Réf. : QE n° 21216 de M. Guillaume Larrivé, JOANQ 9 juillet 2019, réponse publ. 31 décembre 2019 p. 11502, 15ème législature (N° Lexbase : L3838LUP)
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N1716BY9
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par Marie Le Guerroué
Le 09 Janvier 2020
► Même si le nouveau divorce par consentement mutuel extrajudiciaire ne suppose pas le recours à une instance juridictionnelle, il est admis, au regard de l'objet de cette exonération de droits d'enregistrement, qu'elle s'applique à ces divorces lorsque l'une des parties au moins bénéficie de l'aide juridictionnelle.
Telle est la solution apportée par le ministère de l’Action et des Comptes publics dans une réponse ministérielle du 31 décembre 2019 (QE n° 21216 de M. Guillaume Larrivé, JOANQ 9 juillet 2019, réponse publ. 31 décembre 2019 p. 11502, 15ème législature N° Lexbase : L3838LUP).
Question. Le député Guillaume Larrivé avait interrogé le ministre de l'Action et des Comptes publics sur les règles applicables en matière d'exonération des droits d'enregistrement en cas de divorce lorsqu'une des parties bénéficie de l'aide juridictionnelle. Le I de l'article 1090 A du Code général des impôts (N° Lexbase : L9636HLH) dispose en effet que, sauf lorsqu'elles portent mutation de propriété, d'usufruit ou de jouissance, les décisions rendues dans les instances où l'une des parties au moins bénéficie de l'aide juridictionnelle, sont exonérées des droits de timbre et d'enregistrement. Mais il relève que, selon les départements, les bureaux d'enregistrement n'ont pas la même interprétation de cet article dans le cadre d'une procédure de divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats et déposé au rang des minutes d'un notaire, ce qui génère ainsi une inégalité de traitement entre les citoyens concernés. Le député souligne que certains services de publicité foncière considèrent en effet que les dispositions de l'article 1090 A-I du CGI ne vise exclusivement que les jugements, et que l'exonération des droits d'enregistrement n'est en conséquence pas transposable aux procédures amiables visées à l'article 229 du Code civil(N° Lexbase : L2603LBZ), interprétation restrictive qui ne semble pas cohérente avec l'esprit des textes régissant la déjudiciarisation du divorce. Il interroge donc le ministre sur ce point.
Réponse. Le ministre rappelle que la loi de modernisation de la justice du XXIème siècle (N° Lexbase : L1605LB3) prévoit que l'aide juridictionnelle peut être accordée en matière de divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d'un notaire. Les justiciables continuent donc de pouvoir prétendre au bénéfice de l'aide juridictionnelle, bien que le nouveau divorce par consentement mutuel ne se déroule pas devant une juridiction. Aux termes de l'article 1090 A du Code général des impôts, les décisions rendues dans les instances, où l'une au moins des parties bénéficie de l'aide juridictionnelle, sont exonérées des droits d'enregistrement, sauf lorsqu'elles portent mutation de propriété, d'usufruit ou de jouissance. Même si le nouveau divorce par consentement mutuel extrajudiciaire ne suppose pas le recours à une instance juridictionnelle, il est admis, au regard de l'objet de cette exonération de droits d'enregistrement, qu'elle s'applique à ces divorces lorsque l'une des parties au moins bénéficie de l'aide juridictionnelle. Il ajoute qu’une précision en ce sens sera apportée à la doctrine administrative publiée (cf. l’Ouvrage «La profession d’avocat» N° Lexbase : E7628E9E).
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Réf. : CA Aix-en-Provence, 7 novembre 2019, n° 17/05438 (N° Lexbase : A2573ZUT)
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N1815BYU
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par Emmanuel Raskin, Avocat Associé, Vice-Président de la Commission Textes et Membre du Conseil National des Barreaux (CNB), Vice-Président National de l’ACE (Avocats Conseils d’Entreprise), Expert Français auprès du Conseil des Barreaux Européens (CCBE)
Le 13 Janvier 2020
Mots-clefs : jurisprudence • acte d'avocat • cautionnement • mentions manuscrites
Une banque accorda un prêt à une société X, destiné à financer, pour partie, une cession d’actions. L’acte sous seing privé, qui concrétisa l’opération, contenait également le cautionnement solidaire de l’épouse, Mme Y, du dirigeant de la société concernée en garantie des engagements de cette dernière. Les échéances convenues ne furent plus respectées et la banque notifia à la société X et à Mme Y, outre la déchéance du terme, une première mise en demeure de payer la totalité des arriérés, le capital restant dû et les intérêts contractuels jusqu’à parfait paiement. Une seconde mise en demeure fut délivrée à Mme Y, la première n’ayant pas été distribuée. Celle-ci étant demeurée infructueuse, la banque assigna en paiement la caution devant le tribunal de grande instance de Toulon. La défense de la caution fut assez classique, tenant dans un premier temps à la demande de nullité de son engagement pour non respect des mentions manuscrites exigées à peine de nullité par le Code de la consommation et, subsidiairement, à ce que ledit engagement fût jugé disproportionné aux facultés contributives de la caution. Le tribunal jugea nul et de nul effet l’engagement de caution de Mme Y au visa de l’article L. 341-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L1158K7Z), dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 16 mars 2016, alors applicable, les mentions manuscrites prévues à peine de nullité par ce texte faisant en l’espèce défaut. La banque interjeta appel du jugement ainsi rendu devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence. Son moyen principal fut que l’engagement de caution était, selon la banque, un acte d’avocat dispensant l’exigence des mentions manuscrites jugées défaillantes.
La cour d’appel confirma le jugement attaqué dans toutes ses dispositions. Non seulement les dispositions invoquées par la banque au soutien de l’existence d’un acte d’avocat n’étaient pas en vigueur à la date de signature de l’acte de cession comprenant l’acte d’emprunt et l’engagement de caution, motivation imparable, mais au surplus, cet acte, s’il avait été rédigé par un avocat, n’avait pas été contresigné par ce dernier. Il ne pouvait donc s’agir d’un acte d’avocat tel que définit par les articles visés par la banque dans ses conclusions d’appelante. La solution était inévitable. Un pourvoi en cassation serait bien mal venu…
Cette solution est par ailleurs fort louable car on ne peut se contenter d’avancer qu’un acte sous seing privé rédigé par un avocat est, par cette seule caractéristique, un acte d’avocat. A défaut, il y aurait manifestement une perte de crédit à cet acte dont la profession a déjà à souffrir qu’il soit dépourvu de toute force exécutoire, à tout le moins lorsqu’il entérine un mode alternatif de règlement des différends.
Il convient de rappeler la forte protection formaliste de la caution telle que prévue par les dispositions du code de la consommation, que la cour d’appel rappelle dans sa décision, avant de traiter de l’impact de l’acte d’avocat en la matière, à supposer qu’il fût applicable au cas d’espèce, bien évidemment.
I - Un formalisme ad validatem contre le créancier professionnel
1.1. Evolution
La jurisprudence a longtemps, s’agissant des cautionnements soumis au code civil, ramené la mention manuscrite exigée par l’ancien article 1376 du Code civil (N° Lexbase : L1024KZX) à une exigence de preuve. Elle décidait ainsi qu’il importât peu que la mention manuscrite incomplète soit corroborée par un élément dans le contrat principal dans lequel était intégré le cautionnement.
La législation consumériste alla bien au delà depuis 2004 et a voulu préserver les intérêts de la caution, quelle que soit sa nature, civile ou commerciale.
L’article L. 343-1 du Code de la consommation (N° Lexbase : L9826LCW) dispose, depuis l’ordonnance n° 2017-203 du 21 février 2017 (N° Lexbase : L9754LCA), que les formalités définies à l’article L. 331-1 (N° Lexbase : L1165K7B) sont prévues à peine de nullité.
L’article L. 331-1, créé par l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 N° Lexbase : L0300K7A), dispose que : «Toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel fait précéder sa signature de la mention manuscrite suivante et uniquement de celle-ci : En me portant caution de X..., dans la limite de la somme de...couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de…, je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n'y satisfait pas lui-même».
En l’espèce, l’acte litigieux fut conclu le 3 septembre 2007. Les textes précités ne lui étaient par conséquent pas applicables. Cependant, ainsi que le rappelle la cour d’appel d’Aix-en-Provence, l’article L. 341-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L5668DLI), dans sa version antérieure à l’ordonnance du 14 mars 2016, issu de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003, en vigueur le 5 février 2004, abrogé par l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 [art. 34 (V)], disposait : «Toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : En me portant caution de X..., dans la limite de la somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ..., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n'y satisfait pas lui-même».
L’article L. 343-1 prévoyait, à l’époque, que«Les formalités définies à l'article L. 341-2 sont prévues à peine de nullité».
Ces textes étaient donc applicables à l’acte de cautionnement litigieux conclu le 3 septembre 2007, de sorte que la mention manuscrite y apposée : «Cautionnement solidaire de Mme Y pour prêt [banque]» était manifestement insuffisante au regard de l’exigence formaliste du texte de loi précité. En l’espèce, il s’agissait pourtant d’un cautionnement consenti en garantie d’une cession de contrôle d’une société commerciale. Cela importa peu. La jurisprudence de l’époque avait, en effet, déjà posé comme principe que ces dispositions n’opéraient aucune distinction envers les cautions, dont l’exigence de la mention manuscrite, que la cautionnement soit de nature commerciale ou non, est prescrite à peine de nullité (CA Amiens, 11 octobre 2007, n° 06/00419 N° Lexbase : A6109G97 Banque et Droit, mars-avril 2008, 44 ; CA Lyon, 15 février 2007, n° 05/07178 N° Lexbase : A8666DZY BICC, 15 juin 2007, n° 1334 ; Cass. civ. 1, 15 octobre 2014, n° 13-21.605, F-D N° Lexbase : A6644MYQ, CCC, 2015, n° 20), dès lors que le créancier ne conteste pas sa qualité de professionnel, qualité qui fût impossible à la banque de contester dans l’affaire commentée, ce qu’elle ne fît d’ailleurs pas.
Le jugement attaqué avait donc, à raison, annulé l’acte de cautionnement incriminé, ce que la cour d’appel ne remis pas en cause dans la première partie de la motivation de son arrêt.
1.2. Tempéraments
Il s’agit désormais, depuis 2004, d’un formalisme sans liberté de plume. Seules sont tolérées des erreurs matérielles. Elles sont néanmoins très encadrées.
Le fait que la mention manuscrite soit interrompue par un texte pré imprimé et que la caution ait signé sur le côté de la mention et non en dessous faute de place en base de page n’est pas une cause de nullité (Cass. com., 28 juin 2016, n° 13-27.245, F-D N° Lexbase : A1983RWD, RJDA 2016, n° 733). De même, la mention manuscrite n’a pas à précéder immédiatement la signature de la caution, de sorte que l’interposition, entre la mention manuscrite par ce texte et la signature de la caution, d’une autre mention manuscrite de la caution, à l’exclusion d’une quelconque adjonction ou clause pré imprimée émanant du créancier, ne contrevient pas aux exigences de la loi (Cass. com., 22 janvier 2013, n° 11-25.887, F-D N° Lexbase : A8820I33, CCC 2013, n° 89 ; Cass. com., 18 janvier 2017, n° 14-26.604, F-P+B N° Lexbase : A7144S9H, RD banc. fin, 2012, n° 182). Force est donc de constater la faible marge de manœuvre.
II - L’acte d’avocat n’est pas qu’un acte rédigé par un avocat
2.1. L’ADN de cet acte
L’article 1er du «projet de Loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées» a introduit dans la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 (loi portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques N° Lexbase : L6343AGZ) les articles 66-3-1, 66-3-2 et 66-3-3. Ils consacrent l’acte d’avocat. Le texte a été adopté par le Sénat et l’Assemblée Nationale respectivement le 30 juin et le 9 décembre 2010.
Son adoption définitive, après une seconde lecture du Sénat, date du 15 mars 2011.
La valeur qu’accordent les nouvelles dispositions des articles 66-3-2 et 66-3-3 à l’acte contresigné sont celles inhérentes aux devoirs que l’avocat, conseil et rédacteur, se doit de respecter, rappelés au nouvel article 66-3-1 : le devoir d’éclairer les parties, l’examen nécessaire des conséquences juridiques de l’acte, avec implicitement la notion d'efficacité juridique à laquelle cet examen renvoie nécessairement.
La jurisprudence exige, depuis de nombreuses années, que l’avocat rédacteur d’actes ait satisfait à son obligation de conseil, d’efficacité de l’acte juridique qu’il a rédigé, et de loyauté en préservant notamment un équilibre à l’égard de toutes les parties. Aux termes de l’article 66-3-1, en contresignant l’acte, «l’avocat atteste avoir éclairé pleinement la ou les parties qu’il conseille sur les conséquences juridiques de cet acte». La formulation retenue n’emporta pas création d’un nouveau régime de responsabilité, car l’avocat qui participe à la rédaction d’un acte sous seing privé était d’ores et déjà soumis à une obligation de conseil, d’informations, de compétences et de diligences. La première chambre civile de la Cour de cassation a précisé très nettement le 11 octobre 1966 que le devoir de conseil de l’avocat implique celui d’éclairer les parties, de s’assurer de la validé des actes et de s’assurer de l’efficacité des actes rédigés [1].
En analysant cet arrêt, Monsieur le Conseiller Aubert, dans le rapport 1994 de la Cour de cassation, a rappelé les trois socles de la responsabilité d’un conseil rédacteur : «L’obligation d’informations qui constitue naturellement le noyau central du devoir de conseil se trouve complété en amont par l’obligation de vérifications et, en aval, par une obligation d’efficacité». La loi nouvelle ne fit donc que rappeler et légaliser cette jurisprudence fondatrice. Le 22 juin 1999, la Cour de cassation précisait et ajoutait que «…le rédacteur d’un acte juridique est tenu, à l’égard de toutes les parties, d’en assurer l’efficacité». Cette décision était extrêmement importante car elle signifiait que les rédacteurs d’actes, y compris les avocats, n’avaient plus comme unique vocation la défense des intérêts de leurs clients, mais qu'ils pouvaient alors, à l’instar des notaires, revêtir la qualité de «tiers impartial» ou «d’arbitre» [2], puisqu’ils étaient désormais tenus de conseiller les deux parties.
L’obligation de conseil, fut, avec l’acte d’avocat, encore plus profonde et transcenda en réalité la nature du rapport juridique, pour englober toutes les parties à l’opération dont le professionnel est le maître d’œuvre. La jurisprudence rendue par la première chambre civile de la Cour de cassation le 27 novembre 2008 permet de vérifier ce principe de façon extrêmement claire «…en qualité d’unique rédacteur d’un acte sous seing privé, l’Avocat était tenu de veiller à assurer l’équilibre de l’ensemble des intérêts en présence et de prendre : l’initiative de conseiller les deux parties à la convention sur la portée des engagements souscrits de part et d’autre, peu important le fait que l’acte a été signé en son absence, après avoir été établi à la demande d’un seul des contractants» [3].
Un second arrêt du 25 février 2010 alla dans le même sens en jugeant que"…le rédacteur d’acte, tenu de veiller à assurer l’équilibre de l’ensemble des intérêts en présence et de prendre l’initiative de conseiller les deux parties à la convention sur la portée des incidences, notamment fiscales, des engagements souscrits de part et d’autre, peu important que son concours ait été sollicité par l’une d’elle et qu’il doit apporter la preuve qu’il a rempli cette obligation à leur égard, quelque soient leurs compétences personnelles» [4]. Ainsi en matière de rédaction d’acte, les obligations de l’avocat sont très étendues et particulièrement rigoureuses, si bien d’ailleurs que certains auteurs les qualifient d’obligations de résultat, voire même d’obligations quasi-légales [5].
Il n’est donc pas surprenant que le nouveau texte donne une contrepartie à ces obligations en donnant à l'acte d'avocat une portée supérieure à celle d'un simple acte sous seing privé.
2.2. L’aboutissement paradoxal
L’acte d’avocat ne constitue pas une nouvelle catégorie d’acte qui élargirait les branches de l’alternative acte authentique/acte sous seing privé, mais constitue «davantage une officialisation via un sceau original des actes émanant d’avocat» [6]. Cependant, son autonomie réside dans sa genèse qui est identifiable, puisqu’il est induit d’une rédaction professionnelle et qu'il implique une assistance des signataires. La signature de son ou ses auteurs présume alors que les parties ont été suffisamment éclairées. Rien de nouveau ici : il s'agit tout simplement d'apporter une précision dont le mérite est de distinguer l'acte rédigé par l'avocat, l'acte authentique et le simple acte sous seing privé. Là est le paradoxe de l’aboutissement du texte «créateur». Les actes authentiques ont pour fonction de consigner des moments juridiques importants dans la vie des citoyens de la citée, en les solennisant et en les rendant pratiquement incontestables.
Les spécialistes les définissent comme des actes qui sont dressés par des officiers publics compétents ayant reçu de la loi la mission d’instrumenter et qui, en raison de la qualité de leur rédacteur, méritent qu’on leur accorde une particulière autorité [7].
Dumoulin écrivait au XVI siècle, dans son commentaire de la coutume de Paris, «scripta publica probant se ipsa» (les écritures publiques font foi par elles-mêmes)». L'auteur précisait :"l’acte fait foi parce-que le Notaire a agit ‘propriis sensibus, visus auditus’» («parce qu’il a vu et entendu personnellement tout ce qu’il a rapporté»). Cela ne fait pas pour autant de l’acte sous seing privé un contrat de dernier rang. Sans pour autant concurrencer l’acte authentique, l’acte sous seing privé peut être rédigé par un avocat. Bien qu’il ne soit pas officier ministériel, les obligations inhérentes à l’exercice de la fonction d’avocat renforcent naturellement la valeur de l’acte qu’il rédige. L’intervention de l’avocat se manifeste en effet par ses diligences de rédaction et les conseils qui la précèdent. Cette démarcation était déjà notée au début du XIXème siècle : «Rien n’interdit à un Avocat par les conseils duquel une convention, même sous seing privé, est rédigée, de lui imprimer l’autorité de sa signature comme conseil» [8]. La jurisprudence donne à l’avocat une mission qui confère à l’acte qu’il a rédigé des qualités d’efficacité supérieures à celles de l’acte sous seing privé usuel rédigé sans son intervention. Cette règle figure au premier aliéna l’article 7.2 du règlement intérieur national de la profession d’Avocat (N° Lexbase : L4063IP8) [9].
La loi du 15 mars 2011 (N° Lexbase : L4063IP8) a enfin introduit dans notre droit écrit ce qui a été érigé au cours de plusieurs siècles. L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 N° Lexbase : L4857KYK). a introduit l’acte sous signature privée contresigné par avocat dans le Code civil à l’article 1374. Il dispose : « L’acte sous signature privée contresigné par les avocats de chacune des parties ou par l’avocat de toutes les parties fait foi de l’écriture et de la signature des parties, tant à leur égard qu’à celui de leurs héritiers ou ayant cause. La procédure de faux prévue par le Code de procédure civile lui est applicable. Cet acte est dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi».
La garantie de l’acte d’avocat exhale naturellement une mission de service public d’efficacité, de force probante et d’équilibre que la force exécutoire doit confirmer clairement. L’avocat n’est-il pas au-delà d’un auxiliaire, un vrai partenaire de justice ? Assurément. C’est ce qu’édicte en toute clarté l’article 6.1 du Règlement Intérieur National de la profession d’avocat : «Partenaire de justice et acteur essentiel de la pratique universelle du droit, l’avocat a vocation à intervenir dans tous les domaines de la vie civile, économique et sociale…». L’efficacité que donne à l’acte contresigné par l’avocat l’article 1374 nouveau du Code civil (N° Lexbase : L1026KZZ) confirme que depuis plusieurs siècles les garanties attachées à la mission rédactionnelle de l’avocat donnent aux actes qu’il contresigne une force autonome laquelle, sans concurrencer l’authenticité, doit en permettre une exécution sans que soit nécessaire pour ce faire d’avoir recours au juge ou à l’officier ministériel. L’obligation de conseil transcende la nature du rapport juridique, pour englober toutes les parties à l’opération dont le professionnel est le maître d’œuvre. Le seul intérêt privé est dépassé pour servir un intérêt général d’équilibre, d’efficacité, donc de validité, ce qui suppose évidemment l’examen du respect de l’ordre public.
En matière de rédaction d’acte, les obligations de l’avocat sont très étendues et particulièrement rigoureuses, si bien d’ailleurs que certains auteurs les qualifient d’obligations de résultat, voire même d’obligations quasi-légales [10]. Il n’est donc pas surprenant que le nouveau texte donne une contrepartie à ces obligations en donnant à l'acte d'avocat une portée supérieure à celle d'un simple acte sous seing privé. La garantie de l’acte d’avocat exhale naturellement une mission équivalente à celle de service public que donnent les critères d’efficacité, de force probante et d’équilibre que la force exécutoire doit confirmer clairement.
Alors que l’acte d’avocat n’était pas encore consacré par la loi, lors de la conclusion du cautionnement objet de l’affaire commentée, il est à noter que la banque ne fit pas valoir ces arguments, puisqu’elle s’est bornée à soutenir l’existence d’un acte d’avocat. N’aurait-elle pas eu intérêt à mettre en lumière les principes jurisprudentiels donnant à l’acte rédigé par avocat une autre portée que l’acte sous seing privé simple ?
La banque ne pouvait exciper de la force d’un acte non encore consacré par la loi. Ce point de droit évident suffisait pour écarter les moyens d’appel de la banque sur le terrain de l’acte d’avocat. Elle pouvait, pour autant, discuter des qualités antérieures consacrées à l’acte rédigé par avocat.
Reste que l’article 1374 prévoyant la dispense des mentions manuscrites prévues par la loi est de valeur législative. Il exige le nom et le contreseing de l’avocat rédacteur, dès son premier alinéa, à défaut, l’acte n’est pas un acte d’avocat. Ce point ne souffre pas de discussion et la cour d’appel le rappelle dans son arrêt commenté, «au surplus» …
La loi peut déroger à la loi. Il fallait donc un texte de telle valeur pour pouvoir déroger aux règles impératives de l’article L. 341-2 du Code de la consommation dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 14 mars 2016. Dura lex sed lex.
👉 Quel impact dans ma pratique ? La rédaction d’un cautionnement par un avocat ne lui confère pas, à elle seule, la qualification d’acte d’avocat. Sans cette qualification, qui requiert le nom et le contreseing de l’avocat rédacteur, le cautionnement est nul s’il ne comprend pas les mentions manuscrites requises. |
[1] Cass. civ. 1, 11 octobre 1966, n° 65-10.254 (N° Lexbase : A5094KLA).
[2] P. Michaud, L’acte d’Avocat : l’acte de la liberté contractuelle sera-t-il une révolution ?!
[3] Cass. civ. 1, 27 novembre 2008, n° 07-18.142, F-P+B (N° Lexbase : A4608EBB), Recueil Dalloz 2009, page 706, commentaire Ch. Jamin.
[4] Cass. civ. 1, 25 février 2010, n° 09-11.591, F-D (N° Lexbase : A4489ES3).
[5] Monsieur le Professeur P.-Y. Gautier,L’obligation de conseil du rédacteur d’acte : un devoir quasi légal envers toutes les parties, RTD civile, 2009, page 134.
[6] J. Varoclier, L’acte d’Avocat : much ado about nothing ?, Gazette du Palais, 2011.
[7] Ch. Beudan, Cour de Droit Civil, 2ème édition n° 1181.
[8] E. Cresson, Usages et règles de la profession d’Avocat, jurisprudences, ordonnances, décrets et lois, 1888.
[9] «L’avocat rédacteur d’un acte juridique assure la validité et la pleine efficacité de l’acte selon les prévisions des parties. Il refuse de participer à la rédaction d’un acte ou d’une convention manifestement illicite ou frauduleuse…».
[10] Monsieur le Professeur P.-Y. Gautier, L’obligation de conseil du rédacteur d’acte : un devoir quasi légal envers toutes les parties, RTD civile, 2009, page 134.
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Réf. : Loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille (N° Lexbase : L2114LUT)
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N1781BYM
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par Anne-Lise Lonné-Clément
Le 08 Janvier 2020
A été publiée au Journal officiel du 29 décembre 2019, la loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille (N° Lexbase : L2114LUT), adoptée aux termes d’une procédure accélérée, et entrée en vigueur le 30 décembre 2019, et répondant aux préconisations du «Grenelle des violences conjugales».
Les mesures se répartissent en cinq principaux chapitres. Le premier chapitre, intitulé «de l'ordonnance de protection et de la médiation familiale», un renforcement du dispositif de l’ordonnance de protection, afin de la rendre plus accessible et plus protectrice pour les victimes. Parmi les principales novations, on relèvera :
- l’absence de condition de dépôt d'une plainte pénale préalable ;
- l’obligation pour le juge aux affaires familiales de se prononcer dans un délai de six jours au maximum, et non plus simplement dans les meilleurs délais ;
- l’exclusion de la médiation en cas d’allégation de violence conjugale ;
- en matière d’autorité parentale, la suspension de l’exercice de l’autorité parentale en cas de crime sur l’autre parent (sur ce point, cf. les observations d'Adeline Gouttenoire, in Pan. Lexbase, éd. priv., n° 808, 2020 N° Lexbase : N1761BYU).
Le chapitre 2 prévoit de supprimer le versement de la pension de réversion en cas de condamnation du conjoint survivant pour violences commises sur l’autre conjoint
Le chapitre 3 prévoit l'élargissement du port du bracelet anti-rapprochement.
Le chapitre 4 prévoit des dispositions tendant à faciliter le relogement des victimes de violences conjugales.
Enfin le chapitre 5 vise à faciliter le recours au téléphone grave danger, qui permet de joindre, en cas de danger, une plateforme d’assistance.
Lexbase Hebdo - édition privée reviendra en détail, dans le prochain numéro, sur l’ensemble des dispositions de ce texte, à travers un commentaire d’Isabelle Corpart. |
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Réf. : Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020 (N° Lexbase : L5870LUX)
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N1724BYI
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par Bastien Lignereux, Maître des requêtes au Conseil d’Etat
Le 23 Janvier 2020
L’apport de la loi de finances pour 2020 en matière de fiscalité patrimoniale est incontestablement moins riche que celui des deux premières lois de finances du quinquennat, dont résultent, respectivement, l’instauration de l’impôt sur la fortune immobilière et du prélèvement forfaitaire unique sur les revenus mobiliers d’une part, et la réforme de l’« exit tax » ainsi que du dispositif dit « Dutreil » d’exonération de droits de mutation à titre gratuit en faveur des transmissions d’entreprises d’autre part. Cela étant, après avoir été substantiellement complétée par les deux chambres, la loi de finances pour 2020 recèle un nombre non négligeable de mesures touchant en particulier à la fiscalité des placements immobiliers et financiers.
I - Fiscalité immobilière
A) La loi de finances pour 2020 modifie plusieurs avantages fiscaux visant, en matière d’impôt sur le revenu, à favoriser certaines opérations immobilières
1 - Parmi ceux-ci, le crédit d’impôt en faveur de la transition énergétique (CITE) [1], qui tend à inciter les particuliers à améliorer le niveau de performance énergétique de leur résidence principale, est le seul qui ait fait l’objet d’un article en texte initial du projet de loi de finances [2]. Mettant en œuvre un engagement du candidat élu lors du dernier scrutin présidentiel, cette mesure prévoit de supprimer ce crédit d’impôt, à compter de 2021, pour le remplacer par une prime budgétaire, versée dès la réalisation des travaux par l’Agence nationale de l’amélioration de l’habitat (Anah) et dont le montant est majoré pour les ménages modestes. L’année 2020 marque une étape de transition dans cette réforme, avec une application de la nouvelle prime limitée aux ménages modestes (ménages éligibles aux aides actuelles de l’Anah) et, pour les ménages à revenu intermédiaire, la prorogation du crédit d’impôt. Les ménages à revenu élevé, appartenant aux deux derniers déciles de revenu fiscal de référence, se voient, sauf exceptions [3], exclus du champ des aides publiques à la rénovation énergétique, ce que le Conseil constitutionnel a validé dans sa décision rendue le 27 décembre [4].
Pour sa dernière année d’application, le CITE connaît plusieurs modifications. La liste des travaux éligibles évolue, avec notamment l’exclusion des dépenses d’acquisition de chaudières et le retour de la notion de bouquet de travaux, sous une forme différente de celle qui avait été abrogée par la loi de finances pour 2015. Outre son recentrage sur les ménages à revenu intermédiaire, les locataires et occupants à titre gratuit se voient exclus de son champ, par symétrie avec la prime distribuée par l’Anah. Enfin, les montants accordés sont déterminés non plus en proportion de la dépense éligible effectuée, mais sur la base de forfaits définis par type de dépense.
2 - S’agissant de la réduction d’impôt « Pinel » en faveur de l’investissement locatif [5], d’une part, sur une initiative de la majorité parlementaire à l’Assemblée nationale, le dispositif a été recentré sur l’acquisition de logements collectifs [6]. Les habitations individuelles ont ainsi été exclues, pour des motifs de lutte contre l’artificialisation des sols. L’entrée en vigueur de cette mesure est toutefois différée aux investissements réalisés à compter du 1er janvier 2021.
D’autre part, a été décidée la mise en œuvre d’une expérimentation, sur le territoire de la région Bretagne et jusque fin 2021, permettant au préfet de région, après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement et du président du conseil régional, d’arrêter un nouveau zonage, déterminant les communes ou parties de communes se caractérisant par une tension élevée sur le marché locatif [7]. L’expérimentation porte également sur les plafonds de loyer et de ressources, qui pourront être définis au niveau infra-communal, ce qui, s’agissant des plafonds de loyer, permet de mieux prendre en compte les différences entre quartiers d’une même commune.
3 - La réduction « Denormandie » en faveur de la rénovation des logements locatifs dans les villes moyennes, créée par la loi de finances pour 2019 [8], fait déjà l’objet d’adaptations. Pour les acquisitions réalisées à compter de 2020, la liste des travaux éligibles sera revue pour inclure, au-delà même des travaux de rénovation définis par un décret du 26 mars 2019 [9], tous « travaux d’amélioration » [10], notion qui, selon l’exposé des motifs de l’amendement dont elle est issue, semble épouser le champ des travaux éligibles au prêt à taux zéro. Un nouveau décret devra préciser le champ des travaux éligibles. En outre, si la liste des communes éligibles n’est pas retouchée, son champ géographique est étendu à l’ensemble du territoire de ces communes [11], et non plus au seul centre-ville, lequel avait pourtant été entendu très largement par les textes réglementaires [12]. Enfin, son application d’ores et déjà est prorogée jusque 2022 (au-delà même de la date limite d’application de la réduction « Pinel », qui s’applique jusque 2021).
4 - Le dispositif dit « Cosse » ou « Louer abordable » [13], qui octroie sous certaines conditions aux propriétaires bailleurs d’un logement conventionné avec l’Anah une déduction sur leurs revenus fonciers, est prorogée pour trois années supplémentaires, jusque 2022 [14]. Toutefois, le dispositif est « verdi » : pour les conventions conclues avec l’Anah à compter du 1er juillet prochain, la déduction sera soumise au respect d’un niveau de performance énergétique globale qui doit être fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du Logement, de l’Energie et du Budget.
5 - Enfin, la réduction d’impôt « Malraux » [15] en faveur de la restauration des logements, applicable, sous conditions mais sans borne de délai, dans les sites patrimoniaux remarquables et, jusque fin 2019, dans les quartiers anciens dégradés et les quartiers dits « NPNRU », est prorogée, pour ce second volet, jusque 2022 [16].
B) La fiscalité des revenus fonciers et des plus-values immobilières connaît des modifications plus mineures
6 - La taxe dite « Apparu » sur les loyers tirés de la location de logements de petite surface [17] est abrogée dans le cadre d’un article de suppression de « petites taxes » [18]. Créée par la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 afin de lutter contre la pratique de location de « micro-logements » à des prix élevés, cette taxe était ciblée sur les logements situés en zone tendue dont la surface habitable est inférieure ou égale à 14 mètres carrés et dont le loyer mensuel, charges non comprises, excède un montant maximum par mètre carré fixé par décret.
7 - En second lieu, les exonérations de plus-values immobilières en faveur de la construction de logements sociaux [19] sont prorogées jusque 2022 [20]. Ces exonérations visent à favoriser la cession de terrains utilisés par le cessionnaire pour la construction de tels logements.
II - Fiscalité mobilière
A) Les réductions d’impôt en faveur de la souscription au capital d’entreprises évoluent de manière substantielle
8 - On se souvient qu’à l’occasion de l’abrogation de l’ISF par la loi de finances pour 2018, le Parlement avait adopté, dans le but d’amortir les effets potentiels de la suppression du dispositif « ISF-PME », une majoration exceptionnelle du taux de la réduction d’impôt sur le revenu dite « Madelin » en faveur de la souscription au capital de PME. S’agissant toutefois d’un dispositif constitutif d’une aide d’Etat au sens de l’article 107 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, non notifiée, l’entrée en vigueur de cette hausse de taux était subordonnée à l’accord de la Commission européenne. Le Gouvernement a engagé dès janvier 2018 le processus de notification et, dans le courant d’année 2019, les échanges sur la compatibilité de ce dispositif avec la règlementation des aides d’Etat se sont faits suffisamment précis pour envisager sa mise en conformité.
La loi de finances pour 2020 [21] en tire les conséquences en apportant à ce dispositif les modifications nécessaires pour assurer sa compatibilité avec les exigences européennes. En premier lieu, le taux spécifique de la réduction d’impôt pour les versements effectués par l’intermédiaire de fonds investis en Corse et dans les départements d’outre-mer doit être ramené à 30 % au lieu de 38 %. En deuxième lieu, les conditions d’âge et de plafond de versements applicables aux entreprises solidaires d’utilité sociale (ESUS), qui bénéficient déjà par dérogation de la réduction d’impôt, sont aménagées pour les rapprocher du droit commun. Enfin, il est précisé que le volet du dispositif relatif aux souscriptions directes ou via une société holding est placé sous le couvert du Règlement général d’exemption par catégories (RGEC) n° 651/2014 du 17 juin 2014.
Moyennant ces évolutions, la hausse temporaire de sept points du taux de la réduction d’impôt décidée en loi de finances pour 2018, de 18 % à 25 %, est prorogée, à titre exceptionnel, pour les versements réalisés jusqu’au 31 décembre 2020. Elle s’appliquera aux versements effectués à compter d’une date fixée par décret, qui ne peut être postérieure de plus de deux mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne.
Enfin, il faut noter que, sur une initiative du Sénat, les activités de courtage et de change ont été exclues du champ des activités éligibles au bénéfice de la réduction d’impôt [22] et il est précisé que les titres souscrits dans le cadre d’un plan d’épargne retraite institué par la loi « Pacte » ne sont, à l’instar de ceux souscrits dans un plan d’épargne salariale ou dans un PEA, pas éligibles à cette réduction.
9 - La redéfinition des conditions d’application de la réduction « Madelin » aux ESUS a conduit à la création d’une nouvelle réduction d’impôt en faveur de la souscription au capital de sociétés foncières solidaires [23].
Codifiée à l’article 199 terdecies-0 AB du Code général des impôts, ce dispositif vise à favoriser le développement des sociétés qui ont apportent un soutien spécifique aux publics fragilisés à travers une offre de prestations immobilières à des tarifs moins élevés que ceux du marché. Se plaçant sous le cadre européen relatif aux services d’intérêt économique général fournis par des entreprises privées [24], ce dispositif permettra aux souscripteurs de bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu, égale à 18 % du montant des versements [25], à condition que le montant des souscriptions collectées chaque année dans ce cadre n’excède pas un plafond, ne pouvant lui-même excéder 40 millions d’euros et calculé chaque année pour tenir compte de l’écart entre les loyers observés sur le marché de référence, et ceux facturés par la foncière à ses bénéficiaires et du coût d’accompagnement spécifique mobilisés par la foncière pour favoriser l’accès aux biens immobiliers de ces publics fragiles. Une convention de mandat de service économique général sera conclue avec chaque foncière, selon les modalités et exigences prévues par le cadre communautaire.
B) Les autres évolutions concernent le régime de l’apport-cession et la fiscalité des produits d’assurance vie
10 - Le régime de l’« apport-cession » (CGI, art. 150-0 B ter N° Lexbase : L9142LNW) fait l’objet de modifications pour l’essentiel paramétriques [26]. Rappelons que, depuis 2012, pour lutter contre des montages optimisant consistant à céder indirectement des titres pour éluder le cas échéant l’impôt sur la plus-value de cession, ce dispositif prévoit qu’en cas d’apport de titres à une société contrôlée par l’apporteur, la plus-value d’apport est automatiquement placée en report d’imposition, lequel expire non seulement en cas de cession par l’apporteur des titres reçus en contrepartie de l’apport, mais aussi lors de la cession des titres apportés, par la société dans les trois ans de l’apport, sauf remploi d’une partie significative produit de cession dans une nouvelle activité économique opérationnelle. La loi de finances pour 2019 l’avait déjà retouché pour prévoir que ce remploi, qui doit intervenir dans les deux ans de la cession des titres apportés, pouvait s’effectuer non plus seulement directement dans une société opérationnelle, mais aussi indirectement, par la souscription de parts de certains fonds de capital investissement, lesquels réinvestissent, dans un délai de cinq ans, 75 % des sommes collectées au capital de sociétés opérationnelles. La loi de finances pour 2020 assouplit les modalités de ce remploi indirect en prévoyant que la souscription de parts de fonds dans les deux ans de la cession s’entend de la signature d’un engagement de souscription au fonds, qui mentionne le montant minimum que le fonds s’engage à appeler dans les cinq ans qui suivent et à réinvestir. Corrélativement, le délai pendant lequel, en cas de donation par l’apporteur des titres reçus en contrepartie de l’apport, le report est maintenu sur la tête du donataire, est aligné sur le délai maximal au terme duquel le respect de l’obligation de remploi est susceptible d’être apprécié : cinq ans en cas de remploi seulement direct [27], dix ans en présence d’un remploi indirect.
11 - La fiscalité des produits d’assurance vie, qui avait déjà connu quelques évolutions avec la loi du 22 mai 2019 dite « Pacte » et l’ordonnance du 24 juillet suivant portant réforme de l’épargne retraite, est modifiée pour soumettre à l’impôt sur le revenu les rachats effectués sur des contrats souscrits avant 1983 [28]. Rappelons en effet que, pour des raisons historiques, ces rachats étaient jusqu’alors totalement exonérés d’impôt sur le revenu (mais non de prélèvements sociaux), le législateur ayant décidé, lors de l’adoption de la loi de finances pour 1983 qui a fiscalisé les produits d’assurance vie, de limiter cette mesure aux nouveaux contrats. Dans un contexte notamment où ces anciens contrats peuvent être pérennisés par l’ajout d’un nouvel assuré (mécanisme dit de la co-souscription), la loi de finances pour 2020 les soumet à l’impôt sur le revenu dans les conditions de droit commun (application de l’abattement annuel de 4 600 euros pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et de 9 200 euros pour les contribuables soumis à imposition commune ; taux réduit le cas échéant applicable). Afin de ne pas modifier le régime fiscal des investissements déjà réalisés, cette mesure est toutefois limitée aux produits afférents à des versements effectués à compter du 10 octobre 2019. Enfin, la loi de finances pour 2020 modifie également les conditions d’application du dispositif dit « Fourgous » de transfert de contrats vers un autre type de contrat d’assurance vie sans perte d’antériorité fiscale.
III - Fiscalité des transmissions patrimoniales
12 - Le Gouvernement n’avait pas l’intention de faire de la loi de finances pour 2020 un instrument de réforme de la fiscalité des transmissions patrimoniales. Cela étant, deux initiatives parlementaires ont conduit à des mesures de portée inégale.
13 - En premier lieu, le droit de partage (CGI, art. 746 N° Lexbase : L9120IQT), qui frappe en principe au taux de 2,5 % tout partage de biens meubles et immeubles entre copropriétaires, cohéritiers et coassociés, voit son taux progressivement abaissé pour les partages des intérêts patrimoniaux consécutifs à une séparation de corps, à un divorce ou à une rupture d'un pacte civil de solidarité [29]. Cette diminution ne débutera toutefois qu’en 2021 : le taux est ramené à 1,80 % à compter du 1er janvier 2021 et à 1,10 % à compter du 1er janvier 2022. Il s’agit donc à terme de revenir, pour ces partages, au taux qui était applicable avant la hausse décidée par la loi du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011. Pour les autres partages, le droit reste établi à 2,5 %.
14 - En second lieu, dans le cadre d’un amendement parlementaire visant à borner dans le temps l’application de plusieurs « petites niches » fiscales [30], l’exonération de droits de mutation à titre gratuit prévue par l’article 794 du Code général des impôts en faveur des transmissions de biens à certains organismes publics est limitée jusqu’au 31 décembre 2023. Il s’agit d’une part des biens transmis par donation ou successions aux régions, départements, communes, à leurs établissements publics et aux établissements publics hospitaliers, affectés à des activités non lucratives et, d’autre part, des libéralités faites aux organismes d'administration et de gestion de la sécurité sociale ainsi qu'à la caisse générale de prévoyance des marins et de leurs familles en cas d'accident, de maladie, d'invalidité et de maternité. Une mesure législative sera donc nécessaire si le législateur estime utile de proroger l’application de cette exonération au-delà de cette date.
[1] CGI, art. 200 quater (N° Lexbase : L9220LNS).
[2] Article 4 du projet de loi de finances pour 2020, déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 27 septembre 2020, devenu article 15 de la loi de finances.
[3] Ils demeurent éligibles au CITE au titre de leurs dépenses d’acquisition de bornes de recharge de véhicules électriques et d’isolation des parois opaques.
[4] Cons. const., décision n° 2019-796 DC du 27 décembre 2019, Loi de finances pour 2020, paragraphes 8 à 13 (N° Lexbase : A3062Z9B).
[5] CGI, art. 199 novovicies (N° Lexbase : L5942LQ7).
[6] Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020, art. 161.
[7] Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020, art. 164.
[8] CGI, art. 199 novovicies, 5° du B du I et IV bis.
[9] Décret n° 2019-232 du 26 mars 2019 relatif aux conditions d'application de la réduction d'impôt sur le revenu au titre de l'investissement locatif prévue au 5° du B du I de l'article 199 novovicies du Code général des impôts (N° Lexbase : L6891LPW).
[10] Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020, art. 162.
[11] Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020, art. 115.
[12] Arrêté du 26 mars 2019, relatif à la liste des communes ouvrant droit à la réduction d'impôt prévue au 5° du B du I de l'article 199 novovicies du Code général des impôts, codifié à l’art. 18-0 bis D de l’annexe IV au Code général des impôts.
[13] Codifiée au o du 1° du I de l’article 31 du Code général des impôts (N° Lexbase : L7767LQQ), qui définit le centre-ville, pour l’application de ces dispositions, comme les zones de bâti continu de la commune.
[14] Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020, art. 23.
[15] CGI, art. 199 tervicies (N° Lexbase : L2407LEU).
[16] Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020, art. 160.
[17] CGI, art. 234 (N° Lexbase : L8076LQ8).
[18] Article 21 de la loi de finances pour 2020, 1° du I.
[19] 150 U, 7° et 8° (N° Lexbase : L4881LR9).
[20] Article 107 de la loi de finances pour 2020.
[21] Article 137, issu d’un amendement du Gouvernement en première lecture à l’Assemblée nationale.
[22] Cette mesure fait suite à une décision du Conseil d’Etat statuant au contentieux du 9 mai 2019, n° 428692, annulant pour excès de pouvoir les commentaires administratifs relatifs aux réductions « ISF-PME » et « Madelin » en tant qu'ils indiquent que sont exclues du champ d'application de ces dispositifs les sommes versées au titre des souscriptions au capital des petites et moyennes entreprises exerçant l'activité de courtier en assurances. Cette activité est en effet jugée commerciale par nature (CE 8° et 3° ch.-r., 9 mai 2019, n° 428692, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0385ZBU).
[23] Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020, art. 157.
[24] Ce cadre est défini dans la décision n° 2012/21/UE de la Commission du 20 décembre 2011 relative à l’application de l’article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides d’Etat sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général.
[25] Ce dispositif et le dispositif « Madelin » sont toutefois placés sous un plafond de versements unique et global.
[26] Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020, art. 106.
[27] L’obligation de remploi pouvant intervenir en cas de cession des titres apportés jusqu’à trois ans après l’apport, après quoi s’ouvre un délai de deux ans pour remployer.
[28] Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020, art. 9.
[29] Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020, art. 108.
[30] Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020, art. 136.
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Réf. : Décret n° 2019-1419 du 20 décembre 2019 relatif à la procédure accélérée au fond devant les juridictions judiciaires (N° Lexbase : L1578LUY)
Lecture: 1 min
N1782BYN
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par Anne-Lise Lonné-Clément
Le 08 Janvier 2020
► A été publié au Journal officiel du 22 décembre 2019, le décret n° 2019-1419 du 20 décembre 2019 relatif à la procédure accélérée au fond devant les juridictions judiciaires (N° Lexbase : L1578LUY).
Ce texte modifie les dispositions relatives à la procédure en la forme des référés devant les juridictions de l'ordre judiciaire, et la renomme procédure accélérée au fond. Il distingue les procédures qui demeurent des procédures accélérées au fond de celles qui deviennent des procédures de référé, sur requête ou au fond.
Entrée en vigueur : les dispositions du décret s'appliquent aux demandes introduites à compter du 1er janvier 2020 à l'exception des dispositions de l'article 22 qui sont entrées en vigueur le lendemain de la publication du décret, soit le 23 décembre 2019.
Lexbase Hebdo - édition privée reviendra en détail très prochainement sur l’ensemble des dispositions de ce texte, à travers un commentaire de Julien Bioulès, à paraître dans le cadre d’un numéro spécial consacré aux différents décrets portant réforme de la procédure civile en 2020 (décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, réformant la procédure civile N° Lexbase : L8421LT3 ; décret n° 2019-1419 du 20 décembre 2019 relatif à la procédure accélérée au fond devant les juridictions judiciaires N° Lexbase : L1578LUY ; décret n° 2019-1380 du 17 décembre 2019, relatif à la procédure applicable aux divorces contentieux et à la séparation de corps ou au divorce sans intervention judiciaire N° Lexbase : L0938LUB). |
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Réf. : CJUE, 19 décembre 2019, aff. C-263/18 (N° Lexbase : A4752Z8I)
Lecture: 4 min
N1705BYS
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par Vincent Téchené
Le 08 Janvier 2020
► La vente de livres électroniques d’occasion par le biais d’un site internet constitue une communication au public soumise à l’autorisation de l’auteur.
Tel est l’enseignement d’un arrêt rendu le 19 décembre 2019 par la Cour de de justice de l’Union européenne (CJUE, 19 décembre 2019, aff. C-263/18 N° Lexbase : A4752Z8I).
L’affaire. Deux associations ayant pour objet la défense des intérêts des éditeurs néerlandais, ont saisi le rechtbank Den Haag (tribunal de La Haye, Pays-Bas) d’une requête visant à faire interdire, entre autres, à une société de mettre des livres électroniques à la disposition des membres du club de lecture créé par cette dernière sur son site internet ou de reproduire ces livres. En proposant des livres électroniques «d’occasion» à la vente dans le cadre de ce club de lecture, cette société effectuerait une communication au public non autorisée de ces livres. La société soutient, au contraire, que de telles activités relèvent du droit de distribution, soumis par la Directive 2001/29 du 22 mai 2001 (N° Lexbase : L8089AU7) à une règle d’épuisement lorsque l’objet concerné, en l’occurrence les livres électroniques, a été vendu dans l’Union par le titulaire du droit ou avec son consentement. La CJUE a donc été saisie d’un question préjudicielle.
La décision. La Cour a considéré que la fourniture par téléchargement, pour un usage permanent, d’un livre électronique ne relève pas du droit de «distribution au public», prévu à l’article 4 § 1 de la Directive 2001/29, mais bien du droit de «communication au public», prévu par son article 3 § 1, pour lequel l’épuisement est exclu. La Cour a notamment déduit du traité de l’OMPI sur le droit d’auteur, à l’origine de cette Directive, ainsi que des travaux préparatoires de cette dernière, que le législateur de l’Union avait eu l’intention de réserver cette règle d’épuisement à la distribution d’objets tangibles, tels que des livres sur support matériel. En revanche, l’application de cette règle d’épuisement à des livres électroniques risquerait d’affecter l’intérêt des titulaires à obtenir une rémunération appropriée de manière beaucoup plus significative que dans le cas de livres sur support matériel, dès lors que des copies numériques dématérialisées de livres électroniques ne se détériorent pas avec l’usage et constituent ainsi, sur un éventuel marché de l’occasion, des substituts parfaits des copies neuves. S’agissant plus précisément de la notion de «communication au public», la Cour a indiqué que celle-ci doit s’entendre au sens large, comme couvrant toute communication au public non présent au lieu d’origine de la communication et, ainsi, toute transmission ou retransmission, de cette nature, d’une œuvre au public, par fil ou sans fil. Cette notion associe deux éléments cumulatifs, à savoir un acte de communication d’une œuvre et la communication de cette dernière à un public. Selon la Cour, le fait de mettre les œuvres concernées à la disposition de toute personne qui s’enregistre sur le site internet du club de lecture doit être considéré comme une «communication» d’une œuvre, sans qu’il soit nécessaire que la personne concernée utilise cette possibilité en extrayant effectivement le livre électronique à partir de ce site Internet.
En outre, il y a lieu de tenir compte non seulement du nombre de personnes pouvant avoir accès à la même œuvre parallèlement, mais également du nombre d’entre elles qui peuvent avoir successivement accès à celle-ci. En l’occurrence, selon la Cour, le nombre de personnes pouvant avoir accès, parallèlement ou successivement, à la même œuvre par le biais de la plate-forme du club de lecture est important. Par ailleurs, la Cour a jugé que, pour être qualifiée de communication au public, une œuvre protégée doit être communiquée selon un mode technique spécifique, différent de ceux jusqu’alors utilisés ou, à défaut, auprès d’un public nouveau, c’est-à-dire un public n’ayant pas déjà été pris en compte par les titulaires du droit d’auteur lorsqu’ils ont autorisé la communication initiale de leur œuvre au public. En l’occurrence, dès lors que la mise à disposition d’un livre électronique est en général accompagnée d’une licence d’utilisation autorisant seulement la lecture de celui-ci, par l’utilisateur ayant téléchargé le livre électronique concerné, à partir de son propre équipement, il y a lieu de considérer qu’une communication est faite à un public n’ayant pas été déjà pris en compte par les titulaires du droit d’auteur et, partant, à un public nouveau.
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newsid:471705
Réf. : Loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019, d'orientation des mobilités (N° Lexbase : L1861LUH) ; Cons. const., décision n° 2019-794 DC du 20 décembre 2019 (N° Lexbase : A6327Z8T)
Lecture: 2 min
N1719BYC
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par Charlotte Moronval
Le 08 Janvier 2020
► A été publiée au Journal officiel du 26 décembre 2019, la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019, d'orientation des mobilités (N° Lexbase : L1861LUH).
Certaines dispositions concernent la mobilité des salariés :
A noter, toutefois, que le Conseil constitutionnel a censuré partiellement, dans sa décision du 20 décembre 2019 (Cons. const., décision n° 2019-794 DC du 20 décembre 2019 N° Lexbase : A6327Z8T), les dispositions relatives à l'établissement des chartes de responsabilité des plateformes numériques de travail. Le Conseil constitutionnel a relevé que si, en principe, les travailleurs en relation avec une plateforme ayant établi une charte exercent leur activité de manière indépendante dans le cadre de la relation commerciale nouée avec elle, il appartient au juge, conformément au Code du travail, de requalifier cette relation en contrat de travail lorsqu’elle se caractérise en réalité par l’existence d’un lien de subordination juridique. Les dispositions contestées visaient à faire échec à cette requalification lorsqu’elle repose sur le respect d’engagements pris par la plateforme et que la charte a été homologuée.
Lexbase Hebdo - édition sociale reviendra en détail très prochainement sur l’ensemble des dispositions de cette loi en matière de droit social, à travers un commentaire de Pascal Lokiec, à paraître. |
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Réf. : Loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la Sécurité sociale pour 2020 (N° Lexbase : L1993LUD) et Cons. const., décision n° 2019-795 DC, du 20 décembre 2019 (N° Lexbase : A6328Z8U)
Lecture: 4 min
N1715BY8
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par Laïla Bedja
Le 08 Janvier 2020
La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020 (N° Lexbase : L1993LUD) a été publiée au Journal officiel du 27 décembre 2019 après que le Conseil constitutionnel ait rendu sa décision le 20 décembre 2019 (N° Lexbase : A6328Z8U).
La décision du Conseil constitutionnel
Saisi de trois recours les 4, 6 et 9 décembre 2019, déposés par plus de 60 sénateurs, pour l’un, et plus de 60 députés, pour les deux autres, les Sages se sont prononcés sur la LFSS pour 2020, dont dix articles étaient critiqués.
Ils ont censuré l’article 8 qui visait à neutraliser, à partir de 2021, dans le calcul des allègements généraux de cotisations et contributions sociales dues par les employeurs, certains effets du dispositif de «bonus-malus» conduisant à moduler le taux de leurs contributions à l'assurance chômage en fonction, notamment, du nombre de contrats de travail de courte durée ; les dispositions de cet article étant étrangères au domaine des lois de financement de la Sécurité sociale.
Sous réserve d’interprétation, le Conseil a admis la conformité à la Constitution l’institution d’une contribution à la charge des entreprises exploitant certains produits de santé (art. 23).
Par ailleurs, le Conseil valide la revalorisation dérogatoire de 0,3 % de certaines prestations et pensions servies par les régimes obligatoires de base de Sécurité sociale pour les pensions dont le montant total dépasse 2 000 euros. En deçà de cette somme, les pensions sont revalorisées au niveau de l’inflation. Compte tenu de son caractère exceptionnel et limité, le dispositif de revalorisation différentielle contesté repose sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec l'objet de la loi et ne crée pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.
Les principales mesures sociales de la LFSS pour 2020
La reconduction de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (art. 7). La prime dite «Macron» est reconduite mais avec quelques aménagements. Les conditions sont donc les suivantes :
Pour les salariés intérimaires mis à disposition d’une entreprise utilisatrice ayant décidé de verser la prime, la LFSS prévoie l’information de l’entreprise de travail temporaire qui devra alors verser la prime au salarié mis à disposition selon les conditions et modalités fixées par l’accord ou la décision unilatérale de l’entreprise utilisatrice.
Transfert aux URSSAF du recouvrement de l’ensemble des cotisations et contributions sociales (art. 18). Par étape jusqu’en 2025, l’URSSAF assurera le recouvrement des cotisations et contributions de l’ensemble des salariés du secteur privé (hors régime agricole), dont les cotisations actuellement payées à l’AGIRC-ARRCO.
Fusion des déclarations sociale et fiscale des travailleurs indépendants en 2021 (art. 19). Afin de faciliter les démarches des travailleurs indépendants, ces derniers ne feront plus qu’une déclaration fiscale telle que prévue à l’article 170 du Code général des impôts (N° Lexbase : L7964LG3). Les organismes de Sécurité sociale recevront de l’administration fiscale à leur demande, les informations nécessaires au calcul des cotisations et contributions. Par ailleurs, les travailleurs indépendants devront procéder par voie dématérialisée au versement des cotisations et contributions sociales.
Allocation journalière du proche aidant (art. 68). Afin d’indemniser le congé de proche aidant, la loi institue l’allocation journalière du proche aidant. La loi reporte à un décret la définition du montant de cette allocation ainsi que l’ensemble des modalités pour en bénéficier. En revanche, elle fixe le plafond pour l’ensemble de la carrière d’un bénéficiaire à soixante-six jours. Cette allocation n’est pas cumulable avec certaines indemnités et allocations.
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Réf. : Décret n° 2020-1 du 2 janvier 2020, relatif aux sociétés à mission (N° Lexbase : L2364LU4)
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par Vincent Téchené
Le 08 Janvier 2020
► Pris pour l’application des dispositions de la loi «PACTE» relative à la société à mission (cf. not. C. com., art. L. 210-10 N° Lexbase : L8961LQX à L. 210-12), un décret a été publié au Journal officiel du 3 janvier 2020 (décret n° 2020-1 du 2 janvier 2020, relatif aux sociétés à mission N° Lexbase : L2364LU4).
Ce texte complète les dispositions du Code de commerce relatives aux obligations de déclaration des sociétés dans le cadre de leurs demandes d'immatriculation et d'inscriptions modificatives, pour inclure la qualité de société à mission. La disposition fixant les renseignements d'identification des personnes morales de droit privé figurant au répertoire SIRENE tenu par l'INSEE est complétée pour que la qualité de société à mission soit également mentionnée le cas échéant, dans ce répertoire. Le décret précise les modalités de désignation de l'organisme tiers indépendant et les incompatibilités auxquelles cet organisme est soumis. Il détaille les diligences que doit réaliser l'organisme pour vérifier l'exécution des objectifs sociaux et environnementaux que la société se donne pour mission de poursuivre dans le cadre de son activité. Il indique également le contenu de l'avis et la publicité qui s'y attache. Enfin, le décret adapte les règles de soumission de projets de résolution à l'assemblée générale des sociétés d'assurance mutuelles (sur la société à mission, cf. les obs. de B. Brignon N° Lexbase : N9062BXW).
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Réf. : Ordonnance n° 2019-1234 du 27 novembre 2019, relative à la rémunération des mandataires sociaux des sociétés cotées (N° Lexbase : L6994LT9) ; décret n° 2019-1235 du 27 novembre 2019, portant transposition de la Directive (UE) 2017/828 du 17 mai 2017, modifiant la Directive 2007/36/CE en vue de promouvoir l'engagement à long terme des actionnaires (N° Lexbase : L6905LTW)
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par Philippe Emy, Maître de conférences à l’Université de Bordeaux
Le 08 Janvier 2020
La loi du 9 décembre 2016, relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite loi «Sapin 2» (loi n° 2016-1691 N° Lexbase : L6482LBP), a bouleversé les principes régissant la rémunération des dirigeants de sociétés cotées. Cette petite révolution fut la conséquence directe d’un scandale, à savoir l’augmentation de la rémunération de son président par le conseil d’administration de Renault, alors que l’assemblée générale s’était préalablement prononcée contre. Le législateur, contraint de réagir, ajouta un amendement à la loi «Sapin 2» en introduisant en droit français un principe de say on pay. Trois ans plus tard, le législateur remet le sujet de la rémunération des dirigeants sociaux sur le métier, cette fois sans rapport direct avec les récentes tribulations de l’ancien dirigeant de Renault. Il s’agit en effet de transposer en droit français les articles 9 bis et 9 ter de la Directive 2007/36/CE du 11 juillet 2007, concernant l'exercice de certains droits des actionnaires de sociétés cotées (N° Lexbase : L9363HX3), dans leur rédaction issue de la Directive 2017/828 du 17 mai 2017 (N° Lexbase : L7431LEX). La législation issue de la loi du 9 décembre 2016 respectait l’esprit du droit de l’Union européenne. Dans les deux systèmes, il s’agit d’appliquer aux rémunérations des dirigeants des sociétés cotées un système de say on pay. Le système mis en place par la loi «Sapin 2» faisait intervenir l’assemblée des actionnaires à l’occasion d’un vote préalable (ex ante) sur la politique de rémunération et d’un vote a posteriori (ex post) concernant le versement des éléments fixes, variables et exceptionnels composant la rémunération totale. Bien que la Directive ne soit pas d’harmonisation maximale, une modification du droit français s’avérait malgré tout nécessaire afin de respecter scrupuleusement les modalités techniques imposées par le droit européen. L’article 198 VI de la loi «PACTE» du 22 mai 2019 (loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 N° Lexbase : L3415LQK) habilita le Gouvernement à effectuer cette transposition par voie d’ordonnance ainsi qu’à créer un dispositif unifié et contraignant encadrant la rémunération des dirigeants des sociétés cotées [1]. Il faut dire qu’un certain nombre d’incertitudes et de lacunes avaient été repérées dans notre droit positif. Notamment, la coexistence, à côté du système de say on pay, de l’application du régime des conventions réglementées, en application des articles L. 225-42-1 (N° Lexbase : L9602LQP) et L. 225-90-1 (N° Lexbase : L9603LQQ) du Code de commerce, aux «engagements correspondant à des éléments de rémunération, des indemnités ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de la cessation ou du changement de ces fonctions, ou postérieurement à celles-ci», générait une complexité dont on pouvait faire l’économie.
L'ordonnance n° 2019-1234 du 28 novembre 2019 et l’article 1er du décret n° 2019-1235 daté du même jour mettent en place un régime unifié qui s’appliquera à toutes les rémunérations [2]. Ce nouveau régime est d’abord caractérisé par un champ d’application plus étendu que ne l’était celui issu de la loi «Sapin 2» (I). La procédure du say on pay mise en place reste quant à elle très proche de l’ancien régime, même si quelques changements voient le jour. D’une part, le conseil d’administration doit élaborer une politique de rémunération qui devra être approuvée dans un vote ex ante par l’assemblée des actionnaires (II). D’autre part, la loi organise des délibérations postérieures portant sur les rémunérations (III).
I - Domaine d’application du nouveau régime
L’objectif de l’ordonnance est de créer un régime unifié applicable à la détermination des rémunérations des dirigeants dans les sociétés cotées. Cela passe par la disparition des régimes spécifiques et par la redéfinition du domaine du système du say on pay.
Les sociétés visées. Le nouveau régime s’applique aux sociétés dont les actions -et non plus les titres, transposition oblige- sont admises aux négociations sur un marché réglementé.
La véritable nouveauté par rapport au régime établi par la loi «Sapin 2» tient à l’extension et à l’adaptation du mécanisme aux sociétés en commandite par actions. C’est une nouvelle fois le droit européen qui exigeait cette modification. L’article L. 226-8 du Code de commerce (N° Lexbase : L7136LTH) a été réécrit et les articles L. 226-8-1 (N° Lexbase : L7137LTI) et L. 226-8-2 (N° Lexbase : L7138LTK) du même code ont été créés afin d’appliquer un régime quasi-identique à celui des sociétés anonymes. La différence essentielle tient à l’équilibre des pouvoirs spécifique à cette forme sociale, c’est-à-dire à la présence de commandités et de deux sortes de dirigeants, les gérants et les membres du conseil de surveillance. Les associés commandités délibèrent à l’unanimité sur la politique de rémunération concernant les gérants, après avis consultatif du conseil de surveillance. Les statuts peuvent cependant prévoir une décision prise à la majorité des commandités ou même la compétence du conseil de surveillance. Le conseil de surveillance est quoiqu’il arrive compétent pour établir la politique de rémunération applicable à ses membres. La politique de rémunération des gérants et des membres du conseil de surveillance doit ensuite faire l'objet d'un projet de résolution soumis à l'approbation de l'assemblée générale ordinaire et à l'accord des commandités donné, sauf clause contraire, à l'unanimité.
Les rémunérations visées. L’objectif ici recherché est de soumettre toutes les rémunérations quelles qu’elles soient au mécanisme de say on pay. Cela comprend tout d’abord toutes les composantes de la rémunération, fixes et variables.
Il faut également soumettre à la procédure les engagements correspondant à des éléments de rémunération, des indemnités ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de la prise, de la cessation ou du changement de leurs fonctions ou postérieurement à l'exercice de celles-ci. Il s’agit bien évidemment des golden hellos, parachutes dorés, indemnités compensatrices d’une clause de non-concurrence ou encore pensions versées par la société. Jusqu’ici, ces éléments étaient soumis au régime des conventions réglementées. Les articles L. 225-42-1 et L. 225-90-1 ont été abrogés afin de soumettre ces rémunérations exceptionnelles au seul régime commun. La simplification est évidemment la bienvenue.
Afin d’éviter toute discussion, les textes spécifiques à certaines rémunérations prévoient désormais expressément leur soumission au régime du say on pay. Ainsi en est-il de la répartition par le conseil d’administration des anciens «jetons de présence» [3], des rémunérations exceptionnelles accordées pour les missions ou mandats confiés à des administrateurs [4], de la rémunération du président du conseil d’administration [5], de la rémunération du directeur général et des directeurs généraux délégués [6], de la rémunération des membres du conseil de surveillance [7] et enfin de la rémunération des membres du directoire [8].
L’attribution à un mandataire social d'options donnant droit à la souscription ou à l'achat d'actions [9] et l’attribution d’actions gratuites [10] doivent également être prévues et encadrées par la politique de rémunération.
Enfin, en cas de nomination aux fonctions de président du conseil d’administration, de directeur général, de directeur général délégué ou de membre du directoire d'une personne liée par un contrat de travail à la société, les dispositions du contrat correspondant à des éléments de rémunération, des indemnités ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de la cessation ou du changement de ces fonctions, ou postérieurement à celles-ci, ou des engagements de retraite, sont également soumises au régime [11].
Les rémunérations interdites. Lorsque la politique de rémunération prévoit le versement d’une indemnité en contrepartie d’une clause de non-concurrence post-contractuelle, ce versement est exclu dès lors que l’intéressé fait valoir ses droits à la retraite [12].
Les dirigeants visés. Les administrateurs n’étaient pas soumis aux exigences du système mis en place par la loi «Sapin 2». Le nouveau régime s’appliquera non seulement aux dirigeants exécutifs mais également aux administrateurs. Il existe certes des distinctions, notamment concernant le domaine de l’évaluation ex post de la rémunération de certains dirigeants. Il n’en demeure pas moins que, sur ce point, il y a une extension.
II - Etablissement de la politique de rémunération
Alors que la loi faisait jusqu’ici référence aux principes et critères de détermination, de répartition et d'attribution des rémunérations, elle se réfère désormais aux termes beaucoup plus clairs et consensuels de «politique de rémunération». Le régime de cette politique de rémunération est présenté à l’article L. 225-37-2 du Code de commerce (N° Lexbase : L7132LTC), entièrement réécrit pour l’occasion. Le conseil d’administration doit élaborer un projet de résolution de politique de rémunération, qui devra ensuite être approuvé par l’assemblée générale ordinaire des actionnaires.
Détermination de la politique de rémunération par le conseil d’administration. C’est le conseil d’administration -ou le cas échéant le conseil de surveillance [13]- qui est compétent pour définir cette politique de rémunération. Ainsi, bien que l’assemblée des actionnaires soit amenée à délibérer sur cette question, l’initiative et la détermination du contenu de cette politique demeure une prérogative propre du conseil d’administration. La détermination comme l’attribution des éléments de délibération dépendent donc d’une délibération du conseil d'administration. Pour cette raison, la loi décide que, lorsque le conseil d’administration se prononce sur une rémunération au bénéfice de son président, du directeur général ou d'un directeur général délégué, ces derniers ne peuvent prendre part ni aux délibérations, ni au vote [14].
Selon la loi, cette politique se doit d’être conforme à l'intérêt social de la société, de contribuer à sa pérennité et de s’inscrire dans sa stratégie commerciale. Il faut se rappeler que la Directive du 17 mai 2017 a été prise «en vue de promouvoir l’engagement à long terme des actionnaires» et fait quant à elle référence à une pérennité à «long terme». On perçoit bien ici le souci contemporain de lutter contre la gestion à court terme de nombreuses sociétés et de promouvoir l’intérêt social compris comme l’intérêt de la personne morale dépassant les intérêts des seuls associés. Il n’est pas certain, au-delà de la bonne volonté affichée, que cela ait des répercussions juridiques ou économiques. On présente parfois à tort le système du say on pay comme un moyen de lutter contre les rémunérations excessives versées aux dirigeants. Or, le court-termisme tient souvent plus aux exigences des actionnaires qu’aux velléités des dirigeants sociaux. Les actionnaires, notamment les fonds de pension anglo-saxons et autres hedge funds, sont prêts à rémunérer grassement les dirigeants si ces derniers leur procurent une forte rentabilité à court terme. Les termes employés par la loi pourront-ils permettre au juge de contrôler certaines politiques de rémunération encourageant une gestion court-termiste de la société ? On voit mal la Cour de cassation ouvrir cette boîte de Pandore.
Contenu précis de la politique de rémunération. Sur le principe, la politique de rémunération se doit de décrire toutes les composantes de la rémunération fixe et variable et d’expliquer le processus de décision suivi pour sa détermination, sa révision et sa mise en œuvre [15]. Cette exigence de précision formulée dans l’ordonnance se trouve renforcée par des dispositions particulièrement détaillées issues du décret [16]. Il est impossible ici de reprendre de façon exhaustive toutes les informations que le conseil d’administration sera chargé de présenter. Certaines concernent l'ensemble des mandataires sociaux. C’est le cas par exemple de l’exposé du processus de décision suivi pour déterminer les rémunérations, ce qui comprend, par exemple, les mesures permettant d'éviter les conflits d'intérêts, l’éventuelle intervention d’un comité de rémunération ou encore les méthodes d'évaluation appliquées pour déterminer dans quelle mesure il a été satisfait aux critères de performance prévus pour les rémunérations variables. D’autres informations doivent être indiquées pour chaque mandataire social pris individuellement. Il s’agit notamment de la description des éléments fixes, variables et exceptionnels composant la rémunération totale et les avantages de toute nature accordés au mandataire, ainsi que des engagements pris par la société elle-même ou par toute société contrôlée ou qui la contrôle et correspondant à des éléments de rémunération, des indemnités ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de la cessation ou d'un changement de fonctions, ou postérieurement à celles-ci.
Approbation par l’assemblée générale des actionnaires. Si le conseil d’administration possède en la matière un pouvoir d’initiative, c’est bien à l’assemblée des actionnaires qu’il revient de valider la politique de rémunération des mandataires sociaux. L’assemblée générale ordinaire, statuant dans les conditions de l’article L. 225-98 du Code de commerce (N° Lexbase : L2380LRL), est compétente [17]. La Directive exige qu’une telle consultation des actionnaires ait lieu lors de chaque modification importante et, en tout état de cause, au moins tous les quatre ans. La loi française est plus exigeante dans la mesure où elle continue à exiger de consulter les actionnaires «chaque année et lors de chaque modification importante dans la politique de rémunération». Cela signifie que, si la politique de rémunération ne change pas d’une année sur l’autre, l’assemblée générale devra tout de même se prononcer.
Caractère contraignant du vote des actionnaires. Les sociétés ne peuvent verser de rémunération à leurs dirigeants que conformément à une politique de rémunération approuvée par l’assemblée générale. Il en découle qu’aucune rémunération, de quelque nature que ce soit, ne peut être déterminée, attribuée ou versée par la société si elle n'est pas conforme à la politique de rémunération approuvée par l’assemblée. En conséquence, tout versement, attribution ou engagement effectué ou pris contrairement à la politique de rémunération est atteint de nullité. La loi ne prévoit pas quel type de nullité doit ici être appliqué. A priori, il faudrait opter pour une nullité relative, dans la mesure où seule la société doit ici être protégée. Cependant, retenir une qualification d’ordre public de protection s’avérerait contre-productif, dans la mesure où la société -par l’intermédiaire de ses représentants- risquerait fort de ne pas invoquer la nullité et pourrait renoncer à ce droit une fois acquis. Le risque de conflit d’intérêts et de contournement de la loi est évident, et il serait dès lors pertinent de retenir une qualification qui interdise toute régularisation d’une atteinte à la politique de rémunération, quitte à retenir une nullité absolue en l’absence d’action ut singuli. S’agissant de l’action en nullité, cela permettrait à toute personne ayant un intérêt à agir -comprendre en pratique tout associé- de demander le prononcé de la nullité. Si l’on considère que le droit de demander la nullité appartient bien à chaque actionnaire, le vote ex post ne peut pas valoir régularisation, même si cette volonté de régulariser est expressément manifestée par l’assemblée. On le voit, la question est loin d’être tranchée.
Il faut enfin signaler que l’ordonnance a usé d’une option offerte par la Directive et permet au conseil d'administration, en cas de circonstances exceptionnelles, de déroger à la politique de rémunération si cette dérogation est temporaire, conforme à l'intérêt social et nécessaire pour garantir la pérennité ou la viabilité de la société.
Quelles rémunérations appliquer en l’absence d’approbation par l’assemblée générale du projet de politique de rémunération ? L’assemblée est en droit de rejeter le projet de résolution soumis par le conseil d’administration. Une question se pose nécessairement : dans la mesure où le contenu de la politique de rémunération ne peut être initié que par le conseil d’administration, comment rémunérer les dirigeants en l’attente d’une délibération de l’assemblée validant la politique proposée par le conseil d’administration ? Les solutions proposées par la loi «Sapin 2» sont ici globalement maintenues. Tout d’abord, si antérieurement au refus de l’assemblée, une politique de rémunération avait déjà été a approuvée, elle continue à s'appliquer. Mais le conseil d'administration est alors tenu de soumettre à l'approbation de la prochaine assemblée générale un projet de résolution présentant une politique de rémunération révisée et indiquant de quelle manière ont été pris en compte le vote des actionnaires et, le cas échéant, les avis exprimés lors de l'assemblée. Ensuite, dans l’hypothèse où aucune politique de rémunération n’avait été précédemment approuvée, la rémunération des dirigeants doit être déterminée conformément à la rémunération attribuée au titre de l'exercice précédent ou, à défaut, conformément aux pratiques existant au sein de la société. Là encore, le conseil d'administration est tenu de soumette à l'approbation de la prochaine assemblée générale des actionnaires, un projet de résolution présentant une politique de rémunération révisée en précisant de quelle manière ont été pris en compte le vote des actionnaires et les avis exprimés lors de l'assemblée générale.
Publicité de la politique de rémunération. Cette politique doit d’abord être accessible aux actionnaires, ce qui justifie sa présentation dans le rapport annuel sur le gouvernement d’entreprise. La transposition du nouvel article 9 ter de la Directive 2007/36/CE du 11 juillet 2007 a imposé de réécrire l’article L. 225-37-3 du Code de commerce (N° Lexbase : L7131LTB), texte qui détaille les informations relatives aux rémunérations des mandataires sociaux qui doivent être inscrites dans le rapport sur le gouvernement d’entreprise. Cet article avait déjà fait l’objet d’ajouts substantiels dans la loi «PACTE» du 22 mai 2019. Les informations auparavant exigées sont désormais clarifiées et précisées alors que de nouvelles informations en rapport avec la politique de rémunération ont été ajoutées par l’ordonnance, notamment la manière dont cette politique contribue aux performances à long terme de la société et la façon dont les critères de performance ont été appliqués. Ces informations sont importantes : elles vont permettre aux actionnaires d’apprécier a posteriori comment la politique de rémunération qu’ils ont approuvée a été mise en œuvre par le conseil d’administration. Et ils pourront éventuellement manifester leur mécontentement à travers un vote ex post qui sera examiné un peu plus loin.
Ces informations ne sont pas réservées aux seuls actionnaires : elles doivent également être mises gratuitement à disposition du public sur le site internet de la société pour une durée de dix ans [18].
La Directive et ses textes de transposition font par ailleurs en sorte de protéger un certain nombre de données de nature personnelle et familiale concernant les dirigeants concernés.
III - Les délibérations postérieures portant sur les rémunérations
Les dispositions qui suivent ne dépendent que très partiellement du droit européen et sont pour l’essentiel un ajout du législateur français. Elles renforcent le contrôle des actionnaires, au risque, selon certains, d’alourdir inutilement la procédure. Dans le droit fil de la loi «Sapin 2», l’ordonnance exige que l’assemblée générale annuelle se saisisse de la question des rémunérations et procède à des délibérations spécifiques concernant les rémunérations attribuées à certains dirigeants. Dorénavant, elle exige également une délibération sur les éléments présentés dans le rapport sur le gouvernement d’entreprise.
Délibérations spécifiques relatives aux rémunérations versées à certains dirigeants. L’approbation de la politique de rémunération ne permet pas de déterminer précisément les rémunérations totales qui seront finalement versées aux mandataires sociaux. Certains éléments de rémunération sont affectés d’une incertitude tenant par exemple aux résultats de la société. Pour cette raison, l’assemblée des associés est amenée à se prononcer une seconde fois sur les rémunérations, une fois l’exercice concerné arrivé à son terme. L’article L. 225-100, III du Code de commerce (N° Lexbase : L7151LTZ) reprend ici un mécanisme identique à celui qui s’appliquait depuis la loi «Sapin 2». Des délibérations distinctes sont imposées pour certains dirigeants : le président du conseil d'administration ou du conseil de surveillance, le directeur général, les directeurs généraux délégués, les membres du directoire, le président du directoire et ou le directeur général unique. Cela signifie qu’il n’est pas ici nécessaire de voter sur les rémunérations accordées aux administrateurs ou aux membres du conseil de surveillance, sur lesquelles il a été statué dans le cadre de la politique de rémunération.
La loi opère une distinction entre les rémunérations qui ont déjà été versées et celles, variables ou exceptionnelles qui ne l’ont pas encore été. La rédaction du texte a évolué depuis la loi «Sapin 2» et on peut en déduire que toutes les rémunérations variables ou exceptionnelles versées aux dirigeants visés ne peuvent être versées qu’après leur approbation par l’assemblée. Cependant, les choses ne sont pas si claires puisque l’article L. 225-37-3, 3°, relatif à la politique de rémunération, fait référence à une possible clause de restitution de rémunérations variables. Quoiqu’il en soit, un vote négatif devrait bien entendu conduire à restituer les rémunérations. Si l’assemblée ne valide pas ces rémunérations une fois celles-ci déterminées, alors elles ne pourront pas être versées. Le caractère certain de ces créances n’est donc acquis qu’une fois cette délibération ex post acquise. La loi ne semble exiger qu’une délibération spéciale pour chaque dirigeant concerné, mais rien n’interdit de délibérer pour chaque dirigeant au sujet de chaque rémunération spécifique. Même si la loi conduit à délibérer sur toutes les rémunérations, il n’en demeure pas moins que les rémunérations qui ne sont ni variables, ni exceptionnelles, c’est-à-dire les rémunérations fixes, ne peuvent être remises en cause par un vote négatif.
Délibération unique relative aux informations présentées dans le rapport sur le gouvernement d’entreprise. L’article L. 225-100, II du Code de commerce innove ici en exigeant que l’assemblée statue sur un projet de résolution portant sur les informations mentionnées au I de l'article L. 225-37-3 du même code. Il s’agit des informations relatives aux rémunérations versées aux différents dirigeants en application de la politique de rémunération qui doivent être détaillées dans le rapport sur le gouvernement d’entreprise. Par principe, ce rapport a été remis aux actionnaires avant la tenue de l’assemblée générale annuelle. C’est donc l’occasion pour eux de se manifester et éventuellement de faire savoir au conseil d’administration leur désaccord quant au résultat de la politique de rémunération. On sait que, même si la politique de rémunération doit être approuvée par l’assemblée générale, la détermination de son contenu revient toujours au conseil d’administration. Et ce dernier pourrait traîner des pieds avant de prendre en compte les desideratas des actionnaires.
La loi confère ici un moyen original d’aiguillonner un organe de direction peu réceptif aux attentes des actionnaires. Cette mesure n’est d’ailleurs pas exigée par la Directive, son article 9 ter imposant seulement un vote consultatif portant sur le rapport relatif à la rémunération des exercices les plus récents. En effet, en cas de vote contre le projet de résolution, les versements des rémunérations promises aux membres du conseil d’administration ou du conseil de surveillance -les anciens jetons de présence- sont suspendus jusqu’à ce que l’organe de direction soumette à l’assemblée une nouvelle politique de rémunération et qu’elle soit approuvée. Aussi longtemps qu’une nouvelle politique n’est pas approuvée par les actionnaires, les versements demeurent suspendus. L’arriéré sera versé une fois que l’assemblée aura approuvé une nouvelle politique de rémunération.
On sait que l’assemblée ne peut normalement pas revenir sur les rémunérations fixes accordées aux dirigeants exécutifs. La loi lui donne ici un levier intéressant pour faire pression sur les administrateurs, qui en majorité n’occupent pas dans le même temps un poste de dirigeant exécutif. Privés de toute rémunération, les administrateurs seront sans doute plus enclins à proposer une procédure de rémunération révisée en prenant en compte les exigences des actionnaires.
[1] Etude d’impact, projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, p. 632 et s..
[2] Rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance n° 2019-1234 du 27 novembre 2019, relative à la rémunération des mandataires sociaux des sociétés cotées (N° Lexbase : Z245708X).
[3] C. com., art. L. 225-45 (N° Lexbase : L7144LTR).
[4] C. com., art. L. 225-46 (N° Lexbase : L7145LTS).
[5] C. com., art. L. 225-47 (N° Lexbase : L7146LTT).
[6] C. com., art. L. 225-53 (N° Lexbase : L7147LTU).
[7] C. com., art. L. 225-83 (N° Lexbase : L7149LTX) et L. 225-84 (N° Lexbase : L7150LTY).
[8] C. com., art. L. 225-63 (N° Lexbase : L7134LTE).
[9] C. com., art. L. 225-185 (N° Lexbase : L7152LT3).
[10] C. com., art. L. 225-197-1 (N° Lexbase : L7153LT4).
[11] C. com., art. L. 225-22-1 (N° Lexbase : L7143LTQ) et L. 225-79-1 (N° Lexbase : L7148LTW).
[12] C. com., art. R. 225-29-1, III (N° Lexbase : L0065LUX), R. 225-56-1, III (N° Lexbase : L0062LUT) et R. 226-1-1, III (N° Lexbase : L0063LUU).
[13] C. com., art. L. 225-82-2 (N° Lexbase : L7133LTD). Pour mémoire, en application de l’article L. 226-8-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L7137LTI), les associés commandités délibèrent à l’unanimité sur la politique de rémunération concernant les gérants, après avis consultatif du conseil de surveillance. Les statuts peuvent cependant prévoir une décision prise à la majorité des commandités ou même la compétence du conseil de surveillance. Le conseil de surveillance est seul compétent pour établir la politique de rémunération applicable à ses membres.
[14] C. com., art. L. 225-37-2, IV (N° Lexbase : L7132LTC).
[15] C. com., art. L. 225-37-2, I.
[16] C. com., art. R. 225-29-1 concernant les sociétés anonymes avec conseil d’administration, R. 225-56-1 concernant les sociétés avec directoire et conseil de surveillance, R. 226-1-1 concernant les sociétés en commandite par actions.
[17] Dans la société en commandite par actions, la politique de rémunération doit être approuvée par l'assemblée générale ordinaire et par une décision des commandités donnée, sauf clause contraire, à l'unanimité (C. com., art. L. 226-8-1 N° Lexbase : L7137LTI).
[18] C. com., art. R. 225-29-2, I (N° Lexbase : L0066LUY).
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Réf. : Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020 (N° Lexbase : L5870LUX)
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par Damien Falco, Maître de conférences à l’Université de Haute-Alsace
Le 23 Janvier 2020
Dans sa décision en date du 27 décembre 2019 [1], le Conseil constitutionnel a déclaré la loi de finances pour 2020 [2] conforme à la Constitution malgré la censure de certaines dispositions. Publiée au Journal Officiel de la République Française du 29 décembre 2019, elle est entrée en vigueur le lendemain. Cette loi prévoit des mesures fiscales applicables notamment aux entreprises en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) dont nous proposons ici d’étudier les grandes lignes.
I/ La transposition de la Directive « e-commerce » (LF pour 2020, art. 147).
Le secteur des ventes par correspondance a connu une véritable restructuration ces dernières années. Le passage des ventes par catalogue aux acquisitions en ligne a contribué à l’évolution du comportement des clients. Ces derniers ont peu à peu délaissé la vente traditionnelle pour effectuer leurs achats en ligne dans le cadre des ventes à distance. Tandis qu’à l’origine la majorité des transactions était effectuée par un nombre réduit d’opérateurs, le développement des échanges numériques a rendu ce secteur accessible à de nombreux acteurs. La simplification des transactions a également produit une multiplication des envois de colis. L’ensemble de ces éléments a rendu le secteur particulièrement propice à la fraude en ce qui concerne les ventes à distance intra-UE (A) et les importations (B). L’article 147 de la loi de finances transpose différentes dispositions des Directives UE 2017/2455 du 5 décembre 2017 (N° Lexbase : L7481LHK) et UE 2019/1995 du 21 novembre 2019 (N° Lexbase : L7260LT3) sur les ventes à distance pour tenter d’endiguer le phénomène. Ces mesures n’entreront en vigueur qu’à compter du 1er janvier 2021.
A/ Les mesures concernant les ventes à distance intra-UE
Le régime actuel des ventes à distance - Les ventes à distance (VAD) effectuées à destination des particuliers situés dans un autre Etat membre de l’Union européenne font l’objet d’un régime d’imposition particulier. Ce régime ne concerne que les transactions intra-UE entre un vendeur assujetti et un particulier. Ces opérations sont taxables selon la TVA applicable dans le pays où est établi le vendeur, lorsque le montant cumulé du chiffre d’affaires annuel HT de l’année N-1 (ou à défaut, celui de l’année en cours) de l’entreprise, à destination d’un même pays, est inférieur à un seuil fixé par cet Etat. Le franchissement de ce seuil renverse le lieu de taxation. De la sorte, le bien devient taxable selon le taux de TVA du pays de destination de la marchandise. La fixation du seuil des VAD par les Etats revêt donc une importance particulière. L’article 34 de la Directive TVA oblige les Etats à prévoir un seuil compris dans une fourchette allant de 35 000 à 100 000 euros. La France, qui avait choisi la tranche haute, a réduit le seuil à 35 000 euros depuis 2016. Dès lors, deux situations se rencontrent lorsqu’une entreprise située dans un autre État membre effectue une vente en France : soit le total des ventes effectuées à destination de cet État est inférieur à ce seuil et la taxation a lieu au pays de départ des biens, soit le montant est supérieur et l’imposition s’effectue en France.
L’objectif de réduction de la fraude sur l’e-commerce - Le régime des ventes à distance est propice à différents types de fraude. La plus connue réside dans la technique suivante : une société établie dans un Etat disposant d’un faible taux de TVA réalise des ventes à destination d’un autre Etat membre de l’Union européenne. La fraude consiste à ne pas appliquer la TVA du pays de destination lorsque le seuil prévu par celui-ci est dépassé. Autrement dit, la société continue d’appliquer le taux du pays de départ des biens. Le détournement est assez simple à mettre en œuvre dans la mesure où l’application et le paiement de la TVA du pays de destination nécessitent une démarche volontaire de la part de l’entreprise. A défaut, l’administration fiscale est démunie pour vérifier le dépassement du seuil. Le droit de communication étant limité territorialement, la seule solution consiste à effectuer une demande d’assistance administrative internationale pour obtenir les informations requises. La difficulté de contrôler le respect de la réglementation a été confirmée par le rapport de la commission des finances de 2015 qui a précisé que le seuil des ventes à distance n’est « pratiquement pas contrôlé par les administrations fiscales des Etats membres » et conduit à des « fraudes énormes » [3]. Au final, seuls les vendeurs disposant des structures les plus importantes effectuent les démarches d’enregistrement [4]. Pour cette raison, une évolution de la réglementation s’est avérée indispensable.
L’harmonisation des seuils - A compter de 2021, le seuil à retenir pour déterminer le pays de taxation des biens sera fixé à 10 000 euros pour tous les Etats membres de l’Union européenne. De plus, le calcul du chiffre d’affaires permettant de déterminer si l’entreprise dépasse ce seuil devra être établi en tenant compte de l’ensemble des opérations réalisées dans l’Union européenne, et non plus Etat par Etat comme c’est le cas actuellement. Dès lors, l’imposition selon le taux du pays de destination a vocation à devenir le principe. Les Etats pourront ainsi cibler les contrôles sur les entreprises appliquant encore, malgré le nouveau seuil, le taux du pays d’origine. A noter que ce seuil sera commun avec celui applicable depuis le 1er janvier 2019 aux prestations de services de télécommunications, de radiodiffusion et de télévision ainsi qu’aux services fournis par voie électronique à des personnes non assujetties à la TVA par des prestataires non établis dans l’Etat membre de consommation de ces services.
L’extension du guichet unique - Afin de permettre aux assujettis de déclarer et payer la TVA sur ces opérations, le système du guichet unique existant depuis le 1er janvier 2015 pour les prestations de services de télécommunications, de radiodiffusion et de télévision ainsi que pour des services fournis par voie électronique est étendu aux ventes à distance intra-UE de biens. La portée du dispositif doit cependant être relativisée dans la mesure où il ne s’agit pas d’un moyen de lutte contre la fraude. La commission des finances a déjà précisé en ce sens que « le principe de destination et le mini-guichet permettent de lutter contre l’optimisation fiscale, mais pas contre la fraude fiscale » [5]. En effet, le système restera purement déclaratif et dépendra de la bonne volonté des entreprises de s’enregistrer sur le mini-guichet.
B/ Les mesures concernant les importations
Un régime propice à la fraude - Le commerce électronique est également à l’origine d’une importante fraude en matière d’importation de biens. L’essor de l’économie numérique a augmenté significativement le nombre de livraisons de colis, limitant par là même les possibilités de contrôle des douanes. Le régime des importations diffère de celui des opérations intracommunautaires. Lorsqu’un opérateur situé en dehors de l’Union européenne effectue une vente à destination d’un Etat membre de l’Union, l’opération est soumise à la TVA et aux droits de douane de l’Etat de destination. Jusqu’à présent, la Direction générale des Douanes et Droits Indirects (DGDDI) était chargée d’assurer le recouvrement des droits au moment du dédouanement de la marchandise. L’assiette des taxes est la valeur déclarée en douane.
Les envois de faibles valeurs - Dès 1983, un régime spécifique consistant à exonérer de taxes les livraisons de faibles valeurs a été mis en place [6]. A l’origine, le seuil de la franchise de TVA pour ces échanges était fixé à 22 écus. Il a été modifié par une Directive de 1988 [7] qui instauré une fourchette comprise entre 10 à 22 écus. Ces montants, désormais convertis en euros, sont toujours applicables même si l’article 23 de la Directive précise que les importations dont la valeur n’excède pas 10 euros sont admises en exonération mais que les Etats peuvent porter ce seuil à 22 euros et exclure de l’exonération les biens importés dans le cadre d’une vente par correspondance. Concernant les droits de douane, le seuil a été fixé à 150 euros. La France a retenu le seuil de 22 euros pour la TVA et applique l’exclusion des biens importés via le système des ventes par correspondance. Si le dispositif a été instauré à une période où le commerce électronique n’existait pas, l’essor de ce secteur pose désormais des difficultés pour les entreprises européennes. En effet, un bien importé ayant une faible valeur est exonéré de TVA alors qu’il est soumis à cet impôt s’il provient d’un Etat européen. Ce système a conduit certains Etats à mettre en place des mesures dérogatoires destinées à exclure du régime certains produits ou secteurs. Malgré cela, les opérateurs parviennent à détourner la réglementation à leur profit.
La technique de la sous-déclaration des colis - Face au développement des échanges transfrontaliers, les moyens actuels sont insuffisants pour assurer un contrôle effectif de l’ensemble des colis. La difficulté tient au fait que le calcul et le paiement de la TVA reposent seulement sur la valeur déclarée lors du dédouanement. Ainsi, les vendeurs, désireux de ne pas voir leurs produits taxés, avaient pris l’habitude de sous-évaluer leurs envois. L’objectif était de placer la valeur des colis en dessous des seuils d’imposition pour pratiquer des prix HT plus attractifs. Le rapport de 2015 précise que cette pratique est « extrêmement courante » [8]. La DGDDI fait face à une difficulté matérielle dans la mesure où elle est dans l’incapacité de contrôler si chaque livraison correspond effectivement à la valeur déclarée [9].
L’extension du guichet unique à certaines importations - Afin de faciliter la collecte de la TVA, la loi de finances pour 2020 a créé une nouvelle opération imposable pour les envois de faible valeur (vente à distance de biens importés de moins de 150 euros) en provenance des pays tiers ou des territoires tiers à l’Union européenne et a mise en place un guichet unique pour déclarer ces opérations et être exonéré de la TVA due au titre de l’importation de ces biens.
Les plates-formes en ligne : redevables et solidaires de la TVA - La loi de finances prévoit également que les plates-formes électroniques sont redevables de la TVA lorsque celles-ci facilitent les ventes à distance de biens importés de moins de 150 euros ou qu’elles facilitent les livraisons domestiques ou les ventes à distance intracommunautaires de biens réalisées par leur intermédiaire par un vendeur non établi dans l’Union européenne. En parallèle, il est prévu de rendre redevable de la TVA à l’importation l’interface qui facilite des ventes de biens importés en provenance de pays tiers à destination de consommateurs situés en France, à la place de la personne désignée comme destinataire réel des biens sur la déclaration d’importation. Un guichet électronique est également créé permettant de déclarer dans un seul Etat membre l’ensemble des ventes à distance de biens importés contenus dans des envois ne dépassant pas une valeur de 150 euros, dont le lieu d’imposition est situé dans l’Etat membre de consommation. En contrepartie de l’utilisation de ce système déclaratif et de paiement, une exonération de la TVA due à l’importation est instituée. Il convient de préciser que ces mesures s’ajoutent à celles relatives à la loi n° 2018-898 du 23 octobre 2018 (N° Lexbase : L5827LMR) qui prévoit déjà une solidarité en paiement de la TVA par les plateformes dans certains cas. Cette disposition, qui entre en vigueur dès le 1er janvier 2020, interroge. La solidarité en paiement en matière de TVA semble traduire les lacunes de l’administration dans sa mission relative au contrôle fiscal. C’est lorsque cette dernière n’est plus en mesure de contrôler les transactions qu’elle délègue ce travail aux entreprises. Or, il est évident que ce n’est pas le rôle des entreprises de s’assurer que les autres opérateurs d’un circuit économique remplissent leurs obligations en matière de TVA. Et ce n’est certainement pas à elles d’en supporter le poids en cas de défaillance.
Un droit de communication pour les entrepôts de stockage de biens importés - L’article 148 de la loi de finances intègre une nouvelle obligation pour les exploitants d’entrepôts ou de plateformes logistiques où sont stockés les biens importés destinés à être vendus en France ou dans un autre Etat membre de l’Union européenne. Elle leur impose de tenir à la disposition de l’administration ou de lui communiquer sur demande les informations relatives à l’origine des biens stockés et l’identité des propriétaires des biens. La loi de finances prévoit également la publication d’une liste noire des plateformes en ligne qui ne seraient pas coopératives.
II/ La transposition des mesures relatives aux « quick fixes » (LF pour 2020, art. 34)
Un objectif de simplification - Les « quick fixes » ont pour objectif, dans l’attente de l’adoption d’un régime définitif de TVA, d’harmoniser et de simplifier certaines règles de taxation des échanges intra-UE. A ce titre, l’article 34 de la loi de finances pour 2020 transpose en droit interne la Directive UE 2018/1910 du 4 décembre 2018 (N° Lexbase : L2818LNP). Cette transposition se traduit pour une modification des conditions d’exonération des livraisons intra-UE, une simplification du régime des stocks sous contrat de dépôt et une harmonisation du régime des ventes en chaîne. Ces mesures s’appliquent aux livraisons de meubles corporels dont le fait générateur de la TVA intervient à compter du 1er janvier 2020.
La modification des conditions d’exonération des livraisons intra-UE - Deux conditions sont ajoutées à l’article 262 ter du CGI (N° Lexbase : L5503HWQ) : d’une part, le destinataire d’un bien doit être identifié à la TVA dans un autre Etat membre que celui du départ ou de l’expédition du bien et le destinataire du bien doit avoir communiqué au fournisseur son numéro d’identification à la TVA ; d’autre part, le fournisseur doit déposer l’état récapitulatif (déclaration d’échange de biens) avec toutes les mentions obligatoires. Jusqu’à présent, ces conditions étaient seulement des conditions formelles. Ainsi, en cas de non-respect, les Etats pouvaient seulement infliger des amendes ou des sanctions administratives. Désormais, ces conditions deviennent des conditions de fonds pour l’application du régime d’exonération des livraisons intra-UE.
L’harmonisation des règles relatives aux ventes en chaîne - Les ventes en chaîne concernent des livraisons successives d’un même bien entre plusieurs opérateurs établis dans différents Etats membres et faisant l’objet d’un transport intra-UE unique. Il s’agit du cas dans lequel un vendeur A, établi en France, vend un bien à un opérateur B, situé en Espagne, et que ce dernier revend le même bien à un opérateur C, situé en Belgique. Etant précisé que dans cette situation le vendeur A livre directement le bien à l’opérateur C. La question était ici de savoir à quelle opération devait être imputée l’expédition ou le transport et, par conséquent, l’exonération de la livraison intra-UE. Par principe, la livraison exonérée est celle effectuée à destination de l’opérateur intermédiaire (B situé en Espagne dans l’exemple ci-dessus). Par dérogation, la livraison exonérée est celle effectuée par l’opérateur intermédiaire quand ce dernier a communiqué son numéro d’identification à la TVA à son fournisseur.
La simplification du régime des stocks sous contrat de dépôt - Désormais, un régime de stocks sous contrat de dépôt existe lorsque des conditions fixées à l’article 256 III bis du CGI (N° Lexbase : L0374IWR) sont remplies. Il s’agit du cas dans lequel un fournisseur transfère des biens à un acquéreur connu sans lui en transférer immédiatement la propriété. L'acquéreur a le droit de prélever les biens du stock du fournisseur à sa convenance, conduisant à l’existence d’une livraison de biens qui fait l’objet d’une réglementation particulière. Pour remédier aux difficultés rencontrées dans la pratique, des mesures de simplification ont été adoptées dans le cadre de la Directive UE/2018/1910 du 4 décembre 2018, désormais transposées en droit interne par le biais de l’article 34 de la loi de finances.
En vertu du nouveau texte, un régime de stocks sous contrat de dépôt existe lorsque des conditions sont remplies :
- les biens sont expédiés par un assujetti vers un autre Etat membre afin que ces biens y soient livrés, à un stade ultérieur et après leur arrivée, à un autre assujetti qui a le droit de devenir propriétaire de ces biens en vertu d'un accord existant entre eux ;
- l'assujetti expéditeur n'est pas établi ou ne dispose pas d'un établissement stable dans l'Etat membre vers lequel les biens sont expédiés ou transportés ;
- l'assujetti auquel les biens sont destinés est identifié à la TVA dans l'Etat membre vers lequel les biens sont expédiés et il a communiqué à l’expéditeur son identité et le numéro d'identification à la TVA ;
- le vendeur inscrit le transfert des biens dans un registre prévu à cet effet et indique l'identité et le numéro d'identification à la TVA de l’acquéreur.
Lorsque ces conditions sont remplies, le transfert des biens vers le stock ne sera pas assimilé à une livraison en France si les biens sont livrés à l'acquéreur dans un délai de douze mois suivant leur arrivée sur le territoire de l’autre Etat membre. Si ce délai est respecté, il y aura alors lieu de constater, lors du transfert du pouvoir de disposer des biens comme un propriétaire, une livraison intra-UE exonérée en France et une acquisition intra-UE taxable dans l'Etat d'arrivée des biens.
III/ L’obligation progressive du recours à la facturation électronique
La mesure et sa finalité - L'article 153 de la loi rend la facturation électronique obligatoire dans le cadre des relations B2B pour la période située entre le 1er janvier 2023 et le 1er janvier 2025, selon un calendrier et des modalités fixés par décret. Surtout, les données figurant sur ces factures électroniques devront, par ailleurs, être systématiquement transmises à l'administration fiscale pour leur exploitation à des fins de collecte et de contrôle de la TVA. Les modalités concrètes de ce dispositif doivent encore être précisées dans le cadre d’un rapport qui devrait être remis au Parlement en 2020. Le projet de l’administration consiste à mettre en place un système de déclaration électronique des échanges. A ce titre, l’utilisation des données figurant sur les factures peut conduire à deux solutions de lutte contre la fraude.
La déclaration électronique des achats - La première solution consiste à créer un système de déclaration électronique des achats. La mise en place d’un tel dispositif a été encouragée par certains auteurs [10]. Il favoriserait la lutte contre la fraude en permettant « d’être prévenu dès qu’un micro-assujetti réalise une livraison disproportionnée (ou inhabituelle) alors que sa surface (en chiffre d’affaires, personnel ou bilan) n’offre pas de garantie sérieuse de représentation » [11]. Le mécanisme conduit donc à détecter les sociétés en sommeil qui, soudainement, réalisent un montant de ventes important. À notre sens, le système reste toutefois limité à la lutte contre les fraudes carrousels.
Une tentative avortée - Rappelons que ce dispositif avait été introduit par un amendement des députés [12] dans le projet de loi de finances pour 2017 [13]. Sa mise en œuvre était initialement prévue pour les transactions intervenant à compter du 1er janvier 2018. La déclaration devait obligatoirement être effectuée dans les vingt-quatre heures suivant l’inscription de l’opération en comptabilité. Il était prévu de rendre cette procédure obligatoire pour toutes les opérations dont le montant était supérieur à 863 000 euros ou dont le montant total des achats auprès d’un même fournisseur ou prestataire dépassait ce montant sur une période de trois mois. Le non-respect de cette obligation était assorti d’une sanction spécifique. Ainsi, pour chaque achat non signalé, une amende équivalente à 1 % du montant supérieur à 863 000 euros était prévue. Cependant, le système de déclaration électronique des achats a été déclarée inconstitutionnel. S’il ne sanctionne pas le mécanisme en lui-même, le Conseil constitutionnel estime « qu’en prévoyant une amende proportionnelle non plafonnée, pour un manquement à une telle obligation de signalement, alors même que la personne sanctionnée ne pouvait savoir que son cocontractant ne reverserait pas la taxe sur la valeur ajoutée, le législateur a instauré une sanction manifestement disproportionnée à la gravité des faits qu’il a entendu réprimer » [14]. En conséquence, l’ensemble de la mesure a été censuré.
La déclaration électronique des transactions - La seconde solution consiste à créer un système de déclaration électronique de toutes les transactions. Ce système conduit les entreprises à signaler à l’administration, de manière instantanée, l’ensemble de leurs achats et de leurs ventes. Ainsi, il ouvre la voie à une transformation du modèle de gestion de la TVA en substituant au système déclaratif un dispositif de liquidation administrative sécurisée [15]. Autrement dit, ce mécanisme met en place un contrôle en temps réel des échanges susceptible d’aboutir à l’envoi d’une déclaration de TVA pré-remplie aux entreprises. De même, il facilite les recoupements entre les informations relatives à la vente transmises par le fournisseur et celles issues de la déclaration d’achat du client. Ce dispositif est déjà en place en Espagne puisque le 6 décembre 2016, le gouvernement espagnol a adopté un décret destiné à moderniser, améliorer et promouvoir les moyens électroniques concernant la gestion de la TVA [16]. Le texte prévoit notamment la mise en place, depuis le 1er juillet 2017, d’une déclaration électronique de certaines données relatives aux transactions. Son domaine est large puisqu’il concerne tant les informations relatives aux factures d’achats et de ventes que certains documents douaniers ou comptables [17]. Les informations doivent être communiquées dans les quatre jours suivant l’émission ou l’enregistrement de la facture. En comparaison avec le système de la déclaration électronique des achats, le procédé couvre un champ d’application plus large et permet de lutter contre divers types de fraude.
IV/ Les autres mesures concernant la TVA
Un nouveau système d’autoliquidation - L’article 170 de la loi de finances met en place un dispositif d’autoliquidation de la TVA pour les transferts de certificats de garantie d’origine et de garantie de capacité concernant l’électricité. Le système s’applique aux opérations réalisées à compter du 1er janvier 2020. Le système d’autoliquidation que nous qualifions de « sectoriel » [18] est propice à réduire la fraude dans la mesure où il s’applique à l’ensemble d’un secteur à risque [19]. Si la mesure porte atteinte au principe du paiement fractionné, il ne s’agit que d’une remise en cause temporaire [20]. Le système de l’autoliquidation sectorielle est effectif depuis le 1er janvier 2008 en vertu de l’article 199 de la Directive du 28 novembre 2006 qui vise les déchets neufs d’industrie, les matières de récupération ainsi que les travaux de construction portant sur des biens immeubles. Les enseignements liés à ce mécanisme s’étant avérés positifs, la Commission européenne a par la suite étendu la possibilité de recourir au dispositif dans d’autres domaines présentant un risque élevé de fraude [21] comme les téléphones portables, les circuits intégrés, les métaux précieux, les parfums ou encore les échanges CO2. L’instauration de l’autoliquidation dans le domaine des transferts de certificats de garantie d’origine et de garantie de capacité relatifs à l’électricité s’inscrit dans la continuité des mesures adoptées par les Etats membres de l’Union européenne.
Le recouvrement des importations par la DGFIP - L’article 181 de la loi de finances prévoit qu’à compter du 1er janvier 2022 la DGFIP deviendra compétente pour la gestion et le recouvrement de la TVA sur les importations, à la place de la DGDDI. Cela signifie que les assujettis devront déclarer, payer et déduire la TVA relative à leurs importations sur la déclaration déposée à la DGFIP mensuellement, trimestriellement ou annuellement. La DGFIP deviendra également compétente pour le contrôle de la TVA sur les importations. Cela aura pour conséquence de transférer la compétence juridictionnelle aux juridictions administratives et non plus judiciaires pour le contentieux.
Les évolutions concernant les taux de TVA - La loi de finances apporte des modifications relatives aux taux de TVA dans certains secteurs. Il en est ainsi des livres audio qui bénéficient désormais du taux de 5,5 % même lorsqu’ils ne reposent pas sur un support physique (art. 35). L’article 37 de la loi uniformise l’application du taux de 10 % à l'ensemble des activités, sites ou installations à caractère culturel, ludique, éducatif ou professionnel. L'article 30 prévoit également que les livraisons et les livraisons à soi-même de certains logements locatifs sociaux financés par des prêts aidés, ainsi qu'aux travaux réalisés dans ces logements seront soumis au taux de 5,5 % et non plus 10 %. L’article 31 de la loi met en place une exonération de TVA des soins dispensées aux personnes par les pharmaciens. Jusqu’à présent, les textes précisaient que les soins dispensés par les professions médicales et paramédicales étaient exonérés de TVA. Or, les pharmaciens n’étaient pas concernés par la mesure alors qu’ils peuvent effectuer des soins aux personnes comme les actes de vaccination. La loi corrige donc cette anomalie.
[1] Cons. const., décision n° 2019-796 DC du 27 décembre 2019 (N° Lexbase : A3062Z9B).
[2] Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, de finances pour 2020.
[3] Sénat, Rapport d’information n° 691 fait au nom de la commission des finances sur le e-commerce : propositions pour une TVA payée à la source (Michel Bouvard, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Philippe Dallier, Jacques Genest, Bernard Lalande, Albéric de Montgolfier), 17 septembre 2015, p. 21.
[4] Ibid., p. 22.
[5] Ibid., p. 26.
[6] Directive n° 83/181/CEE du Conseil, du 28 mars 1983, déterminant le champ d’application de l’article 14 paragraphe 1 sous d) de la Directive 77/388/CEE en ce qui concerne l’exonération de la valeur ajoutée de certaines importations définitives de biens, JOCE L. 105 du 23 avril 1983, pp. 38-58.
[7] Directive n° 88/331/CEE, du 13 juin 1988, modifiant la Directive 83/181/CEE déterminant le champ d’application de l’article 14 paragraphe 1 point (d) de la Directive 77/338/CEE en ce qui concerne l’exonération de la taxe sur la valeur ajoutée de certaines importations définitives de biens, JOCE L. 151 du 16 juin 1988, pp. 79-81 (N° Lexbase : L9790AU7).
[8] Sénat, Rapport d’information n° 691 fait au nom de la commission des finances sur le e-commerce : propositions pour une TVA payée à la source (Michel Bouvard, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Philippe Dallier, Jacques Genest, Bernard Lalande, Albéric de Montgolfier), 17 septembre 2015, p. 30.
[9] Le contrôle des colis est marginal. Le rapport de la commission des finances de 2015 précise que seulement entre 1 et 5 % des colis font l’objet d’un contrôle (ibid., p. 21).
[10] V. par ex : Marc Wolf, Odile Courjon, Jean-Claude Bouchard, Une déclaration électronique des achats pour sauver le système TVA, FR 2014, n° 26, pp. 29-32 ; Marc Wolf, Eradiquer la ''fraude carrousel'' à la TVA, Droit fiscal 2014, n° 51, pp. 34-38.
[11] Marc Wolf, Lutte contre la fraude : un autre avenir pour la TVA, Revue européenne et internationale de droit fiscal 2015/3, p. 370.
[12] Amendement n° II-779 présenté par Mme Rabault, rapporteure générale au nom de la commission des finances, M. Dosière et M. Muet, Ass. nat., 11 novembre 2016.
[13] L. fin. rect. 2017 (projet), texte n° 865, 20 décembre 2016, art. 115 I.
[14] Cons. const., décision n° 2016-744 DC du 29 décembre 2016, cons. 92 (N° Lexbase : A9172SXY).
[15] Marc Wolf, Lutte contre la fraude : un autre avenir pour la TVA, précité, p. 371.
[16] Decreto 596/2016, de 2 diciembre, para la modernización, mejora e impulso de luso de medios electrónicos en la gestión del impuesto sobre el valor añadido, por el que se modifican el reglamento del impuesto y otras normas tributarias : BOE núm. 294, de 6 diciembre de 2016, páginas 85173-85187.
[17] https://www.ey.com/gl/en/services/tax/international-tax/alert--spain-to-require-maintenance-and-submission-of-vat-books-by-electronic-means.
[18] Par opposition à l’autoliquidation généralisée visant à appliquer le système à toutes les transactions d’un Etat.
[19] Le recours au dispositif se fonde sur les articles 199 et 395 de la Directive du 28 novembre 2006 (Directive n° 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, p. 40 et 64 N° Lexbase : L7664HTZ).
[20] Le dispositif est limité dans le temps. Malgré tout, il est susceptible d’être prolongé si le Conseil le décide.
[21] Commission des communautés européennes, « Proposition de Directive modifiant la Directive 2006/112/CE en ce qui concerne l’application facultative et temporaire de l’autoliquidation aux livraisons de certains biens et prestations de certains services présentant un risque de fraude », 29 septembre 2009, COM (2009) 511 final, 11 p.
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