Réf. : Cass. crim., 29 mars 2023, n° 22-83.911, F-B N° Lexbase : A39239LU
Lecture: 7 min
N5507BZY
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Barbara Drevet, Docteure, ATER Université Clermont Auvergne, CMH UPR 4232, F-63000 Clermont-Ferrand, France
Le 07 Juin 2023
Mots-clés : état de nécessité • destructions • dégradations • détériorations • glyphosate • écologie
L’état de nécessité invoqué par les militants écologistes est, comme de coutume, rejeté par la Cour de cassation et ne peut ainsi justifier la dégradation ou détérioration délictuelle de bidons contenant du glyphosate, malgré l’existence d’un danger reconnu par la cour d’appel.
[1] Cass. crim., 29 mars 2023, n° 22-83.911, F-B N° Lexbase : A39239LU.
[2] V. notamment Cass. crim., 19 novembre 2002, n° 02-80.788 N° Lexbase : A2434CXG : Mayer, note, D., 2003. 1315 ; Cass. crim., 18 février 2004, n° 03-82.951, F-D N° Lexbase : A88634RP : P. Trouilly, Environnement, 2004, n° 7, comm. 78 ; Cass. crim., 7 février 2007, n° 06-80.108, F-D N° Lexbase : A3018D9N : A. Darsonville, obs., D., 2007, p. 573 ; J.-Ph. Feldamn, obs., D., 2007, p. 1310 ; F.-G. Trébulle, obs., JCP G, 2007, n°14, II 10059.
[3] Cass. crim., 7 février 2007, n° 06-80.108, F-D N° Lexbase : A3018D9N.
[4] Ibid.
[5] Cass. crim., 19 novembre 2002, n° 02-80.788 N° Lexbase : A2434CXG ; Cass. crim., 18 février 2004, n° 03-82.951, F-D N° Lexbase : A88634RP.
[6] Cass. crim., 15 juin 2021, n° 20-83.749, F-B N° Lexbase : A00954WG : A. Dejean de la Bâtie, obs., D., 2021, p.1661 ; G. Beaussonie, obs., RDI, 2021, p.546 ; Ph. Conte, obs., Dr. pén., 2021, n° 9, comm. 138 ; E. Dreyer, Dénonciation du risque nucléaire : comme tout est plus simple sans la Convention européenne des droits de l'homme !, Légipresse, 2021, p. 429 ; J.-C. Saint-Pau, JCP G, 2021, n° 30-34, act. 840; L. Saenko, obs., RTD Com., 2022 p.175.
[7] Dans le même sens v. J. Ph. Fedelman, Les « faucheurs » fauchés par la Cour de cassation, D., 2007, p. 1310.
[8] Dans le même sens v. M. Danti-Juan, État de nécessité, Rép. pén. Dalloz, 2020, § 39.
[9] Cass. crim., 22 septembre 2021, n° 20-80.489 N° Lexbase : A134647Y et n° 20-80.895 N° Lexbase : A442447Y et n° 20-85.434 N° Lexbase : A134747Z : G. Beaussonie, obs., JCP G, 2022, n° 21, doctr. 925 ; Ph. Conte, obs., Dr. pén., 2021, comm. 206 ; G. Chetard, note, AJ pénal, 2021, p. 533.
[10] Cass. crim., 22 septembre 2021, n° 20-85.434, préc., § 8-10.
[11] Ibid, § 12-18
[12] Cass. crim., 18 mai 2022, n ° 20-87.272, FS-D N° Lexbase : A97017XL, n° 21-86.647, FS-D N° Lexbase : A98177XU et n° 21-86.685, FS-B N° Lexbase : A33897XS : S. Pellé, note, D., 2022, 1186 ; J.-B. Thierry, obs., AJ pénal, 2022, p. 374 ; F. Rousseau, obs., JCP G, 2022, 879 ; Ph. Conte, obs., Dr. pén. 2022 ; X. Pin, obs., RSC, 2022, 817 ; A. Lepage, Communication Commerce électronique, 2022, n° 7-8, comm. 51; Cass. crim., 30 novembre 2022, n° 22-80.959, F-D N° Lexbase : A34938XN : A. Costes, Décrochage des portraits officiels du Président de la République : quelques précisions à propos du contrôle de conventionnalité en droit pénal, Lexbase Pénal, 2023, n°57 N° Lexbase : N4391BZN.
[13] Dans le même sens v. Ph. Conte, Danger futur, Dr. pén., 2021, n° 9, comm. 138.
[14] Cass. crim., 29 mars 2023, n° 22-83.911, préc., § 11.
[15] Ibid, §§ 14-16.
[16] E. Bonis et R. Ollard, Destructions, dégradations et détériorations ne présentant pas de danger pour les personnes, Jurisclasseur Pénal Code, Fasc. 20, (actualisation 29 août 2022), §93.
[17] Cass. crim., 4 novembre 2014, n° 14-90.038, F-D N° Lexbase : A9225MZP : pour une approche critique de la décision, v. Malabat, obs., Rev. pénit., 2015, p. 137-138.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485507
Réf. : Cass. civ. 3, 25 mai 2023, n° 21-23.007, F-SB N° Lexbase : A59689WX
Lecture: 8 min
N5744BZR
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Bastien Brignon, Maître de conférences HDR à Aix-Marseille Université, Directeur du master Ingénierie des sociétés, Membre du Centre de droit économique (UR 4224) et de l’Institut de droit des affaires (IDA), Avocat au Barreau d’Aix-en-Provence
Le 05 Juillet 2023
Mots-clés : bail commercial • bail dérogatoire • bail statutaire • maintien en possession du preneur • existence d’un bail • prescription biennale (non) • prescription quinquennale (non) • imprescriptibilité (oui)
La demande tendant à faire constater l'existence d'un bail soumis au statut né du fait du maintien en possession du preneur à l'issue d'un bail dérogatoire, qui résulte du seul effet de l'article L. 145-5 du Code de commerce, n'est pas soumise à la prescription.
1. C’est une précision d’importance qu’apporte la troisième chambre civile de la Cour de cassation dans l’un de ses arrêts du 25 mai 2023. Elle considère ainsi que la demande tendant à faire constater l'existence d'un bail soumis au statut, né du fait du maintien en possession du preneur à l'issue d'un bail dérogatoire, qui résulte du seul effet de l'article L. 145-5 du Code de commerce N° Lexbase : L5031I3Q, n'est pas soumise à la prescription.
2. Quels étaient les faits ? À l’échéance, le 30 septembre 2006, d’un bail commercial de courte durée, qui faisait suite à un précédent bail de même nature, le preneur est resté dans les lieux et a été laissé en possession par le bailleur qui a continué, un temps, d’appeler des loyers puis, s’étant ravisé, a facturé des indemnités d’occupation. Le 19 avril 2017, alors qu’il occupait toujours les locaux, le preneur a assigné le bailleur afin de voir juger qu’il était titulaire d’un bail statutaire, sur le fondement de l’article L. 145-5 du Code de commerce selon lequel si, à l'expiration du bail dérogatoire, le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail soumis au statut des baux commerciaux. Par jugement du 25 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Dax a fait droit à cette demande. En appel, le bailleur a soutenu, à titre principal, l’irrecevabilité de l’action comme atteinte par la prescription biennale de l’article L. 145-60 du Code de commerce N° Lexbase : L8519AID, et, à titre subsidiaire, comme tardive par application de la prescription quinquennale de l’article 2224 du Code civil N° Lexbase : L7184IAC. Par arrêt en date du 29 juillet 2021, la cour d’appel de Pau [1], après avoir écarté la prescription biennale, a admis le moyen tiré de la prescription quinquennale, en la calculant à partir de la conclusion du premier bail dérogatoire, tout en soulignant cependant que « c’est nécessairement à l’issue du bail dérogatoire que le preneur aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit ». L’action du preneur ayant été introduite plus de cinq ans après l’expiration du dernier bail dérogatoire, les juges d’appel ont déclaré l’action irrecevable et ordonné l’expulsion du preneur considéré comme occupant sans droit ni titre.
3. Dans son pourvoi, le preneur a invoqué un moyen écarté par la Cour de cassation comme étant irrecevable. Mais la troisième chambre civile s’est saisie d’office d’un moyen de cassation fondé sur l’article L. 145-5 du Code de commerce et casse partiellement l’arrêt d’appel au motif « que la demande tendant à faire constater l'existence d'un bail commercial statutaire, né du maintien en possession du preneur à l'issue d'un bail dérogatoire, qui résulte du seul effet de l'article L. 145-5 du Code de commerce, n'est pas soumise à prescription ».
4. C’est à notre connaissance la première fois que la Cour de cassation adopte pareille solution dont la portée est très importante. En effet, dès lors que le preneur reste et est laissé en possession à l’issue d’un bail dérogatoire de courte durée relevant de l’article L. 145-5 du Code de commerce (et au plus tard un mois après la fin de ce bail), il pourra, sans être inquiété d’une quelconque prescription, revendiquer le statut des baux commerciaux. Voilà qui contraste avec la solution selon laquelle l’action en requalification du bail dérogatoire en bail statutaire est soumise à la prescription biennale qui, en principe, court dès la conclusion du premier contrat.
5. À dire vrai, il ne faut pas rapprocher la solution de l’arrêt sous commentaire de l’action en requalification et de la prescription biennale. En effet, il ne s’agit pas, dans notre hypothèse, de demander la requalification d’un contrat mais seulement de faire constater en justice la formation d’un contrat de plein droit par le seul effet du maintien dans les lieux, ce qui est fondamentalement différent.
6. Au demeurant, c’est la raison pour laquelle lorsqu’un preneur, et plus rarement un bailleur [2], souhaitent obtenir la requalification d’un bail dérogatoire [3] en bail statutaire, on distingue classiquement et précisément l’action en requalification, soumise à la prescription biennale en vertu de l’article L. 145-60 du Code de commerce, de l’action en revendication du bail statutaire soumise quant à elle à la prescription qui n’est pas celle biennale. Ainsi, dans un important arrêt de 2014, la Cour de cassation a estimé que « la demande tendant à faire constater l'existence d'un bail soumis au statut né du fait du maintien en possession du preneur à l'issue du bail dérogatoire, qui résulte du seul effet de l'article L. 145-5 du Code de commerce, n'est pas soumise à la prescription biennale » [4]. Mais la Cour de cassation ne précisait pas en 2014 qu’une telle action était soumise à la prescription de droit commun, tandis que certains cours d’appel le considéraient [5], comme d’ailleurs la cour d’appel de Pau dont l’arrêt est aujourd’hui partiellement censuré. Il est vrai que si l’action en revendication du statut n’est pas soumise à la prescription biennale, on aurait pu penser, à l’instar des juges du fond précités, que la prescription était celle de droit commun [6]. Mais la Cour de cassation considère, au contraire, qu’une telle action ou demande est imprescriptible.
7. Jean-Pierre Blatter fait valoir que « la justification provient du fait que ce bail statutaire résulte du seul effet de l’article L. 145-5 du Code de commerce ». Qu’une action soit engagée ou non pour le faire constater, il résulte bien de cet article que le bail statutaire s’est ainsi formé de plein droit et il n’y a pas lieu d’appliquer une prescription à une action qui n’a pour objet que de faire constater ce qui existe déjà antérieurement par le seul effet de la loi » [7].
8. Pour notre part, nous souscrivons à l’analyse qui renforce encore un peu plus et un mieux le régime autonome de l’article L. 145-5 du Code de commerce. On se souvient, par exemple, que la Cour de cassation a jugé qu’un bail statutaire peut être revendiqué par le preneur qui, à la fin du bail dérogatoire, de courte durée, reste et est laissé en possession, quand bien même il ne serait pas immatriculé au RCS [8].
9. On en conclut que l’action en revendication possède des vertus que celle en requalification n’a pas, à savoir cette absence de prescription. Cela étant, la solution de l’action en revendication du bail statutaire ne vaut que pour l’article L. 145-5 du Code de commerce et sous réserve que les conditions de cet article soient bien remplies. C’est toute la différence entre l’action en requalification, qui va permettre de requalifier un bail dérogatoire, une convention d’occupation précaire ou encore une location saisonnière, en bail statutaire, avec la très importante précision, exposée au dernier paragraphe, qu’il convient à présent de se placer, non plus au jour de la conclusion du premier des contrats, mais au jour de la conclusion du dernier ; et celle en revendication du statut, dite encore en déclaration ou en constatation de l’existence d’un bail statutaire formé de plein droit après l’expiration du bail dérogatoire, qui va s’opérer donc automatiquement mais uniquement dans le cadre d’un bail de l’article L. 145-5, ce qui signifie que la solution sous commentaire ne s’applique ni aux conventions d’occupation précaire ni aux locations saisonnières.
10. Pour terminer et comme annoncé au paragraphe précédent, il convient d’indiquer que le 25 mai 2023 la troisième chambre civile de la Cour de cassation a également considéré que le délai de prescription biennale applicable à l'action en requalification d'un contrat en bail commercial court, même en présence d'une succession de contrats distincts dérogatoires aux dispositions du statut des baux commerciaux, à compter de la conclusion du contrat dont la requalification est recherchée, là où traditionnellement elle estimait qu’il fallait se placer, pour apprécier le point de départ de la prescription, au jour de la conclusion du premier des contrats [9]. Solution qui constitue, selon Alain Confino, un « revirement inattendu » [10], et selon Jean-Pierre Blatter « une précision ô combien importante et à la portée pédagogique certaine à l’égard des praticiens qui ne manqueront pas à l’avenir, non de demander la requalification des contrats permettant la jouissance des lieux par le preneur et encore moins du premier d’entre eux, mais d’un contrat bien précis, à savoir le dernier » [11].
11. Ces deux jurisprudences du 25 mai 2023 vont, à n’en pas douter, raviver le contentieux des demandes en requalification des conventions hors statut en bail statutaire [12] et de celles en constatation de l’existence d’un bail statutaire par le seul effet du maintien dans les lieux à la suite de la conclusion d’un ou plusieurs baux dérogatoires.
[1] CA Pau, 29 juillet 2021, n° 19/03483 N° Lexbase : A53844ZG.
[2] Cass. civ. 3, 28 septembre 2022, n° 21-17907, F-D N° Lexbase : A08288MM : l’action du bailleur tendant à la requalification du bail dérogatoire en bail commercial est soumise à la prescription biennale de l’article L. 145-60 du Code de commerce.
[3] Ou autres, telles qu’une convention d’occupation précaire ou une location saisonnière.
[4] Cass. civ. 3, 1er octobre 2014, n° 13-16.806, FS -P+B+I N° Lexbase : A8014MX4. Sur cet arrêt v. F. Kendérian, JCl. Entreprise Individuelle, Fasc. 1255, n° 72 ; H. Kenfack, chronique, JCP E, n° 11 du 12 mars 2015, 1130, n° 20.
[5] CA Pau, 29 juillet 2021, n° 19/03483, préc. – CA Paris, 5-3, 1er décembre 2021, n° 20/04742 N° Lexbase : A83027DT, AJDI 2022, p. 203 – CA Montpellier, 17 janvier 2023, n° 20/01745 N° Lexbase : A403789E.
[6] V. toutefois A. Mbotaingar, JCl. Civil Code, art. 1708 à 1762, Fasc. 1265, n° 33 et les réf. citées, concluant à l’imprescriptibilité de l'action en constatation de la mutation du bail dérogatoire en bail commercial statuaire.
[7] Lettre d’actualité du cabinet Blatter Seynaeve, juin 2023, note J.-P Blatter. V. égal. A. Confino, Du nouveau sur la prescription de l'action en requalification d'un contrat en bail statutaire, Open Lefebvre Dalloz, 30 mai 2023.
[8] Cass. civ. 3, 25 octobre 2018 n° 17-26.126, F-P+B+I N° Lexbase : A5407YI4.
[9] Cass. civ. 3, 25 mai 2023, n° 22-15.946, FS-B N° Lexbase : A59649WS.
[10] A. Confino, Du nouveau sur la prescription de l'action en requalification d'un contrat en bail statutaire, Open Lefebvre Dalloz, 30 mai 2023.
[11] Lettre d’actualité du cabilet Blatter Seynaeve, juin 2023, note J.-P. Blatter.
[12] Il faudra bien veiller à demander la requalification non pas du premier contrat ou de tous les contrats mais seulement du dernier pour que la solution de l’un des arrêts du 25 mai 2023 produise pleinement ses effets.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485744
Réf. : CE, 2°-7° ch. réunies, 25 mai 2023, n° 471239, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A70559W9
Lecture: 3 min
N5656BZI
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Yann Le Foll
Le 07 Juin 2023
► L’avis du collège de médecins préalable à la délivrance par le préfet d’une carte de séjour « étranger malade » intervenu sans discussion ou échanges entre eux est sans incidence sur la légalité de la décision prise par le préfet.
Principe. Les dispositions des articles L. 425-9 N° Lexbase : L3274LZB, R. 425-11 N° Lexbase : L4773LZS, R. 425-12 N° Lexbase : L4774LZT, R. 425-13 N° Lexbase : L4775LZU du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles 5 N° Lexbase : Z33002PR et 6 N° Lexbase : Z33003PR de l'arrêté du 27 décembre 2016, pris pour l'application de ces dispositions, issues de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016, relative au droit des étrangers en France N° Lexbase : L9035K4E, et de ses textes d'application, ont modifié l'état du droit antérieur pour instituer une procédure particulière aux termes de laquelle le préfet statue sur la demande de titre de séjour présentée par l'étranger malade au vu de l'avis rendu par trois médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
Ceux-ci se prononcent en répondant par l'affirmative ou par la négative aux questions figurant à l'article 6 précité de l'arrêté du 27 décembre 2016, au vu d'un rapport médical relatif à l'état de santé du demandeur établi par un autre médecin de l'Office, lequel peut le convoquer pour l'examiner et faire procéder aux examens estimés nécessaires.
Garanties. Cet avis commun, rendu par trois médecins et non plus un seul, au vu du rapport établi par un quatrième médecin, le cas échéant après examen du demandeur, constitue une garantie pour celui-ci (au sens de la jurisprudence « Danthony », CE, 23 décembre 2011, n° 335033, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9048H8M).
Collégialité. Les médecins signataires de l'avis ne sont pas tenus, pour répondre aux questions posées, de procéder à des échanges entre eux, l'avis résultant de la réponse apportée par chacun à des questions auxquelles la réponse ne peut être qu'affirmative ou négative.
Par suite, la circonstance que, dans certains cas, ces réponses n'aient pas fait l'objet de tels échanges, oraux ou écrits, est sans incidence sur la légalité de la décision prise par le préfet au vu de cet avis.
Précisions rapporteur public. Dans ses conclusions, Philippe Ranquet justifie ainsi sa position : « La signature à trois implique que chacun des médecins assume l’avis commun, aussi des échanges ont-ils lieu en pratique quand il y a désaccord, pour rapprocher les positions et parvenir à un avis qui soit sinon unanime – rien ne l’impose formellement et la première production de l’OFII envisage clairement l’hypothèse d’une décision à la majorité – du moins accepté. En revanche, au regard de la finalité poursuivie, la « valeur ajoutée » d’une véritable délibération collégiale nous paraît absente quand les avis rendus individuellement, prenant la forme des réponses binaires aux cinq questions, concordent (…) ».
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485656
Réf. : Cass. civ. 1, 11 mai 2023, n° 21-17.737, FS-B N° Lexbase : A39569TP
Lecture: 15 min
N5724BZZ
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Adeline Gouttenoire, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux, Directrice de l'Institut des Mineurs de Bordeaux et Directrice du CERFAP, Directrice scientifique des Ouvrages Lexbase de droit de la famille
Le 28 Juillet 2023
Mots-clés : adoption • enfant né d’une assistance à la procréation (PMA) • enfant du conjoint • parent d'intention • projet parental • intérêt de l'enfant
Il résulte des articles 345-1, 1°, 348-1 et 348-3 du Code civil, applicables à l'espèce que l'adoption plénière de l'enfant du conjoint, permise lorsque l'enfant n'a de filiation établie qu'à l'égard de ce conjoint, requiert le consentement de celui-ci, lequel peut être rétracté pendant deux mois. Sous cette réserve, le consentement donné, qui ne se rattache pas à une instance particulière, n'est pas limité dans le temps.
L’arrêt du 11 mai 2023 illustre, s’il en était besoin, combien il était nécessaire que le législateur intervienne pour admettre l’établissement de la filiation d’un enfant né d’une assistance à la procréation dans un couple de femmes. En effet, jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi n° 2021-1017, du 2 août 2021, relative à la bioéthique N° Lexbase : L4001L7C, seule l’adoption par la mère d’intention permettait à l’enfant d’être rattaché juridiquement à sa mère d’intention. Cette adoption ne suscitait plus de difficulté depuis qu’elle a été admise par la Cour de cassation dans un avis du 22 septembre 2014, même si l’AMP avait été pratiquée à l’étranger [1]. Encore fallait-il que les conditions de l’adoption du conjoint soient réunies, ce qui n’était pas le cas lorsque le couple s’était séparé avant l’adoption.
La question se révèle encore plus complexe lorsque la séparation intervient, comme c’était le cas en l’espèce, alors que la procédure d’adoption est en cours. En effet, une première procédure d’adoption avait été initiée par la mère d’intention en octobre 2016 après que la mère biologique eut donné son consentement en février de la même année. En janvier 2017, la mère d’intention renonçait à l’adoption en raison de la procédure de divorce en cours et de l’intérêt supérieur de l’enfant, la mère biologique [2] ayant informé le parquet en octobre 2016 de son souhait que son fils ne soit pas adopté par son ex-femme. Alors qu’un droit de visite et d’hébergement lui a été refusé par le juge aux affaires familiales, la mère d’intention a formulé une nouvelle demande d’adoption plénière [3] qui a été prononcée par le tribunal de grande instance de Bordeaux le 13 juin 2019 et confirmée par la cour d’appel de Bordeaux le 6 avril 2021. La mère biologique s’est pourvue en cassation contre cet arrêt en invoquant trois arguments : l’absence de validité, du consentement donné par la mère biologique, l’absence de qualité de conjoint au moment du prononcé de la décision d’adoption, et enfin l’absence de respect du principe de primauté de l’intérêt de l’enfant.
Ce dernier point n’a pas été examiné par la Cour de cassation qui considère qu’en application de l’article 1014, alinéa 2, du Code de procédure civile N° Lexbase : L5917MBR, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Il aurait été sans doute été préférable de déclarer, comme la Cour l’a fait dans des arrêts antérieurs, que le moyen fondé sur l’intérêt supérieur de l’enfant ne tendait qu’à remettre en cause le pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond et répondre ainsi au moyen du pourvoi qui prétendait que la cour d’appel s’était prononcée uniquement au regard de l’intérêt de la requérante sans rechercher quel était l’intérêt de l’enfant. Mais la Cour de cassation semble considérer qu’elle a déjà répondu à cette question et qu’il n’est pas nécessaire d’y revenir.
L’arrêt répond donc aux deux premières branches du moyen concernant d’une part le consentement de la mère biologique (I) et d’autre part la qualité de conjoint (II).
I. La validité du consentement de la mère de l’enfant
Projet parental commun. Si la séparation intervient avant la procédure d’adoption et que la mère biologique de l’enfant ne consent pas à celle-ci, l’adoption devient impossible. La loi relative à la bioéthique a partiellement remédié à ce problème en permettant, pendant trois ans, une reconnaissance anticipée pour les AMP réalisées à l’étranger avant l’entrée en vigueur de la loi et en prévoyant une sorte d’adoption forcée lorsque la mère biologique refuse cette reconnaissance conjointe [4]. L’idée est que le projet parental commun de départ implique un engagement de la mère biologique à admettre la filiation de l’enfant à l’égard de la mère d’intention. Le tribunal prononce l’adoption s’il estime que le refus de la reconnaissante conjointe est contraire à l’intérêt de l’enfant et si la protection de ce dernier l’exige (loi n° 2021-1017, du 2 août 2021 N° Lexbase : L4001L7C, art. 9 bis).
Adoption forcée. Cette adoption forcée a également été admise par la Cour de cassation qui, dans un arrêt du 3 novembre 2021 [5], a validé l’adoption plénière de deux jumelles conçues par assistance médicale à la procréation, après la séparation du couple et alors que la femme qui en avait accouché y était opposée. La Cour de cassation se fonde sur le fait que la naissance des enfants résultait d'un projet de couple, auquel l’adoptante avait participé tant lors de la grossesse de sa compagne qu'après la naissance des enfants sur sa tentative de maintenir les liens avec celles-ci malgré la séparation. La cour d’appel avait estimé que l'intérêt de l'enfant était de connaître ses origines et sa filiation et non de faire disparaître l’ex-femme de leur mère de l'histoire familiale des petites filles. Ainsi elle pouvait souverainement en déduire que l'adoption plénière des enfants par celle-ci était conforme à leur intérêt. Ce faisant, la loi comme la Cour de cassation consacre une présomption implicite selon laquelle l’établissement d’une filiation adoptive d’un enfant né d’une AMP par la femme qui a participé au processus de leur conception est conforme à son intérêt, et ce malgré l’opposition de sa mère biologique.
Aide non médicale à la procréation. Dans l’arrêt commenté, l’adoption sans consentement de la mère biologique prévue par la loi dite « bioéthique » (loi n° 2021-1017, du 2 août 2021 N° Lexbase : L4001L7C) ne s’appliquait pas car l’AMP, avait eu lieu en France et de manière non officielle. Mais la mère biologique avait donné son consentement à l’adoption de l’enfant par la mère d’intention et ne s’était rétractée que neuf mois plus tard. Il s’agissait de savoir si cette rétractation après le délai de deux mois prévu par l’article 348-3, alinéa 2, du Code civil N° Lexbase : L5152MEK peut empêcher le prononcé ultérieur de l’adoption dans une autre procédure. La Cour de cassation, comme les juges du fond (tribunal judiciaire et cour d’appel) répondent de manière négative. En effet, la Cour de cassation affirme que « après avoir constaté que le consentement de [la mère biologique], reçu par acte notarié dans les formes requises, n’avait pas été rétracté dans le délai de deux mois, la cour avait justement retenu que celui-ci ne comportait aucune limite dans le temps ni ne se rattachait à une instance particulière ». Autrement dit, la séparation du couple ne doit pas permettre à la mère biologique d’exclure son ex-femme de la vie de l’enfant. La cour d’appel précise que l’adoption de l’enfant du conjoint ne relève pas du régime de droit commun de l’adoption plénière qui comporte un placement de l’enfant en vue de son adoption. Plus particulièrement, l’article 348-2 du Code civil N° Lexbase : L5146MEC qui permet une rétraction du consentement des parents au-delà du délai de deux mois, jusqu’au placement en vue de l’adoption, ne saurait s’appliquer à l’adoption de l’enfant du conjoint.
Anticipation. Dans cet arrêt, la Cour de cassation anticipe et élargit le domaine la reconnaissance de la filiation fondée sur un projet parental. Elle impose clairement à la mère biologique le respect de son engagement que traduit son consentement à l’adoption de l’enfant de son ex-conjointe, en soumettant celui-ci au droit commun de l’adoption. Cette validité du consentement de l’adoption n’est pas non plus remise en cause par le fait que l’adoptante s’était désistée de sa première demande d’adoption, en appel du jugement qui prononçait celle-ci. Elle explique ce retrait par la volonté d’apaiser le conflit, et par la promesse qui lui avait été faite de pouvoir entretenir des relations avec l’enfant. Mais le refus du juge aux affaires familiales de lui accorder un droit de visite et d’hébergement l’a sans doute incitée à solliciter à nouveau le prononcé de l’adoption plénière de l’enfant en mars 2018. La Cour de cassation fait ainsi produire au consentement à l’adoption un effet illimité dans le temps, lorsqu’il s’inscrit dans un projet, constaté par la cour d’appel, de vie familiale réfléchi et concerté qui passait par un mariage en vue d’une adoption de l’enfant par la mère qui n’a pas porté l’enfant. Elle affirme en outre très clairement que le consentement à l’adoption donné dans la perspective d’une procédure d’adoption qui n’a pas abouti, n’a pas besoin d’être renouvelé pour une procédure ultérieure ayant le même objet et concernant le même adoptant. Cette solution donne au consentement à l’adoption une grande portée sur laquelle les notaires doivent attirer l’attention des mères biologiques. Il en sera de même pour la nouvelle reconnaissance anticipée qui permettra à la mère qui ne porte pas l’enfant de voir sa filiation à l’égard de l’enfant établie, sans que la mère biologique puisse s’y opposer. Ce nouveau dispositif a sans doute influé sur le raisonnement de la Cour de cassation qui n’a pas voulu « laisser de côté » les mères d’intention qui ne remplissaient pas les conditions pour accéder au nouveau dispositif de reconnaissance conjointe.
Intérêt de l’enfant. La cour d’appel affirme qu’« en considération de l’intérêt de l’enfant dont il est démontré que la conception a procédé d’un choix de couple et dont la filiation ne saurait dépendre des changements de partenaires, il convient de confirmer le jugement ayant prononcé son adoption [par la mère d’intention] ». Selon les juges du fond l’enfant doit pouvoir se construire par référence à son histoire. Or les conditions de sa conception et le fait qu’il ait été le fruit d’un projet commun des deux femmes participe de cet intérêt. Il apparaît donc que la cour d’appel a estimé que l’adoption était conforme à l’intérêt de l’enfant tel qu’elle l’a souverainement apprécié.
II. La qualité de conjoint
Conditions. L’adoption plénière de l’enfant du conjoint est soumise à un régime moins strict que l’adoption par un tiers, mais elle doit, en contrepartie, satisfaire des conditions spécifiques telle que l’absence de filiation à l’égard de l’autre conjoint (C. civ., art. 345-1 N° Lexbase : L5150MEH). Son régime spécifique se manifeste également en ce qui concerne ses effets, et notamment le maintien de l’exercice de l’autorité parentale par le parent biologique.
Couple. Compte tenu de la spécificité de l’adoption du conjoint, il est doit être établi que le candidat à l’adoption est toujours le conjoint du parent de l’enfant. La loi n° 2022-219, du 21 février 2022, visant à réformer l'adoption N° Lexbase : L4154MBH a élargi l’accès à l’adoption de l’enfant d’un membre du couple par l’autre, au pacsé et concubin de l’autre parent. Le nouveau dispositif n’était pas applicable à l’espèce, non seulement car la cour d’appel de Bordeaux a rendu son arrêt le 6 avril 2021, mais également parce qu’au moment de la seconde requête en adoption le couple était déjà séparé. La loi élargit l’accès de l’adoption à tous les couples, mais encore faut-il que le couple existe. En l’espèce, il fallait établir que l’adoptant était toujours marié à l’autre parent de l’enfant pour que sa requête soit recevable.
Moment de l’appréciation. La réponse à la question dépendait du moment où il faut se situer pour apprécier la qualité pour agir de la mère d’intention, candidate à l’adoption. Le pourvoi considérait que la mère biologique n’avait pas qualité pour demander l’adoption de l’enfant puisqu’au moment où le juge a statué sur la demande d’adoption, le divorce était prononcé et qu’elle n’avait plus qualité pour solliciter l’adoption de l’enfant de son conjoint. Il critique en conséquence l’arrêt d’appel qui avait considéré que la qualité pour agir s’analyse au moment du dépôt de la requête alors que le couple était encore uni par les liens du mariage sans rechercher s’il l’était encore le jour où elle a statué.
Rendu de la décision. La Cour de cassation donne raison au pourvoi en affirmant qu’« en application des articles 345-1, 348-1 et 353 du Code civil, le juge doit vérifier si les conditions légales de l’adoption de l’enfant du conjoint sont remplies au moment où il se prononce », comme elle l’a déjà affirmé dans un arrêt antérieur [6]. Cette précision importante a pour effet d’exclure l’adoption de l’enfant d’un membre du couple par l’autre si la séparation a eu lieu avant le prononcé de l’adoption. Cette exigence reprend celle qui est requise dans le processus de procréation assistée. Elle paraît logique puisque l’objectif est de consacrer une vie familiale entre les deux membres du couple et l’enfant. On remarque cependant que cette exigence n’est pas reprise dans le dispositif de reconnaissance anticipée du couple de femmes ayant eu recours à une AMP. En effet, la vie commune doit perdurer jusqu’à la fin du processus d’AMP, mais celle-ci n’est pas exigée lors de la remise de la reconnaissance anticipée à l’officier d’état civil pour établir la filiation de l’enfant à l’égard de « l’autre femme », selon l’expression mal choisie du Code civil.
Divorce non définitif. Toutefois les époux sont mieux traités que les partenaires ou les concubins car ils peuvent avoir mis fin à la vie commune tout en restant des époux jusqu’au prononcé de leur divorce par une décision définitive. Et c’est ce point qui va permettre à la Cour de cassation de « sauver » l’adoption du conjoint dans cette affaire par un motif de pur droit substitué à ceux critiqués en vertu des articles 620, alinéa 1 N° Lexbase : L6779H79, et 1015 du Code de procédure civile N° Lexbase : L5802L8E. La Cour de cassation reprend en effet le constat de la cour d’appel selon lequel il avait été interjeté appel du jugement de divorce rendu le 12 décembre 2019, par la mère d’intention, peut être justement pour gagner du temps. Cet appel étant toujours pendant, le divorce n’était pas donc définitivement prononcé. Ainsi les deux femmes étaient encore unies par les liens du mariage au moment où la cour d’appel a statué. La Cour de cassation peut ainsi conclure que « les conditions légales de l’adoption de l’enfant du conjoint étaient réunies au moment où elle a statué ».
Protection du lien de l’enfant avec sa mère d’intention. L’arrêt du 11 mai 2023 favorise indiscutablement l’adoption de l’enfant du conjoint après la séparation de l’enfant et s’inscrit, comme certaines dispositions de la loi relative à la bioéthique, dans un mouvement de protection de la relation de l’enfant avec l’ancienne conjointe de sa mère. Cette relation n’est plus dépendante de la relation de couple, car elle est fondée sur le projet parental commun élaboré par hypothèse lorsque le couple allait bien.
[1] Cass. avis, 22 septembre 2014, n° 15010 et 15011 N° Lexbase : A9174MWP.
[2] Cette expression désigne la mère qui a porté l’enfant à et l’égard de qui la filiation de l’enfant a été établie par l’inscription de son nom dans l’acte de naissance.
[3] En réalité l’adoption a été prononcée le 12 octobre 2017 mais la cour d’appel a constaté le désistement de la requérante laquelle a formulé une nouvelle requête le 8 mars 2018
[4] A. Gouttenoire, La filiation monosexuée, Lexbase Droit privé, septembre 2021, n° 878 N° Lexbase : N8824BYH
[5] Cass. civ. 1, 3 novembre 2021, n° 20-16.745, F-D N° Lexbase : A06747BL
[6] Cass. civ. 1, 13 mai 2020, n° 19-13.419, F-P+B N° Lexbase : A06533M7.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485724
Réf. : Projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise, n° 1272
Lecture: 8 min
N5754BZ7
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Guillaume Massé et Hervé Bachellerie - Avocats, D'Alverny Avocats
Le 08 Juin 2023
Mots-clés : entreprises • salariés • partage de la valeur • impôt sur le revenu
Le 24 mai, le projet de loi « portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise » était présenté au Conseil des Ministres, avec une quinzaine d’articles.
Le projet, conformément aux engagements du gouvernement, reprend très largement, les dispositions de l’accord national interprofessionnel (ANI) des partenaires sociaux du 10 février 2023 [1].
Ses 15 articles élargissent sensiblement pour les salariés, notamment des PME, les dispositifs actuels :
C’est ainsi que le projet de loi prévoit une quinzaine d’articles articulés autour de 5 titres :
Plus généralement, les mesures proposées visent à soutenir le pouvoir d’achat des salariés, ainsi qu’à renforcer et à développer les dispositifs associant les salariés aux résultats et performances de l’entreprise tels que l’intéressement, la participation, l’épargne salariale, la prime de partage de la valeur ou l’actionnariat salarié.
I. Faciliter la mise en place d’un régime de participation
Les mesures suivantes sont expérimentales et prises pour une durée de 5 ans, durée au terme de laquelle un rapport d’évaluation sera remis par le Gouvernement au Parlement.
1) Afin de faciliter la mise en place de la participation volontaire dans les entreprises de moins de 50 salariés, l’article 2 permet de déroger aux règles de calcul de la participation (C. trav., art. L. 3324-2 N° Lexbase : L5939LQZ). Cette faculté nécessite cependant un accord, au niveau soit de la branche, soit de l’entreprise.
Pour mémoire, jusqu’à ce jour, les entreprises de moins de 50 salariés [2] peuvent, sur une base volontaire [3], instaurer un régime de participation par voie d’accord ou, en cas d’échec des négociations, par décision unilatérale de l’employeur, selon un régime identique [4].
En tout état de cause, obligation d’ouvrir des négociations, avant le 30 juin 2024, pour chaque branche professionnelle, pour mettre en place la participation dans les entreprises de moins de 50 salariés.
2) Pour les exercices ouverts à compter de 2025, les entreprises ayant entre 11 et 49 salariés, et réalisant un bénéfice net fiscal au moins égal à un pour cent (1 %) du chiffre d’affaires pendant 3 exercices consécutifs, l’article 3 prévoit qu’elles doivent, au choix :
II. Partage de la valeur en cas d’augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal [5]
Lorsque les entreprises qui disposent déjà d’un accord de participation ou d’intéressement ouvrent une nouvelle négociation avec les délégués syndicaux sur cette question [6], elles doivent procéder à l’examen des modalités de partage de la valeur en cas de survenance d’une augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal.
Les modalités de ce partage peuvent être mises en œuvre, aux termes de l’article 5 selon quatre (4) modalités : (i) le versement d’un supplément de participation ou d’intéressement, (ii) mise en place d’un dispositif d’intéressement, (iii) versement de cette prime pour résultat exceptionnel sur un plan d’épargne, ou (iv) versement de la prime de partage de la valeur (prévue par l’article 1e de la loi du 16 aout 2022 précitée).
Les entreprises concernées doivent engager une négociation sur ce thème, avant le 30 juin 2024, sauf évidemment lorsqu’elles disposent déjà d’un tel dispositif.
Toutefois, cet article 5 devrait, selon toute vraisemblance, faire l’objet d’évolution compte tenu des observations du Conseil d’État sur la notion « d’augmentation exceptionnelle du bénéfice net ».
Par ailleurs, l’exonération d’impôt sur le revenu, de la CSG, et de la CRDS de la prime de partage de la valeur (issue de l’article 1 de la loi du 16 aout 2022 précitée) sous plafond est de 3 000 ou 6 000 euros selon l’entreprise, prévue jusqu’au 31 décembre 2023 [7] connait une prorogation jusqu’au 31 décembre 2026. Ce dispositif est au profit des salariés travaillant (i) dans des entreprises de moins de 50 personnes et (ii) ayant perçu au cours des 12 mois précédant le versement de la prime, une rémunération inférieure à 3 fois le SMIC annuel, soit 62 898 euros.
Toutefois, le Conseil d’État estime que ce dispositif réservé à certains salariés pose un problème au regard du principe d‘égalité devant les charges publiques, dans la mesure où il ne revêt plus un caractère exceptionnel. Il devra donc être amendé [8].
III. Prendre en compte la valorisation de l’entreprise
Le troisième objectif, en conformité avec l’accord des partenaires sociaux, est de faire profiter les salariés d’une augmentation de la valeur de l’entreprise (ou du groupe) au fil du temps.
Le plan de partage de la valorisation de l’entreprise, qui s’apprécie sur une durée de 3 ans, concerne tous les salariés avec une ancienneté d’au moins 12 mois, sauf disposition plus favorable prévue dans un accord.
Le montant de la prime peut varier en fonction du salaire, de la classification ou du temps de travail.
La formule de valorisation de l’entreprise, est mise en oeuvre au terme d’une période de 3 ans, décomptée depuis la mise en place du système par accord, en pouvant être indexée notamment sur la situation nette comptable, de la rentabilité, des perspectives d’activité. La comparaison avec d’autres entreprises du même secteur est également possible.
Si l’accord ne contient pas de formule de valorisation ou si la formule s’avère impossible à appliquer, la valorisation de l’entreprise retenue est égale au montant de l’actif net réévalué (ANR) calculé d’après le bilan le plus récent.
Le plafond des primes versées à ce titre lors d’un même exercice est égal à ¾ du montant du PASS (plafond annuel de la sécurité sociale), soit 32 994 euros à ce jour.
Cette prime, qui n’a pas le caractère de salaire et qui ne peut se substituer à aucun autre élément de rémunération, n’est pas à inclure dans les incentives dont le montant cumulé doit respecter un certain plafond pour ne pas remettre en cause les exonérations fiscales et sociales prévues pour les versements sur un plan d’épargne salariale (PEE, PER).
Elle bénéficie d’une exonération des cotisations sociales à la charge du salarié et de l’employeur. Toutefois, elle est soumise à la contribution spécifique au profit de la CNAV (Caisse nationale d’assurance vieillesse) prévue à l’article L. 137-13 du Code de la sécurité sociale N° Lexbase : L2231LYB et égale à 20 % (de la valeur des actions gratuites).
Au niveau de la procédure, le plan de partage de la valorisation de l’entreprise est mis en place par accord, établi sur rapport spécial du CAC (commissaire aux comptes de l’entreprise) ou d’un commissaire désigné à cet effet.
L’accord peut revêtir la forme :
Le gouvernement remettra un rapport d’évaluation au parlement avant le 30 septembre 2025.
Les exonérations dont bénéficie cette prime de partage, parce qu’elles ont fait l’objet d’observations du Conseil d’État, sont donc susceptibles d’évoluer.
IV. Développer l’actionnariat salarié
Pour faciliter l’actionnariat salarié, sont augmentés les plafonds d’attribution gratuite d’actions (AGA) dont peuvent bénéficier les salariés :
Est également créé un nouveau plafond, égal à 30 %, sous condition que les salariés bénéficiaires représentent (i) plus de 25 % de la masse salariale et (ii) plus de 50 % des effectifs.
En outre, si le plafond individuel d’actions gratuites fixé à 10 % du capital social est maintenu, sont désormais sont exclus du calcul les titres détenus depuis plus de 7 ans.
Enfin, le projet de loi reprend les dispositions de l’accord national interprofessionnel encourageant dans les plans d’épargne d’entreprise et dans les d’épargne retraite l’instauration de fonds favorisant la transition énergétique ou socialement responsables.
Ce projet de loi amendé des observations du Conseil d’État arrivera dans les prochains jours sur le bureau de l’Assemblée nationale.
[1] Certaines mesures de l’ANI sont non reprises car devant seulement faire l’objet d’une mesure réglementaire, comme par exemple la création de 3 nouveaux cas de déblocage anticipé du PEE avant 5 ans en cas (i) de rénovation énergétiques de la résidence principale, (ii) de dépense engagées comme proche aidant (dépendance) et (iii) d’acquisition de véhicule dit « propre » (neuf ou occasion).
[2] C. trav., art. L. 3323-6 N° Lexbase : L7712LQP.
[3] Le régime de participation volontaire est régi par les mêmes dispositions que celle de la participation obligatoirement des entreprises de plus de 50 salariés. En particulier, de la règle dite de l’équivalence des avantages consentis, prévue par les dispositions de l’article L. 3324-2 du Code du travail, qui exige que la formule de calcul de la réserve spéciale de participation, si elle est différente de la formule prévue par la loi, comporte pour les salariés des avantages au moins équivalents.
[4] L’avis du Conseil d’État précise que respecte le principe d’égalité le fait que les accords de participation puissent à l’avenir être moins favorables (que e régime légal) ce que ne peuvent pas ceux résultant d’une mise en place volontaire antérieure.
[5] Article 9 de l’ANI.
[6] En application de l’article L. 2242-1 du Code du travail N° Lexbase : L4403L79, les entreprises avec délégués syndicaux sont tenues d’engager, au moins une fois tous les 4 ans, une négociation sur le partage de la valeur.
[7] Issue de la loi du 16 août 2022 et en vigueur depuis le 1er juillet 2022.
[8] Ses avis n° 405548 des 30 juin et 4 juillet 2022 avaient déjà requis une application limitée dans le temps.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485754
Réf. : Cons. const., décision n° 2023-1051 QPC, du 1er juin 2023 N° Lexbase : A64489X4
Lecture: 4 min
N5734BZE
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Maxime Loriot, Notaire Stagiaire - Doctorant en droit international privé à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Le 09 Juin 2023
► Par une décision n° 2023-1051, en date du 1er juin 2023, le Conseil constitutionnel était amené à trancher une question prioritaire de constitutionnalité à la suite d'un arrêt récent rendu par la Cour de cassation le 5 avril 2023 (Cass. QPC, 5 avril 2023, n° 23-40.001, F-D N° Lexbase : A63059NT). Cet arrêt inédit était relatif à l’obligation pour l’héritier réservataire de déposer une déclaration de succession dans les six mois du décès en présence d’un légataire universel.
Rappel des faits
Procédure
Question de droit. Le Conseil constitutionnel était amené à trancher la QPC suivante :
Les dispositions de l’article 724, alinéa 1er du Code civil combinées à celles des articles 641 et 1701 du CGI imposant le paiement des droits de succession par les héritiers réservataires en concurrence avec un légataire universel avant l’enregistrement de la déclaration de succession, alors même que ceux-ci n’ont pas perçu la contre-valeur imposable, sont-elles conformes à la Constitution ?
Solution
Le Conseil constitutionnel déclare que les dispositions de l’article 724, alinéa 1er du Code civil, combinées à celle des articles 641 et 1701 du CGI, imposant le règlement des droits de succession avant l’enregistrement de la déclaration de succession dans un délai de 6 mois à compter du décès, sont conformes à la Constitution.
Le Conseil constitutionnel considère ces dispositions conformes même si elles conduisent à ce qu’en présence d’un légataire universel cumulant cette qualité avec celle d’héritier, les héritiers réservataires soient tenus de verser des droits de succession au titre de biens non encore transmis et dont ils n’auraient pas encore perçu la contre-valeur imposable.
Par ailleurs, le Conseil constitutionnel ajoute que les dispositions susvisées ne méconnaissent pas le principe d’égalité devant les charges publiques et apporte plusieurs précisions :
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485734
Réf. : CE, 3°-8° ch. réunies, 3 mai 2023, n° 438248, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A88219SI
Lecture: 9 min
N5668BZX
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 26 Juillet 2023
Mots clés : fonctionnaire • intégration • révocation • antécédents judiciaires • réputation du service
Dans une décision rendue le 3 mai 2023, la Haute juridiction administrative a dit pour droit que des antécédents judiciaires d’un agent n’affectant pas le bon fonctionnement ou la réputation du service ne peuvent justifier sa révocation. Pour revenir sur cet arrêt qui permet de se pencher sur la vie antérieure du citoyen avant son intégration dans la fonction publique, Lexbase Public a interrogé Pierre Esplugas-Labatut, Professeur de droit public à l’Université Toulouse 1 Capitole, Institut Maurice Hauriou*.
Lexbase : Quels principes régissent la vérification par l'administration de la vie « passée » du candidat fonctionnaire ?
Pierre Esplugas-Labatut : En 1927, Hauriou écrivait que « le fonctionnaire est un citoyen spécial, non assimilable à un salarié du commerce et de l’industrie, faisant de ce dernier un citoyen normal » [1]. Ces propos restent aujourd’hui tout aussi pertinents. En effet, au-delà des fonctionnaires proprement dits, tout agent public est susceptible de se voir reprocher des faits jugés répréhensibles commis même en dehors de l’exercice du service. L’explication banale est que l’agent public exerce une mission particulière de service public et à ce titre est soumis à des sujétions particulières dont l’exigence d’exemplarité.
En ce sens, les statuts de 1946 et 1959 imposaient au candidat-fonctionnaire qu’il soit de « bonne moralité ». Cette qualification étant subjective, celle-ci a été logiquement abandonnée par la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires N° Lexbase : L6938AG3, pour lui substituer l’exigence selon laquelle les mentions portées au bulletin n° 2 du casier judiciaire du candidat (comportant la plupart des condamnations et sanctions administratives prononcées) doivent être le cas échéant compatibles avec l'exercice des fonctions (CGFP, art. L. 321-1 N° Lexbase : L6315MBI). Le but recherché est naturellement d’objectiver de manière bienvenue la nature des incompatibilités. Toutefois, une éventuelle incompatibilité ne vaut au regard de ces textes que pour l’accès à la fonction publique.
S’agissant, de la période d’activité, la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016, relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires N° Lexbase : L7825K7X, dite « Déontologie », pose le principe selon lequel « l'agent public exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité » (CGFP, art. L. 121-1 N° Lexbase : L6215MBS). Cependant, une condamnation pénale n’est pas au nombre des conditions fixées par le droit positif pour entrainer de plein droit la perte de la qualité de fonctionnaire (CGFP, art. L. 550-1 N° Lexbase : L6047MBL). Seule la voie disciplinaire peut alors éventuellement justifier une sanction pour des faits commis en dehors du service, notamment liés à la vie privée. La jurisprudence administrative est à cet égard fournie pour admettre de tels cas même s’il est juste d’observer que ceux-ci remontent plutôt aux années 1970 et couvrent des situations parfois pittoresques ayant trait aux « bonnes mœurs ».
En revanche, la question reste ouverte sur la sanction disciplinaire à apporter pour des faits liés à la vie antérieure à l’exercice des fonctions des agents. C’est précisément l’intérêt de cet arrêt que de donner des éléments de réponse à cette question.
Lexbase : Comment le juge contrôle-t-il l’appréciation effectuée par l’autorité administrative sur cette vérification ?
Pierre Esplugas-Labatut : Il convient de rappeler le principe général en droit de la fonction publique selon lequel, le juge administratif procède désormais à un contrôle de proportionnalité des sanctions disciplinaires prise par l’administration à l’égard d’un agent du service et ne se limite plus à celui de l’erreur manifeste d’appréciation [2]. Dans ce cadre, il a jugé que des comportements extra-professionnels mais concernant des corps particuliers comme les enseignants dans leurs relations avec leurs élèves, les magistrats ou les policiers dans leurs relations avec des personnes poursuivies en justice ou l’ayant été pouvaient bel et bien compromettre la dignité et l’honneur de leurs fonctions.
La situation est toutefois moins claire s’agissant d’actes antérieurs à l’exercice des fonctions des agents publics. Sans doute, existe-t-il une jurisprudence ancienne, citée par la rapporteure publique dans la présente affaire, validant la décision de refus de recrutement d’un candidat reçu à un concours mais ayant fait l’objet antérieurement d’une condamnation pénale [3]. Plus récemment, on peut aussi certes mentionner une décision du Conseil d’Etat acceptant la révocation d’un magistrat ayant fait l’objet d’une condamnation pour défaut de paiement de dettes avant l’intégration de l’intéressé [4]. Le cas des magistrats est toutefois particulier dans le sens où leur statut continue à intégrer l’exigence de « bonne moralité », sans qu’au demeurant celle-ci, curieusement à notre sens, n’ait été censurée par le Conseil constitutionnel [5]. La décision, ayant fait l’objet de cette QPC, de non-admission d’une magistrate, condamnée pour un délit antérieur en état d’ivresse, à l’Ecole nationale de la magistrature a d’ailleurs été en sens inverse invalidée au fond en première instance [6]. Il restait donc à trancher véritablement avec le présent arrêt la question de la compatibilité de condamnations pénales prononcées à l’encontre d’agents publics avec l’exercice de leurs fonctions mais avant la prise de celles-ci.
Lexbase : De quelle manière le CE met-il en œuvre ce contrôle dans la décision du 3 mai 2023 ?
Pierre Esplugas-Labatut : En l’occurrence, un agent employé par le département de la Seine-Saint-Denis contestait la décision prise par son président de le révoquer à la suite, d’une part, de la consultation d’un dossier ne relevant pas de son champ d’intervention en vue de faire bénéficier frauduleusement l’une de ses connaissances de prestations sociales et, d’autre part, de condamnations pénales antérieures de l’intéressé pour vol avec violence et tentative de pénétrer dans un établissement pénitentiaire en s’y présentant avec une pièce d’identité qui n’était pas la sienne.
Le raisonnement suivi en l’espèce par le Conseil d’Etat est en deux temps Dans un premier, il admet, s’agissant de faits antérieurs à la nomination d'un fonctionnaire mais portés ultérieurement à sa connaissance de l’administration, qu’il appartient à celle-ci « d'en tirer les conséquences en engageant une procédure disciplinaire en vue de procéder, à raison de cette incompatibilité, à la révocation de ce fonctionnaire ».
Toutefois, dans un second temps, après avoir écarté le premier grief reproché à l’agent de consultation de dossier dont la matérialité, au terme de l’enquête judiciaire, n’était pas établie, le Conseil d’Etat considère que, eu égard, d’une part, à l'ancienneté des faits (d’ailleurs discutable car moins de cinq ans se sont écoulés entre la deuxième condamnation et l’arrêté de révocation), et, d’autre part, à leur gravité qui ne justifiait pas ou plus, pour l’autorité judiciaire, de mention des condamnations correspondantes au bulletin n° 2 du casier judiciaire, ceux-ci à eux seuls « n'affectaient pas le bon fonctionnement ou la réputation du service dans des conditions justifiant la révocation de l'intéressé ». Le juge administratif pratique donc une forme de « pas de tango argentin », c’est-à-dire, un pas en avant et deux pas en arrière, en acceptant sur le principe que l’administration puisse tenir compte de faits antérieurs à l’exercice du service mais en censurant aussitôt cette position au regard de l’ancienneté et la nature des faits qui conduisent à ne pas compromettre l’intérêt du service.
Lexbase : En quoi cette position du juge administratif est-elle novatrice ?
Pierre Esplugas-Labatut : Au vu de la décision d’annulation de révocation de l’agent, on serait tenté de penser que le Conseil d’Etat a tranché le fait que des agissements rattachés à la vie passée ne peuvent pas justifier une sanction disciplinaire. Il est vrai que de tels faits ne peuvent être constitutifs d’une faute professionnelle car ils sont par hypothèse sans lien avec le service ou même en dehors du service puisque l’intéressé n’était à l’époque pas encore en fonction. On peut d’ailleurs également trouver logique que des comportements fautifs ne poursuivent pas une personne toute sa vie et l’empêchent, une fois la condamnation purgée, d’exercer une activité professionnelle, et ainsi parfois de se réinsérer. Cette solution s’inscrit aussi dans la logique habituelle de l’indépendance de la répression disciplinaire et celle pénale.
Toutefois, il faut observer que le présent arrêt concerne un agent territorial n’exerçant pas de fonctions de direction, d’autorité ou sensibles. Comme indiqué précédemment, le juge administratif a toujours été plus strict concernant certains corps comme ceux des forces de l’ordre ou du secteur enseignant pour lesquels il n’a pas hésité à dégager une « exigence d’exemplarité et d’irréprochabilité » [7]. Il est permis de penser que le juge pourrait tenir une position plus ferme si étaient en cause de tels métiers.
On peut aussi continuer à s’interroger si le juge administratif aurait tenu une position aussi souple de ne pas prendre en compte des condamnations pénales antérieures si celles-ci n’avaient pas été effacées ou dispensées d’inscription au bulletin n° 2 du casier judiciaire ou même si celles-ci avaient été plus récentes. De même, le Conseil d’Etat insiste bien sur le fait que les comportements incriminés antérieurs ne sauraient « à eux seuls » justifier une sanction disciplinaire. A contrario, on peut imaginer que de tels comportements couplés à une faute en lien avec le service peuvent venir en appui d’autres reproches pour fonder une sanction disciplinaire.
Enfin, ainsi que cela a été dit, la portée du présent arrêt est incertaine en ne formulant pas un principe général selon lequel ne doivent pas être pris en compte des agissements liés à une activité passée. Il est laissé à l’administration un pouvoir pour apprécier au cas par cas, sous le contrôle du juge, si ceux-ci sont de nature à mettre en cause l’intérêt du service. En cela, le Conseil d’Etat poursuit son œuvre équilibrée de donner à l’administration les moyens d’agir tout en la modérant.
[1] Précis de Droit administratif et de droit public, 11ème éd., Sirey 1927, tome 2, p. 597.
[2] CE, ass., 13 novembre 2013, n° 347704 N° Lexbase : A2475KPD.
[3] CE, Sect., 5 décembre 1930, S, Rec. p. 1040.
[4] CE, 6 juillet 2016, n° 392728 N° Lexbase : A6121RWM.
[5] Cons. const., décision n° 2012-278 QPC du 5 octobre 2012 N° Lexbase : A9016IT4.
[6] TA Paris, 21 février 2013, n° 1118574 N° Lexbase : A3685I8Y.
[7] CE, 18 juillet 2018, n° 401527 N° Lexbase : A5896XZE.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485668
Lecture: 16 min
N5681BZG
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Céline Leborgne-Ingelaere, Professeure des Universités, CRDP LEREDS, Université de Lille
Le 28 Juillet 2023
Mots-clés : prévention • violences sexuelles et sexistes • harcèlement sexuel • agissement sexiste • employeur • CSE • service de prévention et de santé au travail • responsabilité
Lutter contre les violences sexuelles et sexistes au travail suppose de réagir lors de leur survenance et de les sanctionner strictement. Toutefois, l'enjeu premier est bien la prévention. Il s'agit d'un impératif légalement affirmé et soutenu avec force par les magistrats. Le Code du travail n'est toutefois pas exhaustif sur les mesures à mettre en place de sorte qu'il appartient aux acteurs de l'entreprise de multiplier les initiatives en ce sens, à différents niveaux.
Lutter contre les violences sexuelles et sexistes au travail, lesquelles recouvrent des situations potentiellement variées, est une nécessité prioritairement humaine, mais également juridique. La législation sociale et les magistrats œuvrent d’ailleurs en ce sens. Il est à noter que le Code du travail n’identifie pas juridiquement toutes les formes de violences sexuelles et sexistes, mais concentre uniquement son regard sur le harcèlement sexuel [1] et l’agissement sexiste [2]. Toutefois, les violences sexuelles et sexistes peuvent évidemment présenter des traits bien plus larges en entreprise, tels que réprimés par le Code pénal (viol [3], agression sexuelle [4], exhibition sexuelle [5]).
Sur le terrain de l’identification juridique, le Code du travail, par une définition qui a largement évolué au cours du temps [6], précise qu’ « aucun salarié ne doit subir des faits :
le harcèlement sexuel est également constitué :
- lorsqu'un même salarié subit de tels propos ou comportements venant de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n'a pas agi de façon répétée ;
- lorsqu'un même salarié subit de tels propos ou comportements, successivement, venant de plusieurs personnes qui, même en l'absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition ;
L’article L. 1142-2-1 du Code du travail N° Lexbase : L5440KGL souligne aussi que « nul ne doit subir d'agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d'une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ». Savoir identifier une situation est nécessaire pour la combattre, mais cela ne suffit pas. Prévenir et, s’il le faut, réparer, s’imposent naturellement.
La tolérance n’est pas de mise en la matière et les juges portent un regard toujours plus aiguisé et attentif sur ces violences. Pour exemples récents, preuve en est le licenciement d’un présentateur de télévision à la suite d’une plaisanterie sexiste [8] ou celui d’un animateur de club vacances qui avait tenu des propos qui « visaient systématiquement et de manière répétée des salariées ayant pour point commun d'être des femmes, supposément d'origine magrébine et de confession musulmane, et qui ne pouvaient, dès lors qu'ils revêtent un caractère raciste pour certains, et sexiste pour d'autres, être réduits à des propos triviaux » [9]. De plus, la responsabilité de l’employeur peut être engagée, sous certaines conditions fixées par les juges. Si la réparation des violences perpétrées s’impose, mieux encore est la mise en œuvre d’une démarche de prévention. Tel est d’ailleurs l’objectif premier du législateur et des juges. La prévention, qui est un impératif pour les différents acteurs de l’entreprise (I.) peut potentiellement prendre diverses formes (II.).
I. Prévenir les violences sexuelles et sexistes au travail : un impératif pour les différents acteurs de l’entreprise
Si l’employeur est au cœur de la démarche préventive (A.), ce même objectif est poursuivi par d’autres acteurs de l’entreprise (B.).
A. L’employeur, au cœur de l’objectif de prévention
Le texte de l’article L. 4121-1 du Code du travail N° Lexbase : L8043LGY ne saurait être plus clair : l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :
L’article L. 4121-2 N° Lexbase : L6801K9R souligne d’ailleurs la nécessité de « planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel […] ainsi que ceux liés aux agissements sexistes ». L’article L. 1153-5 du Code du travail N° Lexbase : L0338LMH précise aussi, dans un texte propre au harcèlement, que l'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel, d'y mettre un terme et de les sanctionner.
Cette injonction ressort également de la jurisprudence de la Cour de cassation. Il est acquis aujourd’hui que « ne méconnaît pas l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail et qui, informé de l’existence de faits susceptibles de constituer un harcèlement moral, a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser » [10]. L’absence de mesures préventives entraine la mise en jeu de la responsabilité de l’employeur, outre le fait de ne pas mettre fin au harcèlement sexuel dont est victime un ou une salariée.
B. La prévention des violences sexuelles et sexistes : l’affaire de tous
Mais l’employeur n’est pas seul responsable de la prévention des violences sexuelles et sexistes dans l’entreprise. La loi invite aussi les membres du CSE à s’approprier cet enjeu fort. L’article L. 2312-5 du Code du travail N° Lexbase : L4409L7G dispose ainsi que la délégation du personnel au comité social et économique contribue à promouvoir la santé, la sécurité et l'amélioration des conditions de travail dans l'entreprise. Résulte de cette mission un droit d’alerte visant expressément ces comportements : si un membre de la délégation du personnel au comité social et économique constate, notamment par l'intermédiaire d'un travailleur, qu'il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l'entreprise qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché, il en saisit immédiatement l'employeur. Cette atteinte peut notamment résulter de faits de harcèlement sexuel [11]. Notons aussi l’obligation légale pour le CSE de désigner un référent en matière de harcèlement sexuel et d’agissement sexiste [12]. Cette disposition complète la mission générale confiée à ce dernier consistant à contribuer à faciliter l'accès des femmes à tous les emplois, à la résolution des problèmes liés à la maternité, l'adaptation et à l'aménagement des postes de travail afin de faciliter l'accès et le maintien des personnes handicapées à tous les emplois au cours de leur vie professionnelle et à susciter toute initiative qu’il estime utile et proposer des actions de prévention du harcèlement moral, du harcèlement sexuel et des agissements sexistes [13]. Les représentants des salariés ont aussi un rôle à jouer via la négociation collective. Si les questions relatives à l’égalité professionnelle et la qualité de vie et des conditions de travail sont envisagées dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire en entreprise [14], ces accords peuvent être le creuset de mesures préventives dans l’entreprise. Notons aussi l’importance de la négociation périodique obligatoire de branche « sur les mesures tendant à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et sur les mesures de rattrapage tendant à remédier aux inégalités constatées ». Aujourd’hui, la mise à disposition d’outils aux entreprises pour prévenir et agir contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes doit être évoquée par les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels, au moins une fois tous les 4 ans [15]. L’appropriation de l’enjeu de la lutte contre le harcèlement par les branches professionnelles est nécessaire pour permettre d’appuyer les entreprises dans leur propre politique de prévention. Les services de prévention et de santé au travail ont aussi une mission importante en ce qu’ils sont amenés à « conseiller les employeurs, les travailleurs et leurs représentants sur les dispositions et mesures nécessaires afin d'éviter ou de diminuer les risques professionnels, d'améliorer la qualité de vie et des conditions de travail, en tenant compte le cas échéant de l'impact du télétravail sur la santé et l'organisation du travail, de prévenir la consommation d'alcool et de drogue sur le lieu de travail, de prévenir le harcèlement sexuel ou moral… [16].
Si les textes s’accordent à mettre en exergue l’importance de prévenir ces risques, il n’en demeure que la prévention demeure un défi, voire une gageure.
II. Prévenir les violences sexuelles et sexistes au travail : une gageure
Le Code du travail ne dresse évidemment pas de liste des mesures préventives à mettre en place dans l’entreprise (A.). Néanmoins, des lignes directrices sont tracées de sorte à pouvoir envisager des mesures à différents niveaux (B.).
A. Les orientations limitées du Code du travail
Le droit du travail amène l’employeur à travailler sur différents versants de prévention. Prévenir ces violences suppose tout d’abord de les identifier clairement dans l’entreprise comme de véritables risques professionnels. À ce titre, le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) constitue le « pivot de la prévention ». Tel que cela résulte de l’article L. 4121-3 du Code du travail N° Lexbase : L4413L7L, l'employeur, compte tenu de la nature des activités de l'établissement, évalue les risques pour la santé et la sécurité des travailleurs. Harcèlements au travail et agissements sexistes y trouvent naturellement une place. Cette évaluation des risques tient d’ailleurs compte de l'impact différencié de l'exposition aux risques en fonction du sexe. Ce document doit être mis à disposition des travailleurs, des délégués du personnel au comité social et économique (CSE), du médecin du travail et des professionnels de santé autorisés, des agents de l'inspection du travail, des agents des services de prévention des organismes de Sécurité sociale, des agents des organismes professionnels de santé, de sécurité et des conditions de travail et, enfin, des inspecteurs de la radioprotection. L'employeur doit aussi indiquer les modalités d'accès des travailleurs au DUERP dans un avis et l'afficher à une place convenable et aisément accessible dans les lieux de travail, notamment au même emplacement que celui du règlement intérieur quand l'entreprise ou l'établissement en est doté [17]. Lorsque le document unique d'évaluation des risques professionnels n'est pas tenu, ne retranscrit pas les résultats de l'évaluation des risques ou n'est pas mis à jour, l'employeur s'expose à une contravention de cinquième classe [18].
Par ailleurs, le règlement intérieur élaboré par l’employeur et obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés, constitue un outil de prévention important. Il rappelle notamment les dispositions relatives aux harcèlements moral et sexuel et aux agissements sexistes ainsi que l’existence du dispositif de protection des lanceurs d'alerte [19] et doit être porté, par tout moyen, à la connaissance des personnes ayant accès aux lieux de travail ou aux locaux où se fait l'embauche [20].
Prévenir suppose aussi d’informer. Ainsi, dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l'embauche, toute personne doit être informée par tout moyen du texte de l'article 222-33 du Code pénal N° Lexbase : L6229LLB (délit de harcèlement sexuel) ainsi que des actions contentieuses civiles et pénales ouvertes en matière de harcèlement sexuel et des coordonnées des autorités et services compétents. L’article D. 1151-1 du Code du travail N° Lexbase : L5646MC4 dispose aussi que l'information précise l'adresse et le numéro d'appel du médecin du travail ou du service de santé au travail compétent pour l'établissement ; de l'inspection du travail compétente ainsi que le nom de l'inspecteur compétent ; du Défenseur des droits ; du référent prévu à l'article L. 1153-5-1 N° Lexbase : L9804LLP dans toute entreprise employant au moins deux cent cinquante salariés et du référent CSE quand il existe.
La formation des salariés se révèle également fondamentale. L’accord national interprofessionnel (ANI) du 26 mars 2010 sur le harcèlement et la violence au travail insistait sur la nécessité d’une « meilleure sensibilisation et une formation adéquate des responsables hiérarchiques et des salariés réduisent la probabilité des cas de survenance de harcèlement et de violence au travail » [21]. Afin d’anticiper une éventuelle aggravation de certaines situations et pour informer les potentielles victimes de harcèlement sexuel, l’article L. 1153-5-1 du Code du travail prévoit la désignation, dans toute entreprise employant au moins 250 salariés, d'un référent chargé d'orienter, d'informer et d'accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes. Les prérogatives et moyens des référents manquent toutefois de lisibilité [22].
B. Une prévention possible à différents niveaux
Prévenir les violences sexuelles et sexistes est incontestablement un défi, lequel semble aujourd’hui encore difficile à relever. Selon une enquête menée en 2022 [23], seule une entreprise sur huit seulement a mis en place des mesures adéquates pour prévenir le harcèlement sexuel dans son entreprise. Les efforts sont présents, mais beaucoup reste à faire. Nombreuses sont les études qui témoignent de l’insuffisance des actions menées contre les violences sexistes ou sexuelles au travail. Selon le sondage Opinionway pour Ekilibre Conseil, 45 % des personnes interrogées jugent que leur entreprise ne s’implique pas assez sur ce sujet [24]. Les directions d’entreprises sont dénoncées pour ne pas sensibiliser clairement les salariés et ne pas élaborer une procédure interne de signalement des faits [25].
Rappelons qu’il existe plusieurs niveaux de prévention, de sorte qu’il convient de s’entendre sur le sens donné à ce terme. La prévention primaire vise à supprimer le risque à sa source en réduisant ou éliminant les facteurs de risques présents dans l’organisation. Il peut s’agir d’actions touchant à l’organisation du travail, aux collectifs et relations de travail, au management, au fonctionnement des services. Des mécanismes peuvent être mis en place à l’instar d’un observatoire ou d’un réseau sentinelle par exemple, s’agissant de la prévention des VSST. La prévention secondaire consiste à intervenir sur les stades précoces de l’évolution d’une situation, pour éviter son développement. Les actions visent alors à réduire les atteintes à la santé des individus en les aidant à mieux gérer les situations à risques. Plusieurs outils peuvent être instaurés qu’il s’agisse d’une démarche de sensibilisation des salariés, d’informations sur les procédures de traitement des violences sexistes et sexuelles au travail ou l’élaboration d’outils de communication dans l’entreprise. En effet, « lutter contre le harcèlement sexuel implique une formation efficace et solide pour caractériser le harcèlement sexuel et repérer les comportements à risque. Faire de la prévention signifie dès lors faire connaître les mesures réglementaires (lois, convention collective, règlement intérieur, notamment sur le rôle et la responsabilité de l’employeur), les outils de communication existants (chartes, code de bonne conduite, etc.), les mesures organisationnelles envisageables (aménagements des locaux, changements des équipes, déplacements professionnels, etc.), les interlocuteurs possibles pour la victime et les risques de sanctions disciplinaires encourues par l’agresseur » [26]. Parfois, des colloques ou webinaires sont également organisés. Enfin, relèvent de la prévention tertiaire les actions qui interviennent lorsque le dommage a eu lieu en vue d’en limiter les conséquences sur les individus. Il peut s’agir par exemple de mettre en place une procédure de signalement des faits, une cellule psychologique ou des lignes d'écoute qui permettent de traiter les informations remontées par les salariés : « c'est une façon de faire comprendre à chaque collaborateur qu'il ou elle a le droit de s'exprimer sur ces sujets et que la situation décrite sera traitée au plus vite. D'autant que si la situation perdure, on assiste rapidement à une dégradation des conditions de travail et surtout de la santé, psychologique et physique, des salarié(e)s qui subissent ces commentaires voire ces violences » [27].
La commission des violences emportera une réaction nécessaire de l’employeur. Cela supposera alors qu’une enquête soit menée, en vue de décider d’une sanction de l’auteur des faits. Le cadre de la prévention est toutefois alors malheureusement dépassé.
[1] C. trav., art. L. 1153-1 N° Lexbase : L4433L7C.
[2] C. trav., art. L. 1142-2-1 N° Lexbase : L5440KGL.
[3] C. pén., art. 222-23 N° Lexbase : L2622L4U.
[4] C. pén., art. 222-22 N° Lexbase : L2618L4Q.
[5] C. pén., art. 222-32 N° Lexbase : L2629L47.
[6] La dernière modification en date est la loi n° 2021-1018, du 2 aout 2021, pour renforcer la prévention en santé au travail N° Lexbase : L4000L7B, JORF n° 0178 du 3 août 2021. V. C. Leborgne-Ingelaere, L'alignement de la définition du harcèlement sexuel sur le code pénal : une harmonisation limitée, Droit social, 2021, p. 929.
[7] C. trav., art. L. 1153-1.
[8] Cass. soc., 20 avril 2022, n° 20-10.852, FS-B N° Lexbase : A08737UU.
[9] CE, 1e-4e ch. réunies, 7 octobre 2022, n° 450492, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A92088MY.
[10] Cass. soc., 1er juin 2016, n° 14-19.702, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A2663RR3.
[11] C. trav., art. L. 2312-59 N° Lexbase : L1771LRZ.
[12] C. trav., art. L. 2314-1 N° Lexbase : L0337LMG.
[13] C. trav., art. L. 2312-9 N° Lexbase : L8242LGD.
[14] C. trav., art. L. 2242-1 N° Lexbase : L4403L79. Depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017 N° Lexbase : L7629LGN (JO du 23), la négociation n’est toutefois plus nécessairement annuelle : un accord d’entreprise peut prévoir un calendrier différent pour la négociation obligatoire. Elle doit avoir lieu au moins une fois tous les quatre ans et est annuelle à défaut d’accord collectif (v. dossier Code du travail – À fond la (ré)forme !, JT., 2018, no 208, p. 17 s.)
[15] C. trav., art. L. 2241-1 N° Lexbase : L4955LRX.
[16] C. trav., art. L. 4622-2 N° Lexbase : L4422L7W.
[17] C. trav., art. R. 4121-4 N° Lexbase : L0575MCB.
[18] C. trav., art. R. 4741-1 N° Lexbase : L3068IAU.
[19] C. trav., art. L. 1321-2 N° Lexbase : L0924MC9.
[20] C. trav., art. R. 1321-1 N° Lexbase : L7541LAK.
[21] ANI du 26 mars 2010 sur le harcèlement et la violence au travail, étendu par arrêté du 23 juillet 2010, JO du 31, texte n° 82 N° Lexbase : L9690IMT.
[22] S. Binet, Contre le sexisme sur le lieu de travail, sensibiliser et former, Liaisons sociales Magazine, 1er novembre 2022 [en ligne].
[25] M. Toulgoat, Journée nationale contre le sexisme. Violences sexuelles : le grand retard des entreprises, L’Humanité, 25 janvier 2023 [en ligne].
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485681
Réf. : TA Toulouse, 24 mai 2023, n° 2302868 N° Lexbase : A64019WY
Lecture: 2 min
N5592BZ7
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Yann Le Foll
Le 07 Juin 2023
► L’utilisation de drones pour surveiller les rodéos urbains ne porte pas une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie privée, à la liberté personnelle, au droit de la protection des données personnelles et à la liberté d’aller et venir.
Faits. Était demandée la suspension de l’exécution de l’arrêté du 16 mai 2023, du préfet de la Haute-Garonne autorisant la captation, l’enregistrement et la transmission d’images au moyen de drones lors de la survenue de rodéos urbains.
Position TA. Sur la nature des manifestations en cause, il ressort notamment du dossier de presse produit par la préfecture, qu’outre l’appropriation des voies publiques lors de ces évènements et les nuisances sonores générées, ces comportements ont déjà été la cause d’accidents graves voire de décès.
Eu égard aux périmètres d’intervention et aux modalités d’utilisation des drones tels que prévus dans l’arrêté (ce périmètre étant limité, pour chacune de ces communes, à des secteurs clairement identifiés), le préfet n’avait pas entendu autoriser une surveillance continue présentant un caractère manifestement disproportionné au regard des finalités poursuivies.
Le préfet n’a pas commis d’erreur de droit en fondant son arrêté sur les dispositions des articles L.242-2 N° Lexbase : L8157MAD, L.242-5 N° Lexbase : L8160MAH et L.245-5 du Code de la sécurité intérieure dès lors que la survenue régulière de rodéos urbains dans les communes en cause s’inscrivait pleinement dans ce cadre légal.
Le juge a par ailleurs estimé suffisante la publicité préalable au recours à un drone et a estimé qu’il n’était pas porté atteinte au principe de subsidiarité dans la mesure où les systèmes de vidéosurveillance et les forces au sol existants ne permettaient pas à eux seuls de lutter efficacement contre les rodéos urbains.
Enfin, il a considéré que l’application du décret n° 2023-283 du 19 avril 2023, relatif à la mise en œuvre de traitements d'images au moyen de dispositifs de captation installés sur des aéronefs pour des missions de police administrative N° Lexbase : L4854MHA, n’était pas subordonnée à la transmission à la commission nationale de l’informatique et des libertés d’une doctrine d’emploi.
Décision. Le juge des référés rejette donc la demande de suspension de l’arrêté préfectoral querellé.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485592
Réf. : Cass. crim., 23 mai 2023, n° 22-86.413, F-B N° Lexbase : A29299WE
Lecture: 4 min
N5589BZZ
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Adélaïde Léon
Le 21 Juin 2023
► L’inventaire sommaire du contenu d’un sac jeté dans une rivière, réalisé par un agent de police judiciaire afin d’assurer la préservation des éléments de preuve qui risquent d’être altérés et avant remise à un officier de police judiciaire aux fins de saisies des objets s’y trouvant, ne constitue pas une perquisition au sens des article 56 et 57 du Code de procédure pénale ;
Les prescriptions de l’article 706-30-1, alinéa 2, du Code de procédure pénale ne sont applicables qu'avant destruction des substances stupéfiantes saisies.
Rappel des faits et de la procédure. Après avoir observé une personne prendre la fuite à leur vue, des agents de police judiciaire ont constaté que l’intéressé avait jetée un sac dans une rivière, dont il apparaissait, après repêchage, que l’extrémité d’un canon d’arme en dépassait et qu’il dégageait une forte odeur de cannabis.
Agissant en flagrance, les agents ont procédé à l’inventaire du sac qui a révélé notamment la présence d’armes et de stupéfiants.
Les investigations ont conduit à la mise en cause d’un individu identifié comme propriétaire du sac et organisation d’un trafic de stupéfiants.
Mis en examen, ce dernier a nié être le propriétaire du sac et a déposé une requête en nullité de la procédure au motif que l’inventaire auquel les agents avaient procédé était irrégulier. Il soutenait également que les pesées de stupéfiants réalisées dans le cadre de l’enquête étaient irrégulières.
En cause d’appel. La chambre de l’instruction a fait droit au moyen de nullité au motif que la fouille d’un sac s’apparente à un perquisition et doit, dès lors, en respecter les dispositions légales, notamment la qualité de l’agent et le recours à deux témoins.
La chambre de l’instruction a également fait droit au moyen de nullité concernant les pesées de produits stupéfiants au motif que celles-ci n’avaient pas été réalisées selon les prescriptions de l’article 706-30-1, alinéa 2 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L7675IPX, ce qui avait causé un grief au mis en examen dès lors que lesdits produits avaient été détruits, aucune nouvelle pesée ne pouvant être sollicitée.
Le procureur général a formé un pourvoi contre l’arrêt de la chambre de l’instruction.
Moyens du pourvoi. Il était fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir jugé que l’inventaire du sac constituait une perquisition au sens des articles 56 et 57 du Code de procédure pénale alors que ces dispositions n’ont pas vocation à s’appliquer à la seule vérification du contenu d’un sac volontairement abandonné, dont le détenteur n’est pas identifié et dont l’objet est d’assurer la préservation des preuves.
Le pourvoi critiquait également l’arrêt s’agissant de sa position sur la pesée de stupéfiants. Il n’était en l’espèce pas établi que les scellés avaient été effectivement détruits. Il appartenait à la partie invoquant l’irrégularité de solliciter un nouvelle pesée et à la chambre de l’instruction de vérifier la réalité de la destruction.
Décision. La Chambre criminelle censure dans premier temps l’arrêt de la chambre de l’instruction au visa de l’article 56 du Code de procédure pénale. La Haute juridiction affirme en effet que l’inventaire sommaire du contenu d’un sac jeté dans une rivière, réalisé par un agent de police judiciaire afin d’assurer la préservation des éléments de preuve qui risquent d’être altérés et avant remise à un officier de police judiciaire aux fins de saisies des objets s’y trouvant, ne constitue par une perquisition au sens des article 56 N° Lexbase : L5530LZT et 57 N° Lexbase : L6470KU8 du Code de procédure pénale.
La Cour casse également l’arrêt attaqué au visa de l’article 706-30-1, alinéa 2 du Code de procédure pénale estimant que ces dispositions ne trouvaient pas à s’appliquer aux pesées réalisées en l’espèce. Selon la Chambre criminelle, ces prescriptions ne sont applicables qu’avant destruction des substances stupéfiants saisies. Or, il résultait en effet de la procédure que les produits stupéfiants n’avaient pas été détruits pendant l’enquête et avaient été placés sous scellés avec les pesées litigieuses. La chambre de l’instruction ne pouvait donc faire droit au moyen de nullité se fondant sur le non respect des dispositions de l’article 706-30-1, alinéa 2 susvisé.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485589
Réf. : Cass. civ. 1, 25 mai 2023, n° 21-23.174, FS-B N° Lexbase : A59769WA
Lecture: 4 min
N5767BZM
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)
Le 08 Juin 2023
► En cas de défectuosité d’un produit mis en circulation après le délai de transposition de la directive du 25 juin 1985 mais avant sa transposition en droit français, le délai pour agir est celui de droit commun, et le cas échéant, celui de l’ancien article L. 110-4 du Code de commerce fixant une prescription décennale.
En transposant la directive communautaire du 25 juillet 1985, la loi du 19 mai 1998 N° Lexbase : O8014BIN a institué en matière de responsabilité du fait des produits défectueux un système de prescription original qui laisse place à deux délais distincts : un délai de trois ans pendant lequel la victime doit agir, délai qui court à compter du moment où cette dernière « a eu ou aurait dû avoir connaissance du dommage, du défaut et de l’identité du producteur » (C. civ., art. 1245-16 N° Lexbase : L0636KZL) ; un délai de dix ans au bout duquel plus aucune nouvelle action ne peut être introduite contre aucune des personnes visées par la loi (C. civ., art. 1245-15 N° Lexbase : L0635KZK). Mais on se souvient que cette transposition était intervenue avec presque dix ans de retard (la transposition devait intervenir avant le 31 juillet 1998), rendant le sort des actions introduites du fait d’un produit défectueux mis en circulation après le délai de transposition mais avant l’entrée en vigueur de la loi nouvelle incertain. Tel était donc le cas dans l’espèce ayant donné lieu à l’arrêt rendu le 25 mai 2023.
Faits et procédure. Dans cette affaire, un camion avait été mis en circulation en 1990 et avait subi un accident en 1999. Ce n’est qu’en 2005 qu’une action avait été introduite. L’acquéreur et son assureur faisaient valoir que l’accident avait été causé par la rupture d’un élément de la roue. Pour l’essentiel, et s’agissant des seuls dommages entrant dans le champ d’application de la directive, la cour d’appel avait fait application de l’ancien article L. 110-4 du Code de commerce N° Lexbase : L4314IX3, consacrant une prescription décennale, et fixé le point de départ de cette dernière au jour de la mise en circulation du bus, déclarant ainsi irrecevables les demandes (CA Metz, 24 juin 2021, n° 16/02954 N° Lexbase : A1733Y7C).
Solution. L’arrêt d’appel est cassé au visa de l’article L. 110-4 N° Lexbase : L4314IX3, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 17 juin 2008 et des articles 10 et 11 de la directive. Elle rappelle la jurisprudence constante de la CJUE (v. entre autres CJUE, 4 juillet 2006, C-212/04, Adeneler N° Lexbase : A1488DQ8) selon laquelle « si le principe d'interprétation conforme requiert que les juridictions nationales fassent tout ce qui relève de leur compétence, en prenant en considération l'ensemble du droit interne et en faisant application des méthodes d'interprétation reconnues par celui-ci, aux fins de garantir la pleine effectivité de la directive en cause et d'aboutir à une solution conforme à la finalité poursuivie par celle-ci, l'obligation pour le juge national de se référer au contenu d'une directive lorsqu'il interprète et applique les règles pertinentes du droit interne trouve ses limites dans les principes généraux du droit et que cette obligation ne peut pas servir de fondement à une interprétation contra legem du droit national ». Elle rappelle en outre sa propre jurisprudence en vertu de laquelle « l'action en responsabilité extra-contractuelle dirigée contre le fabricant d'un produit dont le caractère défectueux est invoqué et qui a été mis en circulation après l'expiration du délai de transposition de la directive, mais avant la date d'entrée en vigueur de la loi n° 98-389 du 19 mai 1998 N° Lexbase : O8014BIN transposant cette directive, se prescrit, selon les dispositions du droit interne, qui ne sont pas susceptibles de faire l'objet sur ce point d'une interprétation conforme au droit de l'Union, par dix ans à compter de la date de consolidation du dommage initial ou aggravé ». Par conséquent, « l'action en responsabilité contractuelle dirigée contre le fabricant d'un produit dont le caractère défectueux est invoqué et qui a été mis en circulation après l'expiration du délai de transposition de la directive, mais avant la date d'entrée en vigueur de la loi n° 98-389 du 19 mai 1998 N° Lexbase : O8014BIN transposant cette directive, se prescrit selon les dispositions du droit interne, soit à compter de la réalisation du dommage ou de la date de sa révélation à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en a pas eu connaissance » (V. Cass. civ. 1, 9 juillet 2009, n° 08-10.820, FS-P+B+I N° Lexbase : A7246EI9). On comprend dès lors la cassation de l’arrêt d’appel qui s’était placé au jour de la mise en circulation du bien dont la défectuosité était invoquée, alors que c’est au jour de la réalisation du dommage ou de sa révélation à la victime que les juges du fond auraient dû se placer.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485767
Réf. : Décrets n° 2023-435 et n° 2023-436, du 3 juin 2023
Lecture: 2 min
N5689BZQ
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Laïla Bedja
Le 07 Juin 2023
Les deux premiers décrets d’application de la réforme des retraites (loi n° 2023-270, du 14 avril 2023, de financement rectificative de la Sécurité sociale pour 2023 N° Lexbase : L4410MHS) ont été publiés au Journal officiel du 4 juin 2023.
Âge d’ouverture des droits
Années de naissance |
Âge de départ |
Nés entre le 1er janvier 1955 et le 31 août 1961 inclus |
62 ans |
Nés entre le 1er septembre 1961 et le 31 décembre 1961 inclus |
62 ans et 3 mois |
1962 |
62 ans et 6 mois |
1963 |
62 ans et 9 mois |
1964 |
63 ans |
1965 |
63 ans et 3 mois |
1966 |
63 ans et 6 mois |
1967 |
63 ans et 9 mois |
Nés à compter du 1er janvier 1968 |
64 ans |
Le décret n° 2023-436 décline les conséquences réglementaires du relèvement de l’âge d’ouverture des droits à une pension de retraite.
Il précise par ailleurs les nouvelles bornes d’âge et modalités de départ anticipé pour carrières longues (art. 3 du décret), ainsi que les nouvelles modalités de retraite anticipée des travailleurs handicapés et de retraite anticipée pour inaptitude et incapacité permanente (art. 4).
Transposition à la fonction publique
Le décret n° 2023-435 transpose à l’ensemble des régimes de fonctionnaires et des ouvriers de l’État les évolutions apportées par la loi du 14 avril 2023 de financement rectificative de la Sécurité sociale pour 2023, relatives à l'âge d'ouverture des droits, à la durée d'assurance et aux conditions de départs anticipés.
Le décret précise en outre les règles d'interpénétration entre les trois régimes de la fonction publique et de portabilité de l'un à l'autre des avantages associés à la catégorie active.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485689
Réf. : Cass. soc., 1er juin 2023, n° 21-23.438, F-B N° Lexbase : A64019XD
Lecture: 2 min
N5657BZK
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Charlotte Moronval
Le 07 Juin 2023
► L'octroi de dommages et intérêts pour licenciement nul en lien avec des faits de harcèlement moral ne saurait faire obstacle à une demande distincte de dommages et intérêts pour harcèlement moral.
Faits et procédure. Un salarié est licencié.
Estimant avoir été victime de faits de harcèlement moral, il saisit la juridiction prud'homale et sollicite diverses sommes au titre de la rupture de son contrat de travail et de dommages et intérêts pour harcèlement moral.
La cour d’appel prononce la nullité du licenciement mais déboute le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral, aux motifs :
Dès lors, le salarié ne saurait obtenir deux indemnités, l'une pour le harcèlement moral et l'autre pour le licenciement nul.
La position de la Cour de cassation. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale censure l’arrêt des juges du fond.
Elle juge que l'octroi de dommages et intérêts pour licenciement nul en lien avec des faits de harcèlement moral ne saurait faire obstacle à une demande distincte de dommages et intérêts pour harcèlement moral.
Pour aller plus loin :
|
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485657
Réf. : Ordonnance n° 2023-393, du 24 mai 2023, portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales N° Lexbase : L7325MHR
Lecture: 3 min
N5588BZY
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Perrine Cathalo
Le 07 Juin 2023
► Publiée au Journal officiel du 25 mai 2023, l’ordonnance n° 2023-393, du 24 mai 2023, portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales, réforme le régime des opérations transfrontalières afin de permettre leur réalisation dans un cadre harmonisé.
Pour mémoire, l’article 13 de la loi « DDADUE » du 9 mars dernier (loi n° 2023-171, portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture N° Lexbase : L1222MHQ) a habilité le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les mesures, relevant du domaine de la loi, nécessaires pour transposer la Directive n° 2019/2121, du 27 novembre 2019, modifiant la Directive n° 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières N° Lexbase : L8766LTT dans un délai de trois mois.
L’ordonnance introduit ainsi, aux côtés de la procédure de fusion transfrontalière existante, la possibilité pour une société de transférer son siège dans un autre État membre tout en conservant sa personnalité juridique. Elle lui permet aussi de se scinder en plusieurs sociétés immatriculées dans des États membres différents. Elle procède également à cette occasion à une harmonisation des procédures applicables aux sociétés qui fusionnent avec une ou plusieurs sociétés constituées dans un autre État membre.
Il s’agit globalement de faciliter la réalisation de ces opérations au sein de l'espace européen, en mettant en place une procédure commune. Celle-ci prévoit notamment une étape de préparation (rédaction d’un projet commun d’opération, rapport des dirigeants, vérification par une expertise indépendante…) et des règles de protection des salariés, des créanciers et des actionnaires. Le texte confie par ailleurs aux greffiers des tribunaux de commerce un rôle de contrôle des éventuelles fraudes, pour lequel ils pourront le cas échéant s’appuyer sur les autorités fiscales ou sociales.
L’introduction de ces dispositions pour les opérations transfrontalières a été l’occasion d’une mise en cohérence avec les dispositions nationales applicables aux opérations réalisées entre sociétés françaises. Est ainsi introduit au niveau national le mécanisme de la scission partielle qui permet d’attribuer les actions perçues en rémunération de l’apport directement aux associés de la société apporteuse.
Par cette réforme, les sociétés françaises et européennes disposeront d’un cadre commun rénové et clair pour mener à bien leurs opérations. Les salariés, créanciers ou actionnaires, verront quant à eux leurs intérêts mieux protégés et les éventuelles fraudes ou abus feront l’objet d’un contrôle spécifique organisé.
Afin de permettre aux sociétés concernées de s’adapter à l’ensemble de ce nouveau cadre et de ne pas perturber les opérations en cours, les nouvelles dispositions s’appliqueront aux opérations dont le projet est déposé au greffe du tribunal de commerce à compter du 1er juillet 2023.
Pour en savoir plus :
|
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485588
Réf. : Cass. civ. 3, 25 mai 2023, n° 22-12.870, FS-B N° Lexbase : A59809WE
Lecture: 2 min
N5773BZT
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Anne-Lise Lonné-Clément
Le 10 Juin 2023
► Le respect de l'obligation de délivrance conforme du vendeur d'un terrain vendu comme étant constructible s'apprécie à la date du transfert de propriété, au regard des dispositions du plan local d'urbanisme en vigueur à cette date, les modifications adoptées antérieurement par délibération du conseil municipal mais non encore publiées n'étant pas applicables.
Le transfert de propriété s’opère lors de la signature de l'acte de vente ; la stricte application de cette règle de droit conduit, en l'espèce, à une solution malheureuse pour les acquéreurs d’un terrain à bâtir, qui se retrouvent quelques jours après (neuf jours très exactement) finalement propriétaires d’un terrain inconstructible ; au contraire, la venderesse pourra s’estimer chanceuse.
Faits et procédure. En l’espèce, par acte authentique du 31 janvier 2012, une femme vend un terrain à bâtir à un couple d’acquéreurs.
Selon le certificat d'urbanisme obtenu le 9 janvier 2012, ce terrain était classé en zone Ui du plan local d'urbanisme (PLU) approuvé le 15 juin 2006 et mis en révision le 29 avril 2008.
Ayant découvert que le terrain était classé en zone AN et AH du PLU tel que modifié par décision du 27 janvier 2012, et comme tel devenu inconstructible, l’acquéreuse (devenue seule propriétaire du bien après divorce) a assigné la venderesse en paiement de dommages et intérêts pour manquement à son obligation de délivrance conforme et inapplicabilité de la clause limitative de responsabilité prévue au contrat, ainsi que le notaire pour manquement à son devoir de conseil.
Solution. Ayant relevé que l'objet de la vente était un terrain à bâtir, la cour d'appel de Chambéry, approuvée par la Cour suprême, a exactement retenu que, le transfert de propriété s'étant opéré lors de la signature de l'acte de vente, il convenait de se situer à la date du 31 janvier 2012 pour apprécier si la venderesse avait satisfait à son obligation de délivrance.
Ayant constaté que le PLU modifié, adopté par délibération du conseil municipal du 27 janvier 2012, avait été publié le 9 février 2012, elle a retenu à bon droit, selon la Haute juridiction, que cette date étant celle à laquelle il était entré en vigueur et devenu opposable, le bien vendu était un terrain à bâtir au jour de sa délivrance.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:485773