Réf. : Cass. soc., 13 avril 2022, n° 20-14.870, FS-B N° Lexbase : A41167TM
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N1220BZ9
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par Lisa Poinsot
Le 20 Avril 2022
► Il ne suffit pas de caractériser l'exercice d'un travail au sein d'un service organisé selon des conditions déterminées unilatéralement par la plateforme numérique pour déterminer l’existence d’un lien de subordination et par-delà d’un contrat de travail.
Faits et procédure. Un travailleur, ayant signé un contrôle de location longue durée d’un véhicule et un contrat d’adhésion au système informatisé, voit ses relations contractuelles rompues avec la plateforme numérique. Il saisit alors la juridiction prud’homale d’une demande de requalification de la relation contractuelle en contrat de travail.
La cour d’appel fait droit à sa demande en condamnant ainsi la plateforme numérique au versement de sommes à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages et intérêts pour procédure irrégulière, d'indemnité compensatrice de congés payés, d'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, de dommages et intérêts pour travail dissimulé.
Pour motiver sa décision et déterminer l’existence d’un contrat de travail, elle s’appuie sur divers indices suivants :
Par ces indices, la cour d’appel en déduit que la plateforme détermine unilatéralement les conditions d’exécution de la prestation de services.
La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation censure le raisonnement des juges du fond. En application de l’article L. 8221-6 du Code du travail N° Lexbase : L8160KGC, prévoyant une présomption de non-salariat en faveur des personnes immatriculées au RCS, et de la définition jurisprudentielle du lien de subordination, elle rappelle que pour caractériser un lien de subordination, l’exercice d’un travail au sein d’un service organisé est un indice parmi d’autres. Il faut en outre déterminer que la plateforme possède un pouvoir de direction (adresser au travailleur des directives sur les modalités d’exécution du travail), un pouvoir de contrôle et un pouvoir de sanction en cas d’inobservation de ses directives par le travailleur.
Pour aller plus loin :
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newsid:481220
Réf. : Cass. com., 13 avril 2022, n° 20-22.389, F-B N° Lexbase : A41217TS
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N1177BZM
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par Vincent Téchené
Le 20 Avril 2022
► Les sommes recouvrées au titre de la restitution par le créancier des sommes qu'il a reçues au titre d'opérations annulées à la demande du commissaire à l'exécution du plan agissant dans l'intérêt collectif des créanciers en vue de reconstituer l'actif du débiteur, entrent dans le patrimoine de ce dernier et sont destinées à être réparties entre tous les créanciers ;
Dès lors, toute compensation en vertu de l'existence d'un lien de connexité est donc exclue entre la dette de restitution consécutive à l'annulation d'une opération contractée après la date de cessation des paiements et une créance admise au passif du débiteur.
Faits et procédure. Le 26 février 2014, une EARL a consenti à une coopérative agricole un warrant agricole et une cession de créance. L'EARL, mise en redressement judiciaire le 12 août 2014, a bénéficié d'un plan de redressement arrêté par un jugement du 8 mars 2016.
Le commissaire à l'exécution de ce plan, ayant assigné la coopérative en nullité du warrant agricole et de la cession de créance, au motif qu'ils avaient été consentis après la cessation des paiements de l'EARL, un jugement du 5 mars 2019 a fait droit à cette demande et condamné la coopérative au paiement de certaines sommes. En exécution de ce jugement, le commissaire à l'exécution du plan a fait signifier à la coopérative un commandement aux fins de saisie-vente le 3 juin 2019. Cette dernière l'a contesté devant le juge de l'exécution en demandant la compensation entre les condamnations prononcées et sa créance connexe, admise au passif de la procédure collective pour la somme.
La cour d’appel (CA Besançon, 8 septembre 2020, n° 19/02526 N° Lexbase : A52493TL) a constaté la connexité des créances et admis leur compensation. Le commissaire à l’exécution du plan a donc formé un pourvoi en cassation contestant cette décision.
Décision. La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa des articles 1347 du Code civil N° Lexbase : L1002KZ7, L. 622-7 N° Lexbase : L9121L7X, L. 631-14, alinéa 1 N° Lexbase : L9175L7X, L. 632, I N° Lexbase : L9185L7C et L. 626-25 N° Lexbase : L9143L7R du Code de commerce.
Elle retient qu’il résulte de la combinaison du quatrième (C. com., art. L. 632, I) et du cinquième (C. com., art. L. 626-25) de ces textes que les sommes recouvrées au titre de la restitution par le créancier des sommes qu'il a reçues au titre d'opérations annulées à la demande du commissaire à l'exécution du plan agissant dans l'intérêt collectif des créanciers en vue de reconstituer l'actif du débiteur, entrent dans le patrimoine de ce dernier et sont destinées à être réparties entre tous les créanciers. Elle en déduit que toute compensation en vertu de l'existence d'un lien de connexité est donc exclue entre la dette de restitution consécutive à l'annulation d'une opération contractée après la date de cessation des paiements et une créance admise au passif du débiteur.
Or, elle constate que, pour dire que les condamnations prononcées par le jugement du 5 mars 2019 contre la coopérative au titre de l'annulation d'un warrant agricole et d'une cession de créance se compenseront avec la créance de cette coopérative au titre de ses livraisons, l'arrêt d'appel retient que la connexité entre les créances à compenser résulte de ce qu'elles procèdent, l'une comme l'autre, des liens d'affaires étroits qui unissaient les parties dans le cadre d'un ensemble contractuel prévoyant que l'EARL écoulait sa production auprès de la seule coopérative qui, inversement lui fournissait les marchandises nécessaires à cette production, un compte courant accueillant les flux réciproques générés par ces opérations.
Dès lors, en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes visés.
Pour aller plus loin : v ÉTUDE : L'interdiction des paiements, Les sanctions attachées à la règle de l'interdiction des paiements N° Lexbase : E5137EUS et La compensation pour dettes connexes N° Lexbase : E4729YZ8, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase. |
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newsid:481177
Réf. : Cass. soc., 20 avril 2022, n° 20-10.852, FS-B N° Lexbase : A08737UU
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N1249BZB
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par Charlotte Moronval
Le 21 Avril 2022
► Le licenciement d’un animateur de télévision ayant fait une « blague » sexiste est, au regard de divers facteurs, une sanction proportionnée qui ne porte pas une atteinte excessive à la liberté d'expression garantie à un salarié.
Faits et procédure. Un salarié d’une société de production audiovisuelle, pour laquelle il animait un jeu télévisé, est licencié. Dans cette émission, l’animateur mettait en compétition des couples à l’épreuve de questions posées sur leur vie amoureuse.
Le contrat de travail de l’animateur l’engageait à respecter la charte de la chaîne de télévision en charge de diffuser le programme : cette charte lui imposait de ne pas tenir de propos de haine ou de mépris à raison du sexe et de ne pas valoriser les violences sexistes, quels que soient les médias dans lesquels il apparaîtrait.
En 2017, cet animateur, qui était aussi humoriste, était l’invité d’une émission diffusée sur une autre chaîne, pour faire la promotion de son dernier spectacle. À la fin de ce programme, il lui a été proposé de faire une ultime plaisanterie, qu’il a formulée en ces termes :
« Comme c’est un sujet super sensible, je la tente : les gars vous savez c’qu’on dit à une femme qu’a déjà les deux yeux au beurre noir ? Elle est terrible celle-là ! - On lui dit plus rien on vient déjà d’lui expliquer deux fois ! ».
Cette « blague » a fait naître une vive polémique.
Quelques jours plus tard, au cours de l’enregistrement d’épisodes du jeu dont il était l’animateur, l’intéressé a fait allusion aux critiques que lui valait sa plaisanterie et y a ajouté des propos de même nature. La société de production audiovisuelle licencie l’animateur pour faute grave.
Le conseil des prud’hommes puis la cour d’appel jugent que ce licenciement était justifié. Cette dernière retient notamment que :
L’animateur forme un pourvoi en cassation.
La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi.
Rappel. La liberté d’expression est protégée par l’article 11 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen N° Lexbase : L1358A98 et l’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme N° Lexbase : L1357A97. Elle s’applique dans la relation de travail. La Chambre sociale de la Cour de cassation juge depuis de nombreuses années que, sauf abus, le salarié jouit de sa liberté d’expression dans l’entreprise et en dehors de celle-ci. Cette liberté peut faire l’objet de restrictions justifiées par la nature des tâches à accomplir. Mais ces restrictions doivent être proportionnées au but recherché. Selon la Cour européenne des droits de l’Homme, un juge saisi d’un licenciement fondé sur les propos tenus par un salarié doit vérifier :
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De l’ensemble des éléments évoqués ci-dessus, la cour d'appel, qui a fait ressortir que le licenciement, fondé sur la violation par le salarié d'une clause de son contrat de travail d'animateur, poursuivait le but légitime de lutte contre les discriminations à raison du sexe et les violences domestiques et celui de la protection de la réputation et des droits de l'employeur, a exactement déduit, compte tenu de l'impact potentiel des propos réitérés du salarié, reflétant une banalisation des violences à l'égard des femmes, sur les intérêts commerciaux de l'employeur, que cette rupture n'était pas disproportionnée et ne portait donc pas une atteinte excessive à la liberté d'expression du salarié.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La cause réelle et sérieuse de licenciement pour motif personnel, Les abus de la liberté d'expression, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E3312ZPD. |
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newsid:481249
Réf. : Fiche technique relative à la mise en œuvre de l’interdiction d’attribuer ou d’exécuter des contrats de la commande publique avec la Russie
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N1251BZD
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par Yann Le Foll
Le 20 Avril 2022
► La Direction des affaires juridiques du ministère de l’Économie a publié le 15 avril 2022 une nouvelle fiche technique sur les modalités de mise en œuvre des dispositions du nouveau règlement (UE) n° 2022/576 du Conseil du 8 avril 2022 pour les acheteurs et autorités concédantes.
Rappel. Le nouveau règlement (UE) n° 2022/576 du Conseil du 8 avril 2022, modifiant le règlement (UE) n° 833/2014 concernant des mesures restrictives eu égard aux actions de la Russie déstabilisant la situation en Ukraine N° Lexbase : L3428MCX, prévoit, au point 23) de l’article 2, des mesures applicables aux marchés publics et aux concessions répondant à un besoin dépassant les seuils européens.
Ce règlement, qui adopte un nouveau train de sanctions contre la Russie, interdit depuis le 9 avril 2022, de passer un marché public ou une concession avec des opérateurs économiques établis en Russie, des opérateurs de nationalité russe, des opérateurs détenus majoritairement de manière directe ou indirecte par une entité établie en Russie, avec des opérateurs économiques agissant pour le compte de l’un d’eux, ainsi que de confier la sous-traitance de plus de 10 % du contrat à l’un de ces opérateurs économiques.
Contrats concernés. L’identification des contrats de la commande publique concernés par le règlement à raison de leur objet ou de leur montant peut être réalisée grâce aux données dont disposent les autorités contractantes du fait de la conduite de la procédure de passation (avis d’attribution, données essentielles de la commande publique, données du recensement).
Exceptions. Quelques exceptions sectorielles à ces interdictions sont prévues, par exemple : l'exploitation, l'entretien, le déclassement et la gestion des déchets radioactifs ; la coopération intergouvernementale dans le domaine des programmes spatiaux ; l'achat, l'importation, le transport de gaz naturel et de pétrole, y compris de produits pétroliers raffinés, ainsi que de titane, d'aluminium, de cuivre, de nickel, de palladium et de minerai de fer depuis ou via la Russie vers l'Union. Elles devront préalablement avoir été autorisées, au cas par cas, par les services de la direction générale du Trésor.
Sanctions. L’acheteur qui continue l’exécution ou procède à l’attribution d’un marché sans autorisation des autorités compétentes encourt une peine d'emprisonnement de cinq ans, la confiscation du corps du délit, la confiscation des moyens de transport utilisés pour la fraude, la confiscation des biens et avoirs qui sont le produit direct ou indirect de l'infraction et une amende égale au minimum au montant et au maximum au double de la somme sur laquelle a porté l'infraction ou la tentative d'infraction.
Résiliation. Tout contrat en cours au 9 avril 2022, soit à la date d’entrée en vigueur du règlement (UE) n° 2022/576, qui ne serait pas échu au 10 octobre 2022, doit être résilié avant cette date. Par ailleurs, la résiliation des contrats en cours d’exécution ne pourra donner lieu, à aucune indemnisation, y compris une compensation, une prorogation de paiement ou une garantie.
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newsid:481251
Réf. : Cass. civ. 2, 14 avril 2022, n° 20-22.578, F-B N° Lexbase : A44717TR
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N1205BZN
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par Alexandra Martinez-Ohayon
Le 20 Avril 2022
► La deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans son arrêt rendu le 14 avril 2022 vient préciser que l’appréciation de l’utilité d’une mesure d’instruction ou de consultation qui peut être ordonnée en application des articles 143, 144 et 256 du Code de procédure civile relève du pouvoir discrétionnaire du juge ; la Haute juridiction rappelle également que le juge du fond a un pouvoir d’appréciation souveraine sur les éléments de preuve, sans être tenu de suivre les parties dans le détail de leur argumentaire ni d’ordonner une mesure d’instruction.
Faits et procédure. Dans cette affaire, se prévalant de ses droits sur son interprétation, réalisée dans le cadre d’un casting en vue d’obtenir un rôle dans un film, qui aurait été reprise à son insu dans l’une des scènes de ce film, un comédien-chanteur a assigné la société de production devant le tribunal de grande instance en contrefaçon de droits voisins d’artiste-interprète. Deux ordonnances ont été rendues par le juge de la mise en état, la première constatant la fin d’une mission de consultation ordonnée par une précédente décision, et indiquant n’y avoir lieu à une mesure d’instruction complémentaire, et une seconde ayant rejeté les demandes du demandeur tendant à obtenir de nouvelles mesures.
Par jugement rendu le 30 juin 2017, le tribunal a débouté le demandeur.
Ce dernier a interjeté appel à l’encontre des deux ordonnances et du jugement.
Le pourvoi. Le demandeur fait grief à l’arrêt (CA Paris, 5, 2, 19 avril 2019, n° 17/15892 N° Lexbase : A5305Y9D), dans un premier temps d’avoir confirmé l’une des ordonnances du juge de la mise en état ayant dit n’y avoir lieu d’ordonner une mesure d’instruction complémentaire.
Dans un second temps, il fait grief à l'arrêt d’avoir par confirmation du jugement, de l’avoir débouté de toutes ses demandes. La Haute juridiction énonce que le moyen ne tend qu’à remettre en discussion, devant elle, l’appréciation souveraine des éléments de preuve par le juge du fond.
Solution. Énonçant les solutions précitées, la Cour de cassation valide le raisonnement de la cour d’appel et rejette le pourvoi.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : L’administration judiciaire de la preuve, Les règles générales aux mesures d'instruction, in Procédure civile (dir. E. Vergès), Lexbase N° Lexbase : E68033UI. |
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