Réf. : Cass. civ. 1, 15 février 2023, n° 21-18.498, F-D N° Lexbase : A46489DI
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N4520BZG
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par Anne-Lise Lonné-Clément
Le 13 Mars 2023
► Après avoir constaté que l'enfant avait été entendu par une des conseillères, la cour d'appel, qui n'était tenue ni de préciser la teneur des sentiments exprimés par l'enfant lors de son audition ni qu'elle avait pris en considération les sentiments exprimés par celui-ci, a retenu qu'afin de ne pas supprimer irrémédiablement tout rattachement des trois enfants à leur lignée paternelle au seul motif de l'absence de lien entre la mère des enfants et ses beaux-parents, un droit de correspondance et un droit d'accueil devaient être accordés à ces derniers.
Pour rappel, c’est l’article 371-4 du Code civil N° Lexbase : L8011IWM qui constitue le fondement d’une demande d’octroi d’un droit de visite et/ou d’hébergement par des grands-parents à l’égard d’un enfant. Les exemples jurisprudentiels d’application de ce texte concernant le plus souvent des refus d’octroi d’un droit aux grands-parents, l’arrêt rendu le 15 février 2023 mérite d’être relevé, en ce qu’il s’agit d’un cas d’octroi par le juge d’un droit d’accueil et de correspondance, malgré l’avis contraire exprimé par l’enfant mineur capable de discernement.
En l’espèce, la mère faisait grief à l'arrêt d'accorder un droit de visite aux grands-parents paternels, à l'égard de l’enfant, et de leur allouer un droit de correspondance par téléphone ou par courrier, alors que celui-ci « âgé de 13 ans, avait indiqué lors de son audition qu'il ne souhaitait revoir ni ses grands-parents ni ses cousins paternels, qu'il ne voulait pas aller chez ses grands-parents, qu'il ne voulait pas les voir et qu'il vivait bien mieux sans eux ».
Elle faisait notamment valoir que le juge doit prendre en considération les sentiments exprimés par l'enfant mineur, eu égard à son âge et son degré de maturité. Elle reprochait ainsi à la cour d’appel de Bordeaux de s’être prononcée, sans préciser, ni si elle avait tenu compte des sentiments exprimés par le mineur, et a fortiori ni les opinions exprimées par l’enfant lors de son audition.
Mais l’argument est écarté par la Cour suprême, qui indique très clairement que le juge n’est tenu :
Elle avait alors valablement justifié sa décision en retenant, après avoir constaté que l'enfant avait été entendu par une des conseillères, qu'afin de ne pas supprimer irrémédiablement tout rattachement des trois enfants à leur lignée paternelle au seul motif de l'absence de lien entre la mère des enfants et ses beaux-parents, un droit de correspondance et un droit d'accueil devaient être accordés à ces derniers.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les relations de l'enfant avec un tiers, spéc. Les relations de l'enfant avec ses grands-parents, in L’autorité parentale, (dir. A. Gouttenoire), Lexbase N° Lexbase : E8897B4B. |
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Réf. : Cass. civ. 1, 1er mars 2023, n° 21-17.018, FS-B N° Lexbase : A17819G3
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N4573BZE
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par Jérôme Lasserre-Capdeville
Le 13 Mars 2023
►En application de l’article L. 312-2 du Code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2010-737, du 1er juillet 2010, un emprunt qui n’est qu’accessoirement affecté au remboursement de précédents crédits immobiliers n’entre pas dans le champ d'application des dispositions du Code de la consommation relatives aux crédits immobiliers.
Aujourd'hui, l’étendue exacte du champ d’application du crédit immobilier ressort de quatre articles du Code de la consommation : l’article L. 313-1 N° Lexbase : L3398K7Y qui prévoit les opérations incluses dans le champ d’application, mais aussi l’article L. 313-2 N° Lexbase : L3397K7X qui mentionne, à l’inverse, les opérations qui en sont exclues, et enfin les articles L. 314-11 N° Lexbase : L3205K7T et L. 314-12 N° Lexbase : L3204K7S qui envisagent l’hypothèse particulière du regroupement de crédits. Plusieurs critères ont vocation à jouer en la matière, et plus particulièrement l’affectation du crédit, voire, depuis l’ordonnance n° 2016-351, du 25 mars 2016 N° Lexbase : L2937K7W, la présence d’une garantie réelle sur le bien.
Des incertitudes demeurent cependant en la matière, notamment en présence de faits plus anciens, c’est-à-dire antérieurs à cette même ordonnance. Une décision de la première chambre civile du 1er mars 2023 en témoigne.
Faits et procédure. En l’espèce, le 13 avril 2007, M. W. avait, par l’intermédiaire de la société A., souscrit auprès de la banque luxembourgeoise N. un prêt de 3 800 000 euros garanti par une hypothèque. Ce prêt, remboursable in fine au terme de dix années, au taux variable, libellé en euros et converti en francs suisses, était destiné, d’une part, au remboursement par anticipation de prêts immobiliers consentis par la société C. à hauteur de 486 420,04 euros, d’autre part, à la satisfaction d’un besoin en trésorerie à hauteur de 600 000 euros, enfin, au placement d’une somme de 2 570 000 euros sur un contrat d'assurance-vie nanti au profit de la banque et souscrit auprès de la société L.
Le 11 janvier 2008, invoquant la méconnaissance de dispositions du Code de la consommation relatives aux crédits immobiliers ainsi que l'irrégularité du taux effectif global, l’emprunteur avait assigné la banque et l’intermédiaire en nullité du prêt et de la stipulation d’intérêts, subsidiairement en déchéance de la banque de son droit aux intérêts conventionnels, ainsi qu'en responsabilité et indemnisation.
On précisera qu’en cours d’instance, la banque avait été placée en liquidation judiciaire. La société KPMG Luxembourg avait été alors désignée en qualité de liquidateur.
Toutefois, la cour d’appel de Nîmes n’ayant pas donné raison à M. W., ce dernier avait formé un pourvoi en cassation.
Décision. Plusieurs moyens, et avec eux les réponses données par la Cour, attirent alors l’attention.
En premier lieu, l’emprunteur faisait grief à l’arrêt d’avoir rejeté sa demande en nullité de la convention de prêt conclue le 13 avril 2007 et, en conséquence, de l’avoir condamné à payer à la société KPMG Luxembourg, en sa qualité de liquidateur de la banque, la somme de 4 829 936,32 euros avec intérêts au taux du Libor majoré de 1,8 % à compter du 26 juin 2019.
M. W. prétendait alors qu'est soumis aux dispositions du Code de la consommation relatives au crédit immobilier, le prêt qui est en partie affecté au remboursement par anticipation de prêts antérieurement souscrits par l'emprunteur pour la réalisation de travaux de réparation et d'amélioration sur l'immeuble qu’il avait acquis. De même, il alléguait qu’en toute hypothèse est soumis aux dispositions du Code de la consommation relatives au crédit immobilier le prêt qui est principalement affecté au financement d’une opération de nature immobilière.
La Cour de cassation ne lui donne cependant pas raison.
Elle commence par rappeler le contenu de l’article L. 312-2 du Code de la consommation N° Lexbase : L6657IMI, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2010-737, du 1er juillet 2010.
Elle note ensuite qu’ayant constaté que le prêt litigieux d’un montant 3 800 000 euros avait pour objet de rembourser, à concurrence de 429 800 euros, deux emprunts immobiliers contractés auprès d’une autre banque, de procurer 600 000 euros de trésorerie à l’emprunteur et de financer la souscription simultanée d'un contrat d’assurance-vie à hauteur de 2 750 000 euros, la cour d’appel avait considéré que le concours constituait un investissement financier destiné à effacer les effets négatifs du précédent emprunt immobilier.
Elle en avait alors exactement déduit que le prêt litigieux, qui n’était qu’accessoirement affecté au remboursement de précédents crédits immobiliers, n’entrait pas dans le champ d’application des dispositions du Code de la consommation relatives aux crédits immobiliers. Le moyen n’était donc pas fondé.
Cette solution est importante. Il en résulte, en effet, que ce n’est que si le crédit est principalement affecté au remboursement d’un crédit immobilier que le droit régissant ce dernier est applicable. Une question se pose alors : à partir de quel pourcentage peut-on parler de financement principalement affecté ? Plus de 50 % ? Il est dommage que la Haute juridiction ne nous donne aucune indication sur ce point.
En second lieu, l’emprunteur faisait grief à l’arrêt d’avoir rejeté sa demande de déchéance totale de tout droit, pour la banque, aux intérêts conventionnels et, en conséquence, de l’avoir condamné à payer à la société KPMG Luxembourg, en sa qualité de liquidateur de la banque, la somme de 4 829 936,32 euros avec intérêts au taux du Libor majoré de 1,8 % à compter du 26 juin 2019, alors que les frais relatifs à un contrat d'assurance sur la vie sont intégrés dans la détermination du taux effectif global lorsque la souscription d'un tel contrat est imposée à l'emprunteur comme une condition de l'octroi du prêt. Dès lors, en énonçant, pour exclure les frais de l’assurance-vie de l’assiette de calcul du taux effectif global, que ceux-ci faisaient l’objet d’un contrat et d’un placement distincts, la cour d'appel se serait prononcée par des motifs inopérants et aurait, dès lors, violé l’article L. 313-1 du Code de la consommation N° Lexbase : L1517HIZ, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-346, du 23 mars 2006, applicable au litige.
Ici encore, la Haute juridiction n’est pas convaincue.
La Cour de cassation commence par rappeler le contenu de l’ancien article L. 313-1 du Code de la consommation, visant les éléments à prendre en considération pour calculer le TEG. Elle considère alors qu’il en résulte que, lorsque la souscription d'un contrat d'assurance sur la vie est imposée par le prêteur comme condition d’octroi du prêt, la prime d'assurance, qui fait partie des frais indirects au sens du texte susvisé, doit être prise en compte pour la détermination du taux effectif global.
Or, ayant constaté que la majeure partie de la somme empruntée était destinée à financer la souscription du contrat d’assurance-vie et faisait ainsi ressortir que cet investissement constituait l’objectif poursuivi par l’emprunteur, la cour d'appel, appréciant souverainement la commune intention des parties, avait pu en déduire « que cette circonstance excluait que la souscription de l’assurance-vie ait été une condition mise à l'octroi du prêt ». Le moyen n’était donc pas fondé.
Cette solution emporte notre adhésion. Seuls les frais liés à l’assurance imposée par le prêteur pour pouvoir bénéficier du crédit doivent être comptabilisés dans le TEG (v. par ex., Cass. civ. 1, 23 novembre 2004, n° 02-13.206, F-P+B N° Lexbase : A0245DES ; Cass. civ. 1, 13 novembre 2008, n° 07-17.737, F-P+B N° Lexbase : A2325EBQ). Or, tel n’était pas le cas, manifestement, en l’espèce.
En dernier lieu, l’emprunteur faisait le même grief à l’arrêt des juges du fond, alors que le taux de période et la durée de la période doivent être expressément communiqués à l’emprunteur et que le défaut de communication de ces informations est sanctionné par la déchéance, totale ou partielle, du droit aux intérêts conventionnels. Dès lors, en énonçant, pour rejeter la demande de déchéance des intérêts formée par M. W., que les parties avaient expressément fait référence à l’article R. 313-1 du Code de la consommation N° Lexbase : L6959ABD pour le calcul du taux effectif global et que les exigences de ce texte devaient être respectées mais que la mention du taux de période n’était en revanche pas obligatoire, la cour d’appel aurait violé l’article R. 313-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-297, du 10 juin 2002, applicable au litige.
Or, ce moyen se révèle en revanche utile. Il parvient, en effet, à convaincre la Haute juridiction qui casse et annule la décision des juges du fond en ce qu’elle avait condamné M. W. à payer à la société KPMG Luxembourg, en qualité de liquidateur de la société N., la somme de 4 829 936,32 euros avec intérêts au taux du Libor majoré de 1,8 % à compter du 26 juin 2019.
Pour la Cour de cassation, en effet, il résulte des articles L. 313-4 du Code monétaire et financier N° Lexbase : L8244IMB, L. 313-1 et R. 313-1 du Code de la consommation, les deux premiers textes dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2010-737, du 1er juillet 2010 et le dernier dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2011-135, du 1er février 2011, qu’à l’occasion de la conclusion d’une opération de crédit, le prêteur est tenu de communiquer à l’emprunteur, de manière expresse, le taux de période et la durée de celle-ci.
Pour rejeter la demande de déchéance de la banque de son droit aux intérêts contractuels, la cour d’appel de Nîmes avait retenu que, si les parties avaient expressément fait référence, dans leur convention, à l’article R. 313-1 du Code de la consommation pour le calcul du taux effectif global et que les exigences de ce texte devaient être respectées, la mention du taux de période n’était, en revanche, pas obligatoire.
Dès lors, en statuant ainsi, la cour d’appel avait violé les textes précités.
Cette solution est tout aussi convaincante que les précédentes. En effet, au moment des faits, l’obligation de mentionner le taux de période et la durée de période s’imposait à l’ensemble des contrats de prêt. Il en allait, par exemple, ainsi, à l’égard des prêts destinés à financer des opérations immobilières consentis à une société (Cass. civ. 1, 19 septembre 2007, n° 06-18.924, F-D N° Lexbase : A4308DY9 ; Cass. civ. 1, 1er juin 2016, n° 15-15.813, F-D N° Lexbase : A8710RRZ).
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Réf. : Cass. civ. 3, 15 février 2023, n° 21-24.024, F-D N° Lexbase : A46669D8
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N4610BZR
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par Anne-Lise Lonné-Clément
Le 15 Mars 2023
► Ayant constaté que la bailleresse, qui avait seule mandaté l'huissier de justice, n'avait procédé à l'état des lieux de sortie qu'après le départ de la locataire à l'expiration du délai de préavis, en dépit des sollicitations en temps utile de celle-ci, la cour d'appel a pu en déduire que sa demande de partage des frais d'établissement de l'état des lieux devait être rejetée.
En l’espèce, les locataires d'une maison d'habitation avaient donné congé puis quitté les lieux ; par déclaration au greffe, la locataire avait sollicité la restitution du dépôt de garantie. La bailleresse avait assigné les locataires en paiement de dégradations locatives. Elle demandait par ailleurs le partage par moitié des frais d’huissier d'établissement de l'état des lieux de sortie.
L’article 3-2 de la loi du 6 juillet 1989 N° Lexbase : L8461AGH dispose en effet que « si l'état des lieux ne peut être établi contradictoirement et amiablement par les parties ou par un tiers mandaté par elles, il est établi par un huissier de justice, sur l'initiative de la partie la plus diligente, à frais partagés par moitié entre le bailleur et le locataire et à un coût fixé par décret en Conseil d'État ».
Cette demande est toutefois rejetée par la cour d’appel, approuvée par la Cour suprême, qui avait constaté que la bailleresse, qui avait seule mandaté l'huissier de justice, n'avait procédé à l'état des lieux de sortie qu'après le départ de la locataire à l'expiration du délai de préavis, en dépit des sollicitations en temps utile de celle-ci. Selon la Haute juridiction, elle avait à en déduire que sa demande de partage des frais d'établissement de l'état des lieux devait être rejetée.
On peut donc retenir de cet arrêt que la responsabilité d’une des parties quant à l'absence d’établissement d'un état des lieux à l’amiable peut donc être retenue pour justifier que l’entièreté des frais soit mis à sa charge.
À noter qu’à l’inverse, dans un arrêt rendu le 4 juillet 2019 (Cass. civ. 3, 4 juillet 2019, n° 18-18.905, F-D N° Lexbase : A3037ZIC), la Cour de cassation avait retenu que viole les dispositions précitées, le jugement qui, pour condamner la locataire au paiement de la totalité du constat d'état des lieux de sortie, retient qu'en l'absence d'état des lieux de sortie amiable rendu impossible par la carence de la locataire, dûment convoquée, la bailleresse a dû faire appel aux services d'un huissier de justice dont les frais resteront à la charge de la locataire.
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Réf. : Cass. com., 8 mars 2023, n° 21-18.829, F-B N° Lexbase : A08959HM
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N4642BZX
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par Vincent Téchené
Le 15 Mars 2023
► Lorsqu'un acte frauduleux a eu pour effet de soustraire un bien du patrimoine du débiteur soumis à la liquidation judiciaire et de réduire ainsi le gage commun des créanciers, le liquidateur, qui représente l'intérêt collectif des créanciers, a qualité pour exercer l'action paulienne, y compris lorsque la répartition des dividendes profite exclusivement à certains des créanciers.
Faits et procédure. La société Akerys s'est engagée courant 2004 à acheter à la société A3X deux parcelles de terrains pour lesquels elle a versé une indemnité d'immobilisation. La vente n'ayant pu se réaliser, la société Akerys a assigné la société A3X en remboursement de cette indemnité. Par ailleurs, en 2010, la société Groupe Pacfa, qui avait convenu avec la société A3X d'un projet de promotion immobilière portant sur les parcelles litigieuses moyennant le versement d'un acompte, a demandé le remboursement de ce dernier à la société A3X après l'échec de l'opération, le montant étant garanti par une hypothèque de premier rang sur les parcelles.
Le 13 juin 2012, la société A3X, représentée par son gérant, a effectué un apport en nature des terrains litigieux à la société Sainte Germaine, représentant la quasi-totalité des parts d'une société constituée avec la fille de ce dernier, laquelle a, le 21 août suivant, acquis de la société A3X la quasi-totalité des parts de cette dernière. Les dernières parts ont été cédées à l'épouse du gérant le 31 mars 2013.
Les 23 et 30 août 2013, la société Akerys, qui avait été autorisée à inscrire une hypothèque provisoire de second rang sur les immeubles litigieux à l'encontre de la société Sainte Germaine, a assigné cette dernière ainsi que la société A3X en inopposabilité de l'apport en société sur le fondement de la fraude paulienne.
Les 5 avril et 5 juillet 2016, la société A3X a été mise en redressement puis liquidation judiciaires. Le 10 avril 2017, le liquidateur a assigné la société Sainte Germaine « en nullité pour fraude paulienne » de l'apport en nature précité.
La cour d’appel a déclaré l’apport litigieux inopposable à la procédure collective de la société A3X, pour cause de fraude paulienne. La débitrice a alors formé un pourvoi en cassation.
Décision. La Cour de cassation rejette le pourvoi.
Elle retient que le liquidateur, qui représente l'intérêt collectif des créanciers en application de l'article L. 622-20 du Code de commerce N° Lexbase : L7288IZX, rendu applicable à la liquidation judiciaire par l'article L. 641-4 du même code N° Lexbase : L3692MBD, a qualité pour exercer l'action paulienne contre un acte frauduleux ayant eu pour effet de soustraire un bien du patrimoine du débiteur soumis à la liquidation judiciaire et de réduire ainsi le gage commun des créanciers, y compris lorsque la répartition des dividendes profite exclusivement à certains d'entre eux.
Les juges d’appel ont relevé que la débitrice a transféré, sous le couvert d'un apport en nature, son patrimoine immobilier dans celui de la société Sainte Germaine, puis elle s’est dépouillée progressivement de l'ensemble de ses parts sociales de cette société au bénéfice des parents de son gérant au moyen d'une compensation fictive dénuée de contrepartie. Par conséquent, pour les juges du fond, la débitrice a accompli un acte en fraude aux droits de ses créanciers. La cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision de déclarer l’apport en nature inopposable à la procédure collective, peu important que cette inopposabilité ne profite à l'ensemble des créanciers.
La Cour de cassation approuve ainsi les juges d’appel.
Observations. La possibilité pour les organes de la procédure d’exercer l’action paulienne est connue de longue date. Ainsi en est-il notamment pour le mandataire judiciaire et le commissaire à l'exécution du plan (v. not. Cass. com., 13 novembre 2001, n° 98-18.292, FS-P N° Lexbase : A0871AXK), ou encore, comme dans l’arrêt rapporté, pour le liquidateur (v. déjà, Cass. civ. 1, 13 juillet 2004, n° 03-10.292, F-D N° Lexbase : A1126DD3). Par ailleurs, l’article L. 622-20 du Code de commerce prévoit qu’en cas de carence du mandataire judiciaire, tout créancier nommé contrôleur peut agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers. En conséquence, il pourra également exercer l'action paulienne.
L'accueil de la fraude paulienne ne porte pas atteinte à l'acte frauduleux qui demeure valable entre le débiteur auteur et le tiers complice de la fraude (Cass. com., 14 mai 1996, n° 94-11.124, publié au bulletin N° Lexbase : A2399ABH), mais il entraînera une inopposabilité de l’acte à l’égard des créanciers (Cass. com., 8 octobre 1996, n° 93-14.068, publié au bulletin N° Lexbase : A9353ABZ ; Cass. com., 2 novembre 2005, n° 04-16.232, FS-P+B N° Lexbase : A3456DLL).
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : L'action paulienne, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E6394YX4. |
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Réf. : Loi n° 2023-175, du 10 mars 2023, relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables N° Lexbase : L1382MHN
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N4649BZ9
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par Yann Le Foll
Le 15 Mars 2023
► La loi n° 2023-175, du 10 mars 2023, relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, publiée au Journal officiel du 11 mars 2023, vise pour atteindre cet objectif à libérer le foncier nécessaire, accélérer le déploiement de l’éolien en mer et améliorer le financement et l’attractivité des projets d’énergie renouvelable.
Elle vise tout d’abord à la prise de mesures favorisant l’appropriation territoriale des énergies renouvelables et leur bonne insertion paysagère, les projets devant prendre en compte les paysages vécus et leurs composantes naturelles, historiques et socio-culturelles et limiter les effets de saturation visuelle.
Elle vise ensuite à accélérer les projets industriels nécessaires à la transition énergétique. La carte communale peut délimiter des secteurs dans lesquels est soumise à conditions l'implantation d'installations de production d'énergies renouvelables, dès lors qu'elles sont incompatibles avec le voisinage habité ou avec l'usage des terrains situés à proximité ou qu'elles portent atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à la qualité architecturale, urbaine et paysagère, à la mise en valeur du patrimoine et à l'insertion des installations dans le milieu environnant.
Elle comprend ensuite des mesures tendant à l’accélération du développement de l’énergie solaire, thermique, photovoltaïque et agrivoltaïque. Ainsi, les ouvrages nécessaires à la production d'énergie solaire photovoltaïque ou thermique peuvent être autorisés sur des friches ou des bassins industriels de saumure saturée.
Cette autorisation est subordonnée à la condition que le projet ne soit pas de nature à porter atteinte à l'environnement, notamment à la biodiversité ou aux paysages et à la salubrité ou à la sécurité publiques, en fonctionnement normal comme en cas d'incident ou d'accident. En outre, les parcs de stationnement extérieurs d'une superficie supérieure à 1 500 mètres carrés sont équipés, sur au moins la moitié de cette superficie, d'ombrières intégrant un procédé de production d'énergies renouvelables sur la totalité de leur partie supérieure assurant l'ombrage.
Elle comprend enfin des mesures tendant à l’accélération du développement des installations de production et des mesures transversales de financement des énergies renouvelables et de récupération de partage de la valeur.
Précision. La loi avait été validée par les Sages, exception faite de quelques cavaliers législatifs (Cons. const., décision n° 2023-848 DC, du 9 mars 2023 N° Lexbase : A14159HU).
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Réf. : Cass. civ. 3, 1er mars 2023, n° 22-12.455, FS-B N° Lexbase : A18019GS
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N4595BZ9
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par Yann Le Foll
Le 13 Mars 2023
► Le droit de priorité prévu par l'article L. 424-2 du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique N° Lexbase : L8034I4C ne s'applique pas aux portions de parcelles non utilisées pour l'usage prévu par la déclaration d'utilité publique, si l'essentiel des parcelles expropriées a reçu cette destination.
Faits. Plusieurs terrains agricoles appartenant à un couple de particuliers ont été expropriés au profit du département de l'Essonne aux fins de réalisation d'une infrastructure routière déclarée d'utilité publique. Après réalisation des travaux, le département a vendu à la société X des reliquats de parcelles non utilisés ayant appartenu aux intéressés. Ces derniers ont assigné le département en indemnisation des préjudices résultant de la méconnaissance de leur droit de priorité, demande rejetée par l’arrêt attaqué (CA Paris, 4-7, 9 décembre 2021, n° 20/07611 N° Lexbase : A65727E7).
Position CCass. La cour d'appel a relevé, à bon droit, que le droit de priorité prévu par l'article L. 424-2 du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ne trouve sa cause qu'en cas de non-affectation de la parcelle expropriée au but d'intérêt général défini par la déclaration d'utilité publique et se rattache au droit de rétrocession prévu à l'article L. 421-1 du même code N° Lexbase : L8022I4U et, comme lui, ne s'applique pas aux portions de parcelles non utilisées pour l'usage prévu par la déclaration d'utilité publique si l'essentiel des parcelles expropriées a reçu cette destination.
Ayant retenu que les anciennes parcelles en cause non affectées à l'usage prévu par la déclaration d'utilité publique ne représentaient que 3,2 % de la surface totale de l'opération d'expropriation, elle en a exactement déduit que la condition de non-affectation à l'usage prévu n'était pas remplie et que les expropriés ne bénéficiaient pas d'un droit de priorité lors de la cession à un tiers des parcelles concernées (sur l’impossibilité de renoncer à l’avance au droit de rétrocession, voir Cass. civ. 3, 19 janvier 2022, n° 20-19.351, FS-B N° Lexbase : A77047I8).
D'autre part, la cour d'appel, qui a retenu que l'expropriant avait réalisé l'opération en conformité avec le projet déclaré d'utilité publique, que les biens expropriés avaient été affectés dans leur quasi-totalité à l'usage prévu par ce projet d'intérêt général et que, dans ces conditions, les expropriés ne bénéficiaient pas d'un droit de priorité, n'a pas indûment privé ces derniers d'une plus-value.
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Réf. : Cass. soc., 15 février 2023, n° 22-10.398, F-D N° Lexbase : A45009DZ
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par Charlotte Moronval
Le 13 Mars 2023
► La négligence fautive d’un chef de chantier ayant 22 ans d’ancienneté, qui s’abstient de vérifier que les opérations de branchement électrique sont réalisées en conformité avec les règles de sécurité, compte tenu de la dangerosité potentielle des travaux, rend impossible son maintien dans l’entreprise et justifie son licenciement pour faute grave.
Faits et procédure. Un chef de chantier, disposant d’une ancienneté de 22 ans, est licencié pour faute grave.
Alors qu’il était présent sur un chantier lors de travaux de tranchée et branchements électriques effectués par des salariés qui disposaient de moins de compétences et de responsabilités que lui, il entrait dans ses missions de s'assurer que les opérations étaient réalisées en conformité des règles de sécurité en vigueur dont il avait parfaitement connaissance, compte tenu notamment de la dangerosité potentielle des travaux. S'il n'avait pas volontairement manqué avec les règles de conformité, c'était l'absence de vérification de la conformité des branchements qui était fautive et qui constituait une violation de ses obligations professionnelles d'une importance telle qu'elle rendait impossible son maintien au sein de l'entreprise
Le salarié conteste ce licenciement. Selon lui, ce mauvais contrôle des travaux relevait tout au plus de la négligence et de l'insuffisance professionnelle.
Pour la cour d’appel, le licenciement pour faute grave est valide. En effet, elle :
Il en résultait une négligence fautive de la part du salarié et ce manquement à ses obligations professionnelles rendait impossible son maintien dans l’entreprise.
Le salarié forme un pourvoi en cassation.
La solution. La Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le salarié et approuve la décision des juges d’appel. La négligence de ce salarié était bien constitutive d’une faute grave.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La cause réelle et sérieuse de licenciement pour motif personnel, La faute grave du salarié, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E5682ZNR. |
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Réf. : Loi n° 2023-171, du 9 mars 2023, portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture N° Lexbase : L1222MHQ
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par Lisa Poinsot
Le 16 Mars 2023
► Publié au Journal officiel du 10 mars 2023, la loi n° 2023-171, du 9 mars 2023, dite loi « DDADUE », transposte plusieurs Directives européennes et met en cohérence le droit national français avec un certain nombre de règlements européens.
Les périodes d’essai fixées par les accords de branche plus longues que celles prévues par la loi sont supprimées.
À noter. Cette mesure entre en vigueur six mois après la promulgation de la loi, soit le 10 septembre 2023.
Pour aller plus loin :
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La loi transpose la Directive n° 2019/1158, du 20 juin 2019, concernant l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants N° Lexbase : L0265LRA qui fixe des exigences minimales « conçues pour parvenir à l’égalité entre les hommes et les femmes en ce qui concerne les opportunités sur le marché du travail et le traitement au travail, en facilitant la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale pour les travailleurs qui sont parents ou les aidants ».
→ Congé paternité et d’accueil de l’enfant :
Pour aller plus loin :
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→ Congé parental :
Pour aller plus loin :
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→ Le congé proche aidant et le congé de solidarité familiale : la loi étend aux salariés des particuliers employeurs (C. trav., art. L. 7221-1 N° Lexbase : L7371K9U) et aux assistants maternels la possibilité de bénéficier de ces congés.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Le congé de proche aidant, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E0177ETQ. |
La loi transpose la Directive n° 2019/1152, du 20 juin 2019, relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l’Union européenne N° Lexbase : L0121LRW.
→ Informations sur les éléments essentiels de la relation de travail :
Rappel. Le droit du travail français prévoit déjà la communication aux salariés d’informations par la déclaration préalable à l’embauche ou par le bulletin de paie.
Plusieurs documents doivent être remis au salarié lors de son embauche pour lui transmettre des informations complémentaires (C. trav., art. L. 1221-5-1 N° Lexbase : L1579MHX). Un décret devra fixer la liste des informations devant figurer dans ces documents.
À noter. Les salariés dont le contrat de travail est en cours à la date de promulgation de la présente loi peuvent demander à leur employeur de leur fournir ou de compléter, selon des modalités fixées par décret, les informations principales relatives à la relation de travail. |
Toutefois, par dérogation, ne sont pas soumis à cette obligation, les employeurs de salariés dont le temps de travail ne dépasse pas une durée de 3 heures par semaine au cours d’une période de référence de quatre semaines et qui sont rémunérés en chèque emploi service universel (C. trav., art. L. 1271-5 N° Lexbase : L1457MHG).
Les salariés peuvent par ailleurs former un recours juridictionnel pour obtenir le respect de cette obligation d’information. La recevabilité de ce recours est conditionnée à l’exigence d’une mise en demeure préalable du salarié à son employeur.
→ Procédures d’information obligatoire sur les emplois à durée indéterminée ou à temps plein :
La loi impose à l’employeur d’informer les salariés en CDD ou intérimaires, justifiant d’une ancienneté continue d’au moins six mois, et les salariés à temps partiel des emplois disponibles à durée indéterminée ou à temps plein dans l’entreprise (C. trav., art. L. 1251-25 N° Lexbase : L1583MH4 et L. 1242-17 N° Lexbase : L1582MH3). Un décret devra fixer les modalités d’application.
Pour aller plus loin :
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La loi prévoit la mise en œuvre du Règlement européen n° 2019/1238, du 20 juin 2019, relatif à un produit paneuropéen d’épargne-retraite individuelle (PEPP) N° Lexbase : L5388LRY.
Le Règlement indique que «les pensions de retraite représentent une part essentielle du revenu des retraités et, pour de nombreuses personnes, une prestation de retraite suffisante fait la différence entre passer ses vieux jours à l’abri du besoin ou dans la pauvreté. Elles sont une condition préalable à l’exercice des droits fondamentaux énoncés dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, notamment à l’article 25 sur les droits des personnes âgées qui dispose que "l’Union reconnaît et respecte le droit des personnes âgées à mener une vie digne et indépendante et à participer à la vie sociale et culturelle"».
Le fonctionnement et le régime fiscal et social du PEPP sont alignés sur le plan d’épargne retraite individuel (PER individuel).
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les dispositifs d’épargne salariale, Le plan d’épargne retraite individuel, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E18543LA. |
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