Réf. : Décret n° 2021-1820, du 24 décembre 2021, relatif aux mesures de surveillance applicables lors de leur libération aux auteurs d’infractions commises au sein du couple N° Lexbase : L1152MAW
Lecture: 3 min
N9943BYW
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Adélaïde Léon
Le 27 Janvier 2022
► Le décret n° 2021-1820, du 24 décembre 2021, relatif aux mesures de surveillance applicables lors de leur libération aux auteurs d’infractions commises au sein du couple, destiné à renforcer la protection des victimes de violences ou d’infractions commises au sein du couple, a été publié au Journal officiel du 28 décembre 2021.
Libération ou cessation d’incarcération. Un nouvel article D. 1-11-2 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L2454MA7 prévoit qu’avant toute libération ou cessation, même temporaire de l’incarcération de la personne poursuivie ou condamnée pour des infractions commises au sein du couple, l’autorité judiciaire compétente :
- de prononcer une interdiction de contact ou de paraître en certains lieux ;
- si l’effectivité de cette interdiction doit être renforcée par le recours à un téléphone grave danger ou à un bracelet anti-rapprochement.
Maintien de la surveillance. Selon un nouvel article D. 32-25-1 N° Lexbase : L2456MA9, lorsque la personne renvoyée devant la juridiction de jugement est condamnée à une peine d’emprisonnement ferme ou de détention à domicile sous surveillance électronique (DDSE), avec exécution provisoire, les obligations de l’assignation à résidence sous surveillance électronique, sous surveillance électronique mobile ou d’un bracelet anti-rapprochement, dont l’intéressée fait l’objet, demeurent applicables jusqu’à ce que la personne soit, selon les cas, incarcérée ou que la peine soit effective ou aménagée.
Maintien des interdictions de contact ou de paraître au cours de l’incarcération. Les articles D. 49-86 N° Lexbase : L3419LWK et D. 51 N° Lexbase : L2466MAL sont modifiés afin de prévoir qu’en cas d’incarcération, les interdictions de contact ou de paraître prononcées à l’égard d’une personne demeurent applicables pendant le temps où l’intéressé est incarcéré.
Incarcération et bracelet anti-rapprochement. Il est précisé à l’article D. 51 du Code de procédure pénale qu’en cas d’incarcération d’une personne porteuse d’un dispositif électronique mobile anti-rapprochement, le personnel de l’administration pénitentiaire procède à la dépose du dispositif au moment de l’incarcération. La pose du bracelet devra ensuite intervenir dès la libération ou la cessation, même temporaire, de l’incarcération.
Actualisation du dossier individuel lors de l’instance d’appel. L’article D. 49-41 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L4774HZT est complété afin de prévoir que, durant l’instance d’appel, le président de la chambre de l’application des peines peut saisir avant l’audience le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) s’il apparait nécessaire d’actualiser les éléments du dossier individuel de la personne condamnée.
Cette possibilité doit permettre de prendre la décision d’individualisation de la peine la mieux adaptée et, en cas d’infractions commises au sein du couple, de déterminer s’il y a lieu de prononcer une mesure de bracelet anti-rapprochement.
Entrée en vigueur. L’entrée en vigueur des dispositions du décret n° 2021-1820 du 24 décembre 2021 est différée au 1er février 2022.
Pour aller plus loin :
|
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:479943
Réf. : Cons. const., décision n° 2021-957 QPC, du 17 décembre 2021 (N° Lexbase : A52807GN)
Lecture: 3 min
N9840BY4
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Anne-Lise Lonné-Clément
Le 06 Janvier 2022
► Le premier alinéa de l'article L. 114-1 du Code des assurances, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la Sécurité sociale pour 2007, est conforme à la Constitution.
Telle est la réponse apportée par le Conseil constitutionnel aux questions prioritaires de constitutionnalité qui lui avaient été transmises, par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, par arrêt rendu le 7 octobre 2021 (Cass. QPC, 7 octobre 2021, n° 21-13.251, FS-D N° Lexbase : A813148N).
Les QPC. Les requérants reprochaient aux dispositions en cause (C. ass., art. L. 114-1 , al. 1er N° Lexbase : L2640HWP) de n'accorder qu'un délai de deux ans à l'assuré non professionnel pour intenter une action contre son assureur tandis que les autres consommateurs bénéficient du délai de droit commun de cinq ans pour intenter une action contre un professionnel. Or, selon les requérants, l'assuré non professionnel et les autres consommateurs seraient placés dans une situation identique en raison de leur position de faiblesse face à leurs cocontractants.
Ils critiquaient également l'application d'un même délai de prescription de deux ans aux actions intentées par l'assureur et à celles intentées par l'assuré, sans que soit prise en considération la position de faiblesse de ce dernier.
Il en résultait, selon eux, une méconnaissance du principe d'égalité devant la loi et la Justice.
Réponse du Conseil constitutionnel. Alors que la Cour de cassation avait ainsi estimé que ces deux questions présentaient un caractère sérieux méritant de les soumettre aux Sages de la rue de Montpensier, ceux-ci vont balayer chaque argument d’un revers de main.
S’agissant du premier point, ainsi que le relèvent les Sages de la rue de Montpensier, le contrat d'assurance se caractérise en particulier par la garantie d'un risque en contrepartie du versement d'une prime ou d'une cotisation. Il se distingue à cet égard des autres contrats, en particulier des contrats soumis au Code de la consommation. Ainsi, le législateur a pu prévoir, pour les actions dérivant des contrats d'assurance, un délai de prescription différent du délai de prescription de droit commun de cinq ans applicable, en l'absence de dispositions spécifiques, aux autres contrats. La différence de traitement critiquée par les requérants, qui est ainsi fondée sur une différence de situation, est en rapport avec l'objet de la loi.
Concernant la seconde critique, les Sages répondent simplement qu’en prévoyant l'application d'un même délai de prescription de deux ans tant aux actions des assurés qu'à celles des assureurs, les dispositions contestées n'instituent aucune différence de traitement entre les parties à un contrat d'assurance.
Les dispositions faisant l’objet de vives critiques tant du côté des praticiens, que de la doctrine, comme de la Cour de cassation (cf. R. Bigot, A. Cayol, Chronique de droit des assurances – Décembre 2021, Lexbase Droit privé, décembre 2021, n° 888 N° Lexbase : N9770BYI), peut-être le législateur finira-t-il alors par supprimer le délai de prescription biennal ?
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:479840
Lecture: 9 min
N9955BYD
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Élise Fabing, Avocate associée et Marion Simoné, Faustine Koppel, Avocates, Alkemist Avocats
Le 07 Janvier 2022
Nous avons prêté ce serment avec envie et passion. Chacune, nous avons compris que respecter ce serment revenait à participer au bon fonctionnement de la Justice.
En notre qualité d’auxiliaire de justice, il nous revient de garantir à nos clients l’application des principes essentiels d’un procès juste et équitable. Pourtant, certains usages interrogent.
Nous, avocates en droit du travail, constatons une pratique qui nous semble remettre en cause le principe d’indépendance au sein de la magnifique profession qu’est la nôtre. En effet, certains confrères, consœurs cumulent leur profession d’avocat avec celle de conseillers prud’homaux. Si ce cumul est permis par les textes en vigueur, cela nous questionne.
Le Conseil de prud’hommes est une juridiction particulière puisqu’elle est composée de quatre juges non professionnels (les « conseillers prud’homaux ») réunissant un nombre égal de salariés et d’employeurs.
Ces conseillers sont nommés pour un mandat de quatre ans par arrêté conjoint du Garde des Sceaux et du ministre chargé du travail, sur proposition des organisations syndicales de salariés et professionnelles d’employeurs.
Pour être candidat dans le collège des conseillers employeurs, il suffit d’employer un seul salarié (C. du trav., L. 1441-12 N° Lexbase : L3972K7A), ou d’être salarié. Ainsi, un avocat peut être candidat dès lors qu’il emploie un salarié, un secrétaire juridique par exemple, au sein de son cabinet.
Là où un conseiller prud’homal ne peut pas être juré de cour d’assises (C. proc. pén., art. 257, al 2 N° Lexbase : L1370MAY), maire ou parlementaire (en vertu de la séparation des pouvoirs) ou juge consulaire d’un tribunal de commerce (Code de commerce, art. L. 723-8 N° Lexbase : L7651HNP), la fonction d’avocat lui est ouverte.
Par principe, la profession d’avocat est exclusive de toute autre profession. Il s’agit par-là de garantir l’indépendance de l’avocat, mais également d’éviter tout conflit d’intérêts.
Le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 (N° Lexbase : L8168AID) autorise pourtant à l’avocat de concilier sa profession à d’autres fonctions jugées suffisamment « nobles ». Ainsi, l’article 115 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat dispose dans son deuxième alinéa :
« La profession d’avocat est compatible avec les fonctions d’enseignement, les fonctions de collaborateur de député ou d’assistant de sénateur, de membre assesseur des tribunaux pour enfants ou des tribunaux paritaires de baux ruraux, de conseiller prud’homme, de membre des tribunaux des affaires de sécurité sociale, ainsi qu’avec celles d’arbitre, de médiateur, de conciliateur ou de séquestre ».
Un avocat peut donc cumuler à son statut la fonction de conseiller prud’homal et donc siéger dans une juridiction où un membre de son cabinet, collaborateur ou associé peut plaider.
Le décret du 27 novembre 1991 a pourtant dessiné des limites là où le risque de conflit pouvait paraître évident. Ainsi, un ancien fonctionnaire devenu avocat ne pourra pas, dans ses cinq premières années d’exercice, conclure et plaider contre les administrations relevant du département ministériel auquel il était attaché (art. 122).
Or, ce même décret reste silencieux lorsqu’il s’agit de garantir qu’un avocat cumulant la fonction de conseiller prud’homal exercera avec indépendance ses deux fonctions.
Certains mécanismes permettent certes d’atténuer, en apparence, le risque de conflit d’intérêts au titre desquels figurent l’abstention, le dépaysement ou encore la récusation.
L’abstention, procédé prévu à l’article 339 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1515LSW), permettrait de garantir l’impartialité des conseillers prud’homaux en leur offrant la possibilité de se faire remplacer lorsqu’ils estiment en conscience devoir s’abstenir. Il en reste que cette décision reste personnelle et non contraignante.
Le dépaysement, quant à lui, consiste au renvoi de l’affaire devant une juridiction limitrophe (C. proc. civ., art. 47 N° Lexbase : L7226LED). C’est sans compter les délais insensés sur lesquels butent les justiciables. En effet, à ce jour quatre ans sont désormais nécessaires avant qu’une décision soit rendue par le Conseil de prud’hommes de Nanterre. Ainsi, bien souvent le fatalisme l’emporte afin de ne pas perdre plus de temps, la solution la plus rapide étant paradoxalement d’interjeter appel.
Au même titre que la récusation, l'incident de procédure, mentionné à l’article L. 1457-1 du Code du travail (N° Lexbase : L2060H98), qui permet d’empêcher un conseiller prud’homal de l’examen d’un litige en raison d’un conflit d’intérêts (lien de parenté, lien de subordination, intérêt personnel à la contestation …) se heurte aux mêmes difficultés.
La Cour de cassation ne se limite pas aux dispositions de l’article du Code du travail en ajoutant aux causes de récusation les conditions de l’article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (N° Lexbase : L7558AIR) qui garantit que toute personne ait droit à ce que sa cause soit entendue équitablement par un tribunal indépendant et impartial.
Le mécanisme de récusation nous paraît cependant limité pour prévenir les conflits d’intérêts pour les avocats qui ne sont pas parties aux litiges.
Dans une affaire où une animosité était avérée entre un cabinet d’avocats et un conseiller prud’homal, le cabinet d’avocats avait sollicité une récusation générale, à titre préventif, chaque fois qu’un de ses membres était amené à plaider devant la juridiction composée dudit conseiller.
La Cour de cassation a débouté le cabinet d’avocats en ces termes :
« Le droit de récusation appartient aux clients présents ou à venir du cabinet X... et non à l'avocat qui n'est pas partie et ne peut mettre en œuvre ce droit à titre préventif » (Cass. civ. 2, 8 septembre 2005, n° 03-18.862, F-P+B N° Lexbase : A4419DKU).
Toutefois, le fondement du droit au procès équitable consacré par le droit européen a permis des avancées significatives en matière d’incompatibilité et de garanties d’impartialité.
Ainsi les Hauts magistrats ont jugé qu’un conseiller prud’homal délégué syndical ne pouvait exercer une mission d’assistance ou un mandat de représentation devant le conseil dont il était membre :
« Attendu que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial ;
Que cette exigence implique qu'un conseiller prud'homme n'exerce pas de mission d'assistance ou de mandat de représentation devant le conseil de prud'hommes dont il est membre » (Cass. soc., 3 juillet 2001, n° 99-42.735 N° Lexbase : A6262AGZ)
Qu’en est-il de l’avocat conseiller prud’homal dont la fonction principale est d’assister et de représenter ses clients devant cette même juridiction ?
Toujours sur le fondement du procès équitable, la jurisprudence est allée plus loin.
Dans un premier temps, la prohibition de représentation s’est élargie aux autres sections du Conseil de prud’hommes. Ainsi un délégué syndical conseiller prud’homal de la section industrie n’a pas été autorisé à assister une salariée dont le litige se déroulait devant la section encadrement (Cass. soc., 2 février 2005, n° 03-40.271, F-P+B N° Lexbase : A6384DGK).
Il a ensuite été interdit aux conseillers prud’homaux d’introduire une instance devant le conseil dont ils étaient membres, même s’ils cessaient de l’être ensuite. La sanction encourue étant la nullité sans régularisation possible (Cass. soc., 16 septembre 2008, n° 06-45.334, FS-P+B N° Lexbase : A3954EAP). Dans le cas d’espèce, il s’agissait une nouvelle fois d’un délégué syndical.
Finalement la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 (N° Lexbase : L4876KEC) a posé une interdiction textuelle dans le Code du travail à l’article L. 1453-2 (N° Lexbase : L5960KGT) :
« Les personnes habilitées à assister ou à représenter les parties en matière prud'homale, si elles sont par ailleurs conseillers prud'hommes, ne peuvent pas exercer une mission d'assistance ou un mandat de représentation devant le conseil de prud'hommes auquel elles appartiennent ».
Pour autant, la Cour de cassation n’a jamais eu à se prononcer sur le cumul des fonctions entre un conseiller prud’homal et un avocat. L’imprécision demeure là où se joue la garantie d’un procès équitable pour le justiciable.
Loin de vouloir décourager nos confrères et nos consœurs de s’impliquer dans le bon fonctionnement de la Justice, nous ne sommes pas convaincues que le cumul des fonctions d’avocat et de juge soit le moyen le plus juste d’y parvenir.
Si le Code du travail prohibe formellement à un avocat conseiller prud’homal d’introduire une instance, d’assister ou de représenter un client devant le Conseil de prud’hommes dans lequel il siège, rien n’empêche textuellement aux associés ou collaborateurs de cet avocat conseiller prud’homal de le faire.
Le risque de conflit d’intérêts est parfaitement ignoré par le pouvoir législatif, le pouvoir réglementaire, le CNB, les règlements intérieurs des barreaux ou encore la jurisprudence ordinale.
Nous questionnons cette situation qui n’a que pour unique victime le justiciable déjà malmené par la lenteur judiciaire sans parler des coûts supplémentaires éventuels induits par ces incidents de procédure.
Nous invitons le CNB ainsi que l’Ordre du Barreau de Paris à se saisir de cette question et proposons les modifications législatives et réglementaires suivantes :
Le Conseil de prud’hommes connaît d’importants dysfonctionnements, tels que des délais de jugement excessivement longs ou un taux d’appel élevé.
Si dans notre pratique quotidienne d’avocates salariées, nous supportons tant bien que mal ces difficultés, l’impartialité et la garantie d’un procès équitable sont des principes sur lesquels il nous semble urgent de nous positionner.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:479955
Réf. : Cass. civ. 3, 15 décembre 2021, n° 20-14.423, FS-B (N° Lexbase : A17347GC)
Lecture: 2 min
N9851BYI
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Vincent Téchené
Le 05 Janvier 2022
► Le bailleur est obligé, par la nature même du contrat de délivrer au preneur la chose louée et d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée, sans être tenu, en l'absence de clause particulière, d'en assurer la commercialité.
Faits et procédure. Une SCI a consenti un bail commercial sur un local situé au premier étage d’un centre commercial. La locataire a ensuite assigné la propriétaire en résiliation du bail et indemnisation de son préjudice résultant des manquements du bailleur à son obligation de délivrance et à ses engagements contractuels, en n'assurant pas une commercialité du centre permettant l'exploitation pérenne de son fonds.
Déboutée de sa demande (CA Paris, Pôle 5, 3ème ch., 4 mars 2020, n° 19/10473 N° Lexbase : A03783IT), la locataire a formé un pourvoi en cassation.
Décision. La Cour de cassation énonce qu’il résulte de l’article 1719 du Code civil (N° Lexbase : L8079IDL) que le bailleur est obligé, par la nature même du contrat de délivrer au preneur la chose louée et d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée, sans être tenu, en l'absence de clause particulière, d'en assurer la commercialité.
Or, elle constate que pour déduire l'existence à la charge du bailleur de l'obligation de délivrer à la locataire un local dans un centre commercial de haut de gamme présentant une décoration soignée, l'arrêt retient qu'il résulte des articles 3 et 13 des conditions générales du bail, ainsi que de l'article 14 de ses conditions particulières, que les parties ont entendu tout mettre en œuvre pour que le centre ait un positionnement différent des autres centres, non seulement en termes de qualité environnementale, mais également quant à l'architecture et à la décoration particulièrement soignée.
La Cour de cassation censure donc l’arrêt d’appel au visa des articles 1134 du Code civil (N° Lexbase : L1234ABC), dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 (N° Lexbase : L4857KYK), et 1719 du même code : en statuant ainsi, après avoir relevé que les clauses précitées n'engendraient d'obligations qu'à la charge du preneur mais aucune obligation particulière à la charge du bailleur, la cour d'appel a violé les textes visés.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:479851
Réf. : Ordonnance n° 2021-1247 du 29 septembre 2021 relative à la garantie légale de conformité pour les biens, les contenus numériques et les services numériques (N° Lexbase : L1766L8W)
Lecture: 31 min
N9972BYY
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Dimitri Houtcieff, Agrégé des Facultés de droit
Le 05 Janvier 2022
1. Contexte. – Entrée en vigueur ce 1er janvier 2022, l’ordonnance du 29 septembre 2021 relative à la garantie légale de conformité pour les biens, les contenus numériques et les services numériques est applicable aux contrats conclus à compter de cette date [1]. Le contenu de ce texte ne surprendra cependant guère : l’essentiel de ses dispositions résulte de la transposition de Directives européennes, au point de donner l’impression qu’elles étaient virtuellement de droit positif. Les ventes en ligne et conventions portant sur des services et des données numériques croissant et multipliant très au-delà du cadre de nos frontières, il n’est pas étonnant que l’Union européenne se soit saisie de la question. Elle s’est ainsi attachée à établir des règles harmonisées applicables à la vente en ligne ainsi qu’à la fourniture de contenu et de services numériques dans la perspective d’un marché unique numérique [2].
2. L’émergence d’une « nouvelle catégorie contractuelle ». – L’ordonnance vise largement à cerner les contours de la garantie légale de conformité applicable aux contrats de fourniture de services et de contenus numériques. Il s’agit ainsi de régir, selon les termes de l’article L. 224-25-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L2137L8N), « le contrat par lequel un professionnel, ou toute personne se présentant ou se comportant comme tel, fournit un contenu numérique et un service numérique au consommateur, et ce dernier s'acquitte d'un prix ou procure tout autre avantage au lieu ou en complément du paiement d'un prix ». L’ordonnance n’a cependant pas entendu se borner à quelques ajustements de la garantie de conformité du Code de la consommation, ni même à en acculturer les contours à la numérisation : il s’est agi, selon les termes du Rapport au Président de la République, de créer une « nouvelle catégorie contractuelle » [6]. La méthode retenue est à cet égard peut être excessive : l’opportunité de cette catégorie toute neuve est douteuse, si l’on observe, ainsi qu’on le verra, qu’elle n’a vocation qu’à déboucher sur des règles similaires à celles du droit commun. Quoi qu’il en soit, cette « nouvelle catégorie contractuelle » a désormais son lexique propre, que les rédacteurs de l’ordonnance ont jugé opportun de faire figurer dans l’article liminaire du Code de la consommation.
3. Abus des définitions. – Certaines des définitions figurant désormais dans l’article liminaire apparaissent surabondantes : fallait-il par exemple définir le producteur comme « le fabricant d'un bien, l'importateur d'un bien dans l'Union européenne ou toute autre personne qui se présente comme producteur en apposant sur le bien son nom, sa marque ou un autre signe distinctif » ? Non seulement cette disposition coupée et collée de la Directive 2019/771 diffère par exemple de celle que retient le Code civil en matière de produits défectueux [8], mais elle ne cadre même pas avec celle de l’article L. 421-1 du Code de la consommation [9] (N° Lexbase : L1083K7A) : la variation d’une définition d’un code ou d’un article à l’autre est rarement le signe de la fermeté d’une notion... Dans le même ordre d’idées, on peut se demander s’il est véritablement utile et éclairant de définir les données à caractère personnel comme celles « définies à l'article 4, point 1, du Règlement (UE) n° 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ».
4. Enjeux et plan de l’étude. – Au-delà de ces définitions, l’ordonnance tend donc à fixer le cadre de la garantie légale de conformité des biens et produits numériques. La garantie de conformité est ainsi opportunément due désormais, non seulement en cas d’achat de biens corporels, mais aussi en cas d’achat de jeu vidéo en ligne, ou encore d’abonnement à une chaîne numérique à ou une plateforme de réseaux sociaux [15].
Les rédacteurs de l’ordonnance ne se sont cependant pas bornés à affirmer de manière générale et abstraite qu’en cas d’achat d’un bien, d’un contenu ou d’un service numérique, ceux-ci devaient être conformes à l’usage attendu, quitte à préciser les conséquences de ce principe en fonction des biens, contenus et services considérés. Ils ont préféré procéder – si l’on ose dire – à une mise en conformité de la garantie de conformité à ces biens et services (I), tout en procédant à quelques mises à jour du Code de la consommation lui-même (II).
I. Mise en conformité
5. Plan. – L’ordonnance ne débouche sur aucun régime unifié : les garanties applicables aux biens et celles applicables aux services et contenus numériques figurent dans deux chapitres distincts. Les dispositions qui les composent étant cependant presque identiques, à quelques adaptations près, on examinera ensemble le contenu (A) et la mise en œuvre de l’une et l’autre de ces garanties (B).
A. Contenu
6. Champ d’application : consommateur et non professionnel. – La garantie légale de conformité applicable à la vente de biens et celle relative à la fourniture des contenus et services numériques sont régies par des dispositions séparées [16]. Sans doute comprend-on que certaines adaptations soient rendues nécessaires par le caractère virtuel du service ou corporel du bien réglementé : ainsi a-t-il fallu exclure l’application de la garantie aux biens vendus aux enchères ou par autorité de justice, ou encore à la vente d’animaux domestiques [17]. Les points communs des dispositions considérées l’emportent cependant de loin sur leurs dissemblances, au point qu’il est permis de regretter leur éloignement.
7. Conformité de la conformité. – La notion de conformité ne change pas de nature selon qu’elle est envisagée en matière de vente de biens ou de fourniture de contenus ou services numériques. Cette proximité a ses raisons tant théoriques que pratiques. D’un point de vue théorique, il s’agit ici comme là – que l’on achète un livre ou un jeu vidéo – de vérifier la conformité du produit à l’usage qui en était attendue. D’un point de vue pratique, le bien vendu pouvant être assorti d’un contenu ou d’un service numérique, un brin de cohérence des dispositions entre elles ne saurait nuire.
Enfin, le cas échéant, le bien, le service ou le contenu numérique doit avoir les qualités que le professionnel a présentées au consommateur sous forme – si c’est un bien – d’échantillon ou de modèle ou – si c’est un contenu ou un service numérique – de version d'essai ou d'aperçu, avant la conclusion du contrat. Le bien, le contenu ou le service doivent aussi être fournis avec tous les accessoires et les instructions d'installation auxquels le consommateur peut légitimement s'attendre. De manière spécifique, on relèvera que le contenu ou le service numérique doivent en principe être fournis selon la version la plus récente qui est disponible au moment de la conclusion du contrat, sauf si les parties en convenaient autrement. Ils entraînent par ailleurs une obligation d’assistance clientèle ainsi, le cas échéant, qu’une assistance technique.
Somme toute, la garantie légale de conformité ne sort ni transfigurée ni profondément divisée des nouvelles dispositions : tout au plus est-elle mise en conformité avec les exigences propres aux contenus et services numériques. Des remarques identiques peuvent être faites sur le terrain de la mise en œuvre de la garantie.
B. Mise en œuvre de la garantie
8. Durée. – Les recours auxquels donne lieu le défaut de conformité sont – selon les termes mêmes du rapport au Président de la République – « quasi identiques » en matière de vente de biens ou de contenus et de services numériques. La durée de la garantie ne varie guère : selon le nouvel article L. 217-3 alinéa 2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L2119L8Y), le vendeur répond des défauts de conformité existants qui apparaissent dans un délai de deux ans. Le consommateur ou le non-professionnel bénéficient en cette matière d’une présomption d’antériorité [25] : le défaut apparu dans les vingt-quatre mois du point de départ de la garantie est présumé exister au moment de la délivrance, sauf preuve contraire ou si cette présomption est incompatible avec la nature du bien ou du défaut invoqué : la charge de la preuve de ce que le défaut est dû à une mauvaise utilisation du consommateur pèse ainsi sur le professionnel.
9. Mise en conformité. - En cas de manquement à l’obligation de garantie, le consommateur ou le non-professionnel sont en droit d’exiger la mise en conformité du bien, du contenu ou du service numérique [28]. Le principe est celui d’une exécution en nature, comme en droit commun des contrats [29] : en matière de vente de biens – et par évidence seulement en cette matière – le consommateur peut ainsi bénéficier du remplacement sans frais du bien [30]. La mise en conformité doit intervenir sans frais pour le consommateur, sans retard injustifié à compter de sa demande, et sans inconvénient majeur pour lui compte tenu de la nature de la prestation et de l’usage que le consommateur recherchait [31]. Le consommateur n’est pas tenu de régler la période d’utilisation du bien, du service ou du contenu non conforme [32].
10. Exception à la mise en conformité. – Par exception, le professionnel peut échapper à la mise en conformité, pour peu qu’elle soit impossible ou qu’elle entraîne des coûts disproportionnés, au regard notamment de l’importance du défaut de conformité [33]. S’agissant des biens corporels, l’article L. 217-12 (N° Lexbase : L2126L8A) tient également compte « de la possibilité éventuelle d'opter pour l'autre choix sans inconvénient majeur pour le consommateur ». En toute occurrence, il appartiendra au professionnel de motiver son refus par écrit ou « sur support durable » [34] : entendons par là que l’écrit pourra être dématérialisé.
11. Réduction du prix. – La résistance du professionnel peut aussi conduire le consommateur à recourir à la réduction du prix, elle aussi admise en principe par le droit commun des contrats depuis la réforme [37]. Les articles L. 217-14 (N° Lexbase : L2152L89) et L. 224-25-20 (N° Lexbase : L2171L8W) autorisent ainsi le consommateur à procéder à une réduction en cas de refus de toute mise en conformité, ou si la mise en conformité du bien intervient au-delà d’un délai de trente jours pour les biens ou avec un « retard injustifié » pour les contenus et les services, si elle cause au consommateur un inconvénient majeur, ou qui persiste malgré les tentatives du professionnel. La réduction est cependant écartée – comme la résolution – si le défaut de conformité est mineur, ce qu’il appartiendra au professionnel d’établir [38]. En matière de vente de biens, le consommateur a également droit à une réduction du prix du bien ou à la résolution du contrat lorsque le défaut de conformité est si grave qu’il justifie que la réduction du prix ou la résolution du contrat soit immédiate : il n’est alors même pas tenu de demander la réparation ou le remplacement du bien au préalable.
12. Résolution et restitutions. - Le consommateur subissant un manquement à l’obligation de délivrance peut enfin recourir à la résolution, dont les articles L. 217-16 (N° Lexbase : L2154L8B) et L. 224-25-22 (N° Lexbase : L2173L8Y) prévoient les contours. La possibilité d’invoquer la résolution demeure même si le défaut de conformité ne porte que sur certains biens délivrés en vertu du contrat de vente [40]. Quant aux contrats de vente de biens comportant des éléments numériques, ils sont soumis aux conséquences de la résolution des contrats portant sur des services et des contenus numériques. Les restitutions de ces contenus ou services numériques appellent du reste quelques observations. Non seulement les prestations dont le consommateur a bénéficié ne peuvent donner lieu à une « restitution » proprement dite – ce qui est assez courant et s’observe dans le moindre contrat de bail – mais ce dernier conserve le plus souvent la possibilité d’utiliser le service ou le contenu numérique ou d’en faire une copie : l’acheteur d’un film en ligne peut aisément en faire un enregistrement. L’article L.224-25-22 II du Code de la consommation prévoit dès lors que « le consommateur s’abstient d'utiliser le contenu numérique ou le service numérique ou de le rendre accessible à des tiers ». La naïveté du législateur ayant ses limites, cette disposition autorise en outre le professionnel à empêcher toute utilisation ultérieure du contenu numérique ou du service numérique en les rendant inaccessibles ou en désactivant le compte utilisateur du consommateur. Dans l’hypothèse où le contenu numérique a été fourni sur un support matériel, ce dernier doit être restitué par le consommateur sans retard injustifié et aux frais du professionnel, pour peu que ce dernier l’ait réclamé dans les quinze jours de la date où le consommateur l’a informé de sa décision de résoudre le contrat.
Quant aux données personnelles que le professionnel a pu recueillir, elles échappent à ce dispositif et demeurent soumises, au-delà du contrat, aux dispositions du Code de la consommation relatives à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD) [45].
II. Mises à jour
13. Plan. - Les contenus et services numériques ont cette particularité d’être généralement évolutifs : l’ordonnance a ainsi créé une série de dispositions consacrées à leurs mises à jour (A). L’ordonnance a aussi procédé à quelques mises à jour du Code de la consommation lui-même, afin de tenir compte des évolutions induites par l’accueil de ces contrats portant sur des produits numériques : on s’arrêtera brièvement sur deux d’entre elles (B).
A. Mises à jour des services ou des contenus numériques
14. Scories. Les services et les contenus nécessitent en général certaines mises à jour : ils se distinguent par là des biens corporels, pour lesquels de telles mises à jour se conçoivent difficilement. L’ordonnance crée ainsi une série de dispositions spécifiques à cette question, qui figurent à la fois dans un paragraphe de la sous-section relative à la garantie de conformité pour les contenus numériques et dans une sous-section de la section consacrée à la garantie de conformité des biens. S’il est vrai que les biens peuvent comporter des éléments numériques, on peut ici encore se demander si la redite était nécessaire, d’autant que ce bégaiement de dispositions débouche sur quelques scories [46].
15. Définition et distinction. – Cédant une fois de plus à la tentation de la définition, les articles L. 217-18 (N° Lexbase : L2128L8C) et L. 224-25-24 (N° Lexbase : L2175L83) du Code de la consommation précisent que l’on entend par mises à jour, les mises à jour (sic) ou les modifications visant à maintenir, adapter ou faire évoluer les fonctionnalités du bien, du contenu numérique ou du service numérique, y compris les mises à jour de sécurité, que ces mises à jour soient nécessaires ou non au maintien de la conformité. L’économie des dispositions considérées repose sur une distinction entre les mises à jour indispensables et celles qui ne le sont pas.
16. Les mises à jour qui sont nécessaires. - Le Code de la consommation impose d’abord au professionnel de veiller « à ce que le consommateur soit informé des mises à jour nécessaires au maintien de la conformité du contenu numérique ou du service numérique et à ce qu'il les reçoive » [47]. La durée de cette obligation dépend des circonstances et du contrat. S’agissant de la fourniture de services ou de contenus numériques, si rien n’a été prévu par les parties, l’obligation d’information doit être exécutée « durant une période à laquelle le consommateur peut légitimement s'attendre, eu égard au type et à la finalité du contenu numérique ou du service numérique et compte tenu des circonstances et de la nature du contrat, dans le cas d'une opération de fourniture ponctuelle ou d'une série d'opérations de fourniture distinctes » [48]. Si le contrat prévoit la fourniture continue du service ou du contenu numérique pendant une période donnée, l’obligation d’information subsiste durant toute la période contractuelle [49]. Ces principes sont adaptés s’agissant des biens comportant des éléments numériques : l’article L. 217-19 (N° Lexbase : L2156L8D) distingue alors trois hypothèses. En principe, comme en matière de contenus et de services numérique, l’obligation d’information est due durant une période à laquelle le consommateur peut légitimement s'attendre, eu égard au type et à la finalité des biens et éléments numériques et compte tenu des circonstances et de la nature du contrat, dans le cas d'une opération de fourniture unique du contenu numérique ou du service numérique [50]. Dans le cas où une période de fourniture du service ou du contenu est stipulée par les parties, la durée de l’obligation d’information est aménagée pour tenir compte de la délivrance du bien et du délai biennal ordinaire de la garantie : si le contrat de vente prévoit la fourniture continue d’un contenu ou d’un service numérique pendant une durée inférieure à deux ans, l’obligation d’information subsiste deux ans à compter du moment où le bien comportant les éléments numériques a été délivré [51]. En revanche, si le contrat prévoit la fourniture du contenu ou du service pendant une durée supérieure à deux ans, l’obligation d’information demeure tout ce temps [52].
17. Mises à jour qui ne sont pas nécessaires. – S’agissant des mises à jour qui ne sont pas nécessaires au maintien de la conformité du contenu ou du service numérique, il appartient au professionnel – selon la terminologie approximative des articles L.217-20 (N° Lexbase : L2157L8E) et L.224-25-26 (N° Lexbase : L2176L84) – de « respecter » certaines « conditions ». Le principe de ces mises à jour doit ainsi être prévu par le contrat, lequel doit par ailleurs en « fournir une raison valable » [54]. Le professionnel doit en outre informer le consommateur « de manière claire et compréhensible, raisonnablement en avance et sur un support durable, de la mise à jour envisagée en lui précisant la date à laquelle elle intervient » [55]. Cette obligation d’information ne doit pour une fois rien aux Directives : elle est tirée de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC) du 10 février 2020 [56].
La mise à jour doit évidemment être effectuée sans coût supplémentaire pour le consommateur, le professionnel devant par ailleurs informer le consommateur qu’il est en droit de la refuser ou, le cas échéant de la désinstaller, si elle a une incidence négative sur son accès au contenu numérique ou au service numérique ou à son utilisation de ceux-ci [57]. Dans ce dernier cas, le consommateur peut résoudre le contrat sans frais dans un délai maximal de trente jours, à moins que la mise à jour n'ait qu'une incidence mineure. Le consommateur ne peut par ailleurs résoudre le contrat si le professionnel lui a proposé de conserver le contenu numérique ou le service numérique sans la mise à jour, y compris au moyen d'une désinstallation de la mise à jour, et si ce dernier demeure conforme [58].
B. Mise à jour du Code de la consommation
18. Information précontractuelle. – Au-delà des dispositions spécifiques liées à la conformité, l’accueil de ces nouvelles dispositions impliquait quelques mises en ordre et en cohérence. Sans pouvoir dans ce cadre les examiner toutes, on relèvera ici en particulier la modification de l’obligation générale d’information précontractuelle prévue par l’article L.111-1 du Code de la consommation (N° Lexbase : L2106L8I). Cette dernière a en effet été complétée pour évoquer, non seulement les caractéristiques essentielles des biens et des services, mais également celles des services et des contenus numériques.
20. Conclusion. – Somme toute, la transposition des Directives est évidemment opportune. On peut cependant regretter avec d’autres que les rédacteurs de l’ordonnance n’y aient pas procédé avec davantage de méthode. Les contrats de fourniture de services et de contenus numériques ne méritaient peut-être pas qu’on les consacre de manière aussi spécifique. La dématérialisation qu’implique le caractère numérique des prestations ne paraît finalement déboucher que sur quelques modifications : après tout, le saut n’était pas beaucoup plus grand entre la vente et le transport de créance, que les rédacteurs du Code Napoléon avaient jadis réglementé ensemble. On peut ainsi se demander si les rédacteurs de l’ordonnance n’auraient pas eu avantage à rassembler plutôt qu’à distinguer les dispositions relatives à la vente de biens et à la fourniture de services et de contenu numérique. La multiplication des dispositions calquées les unes sur les autres et la litanie des définitions ne participent pas à clarifier une matière relativement complexe. Elles ne contribueront pas davantage à faire du Code de la consommation autre chose qu’une compilation de dispositions disparates.
[1] Sur ce texte, v. not. C. Hélaine, Adaptation de la garantie légale de conformité pour les biens et les contenus et services numériques, D. actualité, 5 octobre 2021 ; V. Labordes de Virville, Nouveautés en matière de garantie légale de conformité dans les ventes de biens de consommation À propos de la transposition des directives UE 2019/770 et 2019/771 du 20 mai 2019 par l’ordonnance n° 2021-1247 du 29 septembre 2021, CCC n°11, novembre 2021, étude 11 ; S. Bernheim-Desvaux, Réflexion autour de l'ordonnance n° 2021-1247 du 29 septembre 2021 relative à la garantie légale de conformité pour les biens, les contenus numériques et les services numériques, CCC n°11, novembre 2021, comm. 174.
[3] Directive (UE) 2019/771 du 20 mai 2019 relative à certains aspects concernant les contrats de vente de biens, modifiant le Règlement (UE) n° 2017/2394 et la directive 2009/22/CE et abrogeant la directive 1999/44/CE (N° Lexbase : L3484LQ4). Cette directive aplanit les différences découlant des canaux de vente – physiques ou virtuels – adoptés par les entreprises. Sur cette directive, C. Aubert de Vincelles, Nouvelle directive sur la conformité dans la vente entre professionnel et consommateur, JCP G, 2019, actu. 758.
[4] Directive (UE) 2019/770 du 20 mai 2019 (N° Lexbase : L3483LQ3) relative à certains aspects concernant les contrats de fourniture de contenus numériques et de services numériques. Sur cette directive : S. Bernheim-Desvaux, Droit européen de la consommation. De nouvelles règles contractuelles en matière de conformité seront applicables à compter du 1er janvier 2022 !, Contrats, conc. consom., 2019, comm. 130 ; J.-D. Pellier, Le droit de la consommation à l’ère du numérique, RDC, 2019, n° 4, p. 89 ; C. Zolynski, Contrats de fourniture de contenus et de services numériques. À propos de la directive (UE) 2019/770/UE du 20 mai 2019, JCP G, 2019, p. 1181. Adde sur les propositions de directives : Dossier : la fourniture de contenus numériques, Dalloz IP/IT, 2017, pp. 6 et s.
[5] Directive (UE) 2019/770 du 20 mai 2019, op. cit., cons. n° 1.
[6] Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2021-1247 du 29 septembre 2021 (N° Lexbase : Z258321P).
[7] J.-D. Pellier, La dénaturation de l’article liminaire du code de la consommation – à propos de l’ordonnance n°2021-1247 du 29 octobre 2021 relative à la garantie légale de conformité pour les biens, les contenus numériques et les services numériques.
[8] C. civ., art. 1245-5 (N° Lexbase : L0625KZ8).
[9] C. consom., art. L. 421-1 (N° Lexbase : L1083K7A) ; « Pour l'application du présent titre, on entend par : 1° Producteur: a) Le fabricant du produit, lorsqu'il est établi dans l'Union européenne et toute autre personne qui se présente comme fabricant en apposant sur le produit son nom, sa marque ou un autre signe distinctif, ou celui qui procède à la remise en état du produit ; b) Le représentant du fabricant, lorsque celui-ci n'est pas établi dans l'Union européenne ou, en l'absence de représentant établi dans l'Union européenne, l'importateur du produit ; c) Les autres professionnels de la chaîne de commercialisation, dans la mesure où leurs activités peuvent affecter les caractéristiques de sécurité d'un produit ; 2° Distributeur : tout professionnel de la chaîne de commercialisation dont l'activité n'a pas d'incidence sur les caractéristiques de sécurité du produit ».
[10] C. consom., art. limin., 9° : « Fonctionnalité : la capacité d'un bien, d'un contenu numérique ou d'un service numérique à remplir ses fonctions eu égard à sa finalité ».
[11] C. consom., art. limin., 10° : « Compatibilité : la capacité d'un bien, d'un contenu numérique ou d'un service numérique à fonctionner avec du matériel informatique ou des logiciels, avec lesquels des biens, des contenus numériques ou des services numériques de même type sont normalement utilisés, sans qu'il soit nécessaire de convertir lesdits biens, matériels, logiciels, contenus numériques ou services numériques ».
[12] C. consom., art. limin., 11° : « Interopérabilité : la capacité d'un bien, d'un contenu numérique ou d'un service numérique à fonctionner avec du matériel informatique ou des logiciels différents de ceux avec lesquels des biens, des contenus numériques ou des services numériques de même type sont normalement utilisés ».
[13] C. consom., art. limin., 12° : « Durabilité : la capacité d'un bien à maintenir les fonctions et performances requises dans le cadre d'un usage normal ».
[14] Ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021 transposant la Directive 2019/2161 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 et relative à une meilleure application et une modernisation des règles de l'Union en matière de protection des consommateurs, art. 1 (N° Lexbase : Z462351T). L’article liminaire évoquera ainsi : « 14° Place de marché en ligne : un service utilisant un logiciel, y compris un site internet, une partie de site internet ou une application, exploité par un professionnel ou pour son compte, qui permet aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec d'autres professionnels ou consommateurs ; 15° Opérateur de place de marché en ligne : tout professionnel qui fournit une place de marché en ligne aux consommateurs, au sens du 2° du I de l'article L. 111-7 ; 16° Pratique commerciale : toute action, omission, conduite, démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d'un professionnel, en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture d'un bien, d'un service, ou portant sur des droits et obligations ».
[16] C. consom., art. L. 217-3 (N° Lexbase : L2119L8Y) et s. (contrats de vente de biens) et art. L. 224-25-12 (N° Lexbase : L2168L8S) et s..
[17] C. consom., art. L. 217-2 (N° Lexbase : L2118L8X).
[18] C. consom., art. L. 217-32 (N° Lexbase : L2164L8N) et L. 224-25-31 (N° Lexbase : L2194L8R).
[19] Cass. civ. 1, 15 mars 2005, n° 02-13.285, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A2950DHQ), D. 2005. 1948, note A. Boujeka, RTD civ. 2005. 393, J. Mestre et B. Fages.
[20] C. consom., art. L. 219-1 (contrat de vente de biens N° Lexbase : L2134L8K) et L. 224-25-32 (fourniture de contenu ou de service numériques N° Lexbase : L2195L8S).
[21] C. consom., art. L. 241-5 et s. (contrat de vente de biens N° Lexbase : L2179L89) et art. L.241-18-1 et s. (fourniture de contenu ou de service numériques N° Lexbase : L2204L87).
[22] C. consom., art. L. 217-4 ([LXB=L2120L8Z) ]et L.217-5 (N° Lexbase : L2121L83).
[23] C. consom., art. L. 224-25-13 (N° Lexbase : L2165L8P) et L. 224-25-14 (N° Lexbase : L2212L8G).
[24] C. consom., art. L. 217-5 et art. L. 224-25-14.
[25] C. consom., art. L. 217-7 (N° Lexbase : L2123L87).
[26] C. consom., art. L. 224-25-12 (N° Lexbase : L2168L8S).
[27] C. consom., art. L. 217-3 1 et 2° (N° Lexbase : L2119L8Y).
[28] C. consom., art. L. 217-8 (N° Lexbase : L2124L88) et art. L.224-25-17 (N° Lexbase : L2167L8R).
[29] C. civ., art. 1221 (N° Lexbase : L1985LKQ) : « Le créancier d'une obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre l'exécution en nature sauf si cette exécution est impossible ou s'il existe une disproportion manifeste entre son coût pour le débiteur de bonne foi et son intérêt pour le créancier ».
[30] C. consom., art. L. 217-8.
[31] C. consom., art. L. 217-10 (N° Lexbase : L2150L87) et L.224-25-15 (N° Lexbase : L2169L8T).
[32] C. consom., art. L. 217-11 (N° Lexbase : L2151L88) et L.224-25-18 (N° Lexbase : L2170L8U).
[33] C. consom., art. L. 224-25-19 al. 1er (N° Lexbase : L2190L8M).
[34] C. consom., art. L. 217-12 al. 4 (N° Lexbase : L2126L8A) et L.224-25-19 al. 3 .
[35] C. consom., art. L. 224-25-19. Il est plus généralement renvoyé aux « articles 1221 et suivants », c’est-à-dire à l’ensemble des dispositions de la sous-section consacrée à l’exécution forcée en nature.
[36] C. civ., art. 1219 (N° Lexbase : L0944KZY) et 1220 (N° Lexbase : L0943KZX).
[37] C. civ., article 1223 (N° Lexbase : L1984LKP).
[38] C. consom., art. L. 217-14 al. 3 (N° Lexbase : L2152L89) et L. 224-25-20 al. 3 ([LXB L2171L8W]).
[39] V. par ex. CA Aix-en-Provence, ch. 1-8, 23 septembre 2021, n° 18/03109 (N° Lexbase : A198347L), Gaz. Pal. 2022 (à paraître) obs. D. Houtcieff. Selon cette décision, l’article 1223 du Code civil prévoit en cas d’inexécution une réduction de prix peut être appliquée a priori, ou a posteriori, selon que le prix a déjà, ou non, été partiellement, ou totalement, versé : applique de facto cette sanction le contractant ne versant pas le solde de la facture en raison de la mauvaise exécution du contrat ; v. aussi, sur cette question, nos remarques in Droit du contrat, Bruylant 2001, n° 955-7).
[40] C. consom., art. L. 217-16 al. 2 (N° Lexbase : L2154L8B). L’alinéa suivant précise que pour les contrats mentionnés au II de l'article L. 217-1 (N° Lexbase : L2149L84), prévoyant la vente de biens et, à titre accessoire, la fourniture de services non couverts par le présent chapitre, le consommateur a droit à la résolution de l'ensemble du contrat. En outre, dans le cas d'une offre groupée au sens de l'article L.224-42-2 (N° Lexbase : L6553L4H), le consommateur a le droit à la résolution de l'ensemble des contrats y afférents.
[41] C. consom., art. L. 224-25-22 (N° Lexbase : L2173L8Y).
[42] C. civ., art. 1352-3 (N° Lexbase : L0737KZC).
[43] Selon l’article L. 224-25-22 du Code de la consommation, cette mise à disposition doit intervenir sans frais et dans un délai raisonnable, dans un format couramment utilisé par machine. Les données personnelles, qui font l’objet d’un traitement personnel, sont exclues de l’objet de cette obligation.
[44] C. consom., art. L. 224-25-22 III.
[45] C. consom., art. L. 224-25-22. Adde sur la question du contrat et des données personnelles : Dossier « Contrat et protection des données à caractère personnel (I) : aspects généraux », AJ Contrat, 2019, p. 365 et Dossier « Contrat et protection des données à caractère personnel (II) : aspects particuliers », AJ Contrat, 2019, p. 419 ; F.-L. Simon et A. Bounedjoum, RGPD : quelles nouvelles règles en matière de responsabilité et quels impacts sur les contrats ?, AJ Contrat, 2018, p. 172 ; Adde Dossier « le contrat en droit des données à caractère personnel », Dalloz IP/IT 2021, p.180 et notamment N. Martial-Braz, Le contrat entre responsable de traitement et sous-traitant, ibid., p.181 et T. Douville, Le contrat en matière de responsabilité conjointe de traitement de données, ibid., p.188.
[46] L’article L. 224-25-24 alinéa 1er du Code de la consommation (N° Lexbase : L2175L83) affirme par exemple – par erreur de copié-collé sans doute – que « les mises à jour d'un contenu numérique ou d'un service numérique sont régies par la présente sous-section » alors qu’il s’agit d’un paragraphe…
[47] C. consom., art. L. 217-19 (N° Lexbase : L2156L8D) et L. 224-25-25, I (N° Lexbase : L2191L8N).
[48] C. consom., art. L. 224-25-25, I, 1°.
[49] C. consom., art. L. 224-25-25, I, 2°.
[50] C. consom., art. L. 217-19, I, 1°.
[51] Ibid.
[52] Ibid.
[53] C. consom., art. L. 224-25-25 II 1° et 2°.
[54] C. consom., art. L. 217-20, 1° (N° Lexbase : L2157L8E) et L. 224-25-26, 1° (N° Lexbase : L2176L84).
[55] C. consom., art. L. 217-20, 2° et L. 224-25-26, 2°.
[56] Loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC), art 27 (N° Lexbase : L8806LUP).
[57] C. consom., art. L. 217-20, 4° et L. 224-25-26, 4°.
[58] C. consom., art. L. 217-20 et L. 224-25-26.
[59] C. civ., art. 1107 (N° Lexbase : L0818KZC).
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:479972
Réf. : Loi n° 2021-1900, du 30 décembre 2021, de finances pour 2022 (N° Lexbase : L3007MAM)
Lecture: 2 min
N9903BYG
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Marie-Claire Sgarra
Le 05 Janvier 2022
► La loi n° 2021-1900, du 30 décembre 2021, de finances pour 2022, promulguée le 30 décembre 2021, a été publiée au Journal officiel du 31 décembre 2021.
📌 Principales dispositions en matière de fiscalité des particuliers :
📌 Principales dispositions en matière de fiscalité des entreprises :
Ne manquez pas toutes nos précisions sur ces nouveaux dispositifs dans notre dossier spécial « Loi de finances pour 2022 ».
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:479903
Réf. : Cass. soc., 15 décembre 2021, n° 20-18.782, FS-B (N° Lexbase : A17457GQ)
Lecture: 2 min
N9845BYB
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Charlotte Moronval
Le 05 Janvier 2022
► Selon l’article L. 1235-3 du Code du travail (N° Lexbase : L1442LKM), si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et si l'une ou l'autre des parties refuse la réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux, exprimés en mois de salaire brut.
Faits et procédure. Un salarié est, à l’issue d’un arrêt maladie, déclaré inapte à son poste de travail, à la suite d'un examen réalisé par le médecin du travail. Il est licencié, après 29 ans d’ancienneté, pour inaptitude d’origine non professionnelle et impossibilité de reclassement. Contestant son licenciement, il saisit la juridiction prud'homale.
La cour d’appel (CA Nancy, 11 juin 2020, n° 19/01011 N° Lexbase : A39753NK) condamne l’employeur à payer au salarié la somme nette de 63 364,20 euros, à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application de l’article L. 1235-3 du Code du travail. Les juges du fond retiennent que, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l’entreprise et de l’effectif de celle-ci, il y a lieu de fixer le préjudice à cette somme nette.
La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel.
Le salarié ne pouvait prétendre, au regard de son ancienneté du montant de son salaire brut de 3 168,21 euros, qu’à une indemnité maximale de 63 364,20 euros brut.
La Cour de cassation fait ici une application stricte du barème. À noter qu’elle ne se prononce pas sur la conformité du barème Macron aux textes internationaux. Pour en savoir plus : v. ÉTUDE : La cause réelle et sérieuse de licenciement pour motif personnel, L'indemnisation du salarié licencié, in Droit du travail, Lexbase (N° Lexbase : E4830Z3B). |
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:479845
Réf. : CE, 9° et 10° ch.-r., 10 décembre 2021, n° 440845, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A83287E8)
Lecture: 2 min
N9834BYU
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Yann Le Foll
Le 05 Janvier 2022
► Une requête indemnitaire émanant de plusieurs requérants est recevable si les conclusions qu'elle comporte présentent entre elles un lien suffisant ;
► dès lors, la circonstance que de telles conclusions soient soumises à des conditions de recevabilité différentes n'est pas de nature à faire obstacle à l'examen, dans une même instance, de leur recevabilité respective.
Faits. Un secrétaire administratif de classe normale du cadre national des préfectures a été victime le 5 mars 2003 sur son lieu de travail d'un accident reconnu imputable au service. Lui, son épouse et leurs enfants ont formé le 26 avril 2017 une demande tendant à l'indemnisation de leurs préjudices respectifs subis du fait de cet accident de service et de la faute imputable au ministre de l'Intérieur dans l'organisation du service.
Cette demande ayant été implicitement rejetée, ils ont saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande indemnitaire qui a rejeté cette demande comme manifestement irrecevable pour tardiveté et leur appel contre cette ordonnance a aussi été rejeté.
Rappel. Le litige entre l'administration et les membres de la famille d'un fonctionnaire aux fins de réparation des préjudices propres, qu'ils estiment avoir subis du fait de l'accident de service de celui-ci, ne saurait être regardé comme un litige entre l'administration et l'un de ses agents au sens et pour l'application de l'article L. 112-2 du Code des relations entre le public et l'administration (N° Lexbase : L1772KNX).
L'article L. 112-6 du même code (N° Lexbase : L1774KNZ), selon lequel les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande contre une décision implicite lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications exigées par la réglementation, leur est, par suite, applicable (CE, 2° et 7° s-s-r., 26 octobre 2011, n° 340847, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0833HZU).
Position CE. Dès lors, en jugeant tardives les conclusions indemnitaires présentées, dans une même demande, par les requérants en vue de la réparation de leurs propres préjudices consécutifs à l'accident de service en question, dont il n'était pas contesté qu'elles présentaient un lien suffisant avec les conclusions présentées par ce dernier dans cette demande, au motif que les conditions de déclenchement du délai de recours contentieux prévues à l'article L. 112-6 du Code des relations entre le public et l'administration ne leur étaient pas applicables, la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La requête introductive d'instance, La présentation de la requête introductive d'instance par plusieurs personnes physiques ou morales, in Procédure administrative, (dir. C. De Bernardinis), Lexbase (N° Lexbase : E3824EXW). |
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:479834
Réf. : Loi n° 2021-1729, du 22 décembre 2021, pour la confiance dans l'institution judiciaire (N° Lexbase : Z459921T)
Lecture: 2 min
N9861BYU
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Alexandra Martinez-Ohayon
Le 05 Janvier 2022
► La loi n° 2021-1729, du 22 décembre 2021, pour la confiance dans l’institution judiciaire a été publiée au Journal officiel du 23 décembre 2021 ; elle prévoit notamment de faciliter le recours aux MARD avec la création d’un Conseil national de la médiation et complète la liste exhaustive des titres exécutoires.
En effet, aux termes des dispositions de l’article 45, il découle la création d’un Conseil national de la médiation placé auprès du ministre de la Justice dont un décret en Conseil d’État fixera l’organisation, les moyens et les modalités de fonctionnement.
Le Conseil national de la médiation sera notamment chargé de :
Il ressort de l’article 44 que les transactions, et les actes constatant un accord issu d'une médiation, d'une conciliation ou d'une procédure participative, lorsqu'ils sont contresignés par les avocats de chacune des parties et revêtus de la formule exécutoire par le greffe de la juridiction compétente, constituent un titre exécutoire, complétant d’un septième alinéa la liste des titres exécutoires de l'article L. 111-3 du Code des procédures civiles d'exécution (N° Lexbase : L5301LUU).
L’article 47 alloue au Conseil national des barreaux un titre exécutoire sur le recouvrement de ses cotisations, après l’envoi d’une mise en demeure de payer laissant courir le délai d’un mois.
L’article 48 prévoit une amélioration de la prise en charge des frais irrépétibles, prévoyant que les parties pourront produire les justificatifs des sommes qu’elles demandent, comme les honoraires d’avocats, qui sont non compris dans les dépens.
Enfin, l'article 57 énonce l'abandon du projet de création d'une juridiction nationale des injonctions de payer (JUNIP).
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:479861
Réf. : Loi n° 2021-1754, du 23 décembre 2021, de financement de la Sécurité sociale pour 2022 (N° Lexbase : L0865MAB)
Lecture: 16 min
N9970BYW
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen
Le 06 Janvier 2022
La loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021, de financement de la Sécurité sociale pour 2022, dernière de l’actuelle législature s’inscrit dans un contexte sanitaire et politique très particulier : à quelques mois de l’élection présidentielle de 2022, le législateur a entendu voter un texte mesuré et modérément réformateur, sans éveiller des réactions fortes, souvent irrationnelles (exemple, réforme des retraites). L’environnement politique, financier est essentiellement sanitaire, et la LFSS pour 2022 en porte les traces. Suivant une perspective tracée depuis longtemps, l’analyse de la LFSS porte exclusivement sur le volet financier à l’exclusion de la dimension « prestations sociales-santé publique »). Comme pour la LFSS pour 2021 (loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020, de financement de la Sécurité sociale pour 2021 N° Lexbase : L1023LZW), et pour les mêmes raisons, il faut donc distinguer les mesures spécifiques liées à la crise sanitaire, des autres mesures.
I. Mesures de soutien à l'activité économique et aux actifs
Des mesures d’exonérations/abattement de cotisations sociales retenues par la LFSS 2021 ont été prises dans le cadre de la crise sanitaire ; d’autres mesures, spécifiques aux travailleurs indépendants, ont été mises en place, là aussi dans un contexte de crise sanitaire.
A. Mesures prises dans le cadre de la crise sanitaire
La LFSS 2022 a prolongé pour l’année 2022 des mesures mises en place en 2021, dans un contexte sanitaire identique : l’aide au paiement des cotisations sociales ; le régime social des indemnités complémentaires aux indemnités légales d'activité partielle. Le législateur a activé le levier financier (aide au paiement des cotisations, pour les employeurs ; régime des indemnités complémentaires aux indemnités légales d'activité partielle versées par les employeurs, au bénéfice des salariés en activité partielle, et indirectement, des employeurs).
1. Aide au paiement des cotisations sociales
La loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021, de financement de la Sécurité sociale pour 2022 (art. 18) a ouvert la possibilité pour les employeurs éligibles, d’imputer le solde du montant d’aide au paiement, sur les cotisations et contributions sociales dues au titre de l’année 2022 [1].
Cette aide constitue en réalité un crédit de cotisations utilisable dans le cadre d’un report de cotisations. Elle avait initialement vocation à s’appliquer à l’ensemble des sommes recouvrées par les URSSAF, les caisses générales de la Sécurité sociale (CGSS), les caisses de mutualité sociale agricole (MSA) et Pôle emploi, au titre des années 2020 et 2021 (aide visée par la LFSS pour 2021, art. 9), et au titre de l’année 2021 (pour celle visée par l’article 25 de la loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021, de finances rectificatives pour 2021 N° Lexbase : L1967L7Y).
Aide visée par la LFSS pour 2021 (art. 9). Initialement, ce report des cotisations sociales patronales et salariales avait été mis en place pendant le premier confinement [2]. Le report s’élevait à 20 % des rémunérations versées sur les périodes d’exonération, variables selon le secteur d’activité mais concentrées sur la période du premier confinement. Ce dispositif visait les entreprises de moins de 250 salariés particulièrement affectées par les conséquences économiques et financières de la propagation de la covid-19, et dont l’activité principale relevait des secteurs du tourisme, de l’hôtellerie, de la restauration, du sport, de la culture et de l’événementiel (liste « S1 ») et des secteurs connexes (liste « S1 bis »).
Ce dispositif d’aide au paiement, de même que l’exonération de cotisations sociales, a été prolongé par la LFSS 2021 (LFSS pour 2021, art. 9) pour répondre aux difficultés entraînées par la deuxième vague de la pandémie. Les aides au paiement se sont appliquées de façon différenciée selon que la zone géographique était ou non touchée par les restrictions localisées avant le 30 octobre 2020, date du deuxième confinement.
Les décrets n° 2021-75 du 27 janvier 2021 (N° Lexbase : L9805LZ8), n° 2021-429 du 12 avril 2021 (N° Lexbase : L1424L4I) et n° 2021-709 du 3 juin 2021 (N° Lexbase : L7383L49) ont prolongé les exonérations et l’aide au paiement jusqu’au 31 juillet 2021.
Aide visée par la LFR pour 2021. Une autre aide au paiement des cotisations et contributions sociales a été mise en place par la LFR 2021 (art. 25), au bénéfice des entreprises des secteurs S1 et S1 bis dont l’effectif est inférieur à 250 salariés. Mais aucune condition de baisse de chiffre d’affaire n’est prévue. Le décret n° 2021-1094 du 19 août 2021 (N° Lexbase : L5711L7N) dispose ainsi que le bénéfice de l’aide au paiement est réservé aux employeurs éligibles à l’exonération de cotisations et de contributions sociales prévue par l’article 9 de la LFSS pour 2021 au cours de l’une des périodes d’emploi comprises entre le 1er février et le 30 avril 2021.
L’aide au paiement est plafonnée à 15 % de la masse salariale. Elle ne peut être cumulée avec celle prévue à l’article 9 de la LFSS pour 2021 (supra). Elle est due au titre de périodes d’emploi définies par décret et pouvant courir jusqu’au 31 août 2021.
Le décret n° 2021-1094 du 19 août 2021 prévoit que les périodes d’emploi sont celles courant du 1er mai 2021 au 31 juillet 2021.
Prolongation de l’aide par la LFSS 2022. La LFSS 2022 (art. 18, I et II) prolonge la période au titre de laquelle l’aide au paiement prévue par la LFSS pour 2021 (art. 9) est imputable aux sommes recouvrées par les organismes de recouvrement et Pôle emploi ; la LFSS 2022 prolonge l’aide au paiement prévue par la LFR pour 2021 (art. 25).
Selon les travaux parlementaires [3], les aides au paiement ont représenté 1,8 milliard d’euros pour les périodes d’emploi de janvier à avril 2021. Le coût en 2021 des aides au paiement de cotisations se rapportant aux périodes d’emploi de septembre à décembre 2020 s’élèverait à 1,2 milliard d’euros.
2. Régime social des indemnités complémentaires aux indemnités légales d'activité partielle
La loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021, de financement de la Sécurité sociale pour 2022 (art. 15) [4] a prolongé pour 2022 le régime social de faveur instauré par la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020, de financement de la Sécurité sociale pour 2021 (art. 8, al. 1er).
Indemnités complémentaires d’activité partielle, jusqu’à 3,15 fois le SMIC. En principe, l’indemnité d’activité partielle complémentaire (au-delà de l’indemnité légale) versée par l’employeur est assujettie à la CSG au taux normal de 9,2 % auquel s’ajoute la contribution au remboursement de la dette sociale, de 0,5 %.
Première dérogation. Par dérogation au taux de droit commun de la CSG, l’ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020 (N° Lexbase : L5883LWS, art. 11) a prévu que les indemnités complémentaires versées par l’employeur sont assujetties à la CSG au taux réduit, à 6,2 %.
Seconde dérogation. Par dérogation au droit commun [5], la LFSS pour 2021 (art. 8, IV, al. 1er) a mis en place une seconde dérogation : les indemnités complémentaires aux indemnités légales d'activité partielle versées au titre des périodes d'emploi de l'année 2021 par l'employeur, en application d'un accord collectif ou d'une décision unilatérale sont assujetties aux prélèvements sociaux sur les revenus de remplacement dans les mêmes conditions que les indemnités légales, soit à un taux de CSG de 6,2 %.
La LFSS 2022 a prolongé ce régime dérogatoire des indemnités complémentaires dues par l’employeur, pour les périodes d’emploi de l’année 2022 (LFSS pour 2022, art. 15).
Indemnités complémentaires d’activité partielle, au-delà de 3,15 fois le SMIC. La LFSS pour 2021 (art. 8, IV, al. 1er) a prévu que la somme de l'indemnité légale d'activité partielle et de l'indemnité complémentaire versée par l'employeur, en application d'un accord collectif ou d'une décision unilatérale, supérieure à 3,15 fois la valeur horaire du SMIC (1 603,12 euros brut mensuels, valeur au 1er janvier 2022 [6] x 3.5 = 5 610,92 euros), est assujettie :
La LFSS 2022 a prolongé ce régime dérogatoire des indemnités complémentaires dues par l’employeur, dès lors que le montant cumulé (indemnité légale + indemnité complémentaire) dépasse 3,15 fois le SMIC (soit 5 610,92 euros, valeur au 1er janvier 2022), pour les périodes d’emploi de l’année 2022 (LFSS pour 2022, art. 15).
B. Mesures propres aux travailleurs indépendants
Plans d'apurement des dettes. La loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021, de financement de la Sécurité sociale pour 2022 (art. 19, IV, a)) a prolongé jusqu'au 31 décembre 2021 l'intégration dans les plans d'apurement des dettes de cotisations et contributions accumulées pendant la crise sanitaire, mise en place par la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020, de finances rectificative (art. 65, IV). Le contexte sanitaire explique sans difficulté cette mesure.
Autoliquidation. La déclaration et l’acquittement des cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants sont complexes, en raison du décalage dans le temps entre leur revenu et l’acquittement des cotisations. Les travailleurs indépendants doivent connaître leur revenu final pour s’acquitter de leurs obligations sociales, ce qui n’arrive parfois que deux ans plus tard. Ils versent :
La procédure expérimentale d’autoliquidation permet au travailleur indépendant cotisant d’ajuster au mois le mois (ou chaque trimestre) les acomptes de cotisations en fonction des facultés financières, et de ne pas être soumis à des sanctions en cas d’écart entre revenu estimé et revenu réel ni majoration de retard en cas d’écart entre revenu estimé et revenu réel. L’objectif poursuivi est l’amélioration de la lisibilité du recouvrement pour les redevables, l’adaptation aux évolutions de leurs revenus dans le temps, la contemporanéité des prélèvements.
L’expérimentation, initiée par la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017, de financement de la Sécurité sociale pour 2018 (N° Lexbase : L7951LHX), visait les travailleurs indépendants d’Île-de-France et du Languedoc-Roussillon. Le dispositif a ensuite été généralisé à l’ensemble du territoire en 2021 [8].
La loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021, de financement de la Sécurité sociale pour 2022 (art. 19) [9] a introduit quelques modifications au régime juridique de cette expérimentation :
Majoration de retard. Sur demande du cotisant, les cotisations provisionnelles peuvent être calculées sur la base du revenu estimé de l'année en cours [12]. Lorsque le revenu définitif était supérieur de plus d'un tiers au revenu estimé par le cotisant, une majoration de retard était appliquée sur la différence entre les cotisations provisionnelles calculées dans les conditions de droit commun et les cotisations provisionnelles calculées sur la base des revenus estimés, sauf si les éléments en la possession du cotisant au moment de sa demande justifiaient son estimation.
La LFSS 2022 (art. 19, 2) [13] a purement et simplement supprimé cette majoration de retard.
Attestations de vigilance. Une entreprise ayant recours à un sous-traitant dans le cadre d’un contrat d’un montant au moins égal à 5 000 euros hors taxe, doit vérifier, lors de la conclusion du contrat et périodiquement jusqu’à la fin de son exécution, que son cocontractant est à jour de ses obligations de déclaration et de paiement auprès des URSSAF, des CGSS ou des caisses de MSA. Mais l’attestation de vigilance n’était délivrée que lorsque le travailleur indépendant acquittait ses cotisations et contributions dues à leur date d’exigibilité : en début d’activité, ils ne pouvaient pas satisfaire à l’exigence de vigilance s’ils avaient un projet de contracter avec un donneur d’ordre.
Pour résoudre cette difficulté, le législateur a réformé le régime de délivrance de l’attestation de vigilance, afin de mieux tenir compte de la situation dans laquelle le travailleur indépendant n’a pas encore acquitté de cotisations et de contributions et a besoin d’une attestation de vigilance. La LFSS 2022 (art. 19, I, 2° ; CSS, art. L. 243-15 N° Lexbase : L2691MAW) [14] a ainsi ajouté un nouveau cas de délivrance de l’attestation, dès lors que le travailleur indépendant déclare ses revenus d’activité et non plus seulement lorsqu’il acquitte les cotisations et contributions dues ; ou s’il respecte un plan d’apurement ; ou enfin, s’il conteste par voie contentieuse les cotisations et contributions dues.
Une attestation provisoire est délivrée dès lors que l'activité a été régulièrement déclarée et que l'ensemble des formalités et procédures afférentes à la création d'activité ont été respectées. L'attestation provisoire n'est valide que pour la période courant jusqu'à la première échéance déclarative ou de paiement à laquelle le travailleur indépendant est soumis.
II. Paiement et recouvrement des cotisations sociales
La LFSS pour 2022 a introduit trois réformes dans le champ du recouvrement social et du régime de la lutte contre les fraudes sociales : transfert du recouvrement des cotisations de la CIPAV vers les URSSAF ; imputation du recouvrement des cotisations en cas de paiement partiel pour les travailleurs indépendants au microsocial et enfin, droit de communication de documents par voie dématérialisée aux agents des Caisses et URSSAF. Le législateur a fait preuve d’une grande cohérence, puisque ces mesures s’inscrivent dans la continuité de réformes antérieures.
A. Mesures de paiement et de recouvrement
Transfert du recouvrement des cotisations de la CIPAV. La LFSS 2022 (art. 12, I, 2° ; art. 12, I, 6° ; art. 12, I, 7° ; CSS, art. L. 213-1 N° Lexbase : L8754LRN et L. 640-2 N° Lexbase : L2721MAZ) [15] met en place un transfert du recouvrement des cotisations actuellement exercé par la CIPAV, au 1er janvier 2022.
Le recouvrement désormais confié aux URSSAF, porte sur les cotisations et contributions d’assurance vieillesse de base, complémentaire ainsi que d’invalidité-décès pour les professions libérales suivantes : les psychothérapeutes, les psychologues, les ergothérapeutes, les ostéopathes, les chiropracteurs, les diététiciens ; les experts devant les tribunaux, les mandataires judiciaires pour la protection des mineurs, les experts automobiles ; les architectes et autres professions du bâti susmentionnées, les artistes qui ne relèvent pas du régime des artistes-auteurs, les guides-conférenciers.
La date retenue pour l’entrée en vigueur du transfert est le 1er janvier 2023 (LFSS 2022, art. 12, III).
Ce transfert de collecte des cotisations, au bénéfice des URSSAF, fait sens. Il s’inscrit dans une logique d’unification de la protection sociale des travailleurs indépendants et prolonge la réforme portant suppression du régime social des indépendants (2018) et celle portant intégration de la Sécurité sociale des indépendants (SSI) au régime général (2020) [16],
Le périmètre de la CIPAV a été largement réduit en 2018 à l’occasion du transfert de nombreuses professions vers le régime général, en application de la LFSS 2018 [17]. La CIPAV regroupe désormais vingt-et-une professions, contre près de quatre cents avant 2018 [18]. En 2019, l’IGAS [19] a pointé des insuffisances importantes dans le régime de la collecte des cotisations : le taux de recouvrement annuel moyen des cotisations dues à la Cipav s’était élevé à 74 % de 2012 à 2018 contre 93,2 % pour les cotisations dues aux URSSAF par les travailleurs indépendants.
L’objectif recherché est donc de confier au réseau des URSSAF le recouvrement de prélèvements sociaux, parce que l’éclatement du recouvrement social entre différentes instances est peu lisible pour les assurés et engendre des frais de gestion et des erreurs.
Imputation du recouvrement des cotisations en cas de paiement partiel pour les travailleurs indépendants au microsocial. La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020 avait déjà opéré un rapprochement entre l’ordre d’imputation qui régit l’action de la DGFiP et celle de l’ACOSS.
La LFSS 2022 (art. 12, I, 5°; CSS, art. L. 613-9 N° Lexbase : L8749LKA) [20] a repris la même solution, appliquée aux cotisations et contributions des micro-entrepreneurs. L’imputation du paiement sur les créances du cotisant se fait selon l’ordre fixé par la loi de financement pour la Sécurité sociale pour 2020 : en priorité, sur la créance due au principal, puis sur les majorations de retard et pénalités restant dues et enfin sur les frais de justice.
Les dispositions relatives au recouvrement en cas de paiement partiel des cotisations par les employeurs et les micro-entrepreneurs doivent entrer en vigueur au 1er janvier 2022 (LFSS 2022, art. 12, III).
B. Fraudes au paiement des cotisations
Droit de communication de documents par voie dématérialisée aux agents des caisses et URSSAF. Le droit de communication, reconnu aux agents des organismes de Sécurité sociale (CSS, art. L. 114-19 N° Lexbase : L2399MA4), leur permet de prendre connaissance des documents comptables d’un cotisant ou d’un prestataire et de recueillir auprès de tiers tous renseignements nécessaires pour contrôler la sincérité et l’exactitude des déclarations souscrites ou l’authenticité des pièces produites en vue de l’attribution et du paiement des prestations servies par lesdits organismes.
Le droit de communication se heurte à certains obstacles : les tiers ne répondent pas toujours dans les délais impartis (trente jours) ; certains tiers transmettent des documents au format papier, très volumineux et difficiles à exploiter, compliquant ainsi l’accomplissement des missions des agents chargés du contrôle des URSSAF.
La LFSS 2022 (art 25 ; CSS, art. L. 114-19) [21] a élargi le support de la communication des documents et informations sollicités, laquelle peut désormais être effectuée par voie dématérialisée sur demande de l’agent chargé du contrôle ou du recouvrement.
La LFSS 2020 achève ainsi une réforme engagée depuis quelques années déjà, d’ouverture du droit de communication par voie dématérialisée :
[1] C. Imbert, R.-P. Savary, O. Henno, P. Gruny et Ph. Mouiller, Rapport Sénat, n° 130, 3 novembre 2021 [en ligne], p. 114.
[2] Loi n° 2020-935, du 30 juillet 2020, de finances rectificative pour 2020 (N° Lexbase : L7971LXI), art. 65.
[3] C. Imbert, R.-P. Savary, O. Henno, P. Gruny et Ph. Mouiller, Rapport Sénat, n° 130, 3 novembre 2021, préc., p. 114.
[4] C. Imbert, R.-P. Savary, O. Henno, P. Gruny et Ph. Mouiller, Rapport Sénat, n° 130, 3 novembre 2021, préc., p. 103.
[5] CSS, art. L. 136-1-1 (N° Lexbase : L1757LZ4).
[6] Décret n° 2021-1741, du 22 décembre 2021, portant relèvement du salaire minimum de croissance (N° Lexbase : Z07970TR).
[7] CSS, art. L. 136-1-1 et L. 242-1 (N° Lexbase : L4986LR4).
[8] Décret n° 2021-849, du 29 juin 2021, relatif aux conditions de transmission par l’organisme chargé du recouvrement au travailleur indépendant des modalités de calcul des cotisations et contributions sociales (N° Lexbase : L0226L7I).
[9] Étude d'impact, Annexe 9 - Fiches d'évaluation préalable des articles du projet de loi [en ligne], Article 13 – Mesures de simplification en faveur des travailleurs indépendants, p. 80.
[10] Th. Mesnier, C. Janvier, M. Limon, C. Isaac-Sibille, P. Christophe, Rapport Assemblée nationale n° 4568, 14 octobre 2021, Tome II [en ligne], p. 132 ; Th. Mesnier, C. Janvier, M. Limon, C. Isaac-Sibille, P. Christophe, Rapport Assemblée nationale n° 4701, 18 novembre 2021 [en ligne], p. 44 ; É. Doineau, C. Imbert, R.-P. Savary, O. Henno, P. Gruny et Ph. Mouiller, Rapport Sénat n° 130, 3 novembre 2021, préc., p. 118 ; M. Lauzzana et C. Motin, Avis Assemblée nationale n° 4572, 14 octobre 2021 [en ligne], p. 35.
[11] C. Janvier et alii, Rapport Assemblée nationale n° 4568, 14 octobre 2021, Tome II, préc., p. 132 ; M. Limon et alii, Rapport Assemblée nationale n° 4701, 18 novembre 2021, préc., p. 44 ; É. Doineau et alii, Rapport Sénat n° 130, 3 novembre 2021, préc., p. 118 ; M. Lauzzana et C. Motin, Avis Assemblée nationale n° 4572, 14 octobre 2021, préc., p. 35.
[12] CSS, art. L. 131-6-2 (N° Lexbase : L2358MAL).
[13] C. Janvier et alii, Rapport Assemblée nationale n° 4568, 14 octobre 2021, Tome II, préc., p. 136 ; M. Limon et alii, Rapport Assemblée nationale n° 4701, 18 novembre 2021, préc., p. 44 ; É. Doineau et alii, Rapport Sénat n° 130, 3 novembre 2021, préc., p. 118 ; M. Lauzzana et C. Motin, Avis Assemblée nationale n° 4572, 14 octobre 2021, préc., p. 35.
[14] Étude d'impact, Annexe 9 Fiches d'évaluation préalable des articles du projet de loi, préc., Article 13 – Mesures de simplification en faveur des travailleurs indépendants, p. 80.
[15] Étude d'impact, Annexe 9 Fiches d'évaluation préalable des articles du projet de loi, préc., Article 10 – Poursuite de l’unification du recouvrement dans la sphère sociale, p. 32 ; C. Janvier et alii, Rapport Assemblée nationale n° 4568, 14 octobre 2021, Tome II, préc., p. 92 ; M. Limon et alii, Rapport Assemblée nationale n° 4701, 18 novembre 2021, p. 25 ; É. Doineau et alii, Rapport Sénat n° 130, 3 novembre 2021, préc., p. 72 ; M. Lauzzana et C. Motin, Avis Assemblée nationale, n° 4572, 14 octobre 2021, préc., p. 41.
[16] Droit social, dans son numéro 9/2019, a publié un dossier intitulé « Le recouvrement social », constitué des articles suivants : Le recouvrement social à la croisée des chemins, par Ch. Willmann, p. 678 ; La recherche permanente d'un « modèle » ? Unité, spécificités et évolutions du recouvrement social en France, par B. Ferras, p. 685 ; Quelques singularités constitutives du recouvrement social, par Y.-G. Amghar, p. 698 ; Vers une performance renforcée du recouvrement social ? Les évolutions envisagées par le comité action publique 2022 et leurs conditions de réussite, par D. Mathey et J. Roger, p. 703 ; Unifier le recouvrement social, implique de concilier la simplification pour les redevables avec la diversité des besoins des organismes, par M. Delaye, p. 713.
[17] Loi n° 2017-1836, du 30 décembre 2017, de financement de la Sécurité sociale pour 2018, art. 15.
[18] Il s’agit : des architectes, des architectes d’intérieur, des économistes de la construction, des maîtres d’œuvre, des géomètres-experts ; des ingénieurs-conseils ; des moniteurs de ski, des guides de haute montagne, des accompagnateurs de moyenne montagne ; des ostéopathes, des psychologues, des psychothérapeutes, des ergothérapeutes, des diététiciens, des chiropracteurs ; des artistes non affiliés à la Maison des artistes ; des experts automobiles, des experts devant les tribunaux ; des guides-conférenciers ; des mandataires judiciaires à la protection des majeurs ; d’une série de métiers liés à l’art.
[19] IGAS, Rapport d’évaluation du contrat pluriannuel liant l’État et la CNAVPL, 2019.
[20] Étude d'impact, Annexe 9 Fiches d'évaluation préalable des articles du projet de loi, préc., Article 13 – Mesures de simplification en faveur des travailleurs indépendants, p. 80 ; C. Janvier et alii, Rapport Assemblée nationale n° 4568, 14 octobre 2021, Tome II, préc., p. 95 ; M. Limon et alii, Rapport Assemblée nationale n° 4701, 18 novembre 2021, préc., p. 25 ; É. Doineau et alii, Rapport Sénat n° 130, 3 novembre 2021, préc., p. 1.
[21] Étude d'impact, Annexe 9 Fiches d'évaluation préalable des articles du projet de loi, préc., Article 15 - Modification du droit de communication dans le cadre des procédures des URSSAF, p. 99 ; É. Doineau et alii, Rapport Sénat n° 130, 3 novembre 2021, préc., p. 148 ; M. Limon et alii, Rapport Assemblée nationale n° 4701, 18 novembre 2021, préc., p. 165 ; C. Janvier et alii, Rapport Assemblée nationale n° 4568, 14 octobre 2021, Tome II, préc., p. 146 ; M. Lauzzana et C. Motin, Avis Assemblée nationale n° 4572, 14 octobre 2021, préc., p. 43.
[22] Loi n° 2007-297, du 5 mars 2007, relative à la prévention de la délinquance (N° Lexbase : L6035HU3), art. 69 ; C. proc. pén., art. 60-1 (N° Lexbase : L7424LPN).
[23] Loi n° 2014-1655, du 29 décembre 2014, de finances rectificative pour 2014 (N° Lexbase : L2844I7H), art. 21 ; LPF, art. L. 81 (N° Lexbase : L4555I7T).
[24] Loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021 (N° Lexbase : L3002LZ9), art. 268 ; C. trav., art. L. 5312-13-2 (N° Lexbase : L7340LZU).
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:479970
Réf. : Cass. com., 15 décembre 2021, n° 21-11.882, FS-B (N° Lexbase : A17557G4)
Lecture: 8 min
N9947BY3
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Philippe Duprat, Avocat à la cour, ancien Bâtonnier du barreau de Bordeaux, chargé d’enseignement à l’Université de Bordeaux
Le 05 Janvier 2022
Mots-clés : devoir de vigilance • plan de vigilance • compétence • cassation • acte mixte (oui)
L’établissement et la mise en œuvre d’un plan de vigilance ne constituent pas un acte de commerce au sens de l’article L. 721-3, 3° du Code de commerce. Si le lien direct avec la gestion de la société est établi au regard de l’article L. 721-3, 2°, le demandeur non-commerçant dispose du choix de saisir le tribunal civil ou le tribunal de commerce.
Par un précédent arrêt commenté dans ces colonnes, la cour d’appel de Versailles avait, par décision du 10 décembre 2020 [1], considéré que seul le tribunal de commerce était compétent pour connaître de l’action en injonction de faire de l’article L. 225-102-4 du Code de commerce (N° Lexbase : L2119LGL).
La cour de Versailles avait provisoirement mis fin à une controverse qui opposait ceux qui considéraient que seul le juge judiciaire pouvait connaître du contentieux relatif à l’établissement du plan de vigilance et ceux qui soutenaient, au contraire, que le juge consulaire était seul compétent à raison du lien qui existait avec la gestion de la société.
La solution retenue par la cour d’appel est censurée par la Cour de cassation qui, dans son arrêt sous examen, rendu au visa des dispositions de l’article L. 721-3 du Code de commerce (N° Lexbase : L0127L89), décide que les demandeurs non-commerçants, pouvaient choisir d’agir soit devant le tribunal civil soit devant le tribunal de commerce.
La Cour de cassation par l’arrêt rendu le 15 décembre 2021 clôt ainsi la controverse initialement ouverte et met fin à « l’équivoque sur la compétence juridictionnelle en matière de plan de vigilance » [2]. Elle le fait en précisant ce que n’est pas le plan de vigilance (I) pour immédiatement dire ce qu’il est (II).
I. Ce que n’est pas le plan de vigilance
L’article L. 721-3, 3° du Code de commerce attribue à la compétence du tribunal de commerce les contestations « relatives aux actes de commerce entre toutes personnes ». On ne rappellera pas par le menu, ni les vicissitudes, ni les fausses conséquences que certains en avaient tirées, et qui ont affecté dans un passé récent l’écriture des dispositions relatives à la compétence des tribunaux de commerce. Pour faire aussi simple que possible, on s’en tiendra à l’ordonnance du 18 septembre 2000 (ordonnance n° 2000-912 relative à la partie Législative du code de commerce N° Lexbase : L2955AIB) qui, à la faveur d’une recodification à droit constant, n’avait pas repris le texte de l’ancien article 631 du Code de commerce abrogé le 17 décembre 1991. Il faudra attendre la loi dite « NRE » du 15 mai 2001 (loi n° 2001-420 N° Lexbase : L8295ASZ), pour assister à la résurrection de l’article 631 au travers de l’article L. 411-4-1° du Code de l’organisation judiciaire (N° Lexbase : L1140ATE), ultérieurement transposé sans aucune modification par l’article 2 de l’ordonnance n° 2006-673 du 8 juin 2006 (N° Lexbase : L9328HIC), à l’article L. 721-3 du Code de commerce [3].
Il est depuis lors clairement confirmé que les tribunaux de commerce reçoivent compétence pour connaître des contestations relatives aux actes de commerce par nature, c’est-à-dire ceux réalisés indépendamment des personnes qui les accomplissent.
On sait que le législateur fournit sous l’article L. 110-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L1282IWE) une liste importante d’actes qu’il répute actes de commerce. La jurisprudence y a ajouté les actes de commerce par accessoire. L’intérêt de qualifier telle ou telle opération d’acte de commerce n’a pas d’autre objet que de définir le régime juridique qui lui sera applicable, qu’il s’agisse des conditions de formation, de preuve, de prescription ou encore des règles de compétences.
À ce titre, aux termes de l’article L. 721-3, 3°, relèvent de la compétence du tribunal de commerce les « actes de commerce entre toutes personnes ». Or selon la Cour de cassation, l’établissement du plan de vigilance n’est pas de nature à fonder la compétence du tribunal de commerce car selon la Haute juridiction, il n’appartient pas à la catégorie des actes de commerce entre toutes personnes. Il est vrai que les deux critères de l’acte de commerce par nature dégagés par la jurisprudence et que sont, d’une part, celui de la réitération et, d’autre part, celui de la spéculation, ne se retrouvent pas à propos de l’établissement du plan de vigilance. L’établissement d’un plan de vigilance ne constitue pas à proprement parler une opération entre « toutes personnes » ; il s’agit d’un acte unilatéral de la société qui doit se soumettre obligatoirement à l’établissement d’un plan de vigilance si elle répond par ailleurs aux critères de la loi (C. om., art L. 225-102-4).
N’étant pas un acte de commerce par nature, la compétence du tribunal de commerce est donc exclue, du moins en ce qu’elle serait une conséquence automatiquement attachée au seul établissement du plan. Le tribunal de commerce n’est, pour la Cour de cassation, compétent qu’au visa de l’article L 721-3, 2°, sous réserve toutefois du droit d’option dont dispose le demandeur non-commerçant.
II. Ce qu’est le plan de vigilance
La Cour de cassation affirme très nettement, et sans aucune ambiguïté, que l’établissement et la mise en œuvre du plan de vigilance présentent un lien direct avec la gestion de la société. Ce faisant elle condamne la thèse de celles des parties qui soutenaient qu’un tel lien n’était soit pas suffisamment établi, soit inopérant car ne trouvant à s’appliquer que dans les litiges mettant en cause la responsabilité des dirigeants.
Elle s’approprie ainsi l’analyse de la cour d’appel de Versailles qui, dans son arrêt du 10 décembre 2020, avait recensé de manière vraisemblablement exhaustive tous les arguments qui permettaient de conclure à l’existence d’un lien direct « entre l’établissement et la mise en œuvre du plan de vigilance d’une part, et le fonctionnement de la société commerciale d’autre part ».
En revanche, les Hauts magistrats ne tirent pas les mêmes conclusions que les conseillers de la cour d’appel. Ces derniers avaient considéré que le droit d’option dont le demandeur non-commerçant dispose était évincé par la qualification du plan de vigilance d’acte de gestion de la société. À l’inverse la Cour de cassation préserve ce droit d’option et, ce faisant, en fait le critère définitif de détermination de la juridiction compétente. Si le demandeur est dépourvu de la qualité de commerçant, le tribunal judiciaire, ou son président statuant en référé, devient « la juridiction compétente » visée à l’article L. 225-102-4, II.
La solution retenue par la Cour de cassation a pour effet d’englober le plan de vigilance dans la catégorie des actes de commerce mixtes. Élaboré par la société, le plan de vigilance produit nécessairement des effets dont les tiers profiteront ou souffriront. Le contentieux engagé par un tiers à la société à propos de l’établissement ou de la mise en œuvre du plan de vigilance pourra être soumis à la compétence du tribunal judiciaire. Le droit d’option dont le tiers dispose ne constitue pas pour lui une contrainte. Il est au contraire synonyme de choix. La contrainte est celle à laquelle la société est soumise et qui consistera pour elle à devoir se plier au choix du tiers. Procéduralement la solution de la Cour de cassation préserve une dualité de compétence – apanage des actes de commerce mixtes – dont la mise en œuvre appartiendra au seul plaignant. Le choix du tiers devrait naturellement s’orienter vers la juridiction judiciaire qu’il aura tendance à considérer comme plus performante – les juges consulaires ne sont pas des professionnels – et plus impartiale – les juges consulaires sont des commerçants qui jugent d’autres commerçants. Pour autant de telles considérations sont heureusement, abstraitement et institutionnellement, sans aucun fondement réel.
La solution consacrée par la Cour de cassation était porteuse de deux perspectives. L’une déjà envisagée, plutôt progressiste, selon laquelle l’appréciation du plan de vigilance convoque d’autres principes que ceux strictement et habituellement limités à la simple gestion d’une société commerciale. La prévention des atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, notamment visées à l’alinéa 3 de l’article L. 225-102-4, pourrait participer de la constitution, à terme, d’un bloc de compétence spécifique à la juridiction judiciaire et donnant son entière plénitude à la responsabilité sociale de l’entreprise. L’autre, plus régressive, également déjà évoquée, qui redoute que la consécration d’une compétence duale, ne débouche sur un éclatement des contentieux, des divergences de jurisprudence et à terme sur une forme de « forum shopping judiciaire » ou les tiers se détermineront avant tout par un effet d’aubaine.
L’avenir ne départira pas ces deux visions. Si en cette période festive la Cour de cassation a eu le bon goût de faire aux juristes le cadeau d’un arrêt mettant fin à toute divergence antérieure, le législateur a eu l’intelligence de mettre fin à toute future incertitude. En effet, la loi n° 2021-1729, du 22 décembre 2021, pour la confiance dans l’institution judiciaire (N° Lexbase : Z459921T), a, en son article 56, créé l’article L. 211-21 du Code de l’organisation judiciaire (N° Lexbase : L1651MAE) selon lequel « Le tribunal judiciaire de Paris connaît des actions relatives au devoir de vigilance fondées sur les articles L. 225-102-4 et L. 225-102-5 (N° Lexbase : L3956LDU) du Code de commerce ». Le contentieux est désormais dévolu à un pôle spécialisé. Plus personne n’a le choix.
[1] CA Versailles, 10 décembre 2020, n° 20/01692 (N° Lexbase : A458439N), Ph. Duprat, Lexbase Affaires, janvier 2021, n° 662 (N° Lexbase : N6118BYA) ; v. également A. Lecourt, RTDCom., 2021 p. 135.
[2] Cf. G. Leray, Rev Sociétés, 2021, p. 297, note sous CA Versailles, 10 décembre 2020, n° 20/01692, préc..
[3] Voir sur ce qu’un auteur a qualifié de « déménagements d’un code à un autre » : B. Saintourens, Rev. Sociétés, 2006, p. 787, note sous Cass. com., 14 février 2006, n° 03-19.823, F-D (N° Lexbase : A9794DMP).
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:479947
Réf. : Décret n° 2021-1887, du 29 décembre 2021 (N° Lexbase : L1955MAN) ; décret n° 2021-1888, du 29 décembre 2021 (N° Lexbase : L1938MAZ) et décret n° 2021-1889, du 29 décembre 2021 (N° Lexbase : L1967MA4)
Lecture: 5 min
N9921BY4
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Vincent Téchené
Le 05 Janvier 2022
► Trois décrets, publiés au Journal officiel du 30 décembre 2021, viennent compléter l’ordonnance de réforme du droit des sûretés qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2022 (ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 N° Lexbase : L8997L7D ; v. Dossier spécial « La réforme du droit des sûretés par l'ordonnance du 15 septembre 2021 », Lexbase Affaires, octobre 2021, n° 691 N° Lexbase : N8992BYP).
Le décret n° 2021-1887 est pris pour l'application des articles du Code civil, du Code de commerce, du Code des transports, du Code des douanes, du Code général des impôts et du Code de la Sécurité sociale dans leur rédaction issue de l'ordonnance portant réforme du droit des sûretés.
Pour rappel, parmi les avancées majeures de cette réforme, se trouve l’instauration d’un registre unique de publicité, commun à l’ensemble des sûretés mobilières. Ce faisant, le gage de droit commun, le warrant agricole, mais encore les hypothèques maritimes, les hypothèques fluviales, les opérations de crédit-bail mobilier, le privilège du Trésor en matière fiscale et douanière et le privilège de la Sécurité sociale et des régimes complémentaires seront soumis à une publicité unique.
Le décret contient donc les mesures réglementaires nécessaires à la mise en place de ce registre. Il détermine ainsi les sûretés mobilières et les opérations connexes dont la publicité est assurée par une inscription au registre des sûretés mobilières et autres opérations connexes. Il fixe les modalités d'inscriptions initiales, modificatives, de radiation et les modalités de consultation des informations inscrites au registre des sûretés mobilières. Il précise les obligations des greffiers qui tiennent ce registre ainsi que les recours ouverts en cas de décision de refus de ces derniers. Il confie enfin au Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce la mise en œuvre d'un portail internet permettant la consultation gratuite des informations inscrites au registre.
Entrée en vigueur. Le décret entrera en vigueur au 1er janvier 2023 sauf pour les hypothèques maritimes et les saisies de navires pour lesquelles l'entrée en vigueur est fixée dès le 1er janvier 2022.
Le décret n° 2021-1888 tire les conséquences au niveau réglementaire des modifications apportées dans le cadre de cette réforme s'agissant notamment de la réalisation des sûretés mobilières.
L'article 1er modifie le Code de procédure civile afin de moderniser et de clarifier la procédure de purge des inscriptions sur les immeubles, en ce compris le warrant agricole ou le gage portant sur un meuble immobilisé par destination (introduit dans le Code civil par l'ordonnance du 15 septembre 2021).
L'article 2 introduit dans le livre II du Code des procédures civiles d'exécution une articulation nouvelle entre les procédures de saisie-vente mobilière et les sûretés inscrites sur le bien saisi, afin de permettre aux créanciers bénéficiaires de ces sûretés de participer à la distribution des deniers et à l'acquéreur d'obtenir un titre de propriété libre de tout droit. Il modifie en outre la procédure de saisie-appréhension pour permettre une meilleure prise en compte des particularités liées à la réalisation du gage garantissant une créance professionnelle.
L'article 3 tire les conséquences, au livre III du Code des procédures civiles d'exécution, de l'admission, à l'article 2334 du Code civil (N° Lexbase : L1161HIT), du gage portant sur les meubles immobilisés par destination. Il prévoit les conditions de l'information du créancier disposant d'un tel gage ou d'un warrant agricole portant sur un meuble immobilisé par destination compris dans le périmètre d'une saisie immobilière, de son intervention à la procédure de saisie immobilière et précise les modalités de détermination de ses droits dans la distribution du prix, contrepartie de l'effet de purge de son inscription.
L'article 4 modifie l'article R. 511-7 du Code des procédures civiles d'exécution (N° Lexbase : L2542ITC), afin de permettre à la caution de bénéficier d'une mesure conservatoire à l'encontre du débiteur principal dès la prolongation de l'échéance du terme de l'emprunt garanti, alors même qu'elle ne se trouve pas dans les conditions pour obtenir un titre à son encontre (conséquence du nouvel article 2320 du Code civil N° Lexbase : L1144HI9).
L'article 5 assure la coordination des dispositions de divers codes et textes réglementaires, avec les dispositions législatives de ces codes et du Code civil issues de l'ordonnance de réforme du droit des sûretés.
Entrée en vigueur. Les dispositions de ce décret entrent en vigueur pour l’essentiel dès le 1er janvier 2022, sauf la réforme du livre II du CPCE, liée au registre des sûretés mobilières, qui est repoussée au 1er janvier 2023.
Le décret n° 2021-1889 contient pour sa part des dispositions de coordinations. Il prend notamment en compte le remplacement des privilèges immobiliers spéciaux soumis à publicité par des hypothèques légales.
Entrée en vigueur. Ce décret est entré en vigueur le 1er janvier 2022.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:479921