées.

Par lettre du 22 mars 2017, la société B avait indiqué à la société A qu'en raison du comportement du dirigeant de cette dernière, elle n'entendait pas poursuivre sa prestation, puis l'avait assignée en paiement de diverses factures.

La cour d’appel de Poitiers avait fait droit à la demande de paiement des factures, jugeant que la société A et son dirigeant avaient commis des manquements suffisamment graves pour que la société B mette unilatéralement fin à sa prestation contractuelle (CA Poitiers, 22 septembre 2020, n° 18/03399 N° Lexbase : A58573UH).

La société A a alors formé un pourvoi, arguant que la résiliation n'avait été précédée d'aucune mise en demeure de mettre un terme à un tel manquement, reprochant alors à la cour d’avoir ainsi statué, sans relever que la société B aurait opéré une telle mise en demeure.

Solution. En vain. L’argument est écarté par la Haute juridiction, qui prend soin de rappeler la teneur des textes.

Aux termes de l'article 1224 du Code civil N° Lexbase : L0939KZS, la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice.

Selon l'article 1226 du même code N° Lexbase : L0937KZQ, le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable.

La Cour suprême vient alors préciser qu’une telle mise en demeure n'a cependant pas à être délivrée lorsqu'il résulte des circonstances qu'elle est vaine.

Circonstances de l’espèce. En l’espèce, après avoir relevé qu'il ressortait d'attestations versées aux débats que les relations avec les personnels de la société B intervenant sur le chantier étaient devenues très tendues et conflictuelles, le dirigeant de la société A ayant tenu des propos insultants et méprisants à l'égard de l'un des collaborateurs de la société B, mettant en cause sa capacité à faire et à suivre le chantier, donnant des ordres directs à l'un des salariés de celle-ci sans en informer sa hiérarchie, la cour d’appel avait retenu que si l'agacement de ce dirigeant de voir son outil professionnel hors de fonctionnement pouvait être compris, cette situation ne pouvait justifier une attitude inacceptable, qu'il s'agisse des propos tenus, ou du fait d'imposer des dates d'intervention non convenues. La cour ajoutait que ce comportement fautif ne permettait alors plus de poursuivre une intervention dans des conditions acceptables et justifiait le retrait des équipes de l'entreprise, empêchées dans leur exécution contractuelle. Les conseillers d’appel en avaient déduit que, dans ce contexte d'extrême pression et de rupture relationnelle, la société B n'était pas en mesure de poursuivre son intervention.

Selon la Cour de cassation, en l'état de ces constatations et appréciations par lesquelles elle avait fait ressortir que le comportement du dirigeant de la société A était d'une gravité telle qu'il avait rendu manifestement impossible la poursuite des relations contractuelles, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de rechercher si une mise en demeure avait été préalablement délivrée à cette société, dès lors qu'elle eût été vaine, a légalement justifié sa décision.

Pour aller plus loin : cette décision fera l’objet d’un commentaire approfondi par Aurélie Dardenne, à paraître prochainement dans la revue Lexbase Droit privé.

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