Réf. : Cass. crim., 14 avril 2021, n° 20-81.177, F-P+I (N° Lexbase : A25454PX)
Lecture: 3 min
N7414BYA
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Adélaïde Léon
Le 19 Mai 2021
► Lorsqu’une personne âgée de plus de soixante-dix ans est condamnée à une peine égale ou supérieure à quinze ans, pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru, les conditions des articles 729 et 730-2 du Code de procédure pénale sont cumulatives ;
Dès lors, une libération conditionnelle ne peut être octroyée, si elle n’est pas assortie d’un placement sous surveillance électronique mobile, qu’après l’exécution, à titre probatoire, d’une mesure de semi-liberté, de placement à l’extérieur ou de détention à domicile sous surveillance électronique pendant une période d’un à trois ans.
Rappel des faits. Une personne a été condamnée par la cour d’assises à quinze ans de réclusion criminelle pour des faits de viols et d’agressions sexuelles aggravés. L’intéressé a déposé une requête en libération conditionnelle, rejetée par le tribunal de l’application des peines.
Le détenu a relevé appel de cette décision.
En cause d’appel. La chambre de l’application des peines a fait droit à la demande de l’intéressé, alors âgé de soixante-et-onze ans et lui a accordé une libération conditionnelle.
Le procureur général a formé un pourvoi.
Moyens du pourvoi. Il est fait grief à l’arrêt d’avoir octroyé la libération conditionnelle sans y adjoindre une mesure de sûreté.
Décision. La Chambre criminelle casse l’arrêt de la chambre de l’application des peines au visa des articles 729 (N° Lexbase : L7698LPS) (relatif à l’octroi de libération conditionnelle à des condamnés de plus de soixante-dix ans) et 730-2 (N° Lexbase : L7685LPC) du Code de procédure pénale (relatif aux conditions d’octroi de la libération conditionnelle à des personnes condamnées à une peine égale ou supérieure à quinze ans, pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru).
La Cour affirme que lorsque se présente le cas d’une personne âgée de plus de soixante dix ans, condamnée pour l’une des infractions prévues par l’article 730-2, les conditions des deux articles sont cumulatives.
En l’espèce, le condamné était âgé de soixante-et-onze ans et exécutait une peine de quinze ans de réclusion criminelle, prononcée en répression d’une infraction passible du suivi socio-judiciaire. Selon les dispositions précitées et leur caractère cumulatif, la libération conditionnelle du condamné n’aurait dû être accordée, si elle n’était pas assortie d’un placement sous surveillance électronique mobile, qu’après l’exécution, à titre probatoire, d’une mesure de semi-liberté, de placement à l’extérieur ou de détention à domicile sous surveillance électronique pendant une période d’un à trois ans.
C’est donc en violation des dispositions du Code de procédure pénale que la chambre de l’application des peines a admis l’intéressé au bénéfice de la libération conditionnelle sans l’assortir d’un placement sous surveillance électronique mobile et sans qu’elle ait été précédée à titre probatoire d’une des mesures précitées.
Pour aller plus loin : v. Y. Carpentier, ÉTUDE : Les modalités d’exécution des peines, Conditions d’octroi de la libération conditionnelle, Droit pénal général, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase (N° Lexbase : E2856GAZ). |
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:477414
Réf. : Cass. civ. 1, 14 avril 2021, n° 19-21.024, F-P (N° Lexbase : A79844PE)
Lecture: 3 min
N7303BY7
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Marie-Lou Hardouin-Ayrinhac
Le 04 Mai 2021
► Par cet arrêt rendu en date du 14 avril 2021, la première chambre civile de la Cour de cassation rappelle l'articulation des compétences entre le juge aux affaires familiales et le juge des enfants pour la fixation des modalités d’exercice du droit de visite médiatisé d’un parent dans un espace de rencontre ; le premier doit fixer la durée de la mesure et déterminer la périodicité et la durée des rencontres sans pouvoir s’en remettre à la décision du second sur la durée de la mesure et celle des rencontres.
Faits et procédure. Un jugement a prononcé le divorce d’un couple marié.
Par un arrêt rendu en date 12 juin 2019, la cour d’appel d’Orléans fixe la résidence de l'enfant commun au domicile du père. Elle décide que le droit de visite de la mère s'exercera deux fois par mois, dans un espace de rencontre en présence du représentant désigné par l'aide sociale à l'enfance selon les modalités fixées par le juge des enfants pendant la durée de la mesure d'assistance éducative. La cour d’appel dit qu'au-delà de ce délai, il appartiendra à la partie la plus diligente de saisir le juge aux affaires familiales (JAF) pour fixer les nouvelles modalités d'exercice de l'autorité parentale à l'égard de l’enfant commun.
La mère se pourvoit en cassation.
Décision. La première chambre civile de la Cour de cassation rappelle que, selon l'article 1180-5 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L5322IUN), lorsque le JAF décide que le droit de visite s'exercera dans un espace de rencontre en application de l’article 373-2-9 du Code civil (N° Lexbase : L0239K7Y), il fixe la durée de la mesure et détermine la périodicité et la durée des rencontres, sans pouvoir s'en remettre sur ce point à la décision du juge des enfants prise sur le fondement des deux autres, qui est provisoire.
Après avoir constaté que l’enfant commun fait l'objet d'une mesure d'assistance éducative mise en place par le juge des enfants selon les modalités prévues dans un jugement du 12 avril 2019 et fixé la résidence de celui-ci chez son père, l'arrêt de la cour d’appel décide que la mère exercera un droit de visite deux fois par mois dans un espace de rencontre en présence du représentant désigné par l'Aide sociale à l'enfance selon les modalités fixées par le juge des enfants pendant la durée de la mesure d'assistance éducative.
La première chambre civile de la Cour de cassation retient, qu’en statuant ainsi, en s'en remettant à la décision du juge des enfants sur la durée de la mesure et celle des rencontres, la cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé les articles 373-2-9, 375-3 (N° Lexbase : L7326LPZ) et 375-7 (N° Lexbase : L4935K8B) du Code civil et l'article 1180-5 du Code de procédure civile.
N.B. : dans un arrêt rendu le même jour, la première chambre civile de la Cour de cassation rappelle l’obligation du juge aux affaires familiales de déterminer la durée des rencontres lorsqu’il décide qu'un droit de visite s'exercera dans un espace de rencontre (Cass. civ. 1, 14 avril 2021, n° 19-21.690, F-D (N° Lexbase : A80014PZ). Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : L’autorité parentale sur la personne de l’enfant, L'organisation du droit de visite en cas d'exercice de l'autorité parentale par l'un des parents, in L’autorité parentale, (dir. A. Gouttenoire), Lexbase (N° Lexbase : E5818EY7). |
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:477303
Réf. : Décret n° 2021-497, du 23 avril 2021, modifiant le décret n° 2021-13 du 8 janvier 2021 prévoyant l'application de dérogations relatives au bénéfice des indemnités journalières et de l'indemnité complémentaire prévue à l'article L. 1226-1 du code du travail ainsi qu'aux conditions de prise en charge par l'assurance maladie de certains frais de santé afin de lutter contre l'épidémie de covid-19 (N° Lexbase : L2856L4K)
Lecture: 1 min
N7344BYN
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Laïla Bedja
Le 04 Mai 2021
► Le décret du 23 avril 2021, publié au Journal officiel du 24 avril 2021, comporte deux volets :
Prise en charge des frais de transport vers les centres de vaccination
Ainsi, concernant la prise en charge des frais de transport des personnes dans l’incapacité de se déplacer seules vers un centre de vaccination contre la covid-19, elle est prolongée jusqu’au 1er juin 2021. Cette prise en charge est intégrale (lire not. L. Bedja, Lexbase Social, février 2021, n° 855 N° Lexbase : N6578BYB).
Dispense du délai de carence pour l’affiliation à l’assurance maladie des Français expatriés rentrés en France
Pour les Français expatriés rentrés en France, le décret prévoit la prolongation de la dérogation au délai de carence de trois mois s'agissant de l'affiliation à l'assurance maladie et maternité pour les Français expatriés rentrés en France entre le 2 avril et le 1er juin 2021 et n'exerçant pas d'activité professionnelle.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:477344
Réf. : CE 1° et 4° ch.-r., 14 avril 2021, n° 445515, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A25634PM)
Lecture: 1 min
N7321BYS
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Yann Le Foll
Le 04 Mai 2021
► La distribution d’un tract pouvant laisser croire que le candidat bénéficie du soutien d'associations locales dont il reproduit le logo a le caractère d’une manœuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin, eu égard au très faible écart de voix.
Faits. Le requérant a diffusé un document exposant le programme de sa liste, qui comportait une page intitulée « Pour nos partenaires associatifs » sur laquelle étaient reproduits, à la suite des propositions de la candidate en faveur de la vie associative, sur la moitié de la page, les logos en couleur de 36 associations locales.
Position du CE. S’il fait valoir que la reproduction de ces logos n'avait qu'un caractère illustratif de la vie associative de la commune et qu'aucun soutien de ces associations à la liste qu'elle conduisait n'était revendiqué, l'apposition des logos de ces associations, présentées comme des partenaires associatifs sans que leur autorisation ait été recueillie, sur une page du programme de la liste de la maire sortante, à la suite de la présentation des propositions consacrées au développement de la vie associative de la commune, était de nature à faire accroire que la liste bénéficiait du soutien de ces associations.
Décision. Dans ces conditions, la diffusion de ce document a été constitutive d'une manœuvre qui, eu égard au très faible écart de voix entre les deux listes en présence, a été de nature à altérer la sincérité du scrutin.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les dispositions relatives à la période précédant le scrutin, La propagande, in Droit électoral, (dir. G. Prunier), Lexbase (N° Lexbase : E8119ZBC). |
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:477321
Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 20 avril 2021, n° 429467, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A00694QM)
Lecture: 2 min
N7353BYY
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Marie-Claire Sgarra
Le 04 Mai 2021
► La limitation de la déductibilité des moins-values à court terme prévue par l’article 39 quaterdecies du Code général des impôts s'applique seulement en cas de cession de titres de participations ayant fait l'objet d'une émission nouvelle en contrepartie d'un apport.
Les faits.
🔎 Principe. Aux termes du 2 bis de l'article 39 quaterdecies du Code général des impôts (N° Lexbase : L2417LEA), issu de la loi du 16 août 2012, de finances rectificative pour 2012 (loi n° 2012-958, du 16 août 2012, de finances rectificative pour 2012 N° Lexbase : L9357ITQ), la moins-value résultant de la cession, moins de deux ans après leur émission, de titres de participation acquis en contrepartie d'un apport réalisé et dont la valeur réelle à la date de leur émission est inférieure à leur valeur d'inscription en comptabilité n'est pas déductible, dans la limite du montant résultant de la différence entre la valeur d'inscription en comptabilité desdits titres et leur valeur réelle à la date de leur émission.
Solution du Conseil d’État. L’apport réalisé par la société PY au profit de la société HY a été effectué par élévation de la valeur nominale des titres de la filiale et non par émission d'actions nouvelles.
Dès lors, en rejetant les conclusions d'appel de la société CG tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés résultant de la réintégration, sur le fondement des dispositions du 2 bis de l'article 39 quaterdecies du code général des impôts, de la moins-value résultant de la cession des titres de la société HY, alors que ces titres n'avaient pas fait l'objet d'une émission nouvelle dans le cadre de l'apport, la cour a méconnu le champ d'application de ces dispositions.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:477353
Réf. : Cass. civ. 2, 15 avril 2021, n° 19-25.449, F-D (N° Lexbase : A80464PP)
Lecture: 2 min
N7405BYW
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Alexandra Martinez-Ohayon
Le 05 Mai 2021
► Le défaut de mention dans un acte de procédure de l'organe représentant légalement la personne morale constitue un vice de forme, la nullité de cet acte étant subordonnée à la preuve d'un grief que le juge doit constater.
Faits et procédure. Dans cette affaire, le Syndicat général agroalimentaire CFDT d'Ile-et-Vilaine (le syndicat) contestant la licéité du nouveau système d’évaluation du personnel, a assigné une société à jour fixe devant le tribunal de grande instance, en vue de faire interdire un dispositif d'entretien de développement individuel des salariés et annuler les entretiens déjà réalisés depuis sa mise en place. La nullité de la requête à fin d'être autorisée à assigner à jour fixe, ainsi que la nullité de l'assignation à jour fixe ont été soulevées par la défenderesse.
Le tribunal a rejeté l’exception de nullité et énoncé que la procédure d’évaluation des salariés était illicite et interdit l’usage de ce dispositif.
Le pourvoi. Le syndicat fait grief à l’arrêt (CA Rennes, 11 octobre 2019, n° 18/04272 N° Lexbase : A9560ZQ7), d’avoir déclaré irrecevable son action et de dire n’y avoir lieu d’examiner les demandes au fond.
En l’espèce, la cour d’appel, pour énoncer cette solution, a retenu que la requête à fin d’assignation à jour fixe et l'assignation délivrée par le demandeur sont nulles, du fait qu’elles ne portent pas mention de la personne ou de l'organe le représentant.
Solution. Énonçant la solution précitée au visa de l’article 114 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1395H4G), la Cour de cassation censure le raisonnement des juges d’appel, énonçant que ces derniers avaient privé leur décision de base légale, en se prononçant sans constater l’existence d’un grief subi par la société défenderesse.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La forme des actes de procédure, La nullité pour vice de forme, in Procédure civile, (dir. E. Vergès), Lexbase (N° Lexbase : E1151EU8). |
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:477405
Réf. : Cass. com., 14 avril 2021, n° 19-16.468, F-D (N° Lexbase : A80034P4)
Lecture: 2 min
N7272BYY
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Vincent Téchené
Le 04 Mai 2021
► En raison du caractère d'ordre public de l'article L. 223-14 du Code de commerce (N° Lexbase : L3178DYD), il convient de respecter scrupuleusement le formalisme légal, aucune confirmation implicite de la cession de parts sociales ne pouvant faire échec à l'annulation d'une cession effectuée en violation de ce formalisme.
Faits et procédure. Par deux actes du 9 mars 2016, les deux seuls associés d’une SARL ont, chacun, cédé les parts qu'ils détenaient dans le capital de celle-ci, à deux cessionnaires. Soutenant que ces cessions étaient intervenues en violation des dispositions de l'article L. 223-14 du Code de commerce imposant la notification du projet de cession à chacun des associés et à la société, les cédants ont assigné les cessionnaires et la société en annulation desdites cessions.
L’arrêt d’appel (CA Paris, Pôle 5, 9ème ch., 14 mars 2019, n° 17/22115 N° Lexbase : A8221Y3U) ayant déclaré nulles les cessions litigieuses, les cessionnaires ont formé un pourvoi en cassation.
Pourvoi. Les demandeurs au pourvoi reprochaient à la cour d’appel d’avoir prononcé la nullité des cessions sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas du procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 9 mars 2016, que les actionnaires avaient été convoqués le 15 février 2016 et qu'ils avaient reçu avec cette convocation, l'ordre du jour de cette assemblée, comportant l'approbation des projets de cessions litigieuses, de sorte que la société et les associés s'étaient vu notifier les projets de cession par la convocation.
Décision. Mais énonçant la solution précitée, la Cour de cassation approuve l’arrêt d’appel.
Observations. La Cour de cassation rappelle, ici, sa position qu’elle avait notamment exprimée dans un arrêt du 21 janvier 2014 (Cass. com., 21 janvier 2014, n° 12-29.221, F-P+B N° Lexbase : A9837MCC ; Ch. Lebel, Lexbase Affaires, février 2014, n° 370 N° Lexbase : N0896BUQ) : le non-respect de la procédure d'agrément, qui est d'ordre public, n'est donc pas sanctionné par la nullité relative mais bien par une nullité absolue, qui ne peut être couverte par la confirmation implicite de l'acte litigieux de cession à un tiers (v. également, Cass. com., 21 mars 1995, n° 93-14.564, publié N° Lexbase : A8277AB8).
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La circulation des parts sociales, Le caractère d'ordre public des dispositions relatives à l'agrément du cessionnaire, in Droit des sociétés, (dir. B. Saintourens), Lexbase (N° Lexbase : E7586EQZ). |
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:477272
Réf. : Cass. civ. 1, 14 avril 2021, n° 19-21.290, F-D (N° Lexbase : A80484PR)
Lecture: 5 min
N7402BYS
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Anne-Lise Lonné-Clément
Le 05 Mai 2021
► En condamnant le notaire à verser au légataire une certaine somme en réparation de ses divers préjudices résultant de ce que le notaire avait qualifié à tort le legs litigieux de résiduel, sans rechercher, ainsi qu’elle y était invitée par le notaire, si en raison de cette erreur de qualification, l’intéressé n'avait pas bénéficié d’une économie d’impôt venant contrebalancer son préjudice, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382, devenu 1240 du Code civil.
Rappel concernant les libéralités résiduelles/graduelles. Pour comprendre la décision rendue le 14 avril 2021, il convient de rappeler le principe et le régime fiscal attaché à chacune de ces libéralités.
La libéralité résiduelle est une opération par laquelle un disposant prévoit dans une donation ou un testament qu'une personne est appelée à recueillir ce qui subsistera du don ou du legs fait à un premier gratifié, à la mort de celui-ci (C. civ., art. 1057 N° Lexbase : L0217HPQ).
Sur le plan fiscal, au moment de la donation, ou du décès du testateur, seul le premier gratifié est redevable des droits de donation ou de succession selon qu'il est question d'une donation ou d'un legs. Au décès du premier gratifié, le second bénéficiaire doit acquitter des droits de mutation à titre gratuit. Si le premier gratifié a donné ou vendu une partie des biens, les droits dus à son décès par le second gratifié ne portent que sur le residuum transmis.
Quant à la libéralité graduelle, il s’agit de la libéralité par laquelle un disposant donne ou lègue des biens ou des droits, à charge pour le donataire ou le légataire de les conserver et de les transmettre à son décès à un second gratifié désigné dans l'acte (cf. C. civ., art. 1048 N° Lexbase : L0208HPE). Il faut comprendre que le dispositif implique une double charge pour le gratifié, de conservation et transmission.
Concernant le régime fiscal, au moment de la donation, ou du décès du testateur, seul le premier bénéficiaire est redevable des droits de donation ou de succession selon qu'il est question d'une donation ou d'un legs ; au décès du premier gratifié, le second bénéficiaire doit acquitter des droits de mutation à titre gratuit.
Ces principes étant rappelés, on comprendra aisément tout l’enjeu de la qualification de la libéralité en cause dans l’affaire soumise à la Cour de cassation le 14 avril 2021.
Faits et procédure. En l’espèce, décédée le 10 février 2010, la défunte avait laissé pour lui succéder son époux, et son fils, en l'état d'un testament daté du 3 décembre 2006, rédigé, au dos d'un tableau, en ces termes « Je soussignée […] veux que ce tableau ainsi que tout ce que je possède […] aillent en direct lègue à mon époux bien-aimé le jour de ma mort. À la mort de celui-ci tout reviendra à mon fils mais pas du vivant de son père. Aucun autre héritier ne pourra justifier de quoi que ce soit ».
Le 5 novembre 2010, le notaire avait établi un acte de partage en considérant que ce testament instituait le mari légataire à titre particulier des biens et droits immobiliers visés dans le testament, notamment, de la pleine propriété d’une maison. Après s'être remarié, le père avait, le 13 septembre 2013, vendu cette maison à son épouse.
Soutenant qu'il avait bénéficié d'un legs graduel de la maison et non d'un legs résiduel, et qu'en conséquence, l'acte de partage était affecté d'une erreur résultant d'une mauvaise interprétation de cette libéralité, le fils avait assigné son père et le notaire afin d'obtenir la nullité de cet acte et la condamnation de ce dernier à réparer le préjudice causé par le manquement à son devoir de conseil.
Décision cour d’appel. Pour condamner le notaire à payer au fils la somme de 102 000 euros au titre de sa perte de chance, la cour d’appel de Colmar (CA Colmar, 21 juin 2019, n° 17/05252 N° Lexbase : A1899ZGG) avait retenu que le legs était « grevé d'une charge comportant l'obligation pour le légataire de conserver les biens qui en étaient l'objet et, à son décès, de les transmettre au second gratifié désigné dans l'acte, conformément aux dispositions de l'article 1040 du Code civil » (lire C. civ., art. 1048, définition de la libéralité graduelle).
Les juges d’appel ajoutaient que le notaire n'avait pas attiré l'attention du père et du fils sur la différence entre un legs graduel et un legs résiduel et que, faute d'avoir pris en compte l'existence de cette charge grevant le legs, le partage opéré par l'acte du 5 novembre 2010 avait été atteint d'une cause de nullité, de sorte que le manquement du notaire à son devoir de conseil était directement à l'origine de la perte de chance, par le fils, d'hériter de la maison en cause au décès de son père. Ils avaient retenu que ce préjudice pouvait être évalué à 85 % du prix de vente du bien, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une expertise pour estimer la valeur de ses droits en considération de l'existence de la charge grevant le legs.
Cassation. La décision est censurée, sur le fondement de l’article 1240 du Code civil (N° Lexbase : L0950KZ9), sur la question de l’évaluation du préjudice à indemniser ; la Haute juridiction fait droit à l’argument du notaire qui reprochait à la cour de ne pas avoir recherché, comme elle y était invitée, si en raison de l'erreur de qualification du legs, le fils n’avait pas bénéficié d’une économie d'impôt de nature à réduire son préjudice.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:477402