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N1066BZI
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par Vincent Vantighem
Le 27 Avril 2022
Deux ans qu’Emily Spanton attendait ça. En 2020, elle avait bien fait le voyage depuis le Canada où elle réside. Mais le procès en appel avait été renvoyé en raison de l’épidémie de coronavirus. L’an dernier, nouveau voyage et nouveau renvoi. Cette fois, à cause de l’état de santé d’un des avocats de la défense, victime quelques jours plus tôt d’un accident vasculaire cérébral. Mais mardi matin, enfin, Emily Spanton, 42 ans, a pu s’asseoir sur le banc des parties civiles de la cour d’assises du Val-de-Marne, à Créteil.
Face à elle, dans le box des accusés, deux anciens policiers qu’elle connaît désormais bien : Antoine Q., 43 ans, et Nicolas R., 52 ans. En 2019, en première instance, ils avaient été condamnés à sept ans de prison ferme pour l’avoir violée. Les deux anciens membres de la prestigieuse Brigade de recherches et d’intervention (BRI), qui contestent les faits, avaient immédiatement fait appel de leur condamnation. Ressortis après quelques semaines de détention, ils savent qu’ils risquent, à l’issue de ce procès, de repartir derrière les barreaux.
Un verre de whisky dans les locaux du « 36 Quai des Orfèvres »
Les faits remontent à la nuit du 22 avril 2014. C’était un mardi soir. De passage à Paris, Emily Spanton, une touriste canadienne, se trouve dans un pub irlandais du quartier Saint-Michel à Paris. Juste de l’autre côté de la Seine, se trouve le siège de la police judiciaire parisienne. Le fameux « 36 Quai des Orfèvres » popularisé par Georges Simenon. Dans le bar, la touriste fait la rencontre de plusieurs policiers de la BRI. L’ambiance est alors au flirt. Et les agents lui proposent une visite nocturne de leurs bureaux.
« J’étais ivre, je savais que je n’étais pas en mesure de retrouver mon hôtel. Je me suis dit qu’au moins, dans un commissariat, je ne pourrais pas boire à nouveau que je rentrerai une fois sobre, avait-elle expliqué à la cour d’assises de Paris lors du procès en première instance. Je me suis dit que j’y serais en sécurité… »
Selon son récit, elle ressortira du QG de la police une heure plus tard, en état de choc, pour dénoncer un viol. Elle affirme que, dans un des bureaux des policiers, les accusés l’auraient forcé à boire un verre de whisky et lui aurait imposé fellations et pénétrations vaginales.
« Ils ont agi comme des soudards ! »
Le premier accusé, Nicolas R. a reconnu une fellation de la plaignante mais il a assuré qu’elle était consentante. Mais pendant la soirée, l’enquête a établi qu’il avait envoyé un texto à un de ses collègues pour l’inviter à les rejoindre. « C’est une touseuse [partouzeuse]. Dépêche [toi] ». Quant au second policier incriminé, Antoine Q., son ADN a été retrouvé à l’intérieur du vagin de la plaignante. Lui s’est défendu en parlant de pénétration digitale consentie.
En première instance, la cour d’assises de Paris avait notamment motivé sa condamnation par « les déclarations constantes de la jeune femme », à l’inverse « des dépositions évolutives, fantaisistes et peu crédibles » des deux accusés. « Ils ont agi comme des soudards ! », avait notamment martelé l’avocat général Philippe Courroye. « Ce soir-là, ils n’étaient pas la police mais des usurpateurs indignes de brassards et ils se sont comportés comme ceux qu’ils pourchassent… »
Antoine Q. est toujours fonctionnaire de police. À l’ouverture de ce procès en appel, il a indiqué occuper des fonctions administratives depuis janvier 2021, quand l’interdiction d’exercer le métier de policier, prononcée dans le cadre de son contrôle judiciaire, a été suspendue. Nicolas R., lui, travaille désormais dans le bâtiment.
Leur procès en appel doit durer trois semaines. Trois semaines au cours desquels une trentaine de témoins et une dizaine d’experts sont attendus à la barre. Emily Spanton, elle, est attendue à la barre, jeudi 7 avril. Les deux hommes qu’elle accuse encourent une peine de 20 ans de réclusion.
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newsid:481066
Réf. : Cass. civ. 1, 30 mars 2022, n° 21-13.970, FS-B N° Lexbase : A64637RS
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N1036BZE
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par Vincent Téchené
Le 06 Avril 2022
► N'est pas recevable à agir sur le fondement des articles L. 621-1, L. 621-2 et L. 621-7 du Code de la consommation l'association de défense des intérêts des consommateurs qui ne justifie ni de l'existence d'une infraction ni de la méconnaissance d'une disposition issue de la transposition du droit de l'Union.
Faits et procédure. Une association, qui a pour objet social la défense des intérêts des consommateurs en tant que maître d'ouvrage, vis-à-vis des constructeurs de maisons individuelles avec fourniture du plan, et le respect des normes dans le domaine de la construction de maisons individuelles, a été agréée par arrêté du 6 janvier 2006 du préfet de l'Essonne pour exercer l'action civile conformément aux dispositions du livre IV du Code de la consommation.
Invoquant l'existence de pratiques illicites, elle a assigné, devant le tribunal de grande instance de Paris, un constructeur de maisons individuelles, l'assureur de celui-ci et un courtier pour obtenir, sur le fondement des articles L. 621-1 N° Lexbase : L0827K7R, L. 621-2 N° Lexbase : L0826K7Q et L. 621-7 N° Lexbase : L0821K7K du Code de la consommation, la cessation de ces pratiques, des dommages-intérêts en réparation du préjudice collectif des consommateurs et la publication de la décision à intervenir.
À la suite de l'arrêté préfectoral du 24 avril 2018 portant retrait de son agrément, le premier juge a déclaré son action irrecevable, faute de qualité pour agir. En appel, l'association a indiqué agir, à titre subsidiaire, sur le fondement du droit commun pour la défense de l'intérêt collectif entrant dans son objet social.
Toutefois, l'arrêt d’appel (CA Paris, 4-8, 16 février 2021, n° 19/12277 N° Lexbase : A12744HN) ayant déclaré irrecevables, faute de qualité pour agir, les demandes de l’association, celle-ci a formé un pourvoi en cassation.
Décision. La Cour de cassation rappelle d’abord que les articles L. 621-1, L. 621-2 et L. 621-7 du Code de la consommation habilitent les associations agréées, d'une part, à exercer les droits reconnus à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs, d'autre part, à agir devant les juridictions civiles en cessation, interdiction, ou réparation de tout agissement illicite au regard des dispositions transposant les Directives mentionnées à l'article 1er de la Directive n° 2009/22/CE du 23 avril 2009 modifiée relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs N° Lexbase : L1675IER.
Dès lors, pour la Haute juridiction, n'est pas recevable à agir sur le fondement de ces dispositions l'association qui ne justifie ni de l'existence d'une infraction ni de la méconnaissance d'une disposition issue de la transposition du droit de l'Union.
Or, elle constate que la cour d'appel a relevé que l'action en cessation engagée par l'association était fondée sur la méconnaissance alléguée de dispositions du Code des assurances relatives à l'obligation des maîtres d'ouvrage, ayant la qualité de consommateurs, de souscrire une assurance de dommages-ouvrage. Il en résulte que l'association, qui n'invoquait ni l'existence d'une infraction ni la méconnaissance d'une disposition issue de la transposition d'une Directive du droit de l'Union, n'était pas recevable à agir sur le fondement de ces textes.
Par conséquent, par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, la décision déférée se trouve légalement justifiée en ce qu'elle déclare irrecevable l'action de l’association sur le fondement des dispositions susvisées du Code de la consommation.
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newsid:481036
Réf. : CA Paris, 4 février 2022, n° 19/00228 N° Lexbase : A43677LC
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N0945BZZ
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par Marie Le Guerroué
Le 06 Avril 2022
► Si la rémunération de services rendus entre avocats peut être définie à des conditions particulières au regard des règles de confraternité et usages de la profession, ces mêmes règles impliquent que le temps de travail accompli dans ce cadre ne soit pas exploité de façon excessive du fait de la complexité du litige ou de relations conflictuelles entre les parties.
Faits et procédure. Une avocate avait été chargée au début de l'année 2017 d'assister une consœur, qu'elle connaissait par ailleurs professionnellement comme étant elle-même avocate au sein du même barreau, dans le cadre d'une liquidation postcommunautaire faisant suite à son divorce. N'ayant pu obtenir le règlement de la facture de 3 600 euros établie en contrepartie des diligences effectuées, elle avait saisi le Bâtonnier de l'Ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis en sollicitant la taxation de ses honoraires à hauteur de 4 800 euros. Le délégué du Bâtonnier a fixé les honoraires de l'avocat à 3 600 euros TTC outre intérêts au taux légal à compter de la notification de l'ordonnance de taxe. L’avocate cliente a exercé un recours contre la décision précitée.
Réponse de la cour d’appel. En l'absence de convention d'honoraires, pour la cour d’appel, il ne convient pas de dire qu'ils ne sont pas dûs comme le suggère la requérante, mais de faire application de l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 N° Lexbase : L4398IT3 aux termes duquel « Les honoraires tiennent compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci ». La cour rappelle qu’il a été observé à juste titre par le Bâtonnier que si la rémunération de services rendus entre avocats peut être définie à des conditions particulières au regard des règles de confraternité et usages de la profession, ces mêmes règles impliquent que le temps de travail accompli dans ce cadre ne soit pas exploité de façon excessive du fait de la complexité du litige ou de relations conflictuelles entre les parties. Elle ajoute, ensuite, que si la requérante fait observer à juste titre que l'absence de convention rend nécessairement plus difficile l'évaluation des honoraires dus, elle ne saurait pour autant prétendre à la gratuité pour ce motif. La cour relève qu’en l’espèce la gratuité du service n'avait pas été envisagée et qu'il n'existait pas de contestation quant au bien-fondé de la facturation au demeurant justifiée compte tenu de la nature du contentieux traité et des pièces versées aux débats. Au regard de l'absence de convention établie et de la proposition écrite de l’avocate « de forfaitiser [ses] honoraires pour la procédure à 3 000 euros HT hors plaidoirie » qui seule permettait à la cliente de s'engager en toute connaissance de cause, il n'est pas justifié de faire droit à la demande de facturation au temps passé tirant les conséquences d'une rupture de la confiance établie, même si comme souligne la décision déférée, le forfait initialement envisagé s'inscrivait incontestablement dans le contexte de rapports de confraternité.
Confirmation. La décision du Bâtonnier est en conséquence intégralement confirmée.
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newsid:480945
Réf. : Cass. crim., 5 avril 2022, n° 20-81.775, FS-B N° Lexbase : A21527SI
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N1061BZC
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par Lisa Poinsot
Le 27 Avril 2022
► N'exécute pas une prestation de travail sous un lien de subordination, le particulier recueillant des données commerciales, appelé « clicwalker », qui :
En outre, la société ne dispose pas, pendant l'exécution de la mission, du pouvoir de contrôler l'exécution de ses directives et d'en sanctionner les manquements, et ce, quand bien même la correcte exécution des missions est l'objet d'une vérification par la société qui peut refuser de verser la rémunération prévue et le remboursement des frais engagés, en cas d'exécution non conforme.
Faits et procédure. Sur la base du volontariat et contre gratification en points-cadeaux ou en numéraire, des particuliers dits « clicwalkers », effectuent, pour une société et, à partir d’une application gratuite téléchargée sur leur téléphone, les missions suivantes :
Cette société a ainsi pour activité de collecter puis de traiter pour le compte de marques ou d'enseignes, des données commerciales dites de « terrain », recueillies par ces « clicwalkers ».
À la suite d’une enquête préliminaire concluant à l’assimilation de ces travailleurs en salariés, des poursuites pour travail dissimulé par dissimulation d’emplois salariés ont été engagées. Le tribunal correctionnel a conclu à la non-assimilation des « clicwalkers » comme salariés.
A contrario, la cour d’appel constate que :
De ces éléments, elle en déduit l’existence d’un lien de subordination entre la société et les travailleurs du fait que les utilisateurs de la plateforme exécutent une prestation de travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
En conséquence, la cour d’appel retient la qualification de contrat de travail pour déclarer la société coupable du délit de travail dissimulé par dissimulation d’emplois salariés.
La société forme alors un pourvoi en cassation.
La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre criminelle de la Cour de cassation censure la décision de la cour d’appel, en reprenant le raisonnement de la Chambre sociale dès lors que le problème de droit porte sur l’éventuelle requalification de la relation de travail entre un particulier et une plateforme numérique en salariat.
En s’appuyant sur les articles L. 8221-5 N° Lexbase : L7404K94 et L. 8224-1 N° Lexbase : L3622H9Z du Code du travail, la Chambre criminelle rappelle, tout d’abord, que le délit de travail dissimulé par dissimulation d'emplois salariés suppose que soit établie l'existence d'un lien de subordination. Elle mentionne ensuite la jurisprudence sociale en matière de détermination du lien de subordination et de qualification du contrat de travail (Cass. soc., 13 novembre 1996, n ° 94-13.187, publié N° Lexbase : A9731ABZ, Cass. ass. plén., 4 mars 1983, 2 arrêts, n° 81-11.647 N° Lexbase : A5653AAM et n° 81-15.290 N° Lexbase : A3665ABD et Cass. soc., 28 novembre 2018, n° 17-20.079, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A0887YN8). Elle conclut enfin que :
Pour aller plus loin : → sur la dissimulation d’emplois salariés :
→ sur la qualification du contrat de travail et l’établissement du lien de subordination :
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newsid:481061
Réf. : CE, 8° - 3° ch. réunies, 31 mars 2022, n° 458518, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A10257SR
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N1004BZ9
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par Marie-Claire Sgarra
Le 06 Avril 2022
► Le Conseil d’État a rendu un arrêt relatif au régime fiscal de la cession à titre onéreux d’un usufruit temporaire.
Les faits :
Principes :
Arrêt de la cour administrative d’appel. En appel, la cour a considéré que l'apport à la SAS par Mme C., pour une durée contractuellement fixée à trente ans, de l'usufruit dont celle-ci était titulaire à titre viager sur les parts de la SNC n'avait pas la nature d'une cession d'usufruit temporaire. Les dispositions de l’article 13, 5°, précitées ne trouvaient donc pas à s’appliquer.
À noter. L’arrêt de la CAA de Paris n’allait pas dans le sens des commentaires de l’administration fiscale : « Lorsque l'usufruit est cédé à une personne morale, il convient de distinguer : - si l'usufruit est constitué sur la tête de la personne morale, c'est-à-dire qu'il est détaché de la pleine propriété du cédant : dans ce cas, la cession entre dans le champ d'application des dispositions du 5 de l'article 13 du CGI. En effet, en application de l'article 619 du Code civil, la durée de cet usufruit ne pouvant excéder trente ans, cet usufruit est nécessairement consenti pour une durée fixe » (BOI-IR-BASE-10-10-30, 6 avril 2017 N° Lexbase : X5364APD). |
Solution du Conseil d’État. Pour le CE, la cour administrative d'appel de Paris a méconnu les dispositions de l’article 13, 5°, du CGI qui « trouvent à s'appliquer tant à la cession à titre onéreux, par le propriétaire d'un bien ou droit, d'un usufruit portant sur celui-ci qu'à la première cession à titre onéreux, par son titulaire, d'un usufruit préconstitué, dans le cas où le cessionnaire bénéficie du droit d'usufruit pour une période qui n'est pas exclusivement déterminée par la durée de la vie humaine ».
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newsid:481004
Réf. : Circulaire n° 6338-SG du 30 mars 2022, relative à l’exécution des contrats de la commande publique dans le contexte actuel de hausse des prix de certaines matières premières
Lecture: 4 min
N1052BZY
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par Yann Le Foll
Le 06 Avril 2022
► La circulaire n° 6338-SG du 30 mars 2022, relative à l’exécution des contrats de la commande publique dans le contexte actuel de hausse des prix de certaines matières premières, demande aux acheteurs de l’État de mettre en œuvre les leviers juridiques permettant d’atténuer les effets des aléas économiques affectant certaines matières premières, notamment le gaz et le pétrole, dans l’exécution des contrats publics et d’aider les entreprises à poursuivre l’exécution des contrats dont l’équilibre financier serait bouleversé par la dégradation des conditions économiques.
La modification des contrats de la commande publique en cours, lorsqu'elle est nécessaire à la poursuite de leur exécution.
La pénurie des matières premières et la hausse des prix des approvisionnements sont susceptibles d'avoir des conséquences sur les conditions techniques d'exécution des contrats. Dans ces hypothèses, il est possible de recourir aux différents cas de modification des contrats en cours d'exécution prévus par le Code de la commande publique, notamment par ses articles R. 2194-5 N° Lexbase : L4268LRI et R. 3135-5 N° Lexbase : L4401LRG qui, dès lors que ces modifications sont rendues nécessaires par des circonstances qu'une autorité contractante diligente ne pouvait pas prévoir lorsque le contrat a été passé, autorisent des modifications du contrat :
- pouvant atteindre, à chaque modification rendue nécessaire, 50 % du montant initial pour les contrats de la commande publique conclus par des pouvoirs adjudicateurs ;
- et sans plafond pour les contrats de la commande publique conclus par des entités adjudicatrices intervenant dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux.
L'application de la théorie de l'imprévision aux contrats administratifs.
Si la hausse exceptionnelle du prix du gaz et du pétrole constatée depuis le dernier trimestre 2021, dont l'ampleur est accentuée par la crise en Ukraine, est sans conteste imprévisible et extérieure aux parties, tout comme la flambée du prix de certaines matières premières, la condition tenant au bouleversement de l'économie des marchés doit, en revanche, être analysée au cas par cas en tenant compte des spécificités du secteur économique et des justifications apportées par l'entreprise.
Il convient donc de procéder à la détermination des charges extracontractuelles qui pèsent sur le contrat du fait de l'augmentation exceptionnelle des prix, qu'il s'agisse de celui de l'énergie ou de celui de certaines matières premières à l'exclusion des autres causes ayant pu occasionner des pertes à l'entreprise. Ces charges sont appréciées par rapport à l'exécution du marché au coût estimé initialement pour des conditions économiques normales. Elles doivent être déterminées au cas par cas au vu de justifications comptables. Le titulaire doit donc être en mesure de justifier, d'une part, son prix de revient et sa marge bénéficiaire au moment où il a remis son offre et, d'autre part, ses débours au cours de l'exécution du marché. Le cas échéant, il conviendra de tenir compte de la différence entre l'évolution réelle des coûts et celle résultant de l'application de la formule de révision.
Le gel des pénalités contractuelles dans l'exécution des contrats de la commande publique.
À l'instar des mesures prévues par l'ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 N° Lexbase : L5734LWB, dans le cadre de la crise sanitaire fiée au covid-19, le Premier ministre souhaite que l'exécution des clauses des contrats prévoyant des pénalités de retard ou l'exécution des prestations aux frais et risques du titulaire soient suspendue tant que celui-ci est dans l'impossibilité de s'approvisionner dans des conditions normales.
L'insertion d'une clause de révision des prix dans tous les contrats de la commande publique à venir
Le Premier ministre demande enfin aux acheteurs publics de s’assurer que les marchés conclus par leurs services respectent les dispositions des articles R. 2112-13 N° Lexbase : L2624LRM et R. 2112-14 N° Lexbase : L2526LRY du Code de la commande publique qui prohibent le recours au prix ferme lorsque les parties sont exposées à des aléas majeurs du fait de l'évolution raisonnablement prévisible des conditions économiques pendant la durée d'exécution des prestations et imposent que les marchés d'une durée d'exécution de plus de trois mois qui nécessitent, pour leur réalisation, le recours à une part importante de fournitures, notamment de matières premières, dont le prix est directement affecté par les fluctuations des cours mondiaux, comportent une clause de révision de prix incluant au moins une référence aux indices officiels de fixation de ces cours. Le non-respect de ces obligations est susceptible d'engager la responsabilité de l'acheteur.
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newsid:481052
Réf. : Cass. civ. 2, 24 mars 2022, n° 20-21.289, F-B N° Lexbase : A27497RA
Lecture: 2 min
N1059BZA
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par Alexandra Martinez-Ohayon
Le 06 Avril 2022
► La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans son arrêt rendu le 24 mars 2022, vient préciser que l'absence d'opposition des parties à la procédure sans audience doit être recueillie pour toutes les procédures, à l'exception de celles limitativement énumérées par l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, modifiée par l'ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 ; la Haute juridiction relève que la procédure à bref délai régie par l’article 905 du Code de procédure civile n’entre dans aucune des catégories de dérogations énumérées par l’article 8 précité.
Faits et procédure. Dans cette affaire, l’URSSAF de la Corse a fait procéder à une saisie-attribution sur les rémunérations de son débiteur versées par son employeur. Le débiteur a saisi le juge de l’exécution en nullité et mainlevée de la saisie-attribution. Ayant été débouté par jugement du 9 mai 2019, il a interjeté appel à l’encontre de cette décision. La cour d’appel a statué sans audience, en application de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 N° Lexbase : L5722LWT, modifiée par l'ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 N° Lexbase : L1697LX7.
Le pourvoi. L’URSSAF de la Corse fait grief à l’arrêt (CA Bastia, 8 juillet 2020, n° 19/00490 N° Lexbase : A79033QR) de l’avoir déboutée de l’ensemble de ses demandes, et d’avoir déclaré la nullité de la saisie-attribution réalisée à son profit sur les rémunérations versées par l’employeur à son débiteur, enfin d’avoir prononcé sa mainlevée.
En l’espèce, la cour d’appel a statué sans audience sans recueillir l’accord des parties, en retenant qu’en raison de l’état d’urgence sanitaire, l’audience initialement prévue le 7 mai 2020 a été annulée et la procédure renvoyée au 12 juin 2020 dans le cadre d’une audience sans plaidoiries et avec dépôt de dossier. L’arrêt relève qu’il s’agissait d’une procédure à bref délai relevant de l’article 905 du Code de procédure civile N° Lexbase : L8614LYP, sans possibilité d’opposition offerte aux parties.
Solution. Énonçant la solution précitée, la Cour de cassation casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt d’appel rendu par la cour d’appel de Bastia.
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Réf. : Cass. civ. 2, 31 mars 2022, n° 20-19.992, FS-B N° Lexbase : A72107RH
Lecture: 2 min
N1064BZG
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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)
Le 06 Avril 2022
► Est prescrite l’action tendant à l’indemnisation du préjudice de retraite, dès lors que ce préjudice était connu par la victime dès son accident, celle-ci n’ayant jamais pu reprendre une activité salariée depuis l’accident.
Faits et procédure. À la suite d’un accident de la circulation, la victime sollicita l’indemnisation de son préjudice de retraite. Néanmoins, cette demande fut formulée à l’occasion d’une action relative à l’aggravation de son préjudice. Les juges du fond avaient considéré cette indemnisation comme prescrite (CA Aix-en-Provence, 30 janvier 2020, n° 19/00561 N° Lexbase : A22283DU). La victime considérait, quant à elle, que l’interruption de la prescription pouvait s’étendre d’une action à l’autre, dès lors que ces actions tendent au même but, ce qui était le cas en l’espèce.
Solution. La deuxième chambre civile rejette le pourvoi : l’incapacité de travail résultait du préjudice initial, la victime en avait « parfaitement connaissance puisqu’elle n’avait jamais repris d’activité salariée depuis son accident ». En outre, « l’action en aggravation d’un préjudice est autonome au regard de l’action en indemnisation du préjudice » initial, l’interruption de la prescription ne pouvait donc s’étendre d’une action à l’autre. Ainsi, dès lors que le préjudice lié à la perte des droits à la retraite était identifiable dès le préjudice initial, on ne saurait admettre une interruption de la prescription du fait des aggravations. L’action en réparation du préjudice, dépourvu de lien de causalité avec les aggravations, est donc prescrite. Elle devait être introduite dans les dix ans après que le délai de prescription initial ait commencé à courir.
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newsid:481064
Réf. : Cass. soc., 30 mars 2022, n° 20-18.651, FS-B N° Lexbase : A64717R4
Lecture: 3 min
N1016BZN
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par Lisa Poinsot
Le 06 Avril 2022
► La convention de forfait doit déterminer le nombre d'heures correspondant à la rémunération convenue entre les parties, celle-ci devant être au moins aussi avantageuse pour le salarié que celle qu'il percevrait en l'absence de convention, compte tenu des majorations pour heures supplémentaires ;
À défaut de stipulations contractuelles, seul le salarié peut se prévaloir de la nullité de la convention de forfait en heures.
Faits et procédure. Un salarié, soumis au régime juridique de forfait en heures, est licencié. Il saisit la juridiction prud’homale de demandes en paiement de diverses sommes au titre des heures supplémentaires.
La cour d’appel (CA Amiens, 9 avril 2020, n° 19/02114 N° Lexbase : A93193KD) constate tout d’abord qu’un employeur et un salarié peuvent contractualiser un volume d’heures supplémentaires et prévoir le nombre et la rémunération correspondant aux dites heures supplémentaires. Elle ajoute ensuite que l’employeur n’est pas fondé à ne pas appliquer les majorations et contreparties afférentes aux heures supplémentaires effectuées au-delà de la durée légale. Elle en déduit enfin que le contrat ne définit pas le nombre d’heures supplémentaires incluses dans la rémunération. Elle relève par la suite que le salarié produit des bulletins de paie mentionnant un volume horaire de 198,67 heures mensuelles, soit 47 heures supplémentaires.
En conséquence, la cour d’appel rejette la demande du salarié de rappel de salaire au motif que les stipulations contractuelles sont irrégulières et ne sont pas applicables, de sorte qu’il faut revenir à la législation applicable à la durée du travail.
Le salarié forme un pourvoi en cassation en soutenant que :
La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation censure le raisonnement de la cour d’appel en application de l'article L. 3121-22 du Code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 N° Lexbase : L8436K9C et de l'article 1134 du Code civil N° Lexbase : L0857KZR, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 N° Lexbase : L4857KYK. Elle affirme, en premier lieu, que la fixation, par le contrat de travail, d'une rémunération mensuelle fixe forfaitaire pour 198,67 heures, caractérise une convention de forfait de rémunération incluant un nombre déterminé d'heures supplémentaires. En second lieu, elle constate que l’employeur n’est pas fondé à invoquer l’irrégularité d’une convention de forfait en heures pour appuyer sa demande. Il ne peut être opposé au salarié des règles relevant de l’ordre public social édicté dans le seul souci de sa protection.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Le temps de travail des cadres et les conventions de forfait, La rémunération du salarié ayant conclu une convention de forfait en heures, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E7423E9S. |
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