Réf. : Cass. civ. 1, 8 mars 2023, n° 22-10.679, FS-B+L N° Lexbase : A92219GM
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N4634BZN
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par Marie Le Guerroué
Le 18 Mars 2023
► Si la loi du 31 décembre 1971 et le décret du 27 novembre 1991 prévoient une conciliation préalable à l'arbitrage du Bâtonnier, elles n'instaurent toutefois pas une procédure de conciliation obligatoire dont le non-respect serait sanctionné par une fin de non-recevoir.
Faits et procédure. Le 29 octobre 2020, à la suite de la rupture de son contrat de collaboration libérale, une avocate avait conclu une transaction avec la société PVB avocats.
Le 1er décembre 2020, elle avait, sur le fondement de l'article 142 du décret n° 91-1197, du 27 novembre 1991 N° Lexbase : L8168AID, saisi le Bâtonnier de l'Ordre des avocats de Montpellier en nullité de la transaction et en paiement d'une indemnité de préavis et d'une indemnité au titre d'un préjudice moral. Par décision du 30 décembre 2020, le Bâtonnier avait rejeté la fin de non-recevoir invoquée et tirée de l'absence de conciliation préalable, prononcé la nullité de la transaction, condamné la société PVB avocats à payer à l’avocat une indemnité de préavis et l’avocate à lui restituer l'indemnité transactionnelle, ordonné la compensation de ces sommes et alloué à cette dernière des dommages-intérêts. La société PVB avocats avait formé appel de la décision.
L’arrêt d’appel. Pour déclarer irrecevable la requête aux fins d'arbitrage formée le 1er décembre 2020 par l’avocate, l'arrêt retient que la procédure de conciliation pour les litiges nés à l'occasion d'un contrat de collaboration entre avocats est un préalable obligatoire à l'engagement de toute action contentieuse auprès du Bâtonnier et relève que celle-ci, s'étant bornée à adresser, le 6 novembre 2020, à la société PVB avocats une mise en demeure d'avoir à lui régler les sommes dues au titre de son préavis, n'a présenté aucune demande de conciliation.
Décision de la Cour de cassation. La Haute juridiction rend sa décision au visa des articles 7 de la loi n° 71-1130, du 31 décembre 1971, modifiée N° Lexbase : L6343AGZ et 142 du décret n° 91-1197, du 27 novembre 1991, modifié. Elle rappelle que selon le premier de ces textes, les litiges nés d'un contrat de travail ou d'un contrat de collaboration libérale sont, en l'absence de conciliation, soumis à l'arbitrage du Bâtonnier. Selon le second, à défaut de conciliation, le Bâtonnier du barreau auprès duquel l'avocat collaborateur ou salarié est inscrit est saisi par l'une ou l'autre des parties et l'acte de saisine précise, à peine d'irrecevabilité, l'objet du litige, l'identité des parties et les prétentions du saisissant. Si ces dispositions prévoient une conciliation préalable à l'arbitrage du Bâtonnier, elles n'instaurent toutefois pas une procédure de conciliation obligatoire dont le non-respect serait sanctionné par une fin de non-recevoir.
Elle estime par conséquent qu’en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés. La Cour casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier (voir aussi, dans le même sens, le second arrêt rendu le même jour : Cass. civ. 1, 8 mars 2023, n° 21-19.620, FS-B N° Lexbase : A92189GI).
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les rapports entre avocats et avec les professionnels de Justice, La compétence de principe du Bâtonnier dans le règlement des différends entre avocats à l'occasion de leur exercice professionnel, in La profession d’avocat, (dir. H. Bornstein), Lexbase N° Lexbase : E39613R7. |
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Réf. : Cass. civ. 1, 1er mars 2023, n° 21-20.260, F-B N° Lexbase : A17899GD
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N4571BZC
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par Jérôme Lasserre-Capdeville
Le 09 Mars 2023
► Ayant relevé que les clauses relatives à l’objet des contrats étaient parfaitement claires, s’agissant de prêts consentis en francs suisses et remboursables dans la même devise, que les emprunteurs percevaient leurs revenus en francs suisses au temps de la conclusion des contrats et qu’il n’existait aucun risque de change, une cour d’appel en déduit exactement que les clauses ne présentaient pas un caractère abusif.
L’année 2022 a été particulièrement remarquée concernant les prêts en devise. Plusieurs décisions notables ont ainsi été rendues, à leur égard, par la première chambre civile de la Cour de cassation (Cass. civ. 1, 30 mars 2022, n° 19-17.996, FS-B N° Lexbase : A64737R8, J. Lasserre-Capdeville, Lexbase Affaires, avril 2022, n° 712 N° Lexbase : N1010BZG ; v. également, Cass. civ. 1, 30 mars 2022, six arrêts, n° 19-20.574, F-D N° Lexbase : A06207SR ; n° 19-18.998, FS-D N° Lexbase : A06697SL ; n° 19-22.074, F-D N° Lexbase : A07067SX ; n° 19-18.997, FS-D N° Lexbase : A07137S9 ; n° 19-12.947, F-D N° Lexbase : A07567SS ; n° 19-20.717, F-D N° Lexbase : A08087SQ ; Cass. civ. 1, 20 avril 2022, n° 19-11.599, FS-B N° Lexbase : A08927UL, J. Lasserre-Capdeville, Lexbase Affaires, mai 2022, n° 716 N° Lexbase : N1425BZS ; Cass. civ. 1, 20 avril 2022, n° 20-16.316, FS-B N° Lexbase : A08787U3, J. Lasserre-Capdeville, Lexbase Affaires, mai 2022, n° 716 N° Lexbase : N1304BZC ; Cass. civ. 1, 7 septembre 2022, n° 20-20.826, F-B N° Lexbase : A18858HB, J. Lasserre-Capdeville, Lexbase Affaires, septembre 2022, n° 727 N° Lexbase : N2562BZW). Il est vrai qu’une jurisprudence récente de la CJUE (CJUE, 10 juin 2021, deux arrêts, aff. C-609/19 N° Lexbase : A00894W9 et aff. C-776/19 à C-782/19 N° Lexbase : A00904WA, J. Lasserre-Capdeville, Lexbase, Affaires, juin 2021, n° 680 N° Lexbase : N7922BY3) a eu des incidences notables en la matière.
Ce contentieux devrait continuer à donner lieu à des décisions remarquées. Nous en avons d’ores et déjà une illustration avec l’arrêt sélectionné.
Faits et procédure. Les faits étaient très simples. En mars 2008 et juillet 2009, la banque X., un établissement suisse, avait consenti à M. et Mme R., résidents français percevant des revenus en francs suisses, deux prêts immobiliers libellés et remboursables en francs suisses. Cependant, le 10 juillet 2017, les emprunteurs avaient assigné la banque en invoquant le caractère abusif de certaines clauses et un manquement au devoir de mise en garde.
La cour d’appel de Chambéry ne leur ayant pas donné raison par un arrêt du 27 mai 2021 (CA Chambéry, 27 mai 2021, n° 19/01334 N° Lexbase : A08484TL), les époux R. avaient formé un pourvoi en cassation.
Décision. Deux moyens étaient mis en avant.
En premier lieu, les emprunteurs faisaient grief à l’arrêt des juges du fond d’avoir rejeté leurs demandes tendant à voir déclarer abusives et réputées non écrites les clauses des contrats de prêt relatives au montant des prêts et aux modalités de paiement des échéances. Selon eux, en effet, en se bornant, pour dire que les clauses litigieuses, à savoir celles relatives aux montants des prêts et aux modalités de remboursement des échéances, qui constituaient l’objet principal de ces contrats, étaient parfaitement claires, à considérer qu’elles concernaient des prêts consentis en francs suisses, remboursables dans la même devise par des emprunteurs qui, de surcroît, percevaient leurs revenus en francs suisses au temps de la conclusion des contrats, de sorte qu’il n'existait aucun risque de change au préjudice des emprunteurs, lesquels avaient fait le choix, en toute conscience, pour financer l’achat d’un bien immobilier situé en France, de recourir à un prêt en devises, remboursable en devises, sans vérifier si les contrats exposaient de manière transparente le fonctionnement concret du mécanisme auquel se référaient les clauses concernées, de sorte que les emprunteurs pouvaient prévoir, sur la base de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques qui en découlaient pour eux, et ce par référence à un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, la cour d’appel aurait violé l’article L. 212-1 du Code de la consommation N° Lexbase : L3278K9B.
La Cour de cassation juge cependant le moyen non fondé.
Celle-ci déclare qu’après avoir relevé que les clauses « montant du prêt » et « modalités de paiement des échéances » relatives à l’objet des contrats étaient parfaitement claires concernant des prêts consentis en francs suisses, remboursables dans la même devise, que les emprunteurs percevaient leurs revenus en francs suisses au temps de la conclusion des contrats et qu’il n’existait aucun risque de change, la cour d’appel en avait exactement déduit, sans être tenue de procéder à la recherche prétendument omise, que les clauses ne présentaient pas un caractère abusif.
Cette solution ne saurait surprendre. Aux termes de l’article L. 212-1, alinéa 3, du Code de la consommation : « L'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible ». Il revient aux juges du fond de se prononcer sur cette clarté. Or, en l’occurrence, cette dernière avait bien été relevée par les magistrats de la cour d’appel de Chambéry.
En second lieu, les emprunteurs reprochaient à ce même arrêt d’avoir déclaré irrecevables comme prescrites leurs demandes fondées sur le manquement de la banque à son devoir de mise en garde, alors que l’action en responsabilité contre la banque pour manquement à son devoir de mise en garde se prescrit à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime.
La Cour de cassation donne raison aux époux R. Selon elle, il résulte de l’article 2224 du Code civil N° Lexbase : L7184IAC que l’action en responsabilité de l’emprunteur non averti à l’encontre du prêteur au titre d’un manquement à son devoir de mise en garde se prescrit par cinq ans à compter du jour du premier incident de paiement, permettant à l’emprunteur d’appréhender l’existence et les conséquences éventuelles d’un tel manquement.
Or, pour déclarer prescrite la demande de dommages et intérêts, la cour d’appel de Chambéry avait considéré que les contrats de prêt litigieux avaient été souscrits les 13 mars 2008 et 15 juillet 2009 et que les emprunteurs avaient recherché la responsabilité de la banque par assignation du 10 juillet 2017, soit plus de cinq années plus tard.
Dès lors, en statuant ainsi, la cour d’appel avait violé le texte précité. La Haute juridiction casse et annule la décision des juges du fond, en ce qu’elle avait déclaré irrecevable comme prescrite l’action en responsabilité formée par M. et Mme R. à l'encontre de la banque pour manquement à son devoir de mise en garde. L’affaire est alors renvoyée devant la cour d'appel de Grenoble qui devra se prononcer sur l’éventuel manquement au devoir de mise en garde.
Cette solution est également convaincante. Elle va dans le sens d’autres décisions dégagées ces dernières années par la Chambre commerciale (Cass. com., 22 janvier 2020, n° 17-20.819, F-D N° Lexbase : A59293CL ; Cass. com., 8 avril 2021, n° 19-12.693, F-D N° Lexbase : A12194PT) et la première chambre civile (Cass. civ. 1, 5 janvier 2022, n° 20-18.893, FS-B N° Lexbase : A42197HQ, V. Téchené, Lexbase Affaires, janvier 2022, n° 701 N° Lexbase : N9989BYM) de la Cour de cassation.
Pour aller plus, loin : v. ÉTUDE : Le crédit immobilier, Les prêts en devise, in Droit bancaire, (dir. J. Lasserre-Capdeville), Lexbase N° Lexbase : E8578B4H. |
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Réf. : CAA Paris, 4e ch., 3 mars 2023, n° 22PA04811 N° Lexbase : A39929GX
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N4591BZ3
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par Yann Le Foll
Le 09 Mars 2023
► Est annulée la décision prise par la Ville de Paris en 2019 d’accorder une subvention de 100 000 euros à l’association SOS Méditerranée France, cette subvention ayant interféré dans la politique étrangère de la France et la compétence des institutions de l’Union européenne.
Principe. Il résulte de l'article L. 1115-1 du Code général des collectivités territoriales N° Lexbase : L4750L73, dans sa rédaction applicable au litige, qu'une collectivité territoriale peut légalement accorder une subvention à une association, même française, dès lors que cette subvention a pour objet de mettre en œuvre ou soutenir une action internationale de coopération, d'aide au développement ou à caractère humanitaire, sans avoir à justifier que cette action répond à un intérêt public local.
Une collectivité territoriale ne saurait, toutefois, méconnaître les engagements internationaux de la France ni, en attribuant une subvention, prendre parti dans un conflit ou un différend international de nature politique ou interférer dans la conduite de la politique extérieure de la France constitutionnellement réservée à l'État.
Application. Bien que revêtant une dimension humanitaire, l’action de l’association s’inscrivait dans le cadre d’une volonté de remettre en cause, selon les déclarations de ses responsables, les politiques migratoires définies et mises en œuvre par l’Union européenne et ses États membres.
Les débats ayant conduit à l’attribution de la subvention montraient que le conseil de Paris avait entendu faire siennes ces critiques, allant au-delà de ce que la loi permet aux collectivités territoriales dans le domaine de l’action internationale à caractère humanitaire.
Décision. La délibération en litige est donc annulée (voir au contraire pour la légalité de l’attribution de l’aide humanitaire d’urgence par un conseil régional à cette même association, CAA Bordeaux, 3e ch., 7 février 2023, n° 20BX04222 N° Lexbase : A56159DC).
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Réf. : AMF, actualité, du 8 mars 2023
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N4600BZE
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par Perrine Cathalo
Le 09 Mars 2023
► Dans la perspective de l’entrée en vigueur du nouveau cadre européen de reporting extra-financier et notamment des nouveaux standards de reporting issus de la Directive « CSRD », l’AMF a publié un communiqué de presse dans lequel elle appelle dès à présent les sociétés cotées à tenir compte, autant que possible, de ces nouvelles exigences dans l’élaboration de leur reporting extra-financier et de leur stratégie climatique.
Dans l’attente de l’entrée en application de la Directive « CSRD » (Directive n° 2022/2464, du 14 décembre 2022, modifiant le Règlement n° 537/2014 et les Directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises N° Lexbase : L1830MGU), l'AMF appelle les émetteurs à poursuivre, voire renforcer leur dialogue actionnarial sur leur stratégie climatique, dans le cadre de leur assemblée générale, mais également, de façon régulière, en amont et en aval de celle-ci. Un tel dialogue, préalable à cette assemblée, est assurément opportun en cas de dépôt, par des actionnaires, d’une résolution climatique.
À cet effet, l'AMF invite les sociétés cotées sur un marché réglementé à renforcer encore leur communication sur leur stratégie climatique et à la présenter à chaque assemblée générale sous la forme d'un point à l'ordre du jour avec débat.
Dans cette hypothèse, les sociétés veilleront à présenter leur stratégie, qui devra être assortie de cibles précises, de manière argumentée et détaillée. Un suivi en assemblée générale dans les mêmes conditions devrait être mis en place à intervalles réguliers. L'AMF considère qu'il sera opportun, le moment venu et dans des conditions à définir par voie législative, que ces informations soient soumises à l'approbation des actionnaires comme c'est le cas pour les comptes annuels.
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Réf. : CE, 3°-8° ch. réunies, 8 mars 2023, n° 463478, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A14189HY
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N4632BZL
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par Yann Le Foll
Le 10 Mars 2023
► Un fonctionnaire faisant l’objet d’un conseil de discipline doit être informé préalablement de l’audition de témoins, à peine d’irrégularité de la procédure.
Principe. Ni les articles 6, 7 et 8 du décret n° 89-677, du 18 septembre 1989, relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux N° Lexbase : L3750G8E, ni aucune autre disposition ou principe n'imposent à l'administration d'informer le fonctionnaire poursuivi, préalablement à la séance du conseil de discipline, de son intention de faire entendre des témoins ou de l'identité de ceux-ci.
Il appartient au conseil de discipline de décider s'il y a lieu de procéder à l'audition de témoins. Il ne peut toutefois, sans méconnaître les droits de la défense et le caractère contradictoire de la procédure, entendre les témoins le jour même de la séance sans avoir mis en mesure le fonctionnaire poursuivi d'assister à leur audition (CE, 2e-7e s.-sect. réunies, 7 mars 2005, n° 251137, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A2032DHQ).
En l'absence du fonctionnaire, le conseil de discipline ne peut auditionner de témoin que si l'agent a été préalablement avisé de cette audition et a renoncé de lui-même à assister à la séance du conseil de discipline ou n'a justifié d'aucun motif légitime imposant le report de celle-ci.
Faits. L’agent n'a pas été informé préalablement à la tenue du conseil de discipline, qui s'est réuni en son absence, de l'audition de témoins cités par l'administration.
Décision CE. Dans ces conditions, le juge des référés du tribunal administratif de Limoges a commis une erreur de droit en jugeant que le moyen tiré de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure n'était pas propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la légalité de la décision dont la suspension était demandée.
Précisions rapporteur public. Thomas Pez-Lavergne avait préconisé dans ses conclusions cette solution au nom du respect du principe du contradictoire : « si le conseil de discipline souhaite auditionner les témoins malgré l’absence de l’intéressé, il doit nécessairement soit l’avoir préalablement informé de son intention de les auditionner de manière à le mettre en mesure de répondre à ses témoignages en se faisant représenter par le défenseur à l’assistance duquel il a droit, soit, selon nous, en en reportant le délibéré à l’issue des auditions afin de permettre à l’agent, dûment informé du contenu de ses témoignages, d’y répondre, à tout le moins, par écrit ».
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La sanction des obligations des fonctionnaires territoriaux, Le rôle, la composition et les principes de fonctionnement du conseil de discipline, in Droit de la fonction publique, (dir. P. Tifine), Lexbase N° Lexbase : E57723MQ. |
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Réf. : Cass. civ. 1, 1er mars 2023, n° 21-24.166, F-B N° Lexbase : A17919GC
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N4611BZS
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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)
Le 09 Mars 2023
► Le notaire ayant commis une faute, laquelle avait emporté la nullité d’un cautionnement hypothécaire, n’engage pas sa responsabilité à défaut de préjudice subi par le créancier qui bénéficiait d’autres sûretés, lesquelles n’avaient pas encore été mises en œuvre.
Faits et procédure. Point de surprise à la lecture de l’arrêt rendu par la première chambre civile le 1er mars 2023. Un simple rappel des conditions pour que la responsabilité, d’un notaire, en l’espèce, soit engagée. Les éléments nécessaires à la compréhension de l’arrêt se limitent à peu de chose : un créancier (une banque) avait consenti un crédit qui était garanti par différentes sûretés, à savoir un cautionnement consenti par une personne physique, un nantissement et un cautionnement hypothécaire. Ce dernier avait été annulé par les juges du fond en raison de la faute du notaire (dont on ignore en quoi elle consistait). La banque mettait donc en cause la responsabilité du notaire, ce que les juges du fond refusèrent d’admettre, considérant que le créancier « n'avait pas suffisamment justifié de l'impossibilité irrémédiablement compromise d'obtenir, dans le cadre de la liquidation judiciaire de chacun des autres garants et cautions, le paiement de tout ou partie de sa créance » (CA Reims, 14 septembre 2021, n° 19/01810 N° Lexbase : A3898447).
Solution. La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par la banque, approuvant les juges du fond qui avaient retenu que « la banque disposait, pour le recouvrement de sa créance, contre la co-empruntrice, et contre les cautions personnelles, de recours qu’elle n’avait pas mis en œuvre et qui n’étaient pas la conséquence de la situation dommageable imputé à la faute du notaire, la cour d’appel a exactement déduit que le préjudice allégué n’était pas actuel et certain ». La solution ne surprend guère. Une faute ne suffit à engager la responsabilité, encore faut-il un préjudice certain et actuel, sans oublier un lien de causalité. Mais ce dernier n’était pas en cause.
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Réf. : Cass. soc., 8 mars 2023, n° 21-17.802, FS-B N° Lexbase : A92179GH
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N4633BZM
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par Lisa Poinsot
Le 15 Mars 2023
► Si les enregistrements démontrant la faute du salarié ont été collectés par un dispositif de vidéosurveillance illicite, mais que leur production en justice n’a pas un caractère indispensable, alors ces éléments de preuve doivent être déclarés irrecevables.
Faits et procédure. Contestant son licenciement prononcé pour faute grave, une salariée saisit la juridiction prud’homale.
La cour d’appel constate, en premier lieu, que l’employeur :
De ces éléments, elle en déduit que les enregistrements litigieux extraits de la vidéosurveillance constituaient un moyen de preuve illicite.
Rappel. Les personnes concernées par le dispositif de vidéosurveillance doivent être informées, au moyen de panneaux affichés en permanence, de façon visible, dans les lieux concernés, qui comporte a minima, outre le pictogramme d’une caméra indiquant que le lieu est placé sous vidéoprotection:
Ces informations peuvent être également portées à la connaissance du public par d’autres moyens, notamment par le biais d’un site internet. Par ailleurs, si les caméras filment un lieu ouvert au public, le dispositif doit être autorisé par le préfet du département. Enfin, les instances représentatives du personnel doivent être informées et consultées avant toute décision d’installer des caméras. |
La cour d’appel relève, en second lieu, que, pour justifier du caractère indispensable de la production de la vidéosurveillance, la société faisait valoir que les enregistrements avaient permis de confirmer les soupçons de vol et d’abus de confiance à l’encontre de la salariée, révélés par un audit qu’elle avait mis en place et qui avait mis en évidence de nombreuses irrégularités concernant l’enregistrement et l’encaissement en espèces des prestations effectuées par la salariée. En outre, elle constate que la société ne produisait pas cet audit dont elle faisait également état dans la lettre de licenciement.
Dès lors, il résulte des déclarations de l'employeur que la production de la vidéosurveillance n'était pas indispensable à l'exercice de son droit, puisqu'il existait d'autres éléments susceptibles de révéler les irrégularités reprochées à la salariée.
Par conséquent, les juges du fond déclarent ces éléments de preuve inopposables à la salariée puisqu’ils portent atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble. Ils jugent le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
L’employeur forme alors un pourvoi en cassation en soutenant que l’illicéité d’un moyen de preuve n’entraîne pas nécessairement son rejet des débats. En outre, il argue qu’est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionné au but recherché l'atteinte portée à la vie privée d'un salarié par le placement sous vidéosurveillance du magasin où il travaille dans un but de sécurité des personnes et des biens.
La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi en application des articles 6 N° Lexbase : L7558AIR et 8 N° Lexbase : L4798AQR de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.
Elle rappelle qu’en présence d'une preuve illicite, le juge doit :
Autrement dit, le droit à la preuve justifie la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle d’un salarié à la condition que cette production en justice soit indispensable à l’exercice du droit de la preuve et que l’atteinte portée à la vie personnelle soit strictement proportionnée au but poursuivi.
Rappel. La Haute juridiction a souvent imposé que la communication forcée d’éléments portant atteinte à la vie personnelle soit « indispensable » à l’exercice du droit à la preuve. Ont été admis comme mode de preuve :
Elle a parfois exigé que la production de ces pièces soit simplement « nécessaire » à l’exercice de ce droit (Cass. soc., 9 novembre 2016, n° 15-10.203, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A2511SG4). |
En l’espèce, si la production en justice des enregistrements démontrant la faute de la salariée avait présenté un caractère indispensable, la preuve collectée par le dispositif illicite de vidéosurveillance aurait été déclarée recevable.
Pour aller plus loin :
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Réf. : Cass. soc., 1er mars 2023, n° 21-12.068, F-B N° Lexbase : A17959GL
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N4578BZL
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par Lisa Poinsot
Le 09 Mars 2023
► Dès lors que le salarié est soumis à un planning prévisionnel pour les opérations de maintenance et que, pour effectuer ces opérations, il utilise un véhicule de service et est amené à transporter des pièces détachées commandées par les clients, les temps de déplacement entre son domicile et le client doit être pris en compte pour le paiement de son salaire et dans le décompte de ses heures supplémentaires.
Telle est la solution affirmée par la Chambre sociale de la Cour de cassation.
Faits et procédure. Un salarié saisit la juridiction prud’homale en paiement de rappels de salaires et d’indemnités.
Ce salarié, dont le contrat de travail a pris fin le 31 janvier 2017 après qu’il ait fait valoir ses droits à la retraite, soutient qu’à compter de mars 2005, les heures supplémentaires apparaissant sur ses feuilles d’heures mensuelles ont disparu de ses bulletins de paie. Après réclamation, il s’aperçoit que de nombreuses modifications sont apportées sur la feuille d'heures remise en juillet 2010 par réduction des heures ou déplacement d'une semaine sur l'autre.
Il argue que si le règlement est de nouveau intervenu à compter de septembre 2010, ce fut sans régularisation pour la période allant de mars 2005 à août 2010 et à compter de septembre 2010, toutes les heures effectuées ne lui ont pas été systématiquement payées.
Il soutient également que si le temps de déplacement ne constitue pas du temps effectif de travail, néanmoins, au regard de sa situation particulière, son temps de déplacement doit s'analyser en temps de travail effectif, de sorte qu'il sollicite la condamnation de l'employeur à lui payer la somme de 48 786,92 euros à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires à compter d'août 2007 et les congés payés afférents.
La cour d’appel (CA Rouen, 22 octobre 2020, n° 19/03677 N° Lexbase : A56563Y7) relève tout d’abord qu’il n’est pas discuté que le salarié travaille pour les dépôts sur un secteur couvrant la partie Nord de la France et que, depuis début 2015, son activité s'est portée sur les petits dépannages en région Normandie. Dans le cadre de son activité, il est amené à transporter dans son véhicule des pièces détachées commandées par les clients.
Elle ajoute, ensuite, qu’il n’est pas soutenu que les temps de trajet quotidien décomptés par le salarié sont des temps effectués entre deux lieux de travail, de sorte que sans élément complémentaire, l'ensemble des temps de trajet décomptés doit être considéré comme du temps entre le domicile et le premier lieu de travail ou du dernier lieu de travail et le domicile.
Enfin, elle observe qu'il n’est pas discuté que les déplacements font partie intégrante des fonctions du salarié en qualité de technicien de maintenance afin de se rendre sur les lieux sur lesquels il doit faire ses opérations de maintenance avec un véhicule de service.
En outre, il n'est pas démenti par le salarié que le planning prévisionnel des opérations de maintenance préventives ou de vérifications périodiques, soit 90 % de son activité est organisé entre lui-même et son responsable trois à quatre semaines à l'avance afin de se mettre d'accord sur les dates et confirmer les rendez-vous avec les clients, planning ensuite confirmé par le bon de travail.
Mais, pour les opérations de maintenance curatives, le salarié est informé par téléphone pour vérifier sa disponibilité avant confirmation de la mission par le bon de travail, de sorte que le salarié, même s'il peut être amené à transporter des pièces détachées chez le client, ce qui est inhérent à la nature de son activité, ne se trouve pas à la disposition permanente de l'employeur préalablement à son départ comme bénéficiant d'une certaine autonomie dans l'organisation de son travail.
En conséquence, la cour d’appel déclare que le temps de déplacement professionnel de ce salarié ne constitue pas un temps de travail effectif. Elle déboute ainsi le salarié de sa demande en paiement d’heures supplémentaires.
Rappel. La Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence (Cass. soc., 23 novembre 2022, n° 20-21.924, FP-B+R N° Lexbase : A10708U8). En pratique, pour savoir si le temps de trajet des travailleurs itinérants constitue ou non un temps de travail effectif, il faut que :
Si ces contraintes existent, alors le temps de travail doit être pris en compte, notamment, au titre du décompte des heures supplémentaires réalisées. |
Le salarié forme alors un pourvoi en cassation.
La solution. La Chambre sociale de la Cour de cassation casse et annule la décision de la cour d’appel sur le fondement des articles L. 3121-1 N° Lexbase : L6912K9U et L. 3121-4 N° Lexbase : L6909K9R du Code du travail, ce dernier dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088, du 8 août 2016 N° Lexbase : L8436K9C, interprétés à la lumière de la Directive n° 2003/88/CE, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail N° Lexbase : L5806DLM.
La Haute juridiction précise le régime applicable au trajet domicile/client d’un salarié sans lieu de travail fixe, dont les rendez-vous sont fixés par l’employeur. En l’espèce, en l’absence d’autonomie du salarié itinérant, ayant pour tâche de transporter des pièces et effectuer des maintenances chez les clients, dans la planification de ses rendez-vous, le temps de trajet domicile/client doit être assimilée à du temps de travail effectif.
Pour aller plus loin :
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