Le Quotidien du 9 décembre 2020

Le Quotidien

Affaires

[Brèves] Loi « ASAP » : les dispositions intéressant le droit des affaires

Réf. : Loi n° 2020-1525, du 7 décembre 2020, d'accélération et de simplification de l'action publique (N° Lexbase : L9872LYB)

Lecture: 7 min

N5645BYQ

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par Vincent Téchené

Le 15 Décembre 2020

► La loi d'accélération et de simplification de l'action publique a été publiée au Journal officiel du 8 décembre 2020 ;

Elle contient quelques dispositions intéressant largement le droit des affaires dont les plus significatives sont celles en matière de distribution et concurrence (cf. infra).

  • Droit financier

ACPR. L’article 15 de la loi modifie les articles L. 612-1 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L7096LPI) et L. 594-13 du Code de l'environnement (N° Lexbase : L6748IRD) afin de prévoir la possibilité pour Commission nationale d'évaluation du financement des charges de démantèlement des installations nucléaires de base et de gestion des combustibles usés et des déchets radioactifs (CNEF) de consulter l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) pour l'exercice de sa mission d'évaluation du contrôle de l'adéquation des provisions aux charges.

LEP. L’article 114 supprime de l’article L. 221-15 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1597IZ8) l’obligation pour les titulaires de LEP de justifier chaque année de leur niveau de revenus et renvoie à un décret en Conseil d’État la définition des conditions de l’échange d’informations entre l’administration fiscale et les établissements bancaires, ou les modalités selon lesquelles les contribuables doivent eux-mêmes apporter ces informations si l’administration fiscale n’est pas en mesure de le faire.

En outre il prévoit que l'administration fiscale indique, à leur demande, aux entreprises, établissements ou organismes habilités à proposer le compte sur LEP si les personnes qui demandent l'ouverture d'un tel compte ou qui en sont déjà titulaires remplissent les conditions d'ouverture ou de détention.

  • Propriété intellectuelle

Brevets. L’article 28 modifié l’article L. 612-9 du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L3570ADL) opérant ainsi un transfert du ministre chargé de la propriété industrielle au Directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) des décisions relatives à l’interdiction de la divulgation et de la libre exploitation des brevets ainsi qu’à leur prorogation et levée.

Pièces détachées (censure par le Conseil constitutionnel). L'article 136 prévoyait une modification du droit de la propriété intellectuelle applicable aux pièces détachées pour automobiles. Cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 3 décembre 2020 (Cons. constit., décision n° 2020-807 DC, du 3 décembre 2020 N° Lexbase : A721138L) car constituant un cavalier législatif. Il juge en effet, qu’elle ne présente pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 18 du projet de loi initial (art. 28 de loi : cf. supra). On relèvera que cet article reprenait les dispositions de l’article 110 de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 (N° Lexbase : L1861LUH), d’orientation des mobilités, qui avaient subies le même sort car également censurées par le Conseil constitutionnel en tant que cavalier législatif (Cons. const., décision n° 2019-794 DC, du 20 décembre 2019 N° Lexbase : A6327Z8T)…

  • Droit des transports

L’article 77 de la loi supprime les registres du personnel navigant professionnel de l’aéronautique civile. Il simplifie également la définition des fonctions concernées et précise les fonctions de « personnel navigant technique ».

  • Droit des entreprises en difficulté

L’article 124 de loi prolonge les dispositions des articles 1er à 6 de l'ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020, portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises et des exploitations agricoles aux conséquences de l'épidémie de covid-19 (N° Lexbase : L1695LX3 ; P.-M. Le Corre, Publication d’une seconde ordonnance portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises et des exploitations agricoles aux conséquences de l'épidémie de covid-19, Lexbase Affaires, juin 2020, n° 637 N° Lexbase : N3543BYU et P.-M. Le Corre, Le privilège de sauvegarde et du redressement, Lexbase Affaires, juin 2020, n° 638 N° Lexbase : N3635BYBjusqu'au 31 décembre 2021 inclus.

  • Concurrence, consommation, distribution

Relèvement du seuil de revente à perte et encadrement des promotions pour les produits alimentaires. L’ordonnance n° 2018-1128 du 18 décembre 2018 (N° Lexbase : L3274LNL ; lire N° Lexbase : N6896BXP), prise en application de loi « Egalim » (loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 N° Lexbase : L6488LMA), avait prévu un relèvement de 10 % du seuil de revente de perte (« SRP »), ainsi qu’un encadrement des promotions en valeur (34 %) et en volume (25 %), pour les denrées alimentaires et les produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie. Initialement, ces dispositions étaient applicables pour une durée de deux ans.

La loi « ASAP » abroge l’ordonnance susvisée mais réaffirme les conditions de relèvement du SRP et de l’encadrement des promotions en valeur et en volume pour les denrées et les produits concerné(e)s, et ce désormais jusqu’au 15 avril 2023.

Le dispositif adopté prévoit néanmoins une nouveauté : la possibilité de déroger à l’encadrement des avantages promotionnels en volume pour les « denrées alimentaires dont la vente présente un caractère saisonnier marqué, figurant sur une liste définie par les autorités compétentes ».

ICODE. L’article 126 de la loi abroge l’article L. 751-9 du Code de commerce (N° Lexbase : L5106I3I), supprimant de la sorte la base de données « Implantations des commerces de détail » (ICODE).

DGCCRF et Autorité de la concurrence. L’article 128 de la loi « ASAP » procède à la dématérialisation des actes de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) qui s’appliquera tant à la mission de régulation concurrentielle de la DGCCRF qu’à celle relative à la protection des consommateurs en insérant dans le Code de la consommation un nouvel article L. 511-2-1, et dans le Code de commerce un nouvel article L. 450-2-1. Ces dispositions s’appliqueront également aux agents de l’Autorité de la concurrence (pour le code de commerce).

Régime de la convention unique. L’article 138 de la loi « ASAP » complète le dispositif de la convention unique de l’article L. 441-3 du Code de commerce (N° Lexbase : L0509LQW).

Désormais, la convention unique devra également indiquer « l’objet, la date, les modalités d'exécution, la rémunération et les produits auxquels il se rapporte de tout service ou obligation relevant d'un accord conclu avec une entité juridique située en dehors du territoire français, avec laquelle le distributeur est directement ou indirectement lié ». Selon l’amendement parlementaire à l’origine de cet ajout, cette disposition a pour objectif de lutter contre des pratiques de certaines centrales internationales, volontairement délocalisées à l’étranger, qui fournissent des services à des distributeurs français sans contrepartie évidente.

Interdiction des pénalités disproportionnées et réintroduction de la prohibition des déductions d’office. L’article 139 de la loi « ASAP » crée un 3° à l’article L. 442-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L0501LQM) et ajoute ainsi à la réglementation relative aux pratiques restrictives de concurrence une disposition qui vise à sanctionner les deux pratiques suivantes :

- le fait d’imposer des pénalités disproportionnées au regard de l’inexécution d’engagements contractuels ; et

- le fait de procéder au refus ou retour de marchandises ou de déduire d’office du montant de la facture établie par le fournisseur, les pénalités ou rabais correspondant au non-respect d’une date de livraison, à la non-conformité des marchandises, lorsque la dette n’est pas certaine, liquide et exigible, sans même que le fournisseur ait été en mesure de contrôler la réalité du grief correspondant.

Selon l’amendement parlementaire qui a introduit cet article, cette disposition a pour objet de « sanctionner la mise en place de pénalités logistiques qui peuvent atteindre des montants injustifiés ». Elle reprend une préconisation du guide des bonnes pratiques en matière de pénalités logistiques établi par la CEPC.

Le texte va plus loin puisqu’il ne vise pas exclusivement les pénalités de nature logistique.

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Cotisations sociales

[Brèves] Nullité de la contrainte émise après le remboursement d’un trop-perçu de cotisations par l’URSSAF

Réf. : Cass. civ. 2, 26 novembre 2020, n° 19-21.731, F-P+B+I (N° Lexbase : A1664387)

Lecture: 2 min

N5551BYA

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par Laïla Bedja

Le 08 Décembre 2020

► La contrainte délivrée par le directeur d'un organisme de Sécurité sociale sur le fondement de l’article L. 244-9 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L0695LTW) a pour objet exclusif le recouvrement des cotisations et contributions sociales et des majorations de retard.

Les faits et procédure. À la suite du calcul des cotisations et contributions sociales définitives dues par le cotisant au titre de l’année 2015 et compte tenu des sommes versées à titre provisionnel, l’URSSAF a procédé à son profit au remboursement d’une certaine somme.

Ayant constaté que la somme remboursée était supérieure à la somme due, l’URSSAF a notifié au cotisant une mise en demeure puis a délivré à son encontre, le 30 janvier 2017, une contrainte d’un certain montant afférente à la régularisation des cotisations et contributions sociales de l’année 2015.

Le cotisant a formé opposition à cette contrainte devant une juridiction de Sécurité sociale.

La cour d’appel. Pour débouter le cotisant de son opposition, la cour d’appel (CA Rouen, 3 juillet 2019, n° 18/00642 N° Lexbase : A7411ZHX) retient que le cotisant ne peut soutenir que la somme réclamée a changé de nature et de montant, dès lors que l’URSSAF ne réclame pas le remboursement d'une somme qu'elle a versée par erreur mais explique le raisonnement qui a conduit au montant restant dû au titre de l’année 2015, mentionné dans la mise en demeure et la contrainte, qui correspond bien à un solde impayé de cotisations. À tort.

Cassation. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction casse et annule l’arrêt de la cour d’appel selon un moyen relevé d’office. En l’espèce, la contrainte avait pour objet non le recouvrement des cotisations sociales définitives de l'année 2015, mais le remboursement d'un indu correspondant aux sommes versées par erreur par l’URSSAF.

Pour en savoir plus : F. Taquet, ÉTUDE : Le contentieux du recouvrement, La contrainte, in Droit de la protection sociale, Lexbase (N° Lexbase : E34873PT).

newsid:475551

Droit Administratif Général

[Brèves] Loi « ASAP » : les principales dispositions en droit public

Réf. : Loi n° 2020-1525, du 7 décembre 2020, d'accélération et de simplification de l'action publique (N° Lexbase : L9872LYB)

Lecture: 2 min

N5647BYS

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par Yann Le Foll

Le 09 Décembre 2020

La loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020, d'accélération et de simplification de l'action publique, contient de multiples dispositions en droit public, notamment en droit administratif général, en droit de l’environnement et en matière de commande publique.

Transformation de l’action publique :

- déconcentration des autorisations de consultation des documents d’archives publiques non encore librement communicables et des autorisations de destruction d’archives privées classées comme archives historiques ;

- extension du champ des compétences de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) notamment en matière d’agrément des laboratoires pour la réalisation des prélèvements et des analyses du contrôle sanitaire des eaux.

Droit des installations classées :

Parmi les thématiques abordées par la loi « ASAP » dans le domaine du droit des installations classées, on peut citer les suivantes :

- encadrement dans le temps des prescriptions générales édictées dans le domaine des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) concernant les projets en cours d’instruction ;

- possibilité de réaliser les travaux avant que ne soit délivrée l’autorisation environnementale ; transfert partiel d’une « autorisation » ICPE ;

- prise en compte, lors de la remise en état d’une ICPE (autorisée ou enregistrée), de la ressource en eau ;

- remise en état attestée par un tiers et l’imposition d’un délai pour réaliser les travaux de remise en état ;

- et possibilité d’opérer une substitution de tiers intéressé à la remise en état.

Commande publique :

Parmi les thématiques abordées par la loi « ASAP » dans le domaine du droit de la commande publique, on peut citer les suivantes :

- passation d’un marché public sans mise en concurrence pour un motif d’intérêt général lorsque « le respect d’une telle procédure est inutile, impossible ou manifestement contraire aux intérêts de l’acheteur » ;

- élargissement de la possibilité pour les acheteurs de conclure des marchés publics sans publicité ni mise en concurrence en portant temporairement (jusqu’au 31 décembre 2022) le seuil de dispense à 100 000 euros hors taxes pour la passation des marchés de travaux ;

- dérogations aux procédures de mise en concurrence pour certaines prestations d’avocats ;

- adaptation du droit de la commande publique pour faire face aux « circonstances exceptionnelles » (guerre, pandémie, crise économique mondiale, catastrophe naturelle) ;

- et renforcement du dispositif de réservation de l’exécution de certains marchés publics à des petites ou moyennes entreprises (PME) ou à des artisans.

newsid:475647

Filiation

[Brèves] Transcription intégrale de l’acte de naissance d’un enfant né de GPA à l’étranger : la première chambre civile persiste et signe !

Réf. : Cass. civ. 1, 18 novembre 2020, n° 19-50.043, FS-P+B (N° Lexbase : A497937K)

Lecture: 9 min

N5559BYK

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par Marie-Lou Hardouin-Ayrinhac

Le 02 Décembre 2020

► La Cour de cassation confirme sa jurisprudence issue des arrêts du 18 décembre 2019 (Cass. civ. 1, 18 décembre 2019, n° 18-12.327 N° Lexbase : A8960Z8D, n° 18-11.815 N° Lexbase : A8959Z8C, FS-P+B+R+I) : en présence d'une action aux fins de transcription de l'acte de naissance étranger de l'enfant, qui n'est pas une action en reconnaissance ou en établissement de la filiation, ni la circonstance que l'enfant soit né à l'issue d'une convention de gestation pour autrui ni celle que cet acte désigne le père biologique de l'enfant et un deuxième homme comme père ne constituent des obstacles à la transcription de l'acte sur les registres de l'état civil, lorsque celui-ci est probant au sens de l'article 47 du Code civil (N° Lexbase : L1215HWW).

Faits et procédure. Un enfant est né en Colombie britannique (Canada) ayant pour parents deux hommes de nationalité française ayant eu recours à un GPA au Canada. Les parents avaient assigné le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nantes. Ce dernier s'étant opposé à leur demande de transcription de l'acte de naissance sur les registres de l'état civil consulaire, le couple l'a assigné à cette fin.

La Cour de cassation reprend mot pour mot le raisonnement des arrêts du 18 décembre 2019 (Cass. civ. 1, 18 décembre 2019, n° 18-12.327, n° 18-11.815, FS-P+B+R+I), procédant à un rappel détaillé de l’évolution de la jurisprudence.

Le principe de la reconnaissance du lien de filiation : la GPA ne fait pas obstacle à la reconnaissance du lien de filiation.

Avec la mère d’intention. Dans un premier temps, la Cour cite l’arrêt d’Assemblée plénière, rendu le 4 octobre 2019, selon lequel : « il  se déduit de l’article 8 de la CESDH (N° Lexbase : L4798AQR), tel qu'interprété par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH, Gde ch., 10 avril 2019, avis n° P16-2018-001 N° Lexbase : A7859Y8L ; v. A. Gouttenoire, Le régime français de la GPA à l’étranger validée par la Cour européenne des droits de l’Homme, sous certaines réserves…, Lexbase Droit privé, mai 2019, n° 784 N° Lexbase : N9099BXB), qu'au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant, la circonstance que la naissance d'un enfant à l'étranger ait pour origine une convention de gestation pour autrui, prohibée par les articles 16-7 (N° Lexbase : L1695ABE) et 16-9 (N° Lexbase : L1697ABH) du Code civil, ne peut, à elle seule, sans porter une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée de l'enfant, faire obstacle à la transcription de l'acte de naissance établi par les autorités de l'Etat étranger, en ce qui concerne le père biologique de l'enfant, ni à la reconnaissance du lien de filiation à l'égard de la mère d'intention mentionnée dans l'acte étranger, laquelle doit intervenir au plus tard lorsque ce lien entre l'enfant et la mère d'intention s'est concrétisé » (Ass. plén., 4 octobre 2019, n° 10-19.053, publié, paragraphe 6 N° Lexbase : A4073ZQW ; v. A. Gouttenoire, La transcription intégrale des actes de naissance sur les registres d’état civil dans l’affaire «Mennesson» : une solution d’espèce dans un arrêt de principe, Lexbase Droit privé, octobre 2019, n° 800 N° Lexbase : N0904BY7).

Idem s’agissant du père d’intention. Dans un deuxième temps, la Cour réaffirme ensuite que le raisonnement n'a pas lieu d'être différent lorsque c'est un homme qui est désigné dans l'acte de naissance étranger comme « parent d'intention ».

Modalités de la reconnaissance du lien de filiation :

  • L’admission de la transcription conditionnée par l’impossibilité d’adoption

Dans un troisième temps, elle précise que la jurisprudence (Cass. civ. 1, 5 juillet 2017, n° 15-28.597 N° Lexbase : A7470WLA, n° 16-16.901 et n° 16-50.025 N° Lexbase : A7473WLD, n° 16-16.455 N° Lexbase : A7471WLB, FS-P+B+R+I ; v. A. Gouttenoire, La GPA devant la Cour de cassation : dernier acte, Lexbase Droit privé, juillet 2017, n° 708 N° Lexbase : N9619BW8) qui, en présence d'un vide juridique et dans une recherche d'équilibre entre l'interdit d'ordre public de la gestation pour autrui et l'intérêt supérieur de l'enfant, a refusé, au visa de l'article 47 du Code civil, la transcription totale des actes de naissance étrangers des enfants en considération, notamment, de l'absence de disproportion de l'atteinte portée au droit au respect de leur vie privée dès lors que la voie de l'adoption était ouverte à l'époux ou l'épouse du père biologique, ne peut trouver application lorsque l'introduction d'une procédure d'adoption s'avère impossible ou inadaptée à la situation des intéressés.

Ainsi, dans l'arrêt précité, l'assemblée plénière de la Cour de cassation a admis, au regard des impératifs susvisés et des circonstances de l'espèce, la transcription d'actes de naissance étrangers d'enfants nés à l'issue d'une convention de gestation pour autrui, qui désignaient le père biologique et la mère d'intention.

  • Évolution de la jurisprudence :  le caractère probant de l’acte de naissance étranger, seule condition à la transcription

Dans un quatrième et dernier temps, la Cour reprend les termes de ses arrêts de 2019 (Cass. civ. 1, 18 décembre 2019, trois arrêts, n° 18-11.815, n° 18-12.327, FS-P+B+R+I) selon lesquels « les mêmes impératifs et la nécessité d'unifier le traitement des situations ont conduit à une évolution de la jurisprudence en ce sens qu'en présence d'une action aux fins de transcription de l'acte de naissance étranger de l'enfant, qui n'est pas une action en reconnaissance ou en établissement de la filiation, ni la circonstance que l'enfant soit né à l'issue d'une convention de gestation pour autrui ni celle que cet acte désigne le père biologique de l'enfant et un deuxième homme comme père ne constituent des obstacles à la transcription de l'acte sur les registres de l'état civil, lorsque celui-ci est probant au sens de l'article 47 du Code civil. »

Décision. Pour ordonner la transcription partielle de l'acte de naissance de l'enfant et rejeter la demande en ce que cet acte désigne le père d'intention en qualité de parent, la cour d'appel avait retenu que la désignation de celui-ci ne pouvait correspondre à la réalité biologique, ce dont il résultait que les faits qui y étaient déclarés ne correspondaient pas à la réalité, et que la transcription partielle ne portait pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'enfant, au regard du but légitime poursuivi, dès lors que l'accueil de l'enfant au sein du foyer constitué par son père et son compagnon n'était pas remis en cause par les autorités françaises et que ce dernier aurait la possibilité de créer un lien de filiation avec l'enfant par un biais autre que la transcription, n'étant pas établi que la voie de l'adoption serait fermée au motif qu'il figurait dans l'acte de naissance comme parent (CA Rennes, 13 mai 2019, n° 17/07696 N° Lexbase : A8719ZBK). 

La cour d'appel s'était donc fondée sur la jurisprudence existante au jour où elle statuait, qui conditionnait la transcription à l’impossibilité d'adoption.

Sa décision est censurée par la Cour de cassation qui, réaffirmant la solution posée dans ses arrêts de décembre 2019, relève que, saisie d'une demande de transcription d'un acte de l'état civil étranger, et ayant constaté que celui-ci était régulier, exempt de fraude et avait été établi conformément au droit de l'Etat de Colombie Britannique, la cour d'appel a violé les articles 3, § 1, de la Convention de New-York du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant (N° Lexbase : L6807BHL), 8 de la CESDH et 47 du Code civil.

La Cour rejette le pourvoi principal. Elle casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, mais seulement en ce qu'il rejette la demande du père d'intention tendant à la transcription, sur les registres de l'état civil, de l'acte de naissance de l’enfant, né en Colombie Britannique, s'agissant de sa désignation comme parent de l'enfant.

À retenir  : 
  • La condition de rechercher si l’adoption était possible ou non n’est plus admise pour refuser ou autoriser la transcription intégrale de l’acte de naissance d’un enfant né par GPA à l’étranger.
  • L’unique condition posée à la transcription intégrale de l’acte de naissance d’un enfant né par GPA à l’étranger est posée par l’article 47 du Code civil ; elle concerne le caractère probant de l’acte étranger.

À noter : le projet de loi relatif à la bioéthique, tel qu’adopté en deuxième lecture par l’Assemblée nationale, prévoit, en son article 4 bis, de compléter l’article 47 du Code civil pour préciser que « la réalité des faits qui sont déclarés dans l’acte de l’état civil est appréciée au regard de la loi française », afin de maintenir un contrôle juridictionnel sur les GPA réalisées à l’étranger ; cette évolution de la législation viendrait alors mettre un terme à la jurisprudence retenue par la première chambre civile de la Cour de cassation.

 

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Fiscalité des entreprises

[Brèves] Prix de transfert : une insuffisante facturation par une entreprise établie en France à une entreprise établie hors de France est constitutive d’un transfert indirect de bénéfices

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 23 novembre 2020, n° 425577, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A379637Q)

Lecture: 6 min

N5524BYA

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par Marie-Claire Sgarra

Le 01 Décembre 2020

Une présomption de transfert indirect de bénéfices qui ne peut utilement être combattue par l'entreprise imposable en France que si celle-ci apporte la preuve que les avantages qu'elle a consentis ont été justifiés par l'obtention de contreparties ;

► Peut constituer une telle pratique l'insuffisante rémunération perçue par une entreprise établie en France qui expose des charges contribuant au développement de la valeur d'une marque appartenant à sa société mère établie hors de France.

Les faits. Une société, alors détenue à 100 % par une société hollandaise, elle-même détenue par une société italienne, et qui distribuait quasi exclusivement les produits de la société italienne, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2009 et 2010, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a estimé qu'elle avait indirectement transféré des bénéfices à la société italienne. Le tribunal administratif de Paris a déchargé la société française de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2009, de la retenue à la source au titre des années 2009 et 2010 ainsi que des compléments de cotisation minimale de taxe professionnelle et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au titre respectivement de l'année 2009 et de l'année 2010, résultant de cette rectification (TA Paris, 28 mars 2017, n° 1516641 N° Lexbase : A4711YGL). La cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé contre ce jugement (CAA Paris, 27 septembre 2018, n° 17PA02617 N° Lexbase : A6964YEN).

Définition : selon la définition de l’OCDE, les prix de transfert sont « les prix auxquels une entreprise transfère des biens corporels, des actifs incorporels, ou rend des services à des entreprises associées ». Ils se définissent plus simplement comme étant les prix des transactions entre sociétés d’un même groupe et résidentes d’États différents : ils supposent des transactions intragroupes et le passage d’une frontière.

Principe. Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités.

Le vérificateur a mis en évidence que le montant des salaires et des charges externes supporté par la société française de 2005 à 2010, était sensiblement supérieur à celui qui était exposé par dix-neuf entreprises comparables, exerçant la même activité de distribution de produits de luxe, mais de manière «  indépendante », au sens des principes définis par l’OCDE, sans que ce surcroît de charges soit entièrement compensé par le surcroît de marge brute dont bénéficiait, par rapport à ces mêmes entreprises, la filiale française.

La société, immatriculée depuis 1992, a été continûment déficitaire depuis au moins 1996 jusqu'en 2009. Par suite, le vérificateur a regardé cette insuffisance de marge brute comme un avantage octroyé par la société française à la société italienne, constitutif d'un transfert indirect de bénéfices au sens de l'article 57 du Code général des impôts (N° Lexbase : L9738I33).

Le Conseil d’État censure l’arrêt de la cour administrative d’appel :

« En jugeant que l'administration n'établissait pas l'existence d'un avantage consenti à la société italienne au motif que les résultats de la société française au titre des exercices clos de 2010 à 2015 avaient été bénéficiaires sans changement de la politique des prix de transfert de l'entreprise, alors pourtant qu'elle avait relevé que l'exposition de charges supplémentaires de salaires et de loyers par rapport à des entreprises indépendantes visait à accroître, sur un marché stratégique dans le domaine du luxe, la valeur de la marque italienne qui n'avait pas encore la même notoriété que ses concurrents directs, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.

En outre, alors qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'administration fiscale avait établi l'existence d'une pratique entrant dans les prévisions de l'article 57 du Code général des impôts, en démontrant que la rémunération accordée par la société italienne ne permettait pas de couvrir les charges de prestige qui contribuaient à valoriser la marque Salvatore Ferragamo exposées par la filiale française et en faisant valoir que cette dernière avait été continûment déficitaire depuis au moins 1996 jusqu'en 2009, la cour a dénaturé les faits et pièces versées au dossier.

En écartant, dans ces conditions, l'existence d'un transfert indirect de bénéfices devant être réintégré à ses résultats imposables alors que la société n'établissait pas, en se bornant à se prévaloir d'une situation bénéficiaire entre 2010 et 2015, avoir retiré une contrepartie de l'avantage en cause, la cour a inexactement qualifié les faits de l'espèce ».

Pour rappel, le Conseil d’État a eu l’occasion de se prononcer sur la caractérisation d’un transfert indirect de bénéfices en jugeant que le lien de dépendance nécessaire à l’application des dispositions de l’article 57 du CGI n’est pas seulement subordonné à l’existence d’un lien capitalistique ou d’une communauté de dirigeants, mais peut se déduire de l’existence d’une dépendance de fait d’une société étrangère à l’égard de la société française (CE 9° et 10° ssr., 15 avril 2016, n° 372097, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7095RIM).

Lire sur cet arrêt, D. Chrétien, Prix de transfert France/Suisse : une dépendance de fait peut surgir entre deux sociétés et caractériser un transfert indirect de bénéfices, Lexbase Fiscal, mai 2016, n° 654 (N° Lexbase : N2639BWN).

 

 

 

newsid:475524

Marchés publics

[Brèves] Soumissions en réponse à des appels d’offres de marchés publics par des filiales d’un même groupe : absence de sanctions par le droit de la concurrence

Réf. : Autorité de la concurrence, décision n° 20-D-19 du 25 novembre 2020 (N° Lexbase : X1225CKL)

Lecture: 2 min

N5543BYX

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par Yann Le Foll

Le 03 Décembre 2020

► Des sociétés appartenant à un même groupe ayant présenté comme distinctes des offres élaborées de façon concertée en réponse aux appels d’offres d’un établissement public national ne sont pas sanctionnables par le droit de la concurrence (Autorité de la concurrence, décision n° 20-D-19 du 25 novembre 2020 N° Lexbase : X1225CKL).

Faits. Les quatre sociétés mises en cause – qui appartiennent au même groupe – ont présenté comme distinctes des offres élaborées de façon concertée en réponse aux appels d’offres organisés par France AgriMer. Interrogées par cette dernière, ces sociétés ont affirmé ne pas s’être concertées dans la réponse à ces appels d’offres. Les services d’instruction de l’Autorité ont notifié un grief d’entente aux quatre sociétés susmentionnées. Les sociétés mises en cause ont sollicité de l’Autorité le bénéfice de la procédure de transaction, en application des dispositions du III de l’article L. 464-2 du Code de commerce (N° Lexbase : L2313LDZ). La mise en œuvre de la procédure de transaction a donné lieu à l’établissement de procès-verbaux de transaction fixant le montant minimal et le montant maximal des sanctions pécuniaires qui pourraient être infligées par l’Autorité.

Décision. L’Autorité, s’appuyant sur la jurisprudence récente de la CJUE, fait évoluer sa pratique décisionnelle s’agissant des soumissions en réponse à des appels d’offres de marchés publics par des filiales d’un même groupe.

Alors que la pratique décisionnelle de l’Autorité et la jurisprudence de la cour d’appel de Paris considéraient que la présentation d’offres en apparence indépendantes mais préparées de façon concertée par les entités appartenant au même groupe pouvait être sanctionnée au titre de la prohibition des ententes, la Cour de justice a, pour la première fois, expressément jugé, dans un arrêt du 17 mai 2018 (« Ecoservice » N° Lexbase : A8248XMG), que des accords tels que ceux de l’espèce n’entrent pas le champ d’application des règles de concurrence européennes.

La Cour a en effet précisé qu’en pareille hypothèse, les entités concernées ne forment qu’une seule « entreprise » au sens du droit de la concurrence, ce qui fait obstacle à la qualification de telles pratiques d’accords ou de pratiques concertées. En conséquence, l’Autorité considère qu’au regard de l’évolution du droit positif, les conditions de mise en œuvre de la transaction ne sont pas remplies et qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la procédure.

Pour aller plus loin : La présentation des offres in Droit de la commande publique (N° Lexbase : E6798E9N).

newsid:475543

Pénal

[A la une] Procès des « écoutes » : le PNF requiert 4 ans d’emprisonnement dont 2 ans avec sursis contre Nicolas Sarkozy

Lecture: 3 min

N5651BYX

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par June Perot, rédactrice en chef

Le 08 Décembre 2020

► À l’issue de 6 heures 30 d’audience, les réquisitions du Parquet national financier (PNF) sont tombées : quatre ans d’emprisonnement, dont deux avec sursis contre l’ancien chef de l’État ; les mêmes peines pour Gilbert Azibert (l’ancien haut magistrat) et Thierry Herzog avec toutefois une peine complémentaire de cinq ans d’interdiction professionnelle pour l’avocat qui est encore en exercice.

Pour rappel, dans cette affaire, les prévenus sont soupçonnés d’avoir corrompu un haut magistrat afin d’obtenir des informations sur un pourvoi en cassation. Ce dernier étant soupçonné d’avoir agréé le pacte corrupteur.

Tôt dans l’après-midi, avant d’entendre les réquisitions du PNF, Me Karel-Canoy plaidait pour une partie civile, Luc Bismuth, fils d’un certain Paul Bismuth décédé en 1998 mais également pour lui-même, dans la mesure où il s’est constitué partie civile. Il soutenait que son client est une victime directe et une victime par ricochet. Ce nom de famille serait devenu la risée de tout un pays selon l’avocat. Il sollicite du tribunal une condamnation à hauteur de 300 000 euros.

Il s’applique ensuite à plaider sa propre constitution, évoquant le fait que cette affaire cause un préjudice à tous les auxiliaires de justice, victimes collatérales des dysfonctionnements du système judiciaire. Il sollicite 1 euro symbolique au titre du préjudice moral.

Une association est également partie civile et soulève une QPC, aussitôt déclarée irrecevable. Un vent de contestation s’élève sur le banc des parties civiles, le ton monte, la présidente passablement agacée ordonne l’expulsion du représentant de l’association.

Ce non-événement laisse place aux réquisitions du PNF. Pour l’occasion, Jean-François Bohnert, chef du PNF, a fait le déplacement dans le prétoire, tenant à rappeler que le PNF est « une institution jeune et perfectible ». Il revient alors sur la confusion opérée entre les deux affaires : d’un côté les écoutes et de l’autre le traitement des fadettes (enquête préliminaire).

« Le PNF est et restera un fidèle et exigeant serviteur de l'État de droit »

Le procureur adjoint, Jean-Luc Blachon, prend la parole et fait œuvre d’une précision et d’une pédagogie exemplaires, citant tour à tour toutes les jurisprudences de la Chambre criminelle et de la CEDH. Chose assez inédite, les développements sont illustrés par la diffusion, sur un écran de projection situé au-dessus de la présidente, de diapositives exposant le plan de ses propos, des extraits de conversations, schémas, nuage de mots mettant en exergue le mot « agenda ». Il s’étonne : « depuis quand commente-t-on dans les revues juridiques les décisions de chambres de l'instruction non définitives ? ». C’est ensuite au tour de la première vice-procureur, Céline Guillet, de prendre la parole. Elle évoque un attachement à géométrie variable de Me Thierry Herzog s’agissant du secret professionnel. La démonstration est longue (près de 4 heures 30) et méticuleuse. Pour autant, on peine à adhérer à la démonstration qui impressionne sur la forme mais laisse songeur sur le fond.

Une suspension d’audience plus tard, c’est le procureur adjoint qui prend de nouveau la parole pour revenir sur les spécificités techniques juridiques du dossier : corruption, trafic d’influence ; c’est de la chirurgie juridique.

Avant de requérir ses peines, le parquet indique qu’« au regard du statut social et professionnel des prévenus, les faits reprochés donnent une dimension nihiliste aux délits reprochés ».  Jean-Luc Blachon tient à apporter des précisions sur l’institution du PNF au cours d’un moment qu’on qualifiera d’extra-judiciaire. Il conclut finalement cet aparté ainsi : « Une justice qui ne passe pas est source de maux qui ne s'effacent pas ».

19 heures, l’heure des réquisitions sur les peines a sonné et avec, la fin de l’audience.

newsid:475651

Procédure civile

[Brèves] Quid de l’interruption des délais de prescription et de forclusion par une déclaration d’appel nulle ?

Réf. : Cass. civ. 3, 3 décembre 2020, n° 19-17.868, FS-P+B+I (N° Lexbase : A950038D)

Lecture: 4 min

N5641BYL

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 09 Décembre 2020

Deux éléments sont à retenir de l’arrêt rendu le 3 décembre 2020 par la troisième chambre civile de la Cour de cassation, le premier est que l’acte de saisine d’une juridiction, même entaché d’un vice de procédure, interrompt les délais de prescription comme celui de forclusion, et le second, déjà jugé par la deuxième chambre civile (Cass. civ. 2, 1er juin 2017, n° 16-14.300, FS-P+B+I N° Lexbase : A8538WEX), porte sur la régularisation de la déclaration d’appel entachée d’un vice de procédure, qui demeure possible jusqu’à ce que le juge statue, cette dernière ayant interrompu le délai d’appel.

Faits et procédure. Dans cette affaire, une association foncière urbaine libre (AFUL) a été constituée par des copropriétaires d’un immeuble, en vue de réaliser une opération de restauration immobilière éligible à un dispositif de défiscalisation. La maîtrise d’œuvre a été confiée à une société qui était assurée par deux assurances, la réalisation des travaux a été confiée à une autre société également assurée, enfin la mission de coordination en matière de sécurité et protection de la santé a été confiéé à un professionel. L’AFUL a conclu un contrat d’assistance à la maîtrise d’ouvrage avec le syndic de copropriété, qui a sous-traité les missions de conseil et de gestion administrative et comptable à une SCP. Le 20 août 2004, un permis de construire a été délivré et la déclaration de chantier établie le 11 avril 2005. Courant juillet 2006, le chantier a été abandonné et l’immeuble muré. Les deux sociétés, et le syndic ont été placés en redressement judiciaire, puis en liquidation. L’AFUL et les copropriétaires ont assigné en indemnisation de leurs préjudices la SCP, le syndic et le coordonateur, ainsi que leurs assureurs.

Deux pourvois en cassation ont été formés et ils ont été joints en raison de leur connexité.

Seul le moyen unique, pris en sa deuxième branche, du pourvoi n° 19-20.259 sera analysé dans cette brève.

Le pourvoi. L’AFUL fait grief à l’arrêt (CA Nîmes, 25 avril 2019, n° 16/04127 N° Lexbase : A8340Y9R) d’avoir violé les articles 2241 (N° Lexbase : L7181IA9) et 2242 (N° Lexbase : L7180IA8) du Code civil et 121 (N° Lexbase : L1412H43) du Code de procédure civile, en retenant qu’elle n’avait pas qualité à agir.

Réponse de la Cour. Après avoir énoncé la solution précitée, aux visas des articles 2241, alinéa 2, du Code civil et 121 du Code de procédure civile, la Cour suprême relève que l’arrêt d’appel pour retenir le défaut de qualité à agir de l’AFUL, avait indiqué qu’elle avait justifié avoir procédé à la mise en conformité de ses statuts, et avoir accompli les formalités de déclaration et de publication prévues par l’article 8 de l’ordonnance du 1er juillet 2004, cependant que l’irrégularité de fond, portant sur le défaut de capacité d’ester en justice, entachant l’acte d’appel ne pouvait pas être couverte après l’expiration du délai d’appel. En conséquence, l’AFUL restait dépourvue de toute capacité à agir au moment où elle a interjeté appel.

La Haute juridiction s’était également prononcée en ce sens, par un arrêt du 16 octobre 2014 (Cass. civ. 2, 16 octobre 2014, n° 13-22.088, F-P+B N N° Lexbase : A6522MY9, commenté par E. Raskin, La décision annulant une déclaration d'appel pour vice de fond a un effet interruptif sur le délai d'appel au sens de l'article 2241, alinéa 2, du Code civil, dans Lexbase Droit privé, novembre 2014, n°590 N° Lexbase : N4495BUZ).

Solution. Le raisonnement est censuré par la Cour suprême, qui casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt d’appel.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les modalités de mise en œuvre des actions en justice, Les effets de la demande en justice, in Procédure civile, Lexbase (N° Lexbase : E9903ETX)

 

newsid:475641

Rémunération

[Brèves] Loi « ASAP » : les dispositions en matière d’épargne salariale

Réf. : Loi n° 2020-1525, du 7 décembre 2020, d'accélération et de simplification de l'action publique (N° Lexbase : L8587LYP)

Lecture: 2 min

N5646BYR

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par Charlotte Moronval

Le 09 Décembre 2020

► Publiée au Journal officiel du 8 décembre 2020, la loi d'accélération et de simplification de l'action publique, qui a pour but de simplifier les formalités administratives et les démarches qui y sont liées, comporte une série de dispositions relatives à l’épargne salariale (articles 117 à 122).

Durée des accords d’intéressement. La loi ouvre la possibilité de conclure des accords d’intéressement pour une durée comprise entre 1 et 3 ans.

Accord de branche d’épargne salariale. La loi « Pacte » (N° Lexbase : L3415LQK) prévoyait, dans son article 115, une obligation pour les branches professionnelles de négocier la mise en place d’un régime d’intéressement ou d’épargne salariale d’ici le 31 décembre 2020. La loi « ASAP » prolonge d’un an cette obligation, soit jusqu’au 31 décembre 2021.

Nouvelle procédure d’agrément des accords. La loi met en place une nouvelle procédure d’agrément des accords de branche au niveau de l’administration centrale. Ainsi, toute entreprise pourrait mettre en place un dispositif d’intéressement, de participation ou d’épargne salariale conclu au niveau de la branche, dès lors que l’accord de branche a été agréé. L’agrément de l’accord sera pris en charge par l’administration dès son dépôt et un délai d’agrément sera fixé ultérieurement par décret.

Nouvelles modalités de contrôle des accords d’épargne salariale. La loi clarifie le rôle des organismes compétents :

  • les Direccte se chargent de l’instruction des formalités de dépôt et se focalisent sur l’accompagnement lors de la négociation, de la dénonciation et de la révision des accords ;
  • à compter du 1er septembre 2021, c’est l’Urssaf qui se chargera du contrôle de fond.

À noter que la loi prévoit également la possibilité de mettre en place un PERU dans les entreprises dépourvues de représentation du personnel via notamment une DUE. Elle permet également de mettre en place ou d’adhérer à un plan d’épargne interentreprises par DUE, sous réserve de garantir l’information des salariés sur la mise en place du plan.

newsid:475646

Transport

[Brèves] Transport aérien : constitutionnalité de l’amende pour non-respect des mesures prises pour limiter les nuisances aéroportuaires

Réf. : Cons. const., décision n° 2020-867 QPC, du 27 novembre 2020 (N° Lexbase : A838937T)

Lecture: 3 min

N5562BYN

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par Vincent Téchené

Le 02 Décembre 2020

► Les dispositions de l’article L. 6361-12 du Code des transports (N° Lexbase : L6211IND) se bornent à énumérer des personnes participant à l'activité aérienne et susceptibles, à cette occasion, de manquer au respect de l'une des restrictions, procédures ou règles énumérées et n'ont dès lors, ni par elles-mêmes, ni en raison de la portée effective que leur confèrerait une interprétation jurisprudentielle constante, pour objet ou pour effet de rendre une personne responsable d'un manquement qui ne lui serait pas imputable ;

Elles sont donc conformes à la Constitution

QPC. Le requérant soutenait que l'article L. 6361-12 du Code des transports permet de punir des personnes pour des manquements imputables à l'usage d'un aéronef même lorsqu'elles ne disposent pas de la maîtrise effective de cet aéronef, qui relève des seuls commandant de bord ou équipage de l'appareil. Il en résulterait, selon lui, une méconnaissance du principe selon lequel nul ne peut être punissable que de son propre fait, garanti par les articles 8 (N° Lexbase : L1372A9P) et 9 (N° Lexbase : L1373A9Q) de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, ainsi qu’au principe d'égalité devant les charges publiques.

Le Conseil d’État (CE 2° et 7° ch.-r., 25 septembre 2020, n° 440014 N° Lexbase : A13133WK) a donc transmis une QPC au Conseil constitutionnel.

Disposition contestée. L'article L. 6361-12 du Code des transports prévoit que l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires peut prononcer une amende administrative à l'encontre de certaines personnes ne respectant pas les restrictions à l'usage de certains types d'aéronefs ou à l'exercice de certaines activités aériennes, les procédures particulières de décollage ou d'atterrissage, les règles relatives aux essais moteurs et aux valeurs maximales de bruit ou d'émissions atmosphériques polluantes. Il est également prévu que ces personnes peuvent être celles exerçant une activité de transport aérien public, celles au profit desquelles est exercée une activité de transport aérien, celles exerçant une autre activité aérienne ainsi que celles exerçant l'activité de fréteur.

Décision. Pour le Conseil constitutionnel, les dispositions contestées se bornent à énumérer des personnes participant à l'activité aérienne et susceptibles, à cette occasion, de manquer au respect de l'une des restrictions, procédures ou règles précitées. Ainsi, elles n'ont, ni par elles-mêmes ni en raison de la portée effective que leur confèrerait une interprétation jurisprudentielle constante, pour objet ou pour effet de rendre une personne responsable d'un manquement qui ne lui serait pas imputable.

Il en déduit que :

- le grief tiré de la méconnaissance du principe selon lequel nul n'est punissable que de son propre fait manque en fait ; et

- le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques est inopérant à l'encontre de dispositions instituant une sanction ayant le caractère d'une punition au sens de l'article 8 de la Déclaration de 1789.

Dès lors, les dispositions contestées, ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit et doivent, en conséquence, être déclarées conformes à la Constitution.

newsid:475562

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