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N9977BXS
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Le 22 Juillet 2019
Le 28 mars 2019, s'est tenu à la Maison du Barreau de Paris, un colloque organisé par le Barreau de Paris, intitulé «L’agonie du juge d’instruction». Un thème qui faisait écho à l’actualité puisque l’évènement se tenait sept jours après la décision du Conseil constitutionnel (N° Lexbase : A5079Y4U) à propos de la loi de programmation pour la justice 2018-2022 (N° Lexbase : L6740LPC). Une nouvelle loi et une décision qui ont rebattu les cartes sur le rôle que jouera le juge d'instruction dans la procédure pénale française.
La revue Lexbase Professions vous propose de retrouver dans cette édition spéciale les actes de ce colloque.
Au sommaire de cette édition spéciale :
Les interventions de cette journée sont également à retrouver en podcasts sur Lexradio.
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newsid:469977
Réf. : AFA, Commission des sanctions, décision n° 19-01 du 4 juillet 2019 (N° Lexbase : X4332CHW)
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N9877BX4
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par Vincent Téchené
Le 24 Juillet 2019
► La commission des sanctions de l’Agence française anticorruption (AFA) a rendu, le 4 juillet 2019, sa première décision (AFA, Commission des sanctions, décision n° 19-01 du 4 juillet 2019 N° Lexbase : X4332CHW).
► Elle estime qu’au terme d’un long processus d’amélioration et de mise au point de sa cartographie des risques de corruption mené durant l’année 2018 et au cours du premier semestre 2019, soit postérieurement au contrôle de l’AFA, les manquements à l’article 17 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 (N° Lexbase : L6482LBP) reprochés à l’entreprise n’étaient plus constitués à la date de l’audience ;
► En effet, investie d’un pouvoir de plein contentieux, la commission apprécie la réalité des manquements au moment où elle statue.
En ce qui concerne la régularité de la saisine de la commission des sanctions, cette dernière énonce que c’est l’avis du directeur de l’Agence concernant la nature et, le cas échéant, le quantum et les modalités de la sanction et les griefs sur lequel il repose, que le président de la commission communique à la personne mise en cause en l’invitant à présenter ses observations. Ainsi, en l’espèce, la circonstance que trois des huit manquements qui avaient été relevés dans le rapport de contrôle n’ont été repris ni dans la notification des griefs, ni dans la saisine de la commission des sanctions signifie de manière évidente que le directeur de l’Agence a abandonné les griefs correspondants. En outre, si la constatation des cinq manquements retenus est formulée de manière prudente, les griefs sont mentionnés de façon suffisamment claire pour ne laisser aucun doute sur leur contenu et leur portée et permettre à la personne mise en cause de présenter utilement des observations.
Sur la régularité du contrôle, elle retient, en particulier que, pour apprécier la qualité du dispositif de prévention et de détection de la corruption mis en œuvre au sein des entités contrôlées, les contrôleurs de l’Agence peuvent, sans méconnaître de dispositions législatives, le principe de non-rétroactivité de la loi ou d’autres principes, solliciter des documents et renseignements se rapportant à une période antérieure à la date d’entrée en vigueur de la loi du 9 décembre 2016 dès lors que ces documents et renseignements sont «utiles», notamment par ce qu’ils sont de nature à permettre d’appréhender concrètement l’exposition de l’entité contrôlée aux risques de corruption et de trafic d’influence eu égard à la façon dont l’entité contrôlée a fait face dans le passé à l’exposition à ces risques.
Elle retient également que l’absence, à la date du contrôle, de publication d’un questionnaire et d’une liste des pièces à fournir élaborés par l’Agence ne saurait vicier la procédure, dès lors que si ces instruments peuvent faciliter, en pratique, les opérations de contrôles, ils ne sont pas prévus par les dispositions législatives et réglementaires en vigueur.
En outre, la commission énonce que si, conformément à l’article 2 de la loi de 2016, le directeur de l’Agence ne peut assister aux séances lors desquelles la commission des sanctions exerce les compétences de décision qui lui sont conférées, ces dispositions n’ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet d’interdire au directeur d’assister ou de se faire représenter es qualité de partie aux audiences que la commission des sanctions tient en vue de statuer sur les affaires dont elle est saisie.
Pour rejeter le grief relatif à la cartographie des risques de corruption, la commission des sanctions retient que, au vu des réalisations énumérées, notamment de celles qui sont intervenues depuis la fin du contrôle, au cours d’un long processus d’amélioration progressive et de mise au point de sa cartographie des risques de corruption, l’entreprise qui n’était pas tenue de suivre la méthodologie préconisée dans les recommandations éditées par l’Agence, au demeurant postérieurement au contrôle, doit être regardée comme justifiant de la pertinence, de la qualité et de l’effectivité au niveau du groupe de la cartographie qu’il lui incombe de mettre en place.
Elle estime également que le manquement relatif au code de conduite n’est pas constitué. En effet, l’entreprise s’est appliquée à prescrire, dans un ensemble de documents interdépendants, les comportements attendus de ses collaborateurs en indiquant les prescriptions visant à prohiber la corruption, le trafic d’influence, l’octroi abusif de cadeaux ou d’avantages divers, les paiements de facilitation, les conflits d’intérêts ainsi que les règles à observer en matière de concurrence loyale et de procédures comptables. Par ailleurs, l’entreprise est en train de compléter ce dispositif par l’établissement de nouvelles préconisations écrites portant sur le risque de cybersécurité, l’inclusion sociale propice à éviter des atteintes à la probité, les questions d’embargo-pays et que plusieurs de ses filiales ont déjà décliné.
Le grief relatif à la procédure d’évaluation des tiers est évacué, dès lors, notamment, que l’entreprise s’est bien dotée de procédures et d’outils différenciés concernant ses principaux clients ou fournisseurs à risque, de règles d’encadrement de ses relations avec les intermédiaires et a mis en place un dispositif spécifique pour réaliser des diligences raisonnables en cas d’acquisition de sociétés.
Sur le grief relatif aux procédures de contrôle comptable, il est relevé que l’entreprise dispose désormais de procédures de contrôle comptable, à la fois internes et externes, qui concourent effectivement à la prévention des risques de corruption décrits dans sa cartographie des risques et qu’en conséquence le manquement invoqué n’est pas établi.
Enfin, concernant le dispositif de contrôle et d’évaluation interne des mesures mises en œuvre, la commission relève notamment que, tenant compte de la critique formulée par le directeur de l’Agence, la direction de l’audit de l’entreprise, dont l’indépendance est affirmée dans la charte de gouvernance, a été rattachée en janvier 2019 à la direction générale du groupe afin de conforter cette indépendance. En outre, les campagnes d’évaluation du dispositif de contrôle interne lancées en 2018 et 2019 intègrent l’évaluation des points de contrôle spécifiques aux risques de corruption qui ont été identifiés par l’entreprise. Dès lors, le manquement de défaut «d’un dispositif de contrôle et d’évaluation interne des mesures mises en œuvre» conforme à la prescription légale n’est pas établi.
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newsid:469877
Réf. : Cass. civ. 1, 4 juillet 2019, n° 17-27.621, FS-P+B (N° Lexbase : A2891ZIW)
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N9884BXD
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par Jérôme Lasserre Capdeville
Le 03 Décembre 2019
► Aucune action en nullité de la clause prévoyant un taux conventionnel calculé sur une année de 360 jours n’est admise si l'application de la clause litigieuse ne vient pas au détriment des emprunteurs.
Tel est l’enseignement d’un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 4 juillet 2019 (Cass. civ. 1, 4 juillet 2019, n° 17-27.621, FS-P+B N° Lexbase : A2891ZIW).
Malgré l’existence, aujourd’hui, de moyens performants pour calculer le taux d’intérêt lié à un prêt, certains établissements de crédit continuent de déterminer le taux conventionnel de crédits en se fondant sur une année de 360 jours. On parle alors «d’année lombarde» ou de «diviseur 360».
Mais le recours à cet usage est-il admissible en pratique ? Pas dans n’importe quelles circonstances. La Haute juridiction a ainsi eu l’occasion d’affirmer par un arrêt de principe du 19 juin 2013 qu’une telle base de calcul n’était pas possible à l’égard des emprunteurs consommateurs (Cass. civ. 1, 19 juin 2013, n° 12-16.651, FS-P+B+I N° Lexbase : A2042KH4 ; lire N° Lexbase : N7951BTN).
Or, cette solution connait ici une évolution notable. Le 5 mai 2013, la banque A avait consenti à M. et Mme X deux prêts immobiliers. Le taux conventionnel du premier avait été renégocié par l’intermédiaire d’un avenant en date du 7 mars 2016.
Les emprunteurs avaient assigné la banque en annulation des clauses stipulant l’intérêt conventionnel de chacun des prêts au motif que les taux conventionnels précités avaient été calculés, non pas sur une année civile, mais sur «l’année lombarde».
La cour d’appel de Toulouse (CA Toulouse, 18 octobre 2017, n° 17/00436 N° Lexbase : A0461WWY) avait cependant, par une décision du 18 octobre 2017, rejeté leur demande. Ils avaient alors formé un pourvoi en cassation. Ils rappelaient par son intermédiaire, notamment, que dans tout acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel, l’intérêt conventionnel doit être calculé sur la base de l’année civile, sous peine de se voir substituer l’intérêt légal. Ils estimaient que la sanction devait revêtir un caractère automatique.
La Cour de cassation rejette cependant ce pourvoi par la décision étudiée.
Elle note que la cour d’appel avait relevé que le rapport d'expertise amiable produit par les emprunteurs, dont elle avait souverainement apprécié la valeur et la portée, établissait que le calcul des intérêts conventionnels sur la base, non pas de l’année civile mais de celle d'une année de trois cent soixante jours, «avait eu pour effet de minorer le montant de ces intérêts», de sorte que «l'application de la clause litigieuse ne venait pas à leur détriment». La cour d’appel avait alors, par ce seul motif, statué à bon droit selon la Cour de cassation.
Cette solution attire l’attention. Elle témoigne du fait que la Haute juridiction souhaite désormais limiter le contentieux lié à «l’année lombarde», car le calcul du taux conventionnel sur 360 jours (et non pas une année civile) n’est pas de nature à causer un préjudice aux emprunteurs. La clause prévoyant cette règle ne vient pas à leur détriment. Cette solution pourrait être fréquemment reprise par les juges du fond confrontés à ce contentieux.
On notera que cette solution se rencontre déjà, depuis quelques années, en matière de taux effectif global : lorsque l'erreur du TEG est en faveur de l'emprunteur, celui-ci ne peut plus agir en justice (Cass. com., 12 octobre 2016, n° 15-25.034, F-P+B N° Lexbase : A9572R7N ; Cass. civ. 1, 16 novembre 2016, n° 15-23.178, F-D {"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 35974867, "corpus": "sources"}, "_target": "_blank", "_class": "color-sources", "_title": "Cass. civ. 1, 16-11-2016, n\u00b0 15-23.178, F-D, Rejet", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: A2445SIE"}} ; cf. l’Ouvrage «Droit bancaire» N° Lexbase : E3552ATQ).
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newsid:469884
Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 11 juillet 2019, n° 422577, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A6840ZI8)
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N9894BXQ
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par Yann Le Foll
Le 17 Juillet 2019
► Est légale une délibération rétroactive majorant le tarif d’une redevance d'enlèvement des ordures ménagères en tant qu'elle a pour effet de réitérer le tarif de l'année précédente. Telle est la solution d’un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 11 juillet 2019 (CE 3° et 8° ch.-r., 11 juillet 2019, n° 422577, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6840ZI8).
Si une délibération de l'organe délibérant d'une collectivité territoriale ou d'un groupement de collectivités territoriales modifie les tarifs de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères en prévoyant une date d'entrée en vigueur rétroactive, cette délibération est entachée d'illégalité, mais seulement dans la mesure où la délibération a pour objet d'augmenter le montant de la redevance pour une période antérieure à la date de son entrée en vigueur.
En l’espèce, les délibérations prises en cours d'année ont augmenté le tarif de la redevance pour service rendu à compter du 1er janvier de chacune des années en cause.
Ces délibérations sont donc, en l'absence d'autre critique de légalité fondée, légales en ce qu'elles ont pour effet, pour la période courant du 1er janvier de chaque année à la date de leur entrée en vigueur, de réitérer le tarif de la redevance applicable l'année précédente, dont les usagers doivent s'acquitter en contrepartie du service dont ils ont bénéficié (voir, sur les conséquences de la déclaration d'illégalité d'une délibération fixant le montant d'une redevance pour service rendu, CE, Sect., 28 avril 2014, n° 357090, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6012MKU).
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Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 11 juillet 2019, n° 426060, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6847ZIG)
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N9882BXB
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par Yann Le Foll
Le 17 Juillet 2019
► Une commune ne peut s’opposer à l’installation de compteurs «Linky» sur son territoire. Telle est la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 11 juillet 2019 (CE 3° et 8° ch.-r., 11 juillet 2019, n° 426060, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6847ZIG, confirmant CAA Nantes, 4ème ch., 5 octobre 2018, n° 17NT01495 N° Lexbase : A6100YEN).
Il appartient aux autorités de l'Etat de veiller, pour l'ensemble du territoire national, non seulement au fonctionnement optimal du dispositif de compteurs électriques communicants, au vu, notamment, des exigences d'interopérabilité, mais aussi à la protection de la santé publique par la limitation de l'exposition du public aux champs électromagnétiques, en mettant en oeuvre des capacités d'expertise et des garanties techniques indisponibles au plan local.
Dans ces conditions, si les articles L. 2212-1 (N° Lexbase : L8688AAZ) et L. 2212-2 (N° Lexbase : L0892I78) du Code général des collectivités territoriales habilitent le maire à prendre, pour la commune, les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, il ne saurait adopter sur le territoire de la commune des décisions portant sur l'installation de compteurs électriques communicants qui seraient destinées à protéger les habitants contre les effets des ondes émises.
En outre, la circonstance alléguée que l'utilisation des compteurs électriques communicants exposerait le public à des champs électromagnétiques et ne prendrait pas suffisamment en compte le principe de précaution n'habilite pas davantage le maire à prendre sur le territoire de la commune des décisions portant sur l'installation de compteurs électriques communicants au motif qu'elles viseraient à protéger les habitants contre les effets des ondes émises.
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newsid:469882
Réf. : Cass. civ. 1, 4 juillet 2019, n° 19-13.494, FS-P+B+I (N° Lexbase : A7572ZHW)
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N9797BX7
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par Vincent Téchené
Le 17 Juillet 2019
► L'usager, bénéficiaire du service public de l'enlèvement des ordures ménagères, n'est pas lié à ce service par un contrat, de sorte que le délai dont dispose une collectivité publique pour émettre un titre exécutoire, aux fins d'obtenir paiement de la redevance qu'elle a instituée, n'est pas soumis aux dispositions dérogatoires prévues à l'article L. 137-2 (N° Lexbase : L7231IA3), devenu L. 218-2 (N° Lexbase : L1585K7T) du Code de la consommation.
Tel est le sens d’un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 4 juillet 2019 (Cass. civ. 1, 4 juillet 2019, n° 19-13.494, FS-P+B+I N° Lexbase : A7572ZHW).
En l’espèce, suivant délibération du 8 octobre 2013, une communauté de communes a institué, à compter du 1 janvier 2014, une redevance d'enlèvement des ordures ménagères, dont le tarif a été fixé par une délibération du 17 décembre 2013. Par jugement du 9 septembre 2015, la juridiction de proximité a annulé le titre de perception émis à l'encontre d’un redevable pour l'exercice 2014. Par arrêt du 6 octobre 2017, devenu définitif, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté la requête, présentée par plusieurs usagers, tendant à l'annulation de la délibération du 17 décembre 2013. La communauté de communes a établi, le 26 février 2018, une nouvelle facture correspondant à la redevance d'enlèvement des ordures ménagères due pour l'exercice 2014, puis a émis, le 8 mars suivant, aux fins de recouvrement de cette facture, un titre exécutoire à l'encontre du même redevable. Celui-ci a saisi le tribunal d'instance pour en voir prononcer l'annulation. Sa demande a été accueillie.
Les juges du fond après avoir énoncé que, lorsqu'elle assure l'enlèvement des ordures ménagères, la communauté de communes exerce une activité industrielle et commerciale, dont le service est facturé à l'usager proportionnellement à son usage, retiennent que celle-ci doit être regardée comme un professionnel qui s'adresse à des consommateurs et que, dès lors, son action en paiement est soumise au délai biennal de prescription prévu à l'article L. 218-2 du Code de la consommation.
Sur pourvoir formé par la communauté de communes, la Cour de cassation rappelle qu’aux termes de l’article L. 137-2, devenu L. 218-2 du Code de la consommation, l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ; une telle prescription est applicable uniquement à l'action des professionnels pour les biens et services qu'ils fournissent contractuellement aux consommateurs (cf. Cass. civ. 1, 9 juin 2017, n° 16-21.247, F-P+B N° Lexbase : A4302WHS). Par ailleurs, selon l’article L. 2333-76 du CGCT (N° Lexbase : L3271LC7), les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes qui bénéficient de la compétence prévue à l'article L. 2224-13 (N° Lexbase : L3525IZL) peuvent instituer une redevance d'enlèvement des ordures ménagères calculée en fonction du service rendu dès lors qu'ils assurent au moins la collecte des déchets des ménages.
Dès lors énonçant la solution précitée, elle censure le jugement au visa de ces textes.
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Réf. : CJUE, 10 juillet 2019, aff. C‑649/17 (N° Lexbase : A4912ZIR)
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N9864BXM
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par Vincent Téchené
Le 17 Juillet 2019
► Une plate-forme de commerce électronique n’est pas obligée dans tous les cas de mettre un numéro de téléphone à la disposition du consommateur avant la conclusion d’un contrat. Elle est toutefois tenue de mettre à la disposition de celui-ci un moyen de communication lui permettant de la contacter rapidement et de communiquer avec elle efficacement ;
Tel est l’enseignement d’un arrêt rendu le 10 juillet 2019 par la CJUE (CJUE, 10 juillet 2019, aff. C‑649/17 N° Lexbase : A4912ZIR).
Dans cette affaire, une association de consommateurs allemande a assigné Amazon au motif que celle-ci ne respectait pas son obligation légale consistant à procurer au consommateur les moyens efficaces pour entrer en contact avec elle, dans la mesure où elle n’informait pas de manière claire et compréhensible les consommateurs de ses numéros de téléphone et de télécopieur. En effet, la loi allemande impose au professionnel, avant de conclure avec un consommateur un contrat à distance ou hors établissement, de fournir, en toutes circonstances, son numéro de téléphone. Dans ce contexte, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne) a demandé à la Cour de justice si la Directive sur les droits des consommateurs (Directive 2011/83 du 25 octobre 2011 N° Lexbase : L2807IRE) s’oppose à une telle réglementation nationale et si le professionnel est obligé de mettre en place une ligne téléphonique, ou de télécopieur, ou une nouvelle adresse électronique pour permettre aux consommateurs de le contacter.
La CJUE répond que la Directive s’oppose à une telle réglementation nationale, en soulignant que cette Directive n’oblige pas le professionnel à mettre en place une ligne téléphonique, ou de télécopieur, ou de créer une nouvelle adresse électronique pour permettre aux consommateurs de le contacter en toutes circonstances et que cette Directive n’impose de communiquer ce numéro ou celui du télécopieur ou son adresse électronique que dans les cas où ce professionnel dispose déjà de ces moyens de communication avec les consommateurs. Dans le même temps, la Cour constate que la Directive impose au professionnel de mettre à la disposition du consommateur un moyen de communication garantissant une communication directe et efficace, ce professionnel pouvant recourir à d’autres moyens de communication que ceux prévus dans cette Directive afin de satisfaire à ces exigences.
Par ailleurs, pour la CJUE, la Directive ne s’oppose pas à ce que le professionnel fournisse d’autres moyens de communication (tels que des formulaires de contact électroniques ou des systèmes de messagerie instantanée ou de rappel téléphonique), pour autant que ces moyens permettent une communication consommateur-professionnel directe et efficace, ce qui suppose que l’information relative à ces moyens soit accessible par le consommateur sous une forme claire et compréhensible. La Cour observe qu’il appartient aux juridictions nationales d’apprécier si les moyens de communication mis à la disposition du consommateur par le professionnel permettent au consommateur de contacter le professionnel rapidement et de communiquer avec lui efficacement et si les informations sur ces moyens de communication sont accessibles de manière claire et compréhensible. A cet égard, la Cour note que le fait qu’un numéro de téléphone ne soit disponible qu’à la suite d’une série de clics sur le site internet n’implique pas, en tant que tel, que la forme utilisée pour donner l’information au consommateur n’est pas claire et compréhensible.
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newsid:469864
Réf. : Cass. civ. 3, 11 juillet 2019, n° 18-10.368, FS-P+B+I (N° Lexbase : A3238ZK7)
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N9904BX4
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par Manon Rouanne
Le 17 Juillet 2019
► L’étendue de l’obligation de conseil et de mise en garde, à l’égard de son client, à la charge de l’établissement de crédit qui finance un prêt immobilier, s’apprécie au regard des pièces qui lui sont remises à l’appui de la demande de financement, de sorte que, ne manque pas à son obligation de mise en garde, quant aux conséquences du choix contractuel, des emprunteurs la banque qui, au vu des pièces remises par ces derniers, a pu légitimement penser qu’il ne s’agissait pas d’un contrat de construction de maison individuelle mais d’un contrat de louage d’ouvrage moins protecteur.
Telle est la solution dégagée par la troisième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt en date du 11 juillet 2019 (Cass. civ. 3, 11 juillet 2019, n° 18-10.368, FS-P+B+I N° Lexbase : A3238ZK7).
En l’espèce, deux accédants à la propriété ont fait construire une maison d’habitation financée par un prêt immobilier octroyé par un établissement de crédit. Reprochant à ce dernier de ne pas les avoir informés des risques encourus en passant, avec l’entreprise en charge de la réalisation de la quasi-totalité des travaux, un marché ne comportant aucune garantie de livraison, quand bien même sont intervenus une entreprise tierce mais pour une partie infime du coût total des travaux et un architecte seulement tenu d’élaborer des plans, les emprunteurs ont assigné la banque en responsabilité contractuelle pour manquement à son obligation de conseil et de mise en garde.
Confortant la position adoptée par la cour d’appel ayant refusé de retenir la manquement contractuel de la banque, la Cour de cassation rejette le pourvoi en considérant que, dans la mesure où les emprunteurs ont, pour permettre à l’établissement de crédit d’instruire la demande de financement, adressé à ce dernier un contrat d’architecte ainsi que deux devis établis par deux professionnels de la construction, la banque a pu légitimement penser que ses clients s’étaient adressés à un architecte et à deux entreprises avec lesquelles ils avaient conclu des marchés de travaux excluant la qualification de contrat de construction de maison individuelle.
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Réf. : Décret n° 2019-650 du 27 juin 2019, portant diverses mesures relatives au fonctionnement des copropriétés et à l’accès des huissiers de justice aux parties communes de l’immeuble (N° Lexbase : L6760LQG)
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N9921BXQ
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par Florence Bayard-Jammes, Docteur en droit, Professeur associé à TBS Business School
Le 30 Août 2021
Le décret n° 2019-650 du 27 juin 2019 modifie, d’une part, le décret n° 67-223 du 17 mars 1967 (N° Lexbase : L8032BB4) en précisant les modalités d’application des nouvelles dispositions apportées par la loi «ELAN» n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 (N° Lexbase : L8700LM8) à la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, fixant le statut de la copropriété (N° Lexbase : L5536AG7) (cf. notre commentaire, La loi «ELAN» et la copropriété, Lexbase, éd. priv., n° 767, 2019 N° Lexbase : N7025BXH) et, d’autre part, ajoute trois nouveaux articles au Code de la construction et de l’habitation (CCH) afin de déterminer les modalités d’accès aux parties communes des huissiers de justice pour l’exercice de leurs missions de signification et d’exécution.
Les dispositions du décret sont entrées en vigueur dès le lendemain de sa publication, soit le 29 juin 2019.
I. Mise en conformité des mentions de l’état daté avec les nouvelles dispositions de l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965 (décret du 27 juin 2019, art. 2 ; décret du 17 mars 1967, art. 5 modifié N° Lexbase : L5556IGU ; cf. l’Ouvrage «Droit de la copropriété», L’état daté N° Lexbase : E3231E4G)
L’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L5202A33) a été amendé par l’article 210 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 pour améliorer l’efficacité des actions en paiement à l’encontre des copropriétaires débiteurs. La procédure pour obtenir l’exigibilité immédiate des sommes dues, qui concernait auparavant les seules provisions afférentes au budget prévisionnel voté en assemblée générale, a été étendue aux provisions prévues à l’article 14-2 de la loi de 1965 (N° Lexbase : L5469IGN) pour travaux non compris dans le budget prévisionnel. Ainsi, le non-paiement de ces provisions rend immédiatement exigible toutes les sommes à devoir au syndicat des copropriétaires (les provisions non encore échues visées aux articles 14-1 N° Lexbase : L5468IGM et 14-2 I de la loi de 1965, les sommes restant dues appelées au titre des exercices précédents après approbation des comptes en ce compris les cotisations au fonds de travaux).
En conséquence, l’article 2 du décret du 27 juin 2019 modifie les dispositions de l’article 5 du décret du 17 mars 1967, qui concerne les renseignements que doit communiquer le syndic au notaire dans la deuxième partie de l’état daté en supprimant la référence aux seules provisions du budget prévisionnel. Dorénavant, dans la seconde partie de l’état daté, le syndic indique les sommes dont le syndicat pourrait être débiteur à l’égard du copropriétaire cédant relativement au lot concerné au titre : «b) Des provisions pour les périodes postérieures à la période en cours et rendues exigibles en raison de la déchéance du terme prévue par l'article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965», que ce soient les provisions du budget prévisionnels ou celles non comprises dans ce budget.
II. Assemblée générale : nouvelle obligation d’information des copropriétaires à la charge du syndic (décret du 27 juin 2019, art. 3 et 5 ; décret du 17 mars 1967, art. 9 N° Lexbase : L5600IGI et 10 N° Lexbase : L5496IGN modifiés)
Le décret complète les articles 9 et 10 du décret du 17 mars 1967 :
- L’alinéa 2 de l’article 9 est complété par les dispositions suivantes : «Sans que cette formalité soit prescrite à peine d'irrégularité de la convocation, le syndic indique, par voie d'affichage, aux copropriétaires, la date de la prochaine assemblée générale et la possibilité qui leur est offerte de solliciter l'inscription d'une ou plusieurs questions à l'ordre du jour. L'affichage, qui reproduit les dispositions de l'article 10, est réalisé dans un délai raisonnable permettant aux copropriétaires de faire inscrire leurs questions à l'ordre du jour».
- Il est ajouté un troisième alinéa à l’article 10 : «Le syndic rappelle les dispositions du présent article sur les appels de fonds qu'il adresse aux copropriétaires».
Les copropriétaires, y compris lorsqu’ils sont membres du conseil syndical, ne sont pas toujours informés de la possibilité qui leur est offerte, par l’article 10 du décret du 17 mars 1967, de demander à tout moment au syndic, par voie de notification, d’inscrire une ou plusieurs questions à l’ordre du jour de la prochaine assemblée ainsi que de l’obligation de notifier avec leur demande «le projet de résolution lorsque cette notification est requise en application des 7° et 8° du I de l'article 11 3» et que «lorsque le projet de résolution porte sur l'application du e du II de l'article 24 et du b de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965, il est accompagné d'un document précisant l'implantation et la consistance des travaux».
L’étude d’impact de la loi «ELAN» a rappelé les effets néfastes du désintérêt des copropriétaires pour l’assemblée générale dans la gestion des immeubles collectifs et la loi a apporté un certain nombre de modifications destinées à faciliter la participation des copropriétaires à l’assemblée. Le décret complète le dispositif en obligeant le syndic à informer les copropriétaires de leurs droits, afin de renforcer leur implication même s’ils ne sont pas membres du conseil syndical. Le syndic a ainsi deux nouvelles obligations depuis le 29 juin 2019.
La première est de reproduire les dispositions de l’article 10 dans les avis d’appels de fonds adressés aux copropriétaires et, la nouvelle disposition ne faisant pas de distinction, ce rappel devra être fait tant sur les appels de fonds pour l’exécution du budget prévisionnel, que pour ceux concernant les dépenses non comprises dans ce dernier.
La seconde obligation pour le syndic est d’afficher dans les parties communes de l’immeuble [1], la date de la prochaine assemblée générale ainsi que les dispositions de l’article 10 du décret du 17 mars 1967 précité. L’objectif est, comme l’énonce expressément l’article 9, de permettre aux copropriétaires de faire inscrire leurs questions à l’ordre du jour de l’assemblée générale. Afin que cette demande soit examinée dès la prochaine assemblée générale, il est demandé au syndic de réaliser cet affichage «dans un délai raisonnable». Etant rappelé que le délai de convocation est de vingt et un jours avant la date de la réunion, cette nouvelle obligation impose au syndic de programmer bien en amont la date de l’assemblée avec le conseil syndical afin de laisser le temps aux copropriétaires de faire leur demande avant la convocation de l’assemblée. Dans tous les cas, si, malgré l’affichage, la demande du copropriétaire est trop tardive, il y aura lieu d’appliquer la disposition de l’article 10 qui impose au syndic d’inscrire la question à l’assemblée générale suivante. A cet égard, il faut se féliciter que, dans le but de limiter le contentieux, le rédacteur ait pris soin de préciser que le non-respect de cette formalité n’entraîne pas l’annulation de l’assemblée générale. Seule la responsabilité du syndic pourra être recherchée s’il résulte du défaut d’affichage un préjudice pour un copropriétaire.
III. Précisions relatives à la consultation des pièces justificatives des charges avant l’assemblée générale (décret du 27 juin 2019, art. 4 ; décret du 17 mars 1967, art. 9-1 modifié N° Lexbase : L2589LCU ; cf. l’Ouvrage «Droit de la copropriété», L'obligation de mise à disposition des pièces justificatives des charges de copropriété N° Lexbase : E5630ETP)
Décret 17 mars 1967, art. 9-1 : «Pendant le délai s'écoulant entre la convocation de l'assemblée générale appelée à connaître des comptes et la tenue de celle-ci, le syndic tient les pièces justificatives des charges mentionnées à l'article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965 susvisée, en original ou en copie, et classées par catégories à la disposition de chaque copropriétaire pendant une durée qui ne peut être inférieure à un jour ouvré et doit être, en tout cas, appropriée à la dimension de la copropriété.
Le syndic fixe le lieu de la consultation des pièces justificatives des charges, soit à son siège, soit au lieu où il assure habituellement l'accueil des copropriétaires, le ou les jours et les heures auxquels elle s'effectue, qui doivent être indiqués dans la convocation mentionnée à l'article 9.
Lorsqu'il s'agit d'un syndic professionnel, ces jours et heures doivent être fixés pendant les jours et heures d'accueil physique déterminés dans le contrat de syndic.
Le copropriétaire peut se faire assister par un membre du conseil syndical.
Pendant le délai mentionné au premier alinéa, il peut également se faire assister par son locataire ou autoriser ce dernier à consulter en ses lieu et place les pièces justificatives de charges récupérables mentionnées à l'article 23 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.
Tout copropriétaire peut obtenir une copie des pièces justificatives à ses frais».
L’article 9-1 du décret de 1967 précise les modalités de consultation des pièces justificatives des charges par les copropriétaires, prévue par l’article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965. Le nouveau décret amende et réécrit une partie de l’article 9-1, qui avait déjà été modifié par le décret n° 2015-1907 du 30 décembre 2015 (N° Lexbase : L2467KWB), pour tenir compte des nouvelles dispositions de l’article 18-1 de la loi de 1965 (N° Lexbase : L4814AHR) modifié par la loi «ALUR» du 24 mars 2014.
La nouveauté réside dans le fait que le copropriétaire peut dorénavant se faire assister lors de cette consultation non plus uniquement par un membre du conseil syndical, comme cela était déjà prévu auparavant, mais aussi par son locataire. La mesure est très différente de celle qui avait été proposée par les sénateurs à l’occasion de l’examen de la loi «ELAN» [2] qui prévoyait que le copropriétaire puisse, pour effectuer cette consultation, être représenté par la personne de son choix, qu’elle soit ou non membre du syndicat des copropriétaires. Le Sénat justifiait cette possibilité par cohérence avec le fait que le copropriétaire peut se faire représenter en assemblée générale par toute personne de son choix, or l’amendement avait été supprimé par le Commission mixte paritaire en raison de son caractère règlementaire.
Le nouveau texte ne vise plus à conférer un nouveau droit au copropriétaire pour la vérification des charges, mais ouvre un nouveau droit au profit du locataire. En effet, le texte va plus loin en permettant au copropriétaire, s’il le préfère, d’autoriser son locataire à consulter «en ses lieux et place les pièces justificatives des charges récupérables mentionnées à l'article 23 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986».
Remarquons que le droit de consultation du locataire est, dans ce cas, limité aux seules pièces justificatives des charges récupérables [3] et qu’il ne s’agit pas d’un mandat conféré par le copropriétaire bailleur à son locataire, ce qui implique que, de son côté, le copropriétaire conserve le droit de consulter les pièces justificatives des charges.
Lorsqu’il sera sollicité par un locataire, le syndic devra vérifier que celui-ci soit en mesure de justifier qu’il a reçu l’autorisation de son bailleur. Par ailleurs, à la différence du droit reconnu au copropriétaire, le dernier alinéa de l’article 9-1 ne prévoit pas que le locataire puisse obtenir copie des pièces justificatives à ses frais.
Au final, ce sont effectivement des précisions nouvelles qui sont apportées à l’article 9-1 sans que les modalités de consultation des pièces justificatives des charges par les copropriétaires n’aient changé. On peut regretter que le décret n’ait pas saisi l’opportunité de prévoir, comme pour les documents à annexer à la convocation de l’assemblée générale (V. infra, décret du 17 mars 1967, art. 64-5 nouveau) que, lorsque la copropriété est gérée par un syndic professionnel, les pièces justificatives des charges soient mises à la disposition de chaque copropriétaire sur un espace réservé du site sécurisé en ligne que doit leur proposer le syndic pour une durée allant de la convocation à l’assemblée générale au lendemain de l’expiration du délai de recours prévu à l’article 42, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L2467KWB).
IV. Modalités de remise par le syndic des mandats de vote sans indication du nom du mandataire - Indication des modalités de remise sur le procès-verbal de l’assemblée générale (décret du 27 juin 2019, art. 8 et 9 ; décret du 17 mars 1967, art. 15-1 N° Lexbase : L1277LRQ et 17, alinéa 2 N° Lexbase : L5503IGW, nouveaux ; cf. l’Ouvrage «Droit de la copropriété», Les personnes pouvant être désignées mandataire N° Lexbase : E6747ET3)
Décret du 17 mars 1967, art. 15-1 nouveau : «Le syndic qui reçoit, en application du troisième alinéa du I de l'article 22 de la loi du 10 juillet 1965, un mandat avec délégation de vote sans indication du nom du mandataire, remet ce mandat en début de réunion au président du conseil syndical afin qu'il désigne un mandataire pour exercer cette délégation de vote. En l'absence du président du conseil syndical ou à défaut de conseil syndical, le syndic remet aux mêmes fins ce mandat au président de séance désigné par l'assemblée générale».
Décret du 17 mars 1967, art. 17, alinéa 2, nouveau : «Le procès-verbal précise, le cas échéant, si les mandats de vote ont été distribués par le président du conseil syndical ou par le président de séance dans les conditions prévues à l'article 15-1».
L’article 211 de la loi «ELAN» du 23 novembre 2018 a modifié le paragraphe I de l’article 22 de la loi du 10 juillet 1965 en permettant, comme cela était déjà le cas en pratique, que le syndic puisse recevoir des délégations de vote sans indication de mandataire mais sans qu’il puisse ni les conserver pour voter en son nom, ni les distribuer lui-même au mandataire de son choix. Le nouvel article 15-1 du décret de 1967 détermine les modalités de remise de ces mandats, que la pratique appelle mandats en blanc, par le syndic. Il doit, en premier lieu, les remettre en début de réunion au président du conseil syndical qui sera chargé de désigner les mandataires. Si le président du conseil syndical n’assiste pas à la réunion ou si la copropriété n’est pas dotée d’un conseil syndical [4], le syndic remettra ces mandats au président de l’assemblée une fois que celui-ci aura été désigné. Il n’est donc plus possible de laisser, en début de réunion, les copropriétaires se répartir librement les procurations.
Afin d’apporter la preuve du respect des dispositions de l’article 15-1 précité, le décret du 27 juin 2019 modifie l’article 17 du décret de 1967 relatif au procès-verbal de l’assemblée générale qui devra désormais préciser «le cas échant, si les mandats de vote ont été distribués par le président du conseil syndical ou par le président de séance dans les conditions prévues à l’article 15-1».
V. Les modalités de mise en œuvre de la dématérialisation de l’assemblée générale
Afin de lutter contre l’absentéisme aux assemblées générales, la loi du 23 novembre 2018 a permis que les copropriétaires participent à l’assemblée «par présence physique, par visioconférence ou par tout autre moyen de communication électronique permettant leur identification» en renvoyant à un décret en Conseil d’Etat pour définir les conditions d’identification des copropriétaires usant de ces moyens de communication électronique (V. loi du 10 juillet 1965, art. 17-1 A nouveau N° Lexbase : L6780LNG) [5]. Ces conditions sont définies par le décret du 27 juin 2019 qui insère deux nouveaux articles au décret du 17 mars 1967 (art. 13-1 et 13-2), précise les mentions de la feuille présence (art. 14) ainsi que celles du procès-verbal de l’assemblée générale (art. 17).
En revanche, le décret du 27 juin 2019 ne précise pas les modalités de mise en œuvre du vote par correspondance, également prévu par l’alinéa 2 de l’article 17-1 A de la loi de 1965, qui reste donc pour l’instant lettre morte faute de précision relative au formulaire. Il est possible que, compte tenu de la rédaction ambiguë de l’article [6] dénoncée par la doctrine, le Gouvernement profite de l’ordonnance à venir pour modifier la disposition actuelle résultant de la loi «ELAN» dont l’entrée en vigueur serait alors reportée en 2020.
A. Modalités de participation des copropriétaires à l’assemblée générale (décret du 27 juin 2019, art. 6 ; décret du 17 mars 1967, art. 13-1 N° Lexbase : L1276LRP et 13-2 N° Lexbase : L1278LRR nouveaux ; cf. l’Ouvrage «Droit de la copropriété», Les modalités de vote en assemblée générale N° Lexbase : E6449YUE)
Décret 17 mars 1967, art. 13-1 nouveau: «Pour l'application de l'article 17-1 A de la loi du 10 juillet 1965, l'assemblée générale décide des moyens et supports techniques permettant aux copropriétaires de participer aux assemblées générales par visioconférence, par audioconférence ou par tout autre moyen de communication électronique ainsi que des garanties permettant de s'assurer de l'identité de chaque participant. La décision est prise sur la base de devis élaborés à cet effet à l'initiative du syndic ou du conseil syndical. Le syndicat des copropriétaires en supporte les coûts.
Pour garantir la participation effective des copropriétaires, ces supports doivent, au moins, transmettre leur voix et permettre la retransmission continue et simultanée des délibérations».
Art. 13-2 nouveau décret 17 mars 1967 : «Le copropriétaire qui souhaite participer à l'assemblée générale par visioconférence, par audioconférence ou par tout autre moyen de communication électronique en informe par tout moyen le syndic trois jours francs au plus tard avant la réunion de l'assemblée générale».
Les nouvelles modalités de participation à l’assemblée générale sont directement inspirées du droit des sociétés mais pour être transposables dans le domaine de la copropriété et notamment les copropriétés d’habitation, le syndic et les copropriétaires doivent pouvoir disposer des équipements permettant leur mise en œuvre. C’est la raison pour laquelle la participation des copropriétaires à l’assemblée générale à distance est soumise à l’accord préalable de l’assemblée générale, qui doit décider : «des moyens et supports techniques permettant aux copropriétaires de participer aux assemblées générales par visioconférence, par audioconférence ou par tout autre moyen de communication électronique ainsi que des garanties permettant de s'assurer de l'identité de chaque participant» (V. décret 1967, art. 13-1). Le texte précise que, pour garantir la participation effective des copropriétaires, ces supports doivent, au moins, transmettre leur voix et permettre la retransmission continue et simultanée des délibérations ; c’est la raison pour laquelle l’article 13-1 nouveau cite «l’audioconférence» qui n’est pas visée par l’article 17-1 A de la loi de 1965.
En l’absence de renvoi à une majorité qualifiée, la décision de l’assemblée générale est prise à la majorité de l’article 24 de la loi de 1965 (N° Lexbase : L4824AH7), sur la base de devis élaborés à l’initiative du syndic ou du conseil syndical. On peut s’étonner de cette proposition alternative, se demander s’il s’agit véritablement d’une obligation pour le syndic et s'interroger sur les sanctions qui pourraient en résulter s’il omettait de faire délibérer l’assemblée générale sur la question. Dans tous les cas, le nouveau texte précise que c’est le syndicat des copropriétaires qui en supporte les coûts. Ces dispositions, qui laissent à la collectivité des copropriétaires le choix et la charge de recourir à ces nouvelles modalités de participation en assemblée générale, ne sont pas de nature à faciliter leur mise en œuvre effective, car peu de syndicats accepteront de faire un tel investissement pour quelques copropriétaires défaillants. La mesure pourrait, en revanche, trouver plus facilement à s’appliquer dans les copropriétés de bureaux ou centres commerciaux détenus par des investisseurs.
Dès lors que l’assemblée générale aura décidé des moyens et support techniques pour assurer la participation des copropriétaires aux assemblées générales à distance et accepté le devis d’un prestataire, le copropriétaire qui souhaite participer à l’assemblée par voie dématérialisée doit en informer le syndic, par tout moyen, au plus tard trois jours francs avant la réunion de l’assemblée générale (V. décret 1967, art. 13-2). Cette disposition appelle deux remarques.
La première est que, comme le laisse entendre l’article 14 modifié (N° Lexbase : L5500IGS) du décret de 1967 relatif à la feuille de présence (V. infra), le copropriétaire qui a informé le syndic vouloir participer à l’assemblée générale par voie dématérialisée pourra, comme tout copropriétaire, désigner un mandataire (V. loi de 1965, art. 22 I N° Lexbase : L4822AH3) et c’est alors le mandataire qui devra être équipé pour participer à l’assemblée par visioconférence, par audioconférence ou par tout autre moyen de communication électronique.
La deuxième concerne le délai de prévenance de trois jours francs avant la réunion. Ce délai risque d’être insuffisant pour la mise en œuvre effective des moyens permettant cette participation. Cela sous-entend que le syndic ait prévu, dans tous les cas, que la réunion se fasse dans un endroit permettant l’utilisation de ces équipements car il ne saurait être question de modifier le lieu de la réunion indiqué dans la convocation adressée aux copropriétaires au moins vingt et un jours avant la date de la réunion [7]. Quelle serait la sanction si le syndic privait, pour des impératifs techniques, le copropriétaire de son droit de participer à distance à l’assemblée générale ?
B. Mentions de la feuille de présence (décret du 27 juin 2019, art. 7 ; décret du 17 mars 1967, art. 14 modifié N° Lexbase : L5500IGS ; cf. l’Ouvrage «Droit de la copropriété», La feuille de présence N° Lexbase : E6340ETY)
Décret du 17 mars 1967, art. 14 modifié : «Il est tenu une feuille de présence, pouvant comporter plusieurs feuillets, qui indique les nom et domicile de chaque copropriétaire ou associé :
- présent physiquement ou représenté ;
- participant à l'assemblée générale par visioconférence, par audioconférence ou par un autre moyen de communication électronique.
Dans le cas où le copropriétaire ou l'associé est représenté, la feuille de présence mentionne les nom et domicile du mandataire désigné et précise le cas échéant si ce dernier participe par visioconférence, par audioconférence ou par un autre moyen de communication électronique.
Cette feuille indique pour chaque copropriétaire le nombre de voix dont il dispose, le cas échéant en faisant application des dispositions des alinéas 2 et 3 du I de l'article 22 et du III de l'article 24 de la loi du 10 juillet 1965.
Elle est émargée par chaque copropriétaire ou associé présent physiquement, ou par son mandataire. L'émargement n'est pas requis pour les participants à l'assemblée par visioconférence, par audioconférence ou par un moyen électronique de communication.
Elle est certifiée exacte par le président de séance désigné par l'assemblée générale.
Elle peut être tenue sous forme électronique dans les conditions définies par les articles 1366 et 1367 du Code civil».
L’article 14 du décret de 1967 relatif à la feuille de présence est réécrit pour tenir compte de la mise en œuvre des nouveaux moyens de participation à l’assemblée générale. Elle doit désormais indiquer si un copropriétaire ou son mandataire participe à l’assemblée générale par visioconférence, par audioconférence ou par un autre moyen de communication électronique.
La feuille de présence est émargée par les seuls copropriétaires ou associés présents physiquement ou par leurs mandataires mais pas par les participants à l’assemblée par visioconférence, par audioconférence ou par un autre moyen de communication électronique.
Le texte reprend la disposition antérieure selon laquelle la feuille est «certifiée exacte par le président de séance désigné par l'assemblée générale».
En revanche, l’article 14 ne mentionne plus que «la feuille de présence constitue une annexe du procès-verbal avec lequel elle est conservée». La précision est dorénavant prévue dans l’article 17 modifié du décret de 1967 relatif à l’établissement du procès-verbal de l’assemblée générale.
C. Mentions du procès-verbal (décret du 27 juin 2019, art. 9 ; décret du 17 mars 1967, art. 17 modifié N° Lexbase : L5503IGW ; cf. l’Ouvrage «Droit de la copropriété», Le contenu du procès-verbal des décisions de l'assemblée générale N° Lexbase : E7043ETZ)
Décret du 17 mars 1967, art. 17 modifié : «Il est établi un procès-verbal des décisions de chaque assemblée qui est signé, à la fin de la séance, par le président, par le secrétaire et par le ou les scrutateurs.
Le procès-verbal précise, le cas échéant, si les mandats de vote ont été distribués par le président du conseil syndical ou par le président de séance dans les conditions prévues à l'article 15-1.
Le procès-verbal comporte, sous l'intitulé de chaque question inscrite à l'ordre du jour, le résultat du vote. Il précise les noms des copropriétaires ou associés qui se sont opposés à la décision et leur nombre de voix, ainsi que les noms des copropriétaires ou associés qui se sont abstenus et leur nombre de voix.
Le procès-verbal mentionne les réserves éventuellement formulées par les copropriétaires ou associés opposants sur la régularité des décisions.
Les incidents techniques ayant empêché le copropriétaire ou l'associé qui a eu recours à la visioconférence, à l'audioconférence ou à tout autre moyen de communication électronique de faire connaître son vote sont mentionnés dans le procès-verbal.
La feuille de présence est annexée au procès-verbal.
Les procès-verbaux des assemblées générales sont inscrits, à la suite les uns des autres, sur un registre spécialement ouvert à cet effet.
Ce registre peut être tenu sous forme électronique dans les conditions définies par l'article 1366 du code civil. Dans ce cas, la feuille de présence et les procès-verbaux peuvent être établis sous forme électronique et sont signés dans les conditions prévues au second alinéa de l'article 1367 du Code civil».
L’article 17 du décret de 1967 relatif au procès-verbal de l’assemblée générale est modifié pour tenir compte des nouvelles dispositions du décret relatives à la tenue de l’assemblée générale.
Le procès-verbal doit attester du bon déroulement de la réunion et du respect des nouvelles dispositions et, pour ce faire, contenir de nouvelles mentions :
Les autres mentions du procès-verbal n’ont pas été modifiées. Toutefois, le nouveau texte indique que «la feuille de présence est annexée au procès-verbal» ce qui sous-entend qu’elle est conservée avec lui. La question se pose, cependant, de savoir si la migration de cette précision de l’article 14 vers l’article 17 implique que la feuille de présence soit notifiée en même temps que le procès-verbal en application de l’article 42, alinéa 2, de la loi de 1965.
Enfin, le décret du 27 juin 2019 met l’article 17 en cohérence avec les nouvelles dispositions du Code civil résultant de la réforme du droit des contrats, du régime et de la preuve des obligations par l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 (N° Lexbase : L4857KYK). Le texte fait désormais référence aux articles 1366 (N° Lexbase : L1034KZC) et 1367 (N° Lexbase : L1033KZB) du Code civil qui ont remplacé les anciens articles 1316-4 et 1316-1.
VI. Dématérialisation des échanges au sein de la copropriété
Outre les nouvelles modalités de participation à l’assemblée générale, le droit de la copropriété continue, par touches successives, à recourir aux nouvelles technologies et le décret du 27 juin 2019 contient des dispositions nouvelles en vue de faciliter la communication entre le syndic et les copropriétaires en dématérialisant les échanges. Trois modifications importantes affectent le décret du 17 mars 1967.
A. L’envoi des avis d’appel de fonds par message électronique (décret du 27 juin 2019, art. 11 ; décret du 17 mars 1967, art. 35-2 modifié N° Lexbase : L5529IGU ; cf. l’Ouvrage «Droit de la copropriété», L'obligation de régler les provisions sur charges N° Lexbase : E8181ET8)
Décret du 17 mars 1967, art. 35-2 modifié : «Pour l'exécution du budget prévisionnel, le syndic adresse à chaque copropriétaire, préalablement à la date d'exigibilité déterminée par la loi, un avis indiquant le montant de la provision exigible.
Pour les dépenses non comprises dans le budget prévisionnel, le syndic adresse à chaque copropriétaire, préalablement à la date d'exigibilité déterminée par la décision d'assemblée générale, un avis indiquant le montant de la somme exigible et l'objet de la dépense.
Les avis mentionnés aux deux premiers alinéas (avis concernant les provisions pour l’exécution du budget prévisionnel et avis pour les dépenses non comprises dans ce budget) sont adressés par lettre simple ou, sous réserve de l'accord exprès du copropriétaire, par message électronique à l'adresse déclarée par lui à cet effet».
L’article 35-2 du décret oblige le syndic à adresser à chaque copropriétaire, préalablement à la date d’exigibilité, un avis indiquant le montant de la provision exigible pour l’exécution du budget prévisionnel, mais aussi pour ce qui concerne les dépenses non comprises dans ce budget. Jusqu’alors, ces avis devaient être adressés aux copropriétaires «par lettre simple». Dorénavant, ils pourront l’être également «par message électronique». Le décret consacre une pratique déjà expérimentée dans de nombreux syndicats ; toutefois, le texte conditionne cette forme de communication à «l’accord exprès du copropriétaire» qui doit déclarer son adresse électronique au syndic sans préciser sous quelle forme cet accord doit être donné [8]. Il aurait été certainement plus simple de faire de cette nouvelle forme de communication une règle de principe applicable, dès lors que le copropriétaire accepte de communiquer une adresse électronique au syndic en permettant au copropriétaire de demander expressément au syndic de maintenir l’envoi par lettre simple.
B. La mise à disposition des documents mentionnés à l’article 11 sur l’espace en ligne sécurisé dans les copropriétés gérées par un syndic professionnel (décret du 27 juin 2019, art. 13 ; décret du 17 mars 1967, art. 64-5 nouveau N° Lexbase : L1281LRU ; cf. l’Ouvrage «Droit de la copropriété», La mise à disposition des documents dématérialisés relatifs à la gestion de l'immeuble N° Lexbase : E4663E7T et Les documents à notifier et les sanctions de l'absence de notification N° Lexbase : E7033ETN)
Décret du 17 mars 1967, art. 64-5 nouveau : «Lorsque la copropriété est dotée d'un espace en ligne sécurisé, la notification des documents mentionnés à l'article 11 peut, sous réserve de l'accord exprès du copropriétaire, valablement résulter d'une mise à disposition dans un espace du site dont l'accès est réservé aux copropriétaires. La convocation mentionnée à l'article 9 précise expressément que ces documents sont accessibles en ligne et la durée de la mise à disposition».
L’article 11 du décret du 17 mars 1967 (N° Lexbase : L5497IGP) prescrit de notifier en même temps que la convocation à l’assemblée générale «pour la validité de la décision» toute une série de documents qui varient en fonction de la délibération figurant à l’ordre du jour. Dans la mesure où le syndic professionnel est tenu, depuis le 1er janvier 2015, de proposer un accès en ligne sécurisé aux documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble ou des lots gérés, l’Union des syndicats de l’immobilier, proposait que les documents à joindre à la convocation de l’assemblée générale soient accessibles en ligne sur cet espace sécurisé pour tous les copropriétaires, dès l’envoi de la convocation qui ferait mention de leurs modalités de consultation.
La proposition est reprise à minima dans le nouvel article 64-5 du décret du 17 mars 1967 disposant habilement que, lorsque la copropriété est dotée d’un espace en ligne sécurisé, la notification des documents mentionnés à l’article 11 peut valablement résulter de leur mise à disposition sur un espace du site dont l’accès est réservé aux copropriétaires. Rappelons, à cet effet, que le nouvel article 33-1-1 du décret de 1967 (N° Lexbase : L1279LRS) précise les modalités d’accès à cet espace (V. infra) qui se fera au moyen d’un code personnel sécurisé garantissant la fiabilité de l’identification des copropriétaires.
La mesure doit être saluée, car elle est incontestablement de nature à faciliter la convocation des assemblées générales et en limiter les coûts pour le syndicat. Toutefois, elle reste d’application limitée car, d’une part, elle ne trouvera essentiellement à s’appliquer que dans les syndicats gérés par un syndic professionnel puisque, eux seuls, ont l’obligation de proposer aux copropriétaires un accès en ligne sécurisé aux documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble [9]. D’autre part, elle est soumise à «l’accord exprès du copropriétaire». Cet accord doit être donné par chaque copropriétaire dans les formes prévues à l’article 64-1 du décret de 1967 qui a été modifié par le décret du 27 juin 2019 (V. Infra). Ainsi, l’assemblée générale ne peut pas voter une résolution collective s’appliquant à l’ensemble des copropriétaires. Le syndic doit donc distinguer les copropriétaires qui n’ont pas donné leur accord exprès dans les formes prévues et auquel il convient de continuer à notifier les documents concernés en même temps et selon les mêmes modalités que la convocation à l’assemblée générale et les autres qui auront accès à ces documents en ligne. A cet égard, l’article 64-5 impose que la convocation à l’assemblée générale indique que les documents sont accessibles en ligne et précise la durée de mise à disposition ; or, le texte ne fixe par la durée, qui est donc laissée à l’appréciation du syndic. Nous pouvons raisonnablement penser que l’accès doit, a minima, être possible du jour de la date d’envoi des convocations jusqu’au lendemain de la date d’expiration du délai de recours prévu à l’article 42, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965, afin de permettre aux copropriétaires opposants et défaillants de disposer de tous les éléments nécessaires à l’exercice d’un éventuel recours.
C. Les notifications et mises en demeure par voie électronique (décret du 27 juin 2019, art. 13 ; décret du 17 mars 1967, art. 64-1 N° Lexbase : Z56364NT et 64-2 N° Lexbase : L3386LBZ modifiés)
Décret 17 mars 1967, art. 64-1 modifié : «L'accord exprès du copropriétaire mentionné à l'article 42-1 de la loi du 10 juillet 1965 précise s'il porte sur les notifications, les mises en demeure ou les deux. Cet accord exprès peut ne porter que sur les modalités particulières de notification mentionnées à l'article 64-5.
Lorsqu'il est formulé lors de l'assemblée générale, cet accord est mentionné sur le procès-verbal d'assemblée générale. Il peut également être adressé à tout moment au syndic par tout moyen conférant date certaine.»
Décret 17 mars 1967, art. 64-2 modifié : «Le copropriétaire peut à tout moment retirer son accord exprès selon les mêmes formes que celles prévues à l'article 64-1. Si cette décision est formulée lors de l'assemblée générale, le syndic en fait mention sur le procès-verbal.
Cette décision prend effet le lendemain du huitième jour suivant la réception par le syndic de l'information adressée selon les modalités mentionnées au deuxième alinéa de l'article 64-1».
Il résulte de l’article 42-1 (N° Lexbase : L3649I4W) inséré dans la loi du 10 juillet 1965 par la loi «ALUR» du 24 mars 2014 que «Les notifications et mises en demeure, sous réserve de l’accord exprès des copropriétaires, sont valablement faites par voie électronique». Les modalités d’application de ce texte ont été précisées par le décret n° 2015-1325 du 21 octobre 2015 (N° Lexbase : L7318KMY) qui a ajouté quatre nouveaux articles au décret de 1967 (art. 64-1 à 64-4). Le décret du 27 juin 2019 modifie les articles 64-1 et 64-2 du décret de 1967.
A l’instar des dispositions de l’article L. 100 du Code des postes et des communications électroniques (N° Lexbase : L4899LAP) à propos de l’envoi recommandé électronique, lorsque le destinataire n’est pas un professionnel, l’article 42-1 de la loi du 10 juillet 1965 conditionne l’envoi des notifications et mises en demeure par voie électronique à l’accord exprès des copropriétaires.
Dans sa nouvelle rédaction, l’article 64-1 précise l’objet de l’accord du copropriétaire ainsi que les formes dans lesquelles cet accord peut être donné.
L’article 64 du décret de 1967 (N° Lexbase : L5594IGB) prévoit, de façon générale, que toutes les notifications et mises en demeure prévues par la loi du 10 juillet 1965 et le décret du 17 mars 1967 sont valablement faites par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par voie électronique
L’article 64-1 offre dorénavant au copropriétaire la possibilité de cantonner son accord pour la voie électronique aux seules notifications (telle la convocation à l’assemblée générale ou l’envoi du procès-verbal aux copropriétaires opposants et défaillants) ou aux seules mises en demeure (telle la mise en demeure préalable à l’inscription d’une hypothèque sur le lot d’un copropriétaire débiteur). Cette modification vient du fait que l’article 64-1, dans sa rédaction initiale, n’évoquait pas la distinction opérée par l’article 42-1 de la loi entre les notifications et les mises en demeures, et les commentateurs s’interrogeaient sur la question de savoir si l’accord visait obligatoirement l’ensemble des notifications et mises en demeures, ou seulement l’une des deux catégories [10]. Or, il n’est pas certain que les copropriétaires soient tous sensibles à une telle distinction ce qui obligera le syndic à faire preuve de pédagogie et veiller à ce que les mentions de l’accord soient claires et précises quant à leur objet pour éviter tout risque d’irrégularité.
Le texte prévoit, en outre, que l’accord du copropriétaire peut ne porter que sur les nouvelles modalités de notifications des documents mentionnées à l’article 11 du décret de 1967 qui seront alors mis à disposition du copropriétaire sur un espace sécurisé du site proposé au syndicat par les syndics professionnels (V. supra).
Comme auparavant, l’accord du copropriétaire peut être donné au cours de l’assemblée générale et il sera alors mentionné sur le procès-verbal.
Il peut être également donné en dehors de l’assemblée générale mais, sur ce point, le texte a été modifié. Dans sa rédaction antérieure, il était prévu que l’accord devait être communiqué «par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par lettre recommandée électronique au syndic qui l’enregistre à la date de réception de la lettre et l’inscrit sur le registre mentionné à l’article 17 (N° Lexbase : L5503IGW registre des procès-verbaux d’assemblée générale)». Aujourd’hui, ces précisions ont été supprimées et le texte prévoit de façon laconique que l’accord «peut également être adressé à tout moment au syndic par tout moyen conférant date certaine».
Si l’on comprend le souci du rédacteur du décret de simplifier les modalités de remise (et de retrait) de l’accord du copropriétaire [11], il n’est pas certain que l’expression «tout moyen conférant date certaine» réponde à cet objectif. La possibilité de donner son accord par tout moyen semble laisser une grande latitude au copropriétaire et permettre que l’accord soit adressé au syndic par simple message électronique, mais la référence à un moyen «conférant date certaine» interpelle car l’article 1377 du Code civil (N° Lexbase : L1023KZW) ne vise que trois moyens susceptibles de conférer date certaine à un acte sous-seing privé : «L'acte sous signature privée n'acquiert date certaine à l'égard des tiers que du jour où il a été enregistré, du jour de la mort d'un signataire, ou du jour où sa substance est constatée dans un acte authentique». Il faudra certainement faire prévaloir l’esprit du texte sur la lettre, mais les conditions dans lesquelles seront données l’accord auront des conséquences sur la régularité des notifications et mises en demeure. Pour l’instant, dans le but de limiter le contentieux, il est préférable de conseiller aux syndics de demander aux copropriétaires de manifester leur accord, soit au cours de l’assemblée générale, soit au minimum par lettre recommandée avec accusé de réception. Remarquons, par ailleurs, qu’il n’est plus nécessaire que l’accord donné en dehors de l’assemblée générale soit inscrit par le syndic sur le registre des procès-verbaux.
Pour respecter le parallélisme des formes, l’article 64-2 du décret de 1967 qui concerne le retrait de son accord par le copropriétaire est réécrit. Il doit être dorénavant formulé selon les formes prévues par l’article 64-1 précité soit lors de l’assemblée générale soit à tout moment.
Faute de précision dans la nouvelle formulation du texte, on peut raisonnablement penser que le texte s’applique non seulement pour les notifications et les mises en demeures mais aussi pour les modalités particulières de notifications des documents joints à la convocation d’assemblée générales mentionnées à l’article 64-5 nouveau du décret de 1967. Le syndic devra veiller à ce que l’objet du retrait soit clairement énoncé par le copropriétaire.
Enfin, le texte précise que le retrait prend effet le lendemain du huitième jour suivant la réception par le syndic de l’information qui lui est adressée selon les modalités prévues à l’article 64-1 alors qu’auparavant la décision prenait effet le lendemain du jour de la réception de la lettre recommandée par le syndic. Il n’est plus nécessaire que le syndic fasse mention du retrait de l’accord sur le registre des procès-verbaux, lorsque ce retrait est donné en dehors de l’assemblée générale.
VII. Conditions d’accès des copropriétaires et des membres du conseil syndical à l’espace en ligne sécurisé mis à disposition par le syndic professionnel et fréquence de la mise à jour des documents figurant sur cet espace (décret du 27 juin 2019, art. 10 ; décret du 17 mars 1967, art. 33-1-1 nouveau N° Lexbase : L1279LRS ; cf. l’Ouvrage «Droit de la copropriété», La mise à disposition des documents dématérialisés relatifs à la gestion de l'immeuble N° Lexbase : E4663E7T)
Décret du 17 mars 1967, art. 33-1-1 nouveau : «L'espace en ligne sécurisé mentionné au dernier alinéa du I de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 est accessible aux membres du conseil syndical et aux copropriétaires au moyen d'un code personnel sécurisé garantissant la fiabilité de l'identification des copropriétaires. Les documents mis à disposition par le syndic dans cet espace sont téléchargeables et imprimables.
L'ensemble des documents relatifs à la gestion de l'immeuble et des lots gérés mis à disposition dans cet espace, dont la liste minimale est définie par décret sont, le cas échéant, actualisés au minimum une fois par an par le syndic, dans les trois mois précédant l'assemblée générale annuelle».
La loi «ALUR» du 24 mars 2014 a imposé au syndic professionnel de proposer, à compter du 1er janvier 2015, un accès en ligne sécurisé aux documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble sauf décision contraire de l’assemblée générale prise à la majorité de l’article 25 de la loi de 1965. Le décret n° 2019-502 du 23 mai 2019 (N° Lexbase : L3492LQE) dresse la liste minimale des documents dématérialisés accessibles sur un espace sécurisé en ligne étant précisé que l’accès est différencié selon la nature des documents dont certains sont accessibles à l’ensemble des copropriétaires, d’autres aux seuls membres du conseil syndical et enfin, ceux relatifs au lot d’un copropriétaire, mis à sa seule disposition.
Le nouvel article 33-1-1 intégré au décret du 17 mars 1967 précise que l’espace en ligne sécurisé est accessible aux copropriétaires et aux membres du conseil syndical au moyen d’un code personnel sécurisé pour garantir l’identification de la personne qui se connecte. Il est par ailleurs précisé que les documents seront téléchargeables et imprimables.
Le syndic devra, actualiser les documents au minimum une fois par an dans les trois mois avant la tenue de l’assemblée générale annuelle destinée notamment à approuver les comptes du syndicat des copropriétaires. S’il s’agit d’un minimum pour le syndic qui peut actualiser les documents dès lors qu’il le juge nécessaire, on peut s’interroger sur la pertinence de la période d’actualisation minimale prévue «dans les trois mois précédent l’assemblée générale annuelle». Non seulement elle ne coïncide pas avec celle imposée pour l’actualisation annuelle des informations inscrites au registre national d’immatriculation des copropriétés qui doit, en application de l’article R. 711-10 du Code de la construction et de l’habitation (N° Lexbase : L9845K9I), être faite par le syndic ou l’administrateur provisoire «dans un délai de deux mois suivant la tenue de l'assemblée générale au cours de laquelle les compte de l'exercice clos ont été approuvés», mais elle n’est pas non plus en cohérence avec les dispositions du décret du 23 mai 2019 précité relatif à la liste des documents dématérialisés et, notamment, ceux à mettre à la disposition de chaque copropriétaire.
VIII. Précisions sur l’absence d’habilitation du syndic à agir en justice (décret du 27 juin 2019, art. 12 ; décret du 17 mars 1967, art. 55 modifié N° Lexbase : L5562IG4 ; cf. l’Ouvrage «Droit de la copropriété», Le défaut d’autorisation N° Lexbase : E8080ETG)
Décret du 17 mars 1967, art. 55 modifié : «Le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale.
Seuls les copropriétaires peuvent se prévaloir de l'absence d'autorisation du syndic à agir en justice.
Une telle autorisation n'est pas nécessaire pour les actions en recouvrement de créance, la mise en œuvre des voies d'exécution forcée à l'exception de la saisie en vue de la vente d'un lot, les mesures conservatoires, l'opposition aux travaux permettant la recharge normale des véhicules électriques prévue à l'article R. 136-2 du Code de la construction et de l'habitation et les demandes qui relèvent des pouvoirs de juge des référés, ainsi que pour défendre aux actions intentées contre le syndicat. Elle n'est pas non plus nécessaire lorsque le président du tribunal de grande instance est saisi en application des premiers alinéas des articles 29-1A et 29-1 de la loi du 10 juillet 1965 ou du premier alinéa de l'article L. 615-6 du Code de la construction et de l'habitation.
Dans tous les cas, le syndic rend compte à la prochaine assemblée générale des actions introduites.»
L’article 55 du décret de 1967 prévoit que l’autorisation préalable de l’assemblée générale est nécessaire chaque fois que le syndic doit agir en justice. Cette autorisation est donnée à la majorité de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4824AH7) et conditionne la recevabilité de l’action.
Jusqu’alors, la Cour de cassation reconnaissait aux tiers le droit d’invoquer l’irrecevabilité de la demande en l’absence de toute autorisation préalable de l’assemblée générale [12]. Cette faculté leur est désormais refusée et n’est reconnue qu’aux seuls copropriétaires.
Par ailleurs, la liste des actions que le syndic peut intenter sans autorisation préalable de l’assemblée générale s’étend à «l'opposition aux travaux permettant la recharge normale des véhicules électriques prévue à l'article R. 136-2 du Code de la construction et de l'habitation». L’article R. 136-2 du Code de la construction et de l’habitation (N° Lexbase : L8190LQE) concerne le droit reconnu au locataire ou à l’occupant de bonne foi d’un logement situé dans un bâtiment comprenant un parc de stationnement bâti clos et couvert de demander à procéder aux travaux permettant la recharge normale des véhicules électriques ou hybrides. Dans le cas d’un immeuble en copropriété, la demande, accompagnée d’une description détaillée des travaux, d’un plan ou d’un schéma, est notifiée au copropriétaire avec copie au syndic. Le copropriétaire dispose d’un délai de trois mois pour notifier au syndic sa demande d’inscrire la question à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale. Mais le texte prévoit que le propriétaire ou, le cas échéant, le syndicat des copropriétaires représenté par le syndic qui entend s’opposer à ces travaux «doit, à peine de forclusion, saisir le tribunal d’instance du lieu de l’immeuble dans le délai de six mois suivant réception de la demande». En application de l’article 55 du décret de 1967, le syndic n’aura plus à solliciter l’autorisation préalable de l’assemblée générale pour engager cette action.
IX. Dispositions relatives à l’accès aux parties communes des huissiers de justice pour l’exercice de leurs missions de signification et d’exécution (décret du 27 juin 2019, art. 14 ; CCH, art. R. 111-17-1 N° Lexbase : L9167LQL, R. 111-17-2 N° Lexbase : L9168LQM, R. 111-17-3 N° Lexbase : L9169LQN nouveaux ; cf. également Marien Malet, L’accès aux parties communes des immeubles par les huissiers de justice et leurs clercs, Lexbase, éd. priv., n° 789, 2019 N° Lexbase : N9689BX7)
L’obligation, pour le syndicat des copropriétaires, représenté par le syndic, de permettre, aux huissiers de justice d'accéder, pour l'accomplissement de leurs missions de signification ou d'exécution, aux parties communes des immeubles d'habitation existe depuis la loi n° 2010-1609 du 22 décembre 2010 (CCH, art. L. 111-6-6 N° Lexbase : L9772INA) mais elle est restée jusqu’à présent lettre morte faute de précisions sur ses modalités d’application [13]. Ces modalités viennent, enfin, d’être définies à l’article 14 du décret du 27 juin 2019 qui ajoute trois nouveaux articles au CCH.
L’article R. 111-17-1 prévoit que lorsque les parties communes d’un immeuble d’habitation ne sont pas accessibles librement depuis la voie publique, l’huissier ou le clerc assermenté, adresse par tout moyen une demande d’accès au syndic représentant du syndicat des copropriétaires concerné. Dans la demande, il doit justifier de son identité, de sa qualité professionnelle ainsi que de la mission de signification ou d’exécution qui lui a été confié.
En application de l’article R. 111-17-2 le syndic doit remettre à l’huissier, ou au clerc assermenté, un moyen matériel d’accès au parties communes (clés, badge, Vigik…) ou lui adresser les codes lui permettant d’y accéder pour l’accomplissement de sa mission. La remise doit intervenir dans un délai maximal de cinq jours ouvrables à compter de la réception de la demande, contre récépissé ou par tout autre moyen propre à établir la preuve de la remise ou de la transmission et la date à laquelle celle-ci a eu lieu. En revanche, l’article R. 111-17-3 impose à l’huissier ou au clerc assermenté, après accomplissement de sa mission, de restituer au syndic le matériel d’accès au parties communes «sans délai» et contre récépissé.
Ces nouvelles dispositions seront certainement bien accueillies par les huissiers de justice qui notent toutefois que le nouveau texte ne règle pas la problématique qu’ils rencontrent relativement à l’identité du syndic de copropriété de l’immeuble dans lequel ils doivent exécuter leur mission dans la mesure où ils n’ont pas accès au registre national d’immatriculation et ne prévoit pas de sanction particulière à l’encontre du syndic qui ne répondrait pas à leur demande.
[1] Remarquons que le décret n° 2015-1681 du 15 décembre 2015, définissant les modalités d’information des occupants de l’immeuble des décisions prises par l’assemblée générale prévue par l’article 18 I de la loi de 1965 modifié par la loi ALUR du 24 mars 2014 (N° Lexbase : L8009KU8), prévoit notamment dans son article 2 que cette information peut résulter d’un affichage dans les parties communes pendant un mois à l’emplacement prévu à cet effet.
[2] Art. 59 bis J.
[3] Ces charges sont définies par le décret n° 87-713 du 26 aout 1987 (N° Lexbase : L9706A9D).
[4] Ce sera le cas lorsque l’assemblée générale le décide à la majorité de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 ou faute de candidature ou faute pour les candidats d’avoir obtenu la majorité requise pour leur désignation. V. art. 22 I loi 10 juillet 1965.
[5] V. notre commentaire, La loi «ELAN» et la copropriété, Lexbase, éd. priv., n° 767, 2019, préc..
[6] L’article 17-1-A considère les formulaires ne donnant aucun sens précis de vote ou exprimant une abstention comme des votes défavorables et fait par ailleurs référence à des résolutions qui, à l’issue des débats en assemblée, auraient «évolué de manière substantielle».
[7] Le changement du lieu de réunion postérieurement à la convocation obligerait le syndic à renouveler la convocation en respectant le délai de vingt et un jours prescrit par l’article 9 du décret de 1967. V. en ce sens Cass. civ. 3, 26 juin 2002, n° 00-22.557, FS-P+B (N° Lexbase : A0097AZM), Bull. civ. III n° 152.
[8] La nouvelle rédaction de l’article 64-1 du décret de 1965 (N° Lexbase : Z56364NT) ne vise que l’accord du copropriétaire pour recevoir les notifications et/ou les mises en demeure par voie électronique ainsi que l’accord sur la dématérialisation des documents joints à la convocation d’assemblée générale en application du nouvel article 64-5 du décret de 1967 (N° Lexbase : L1281LRU).
[9] Dans le cas où l’assemblée générale n’aura pas, par une délibération votée à la majorité de l’article 25, refusé la mise en place de cet accès en ligne. V. loi 10 juillet 1965, art. 18, I, 11ème tiret (N° Lexbase : L4813AHQ).
[10] V. Les notifications par voie électronique, des ambitions déçues, par P. Lebatteux, Revue Administrer, n° 496, mars 2016, p. 7 s..
[11] La notice précédant les dispositions du décret mentionne : «Les modalités de remise et de retrait de l’accord sont également simplifiées dès lors que le copropriétaire peut donner son accord en assemblée générale et, à défaut, par tout moyen conférant date certaine».
[12] Cass. civ. 3, 10 juillet 2012 n° 11-16.245, F-D (N° Lexbase : A8193IQI).
[13] L’article 123 de la loi «ELAN» prévoyait la possibilité pour les huissiers de justice d’accéder aux boites aux lettres particulières selon les mêmes modalités que les opérateurs postaux. Cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel pour cause de cavalier législatif (Cons. const., 15 novembre 2018, décision n° 2018-772 DC N° Lexbase : A1890YLL).
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Réf. : Cass. civ. 1, 11 juillet 2019, n° 15-17.718, FS-P+B (N° Lexbase : A3339ZKU)
Lecture: 2 min
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par Anne-Lise Lonné-Clément
Le 17 Juillet 2019
► Selon l'article 176, alinéa 3, du Code civil (N° Lexbase : L1229HWG), l'acte d'opposition cesse de produire effet après une année révolue ; la caducité de l'opposition rend, alors, sans objet l'examen de son bien-fondé, sauf pour la cour d'appel à se prononcer sur la faute de l'opposante ;
► pour retenir le caractère fautif de l’opposition de nature à engager la responsabilité de son auteur, la cour d’appel ne peut se contenter de relever que l'opposition à mariage n’est pas fondée, sans caractériser de circonstances particulières faisant dégénérer en abus le droit d'opposition.
Telles sont les précisions apportées par la première chambre civile de la Cour de cassation, aux termes d’un arrêt rendu le 11 juillet 2019 (Cass. civ. 1, 11 juillet 2019, n° 15-17.718, FS-P+B N° Lexbase : A3339ZKU).
En l’espèce, le 25 septembre 2013, Mme Z avait formé opposition au mariage de M. X et Mme Y, lequel devait être célébré le 6 octobre 2013 ; le 15 novembre 2013, M. X avait assigné Mme Z afin de voir ordonner la mainlevée de cette opposition et en paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.
Mme Z faisait grief à l'arrêt rendu le 19 février 2015 par la cour d’appel de Versailles de donner mainlevée de l'opposition à mariage. En vain.
La Cour suprême approuve les juges d’appel qui, après avoir exactement rappelé que, selon l'article 176, alinéa 3, du Code civil, l'acte d'opposition cesse de produire effet après une année révolue, avaient à bon droit constaté la caducité de l'opposition signifiée le 25 septembre 2013 ; et d’ajouter que, la caducité de l'opposition rendant sans objet l'examen de son bien-fondé, sauf pour la cour d'appel à se prononcer sur la faute de l'opposante, ce qui est sans rapport avec le chef du dispositif attaqué, les motifs critiqués par les deuxième et troisième branches étaient surabondants.
En revanche, la Cour régulatrice censure les juges d’appel qui, pour condamner l’opposante à payer une certaine somme à M. X à titre de dommages-intérêts, avaient retenu que, l'opposition à mariage n'étant pas fondée, elle présentait un caractère fautif de nature à engager sa responsabilité, ce sans caractériser de circonstances particulières faisant dégénérer en abus le droit d'opposition (cf. l'Ouvrage «Mariage - Couple - PACS», Les effets et la durée de l’opposition à mariage N° Lexbase : E4746EX3).
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
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Réf. : Cass. civ. 3, 13 juin 2019, n° 18-18.445, FS-P+B+I (N° Lexbase : A5685ZEB) ; Cass. civ. 3, 13 juin 2019, n° 18-13.287, FS-P+B+I (N° Lexbase : A5863ZEU) ; Cass. civ. 3, 13 juin 2019, n° 18-14.225, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A5849ZED)
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N9890BXL
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par Pierre Tifine, Professeur de droit public à l’Université de Lorraine, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition publique, Doyen de la faculté de droit, économie et administration de Metz
Le 17 Juillet 2019
Lexbase Hebdo - édition publique vous propose, cette semaine, de retrouver la chronique d’actualité de droit de l’expropriation rédigée par Pierre Tifine, Professeur à l’Université de Lorraine et doyen de la faculté de droit économie et administration de Metz. Dans la première décision commentée, la Cour de cassation apporte d’intéressantes précisions sur la détermination de la date de référence dans l’hypothèse d’une modification dans le plan local d’urbanisme d’un périmètre soumis au droit de préemption urbain (Cass. civ. 3, 13 juin 2019, n° 18-18.445, FS-P+B+I). Elle précise, dans une autre affaire, que l’occupant exproprié en vertu de la procédure spéciale d’expropriation des immeubles insalubres ou menaçant ruine bénéficie des droits de priorité et de préférence prévus par le Code de l’expropriation (Cass. civ. 3, 13 juin 2019, n° 18-13.287, FS-P+B+I). Enfin, un dernier arrêt indique qu’en cas d’expropriation partielle impliquant de modifier les limites des terrains concernés, l’autorité compétente doit obligatoirement établir un document d’arpentage (Cass. civ. 3, 13 juin 2019, n° 18-14.225, FS-P+B+R+I).
La question de la détermination de la date de référence à laquelle doit être apprécié «l’usage effectif» des biens expropriés est fréquemment soumise aux juridictions judiciaires. Cette date ne doit pas être confondue avec celle du transfert de propriété, qui correspond à la date de l’ordonnance d’expropriation. Elle ne doit pas non plus être confondue avec celle à laquelle il est procédé à l’évaluation des biens, celle-ci correspondant à la date du jugement de première instance. C’est à cette date de référence que devra être opérée la qualification du terrain et que devra être appréciée sa constructibilité.
Comme le précise l’article L. 322-2 du Code de l’expropriation (N° Lexbase : L9923LMH), la date de référence, qui devra impérativement être précisée par le jugement en mentionnant la qualification des biens à cette date [1], se situe, en principe, un an avant l’ouverture de l’enquête publique.
Toutefois, ce principe est assorti d’exceptions, notamment pour les biens qui sont soumis au droit de préemption, ce qui est le cas dans la présente affaire. En application de l’article L. 213-6 du Code de l’urbanisme (N° Lexbase : L1310LDU), lorsqu’un bien soumis au droit de préemption fait l’objet d’une expropriation, la date de référence est celle prévue au a de l’article L. 213-4 du même code (N° Lexbase : L8209I4S). Selon cet article, il s’agit de la date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan d’occupation des sols ou approuvant, révisant ou modifiant le plan local d’urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien.
En l’espèce, une délibération du 28 septembre 2016, rendue publique le 18 octobre 2016, avait modifié le plan local d’urbanisme et la délimitation de la zone dans laquelle se situe le bien faisant l’objet de la procédure d’expropriation. Pourtant, la cour d’appel de Montpellier avait refusé de retenir cette dernière date.
Le raisonnement des juges du fond est validé par la Cour de cassation, qui retient une application restrictive de l’article L. 213-4, a du Code de l’urbanisme. Certes, la délibération du 28 septembre 2016 a bien eu pour effet de modifier le plan local d’urbanisme. Toutefois, comme l’avait déjà jugé la cour d’appel de Montpellier, si elle avait modifié le périmètre de la zone dans laquelle était située la parcelle expropriée, elle n’avait pas affecté les caractéristiques de cette zone. En d’autres termes, cette délibération n’avait eu aucune conséquence notable sur la valeur du bien litigieux. En conséquence, le pourvoi en cassation formé par l’ancien propriétaire est rejeté.
La loi du 10 juillet 1970, tendant à faciliter la suppression de l’habitat insalubre, dite loi «Vivien», avait instauré une procédure simplifiée d’expropriation, sans enquête préalable ni arrêté de cessibilité. Ces dispositions sont aujourd’hui codifiées aux articles L. 511-1 (N° Lexbase : L8042I4M) et suivants du Code de l’expropriation. Cette procédure peut concerner à titre principal deux types d’immeubles : ceux qui ont été déclarés insalubres à titre irrémédiable en application de l’article L. 1331-28 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L0245LNE) ; ceux qui sont à usage total ou partiel d’habitation et qui ont fait l’objet d’un arrêté de péril pris en application de l’article L. 511-2 du Code de la construction et de l’habitation (N° Lexbase : L0252LNN) et assorti d’une ordonnance de démolition ou d'interdiction définitive d’habiter. A titre exceptionnel peuvent aussi être concernés «des immeubles qui ne sont eux-mêmes ni insalubres, ni impropres à l’habitation, lorsque leur expropriation est indispensable à la démolition d’immeubles insalubres ou d’immeubles menaçant ruine, ainsi que des terrains où sont situés les immeubles déclarés insalubres ou menaçant ruine lorsque leur acquisition est nécessaire à la résorption de l’habitat insalubre, alors même qu’y seraient également implantés des bâtiments non insalubres ou ne menaçant pas ruine». Ces dernières dispositions visent les immeubles qui ne sont pas insalubres mais dont l’expropriation est indispensable à la démolition d'immeubles insalubres, sans distinguer -ce que ne précise pas le texte- entre les immeubles à usage d’habitation et les autres [2].
Il n’est pas précisé, en l’espèce, qu’elle est l’hypothèse concernée, le litige portant non pas sur les conditions de mise en œuvre de la procédure, mais sur ses conséquences pour les personnes expropriées. Celles-ci ont évidemment le droit à percevoir des indemnités, conformément aux dispositions des articles L. 242-1 (N° Lexbase : L7968I4U) à L. 242-7 et du livre III du Code de l’expropriation qui définit les règles d’indemnisation de droit commun, sous réserve des dispositions de l’article L. 511-6 du même code (N° Lexbase : L8047I4S) qui envisagent divers cas de réduction de l'indemnité [3].
La question qui se pose en l’espèce est de savoir si les occupants des immeubles expropriés bénéficient des droits de priorité et de préférence prévus par les articles L. 423-1 (N° Lexbase : L8028I44) à L. 423-5 du Code de l’expropriation.
En application de l’article L. 423-1, le droit de priorité bénéficie aux propriétaires occupants des locaux d’habitation expropriés et dont les ressources n’excèdent pas les plafonds fixés pour l’attribution de logements construits en application de la législation relative aux HLM. Ils bénéficient alors : soit d’un relogement en qualité de locataires dans un local soumis à la législation sur les HLM ou dans un local dont le loyer n’excède pas celui d’un local construit en application de la législation relative aux HLM de même consistance ; soit de l’accession à la propriété au titre de la législation applicable en matière d’HLM ainsi que pour l’octroi, le cas échéant, des prêts correspondants. Le II du même article précise également que lorsque l’expropriation a porté sur une maison individuelle, ce droit de priorité s’exerce, à la demande des intéressés et si cela est possible, sur un local de type analogue situé dans la même commune ou dans une commune limitrophe.
L’article L. 423-2 (N° Lexbase : L8029I47) prévoit quant à lui que si ces conditions sont réunies, l’expropriant est tenu à une obligation de relogement dont il sera valablement libéré par l’offre aux intéressés d’un local correspondant à leurs besoins et n’excédant pas les normes relatives aux HLM. Dans le cas où l’expropriation a porté sur une maison individuelle, le relogement est, si cela est possible, offert dans un local de type analogue, n'excédant pas les normes relatives aux HLM situés dans la même commune ou dans une commune limitrophe.
Le droit de préférence est quant à lui visé par l’article L. 423-4 du Code de l’expropriation (N° Lexbase : L8031I49). Il bénéficie aux propriétaires occupants de locaux d’habitation expropriés en vue de l’octroi de prêts spéciaux au titre de l’aide à la construction, lorsque leurs ressources ne dépassent pas les plafonds fixés pour cette aide.
La cour d’appel de Versailles avait considéré que ces textes n’étaient pas applicables dans le cadre d’une procédure d’expropriation en vue de la suppression de l’habitat insalubre. En conséquence, elle avait déclaré irrecevable la demande d’un occupant tendant à ce qu’il soit fait injonction à la commune expropriante, sous astreinte, de le faire bénéficier d’un droit de priorité et de préférence.
Cette analyse était manifestement erronée au regard des textes applicables à cette procédure. Selon l’article L. 511-9 du Code de l’expropriation (N° Lexbase : L8050I4W), le refus par les occupants «du relogement qui leur est offert par l’expropriant, dans les conditions prévues à l’article L. 314-2 du Code de l’urbanisme, autorise leur expulsion sans indemnité». Or, l’article L. 314-2 du Code de l’urbanisme (N° Lexbase : L8177I4M) précise que «tous les occupants de locaux à usage d’habitation, professionnel ou mixte ont droit au relogement […] ils bénéficient, en outre, des droits de priorité et de préférence prévus aux articles L. 423-1 à L. 423-5 du Code de l’expropriation […]». L’arrêt attaqué est en conséquence cassé et l’affaire est renvoyée à la cour d’appel de Paris qui devra déterminer si l’occupant remplit les conditions visées par ces articles lui permettant de bénéficier des droits de priorité ou de préférence.
La logique du droit de l’expropriation, telle qu’elle résulte de l’article 17 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 (N° Lexbase : L1364A9E), implique qu’une balance soit faite entre le droit de propriété «inviolable et sacré» et les atteintes qui peuvent être autorisées à ce droit pour motif de «nécessité publique» ou «d’utilité publique» selon la terminologie employée par le Code de l’expropriation. C’est pour cette raison que l’expropriation doit être strictement limitée aux parcelles dont l’expropriant a besoin pour mener à bien l’opération déclarée d’utilité publique. Il est en conséquence fréquent qu’un propriétaire privé ne soit que partiellement exproprié. Cette situation ne lui est d’ailleurs pas nécessairement plus favorable qu’une expropriation totale. En particulier, une expropriation partielle peut rendre difficile l’exploitation de terrains agricoles comme elle peut limiter la constructibilité d’un terrain. C’est pour cela qu’il existe une procédure de réquisition d’emprise totale qui permet à la personne touchée par une emprise partielle de demander que l’expropriant procède à l’acquisition de la totalité du bien concerné [4]. Mais surtout, lorsque cette procédure n’est pas déclenchée, le propriétaire qui est privé d’une partie de son bien doit savoir précisément quelle est la consistance de la parcelle qui demeure dans son patrimoine. Cette exigence est prise en compte par les dispositions de Code de l’expropriation relatives au contenu de l’ordonnance d’expropriation dont l’effet -rappelons-le- consiste à transférer les biens du patrimoine du propriétaire évincé vers celui du bénéficiaire de l’opération.
C’est l’arrêté de cessibilité, qui fait partie du dossier transmis par l’autorité administrative au juge de l’expropriation en application de l’article R. 221-1 du Code de l’expropriation (N° Lexbase : L2104I73), qui permet au préfet, qui est seul compétent en la matière, de déterminer la liste des parcelles ou des droits réels immobiliers à exproprier, lorsque cette liste ne résulte pas de la déclaration d'utilité publique [5]. L’arrêté de cessibilité va ainsi permettre de déclarer cessibles les propriétés ou parties de propriété dont la cession est nécessaire à la réalisation de l’opération projetée. Toutefois, des modifications dans la situation des biens peuvent survenir entre la date à laquelle l’arrêté de cessibilité est établi et la date à laquelle statue le juge de l’expropriation. En conséquence, l’article R. 221-4 du Code de l’expropriation (N° Lexbase : L2107I78) prévoit que l’ordonnance «prononçant l’expropriation désigne chaque immeuble ou fraction d’immeuble exproprié et précise l’identité des expropriés, conformément aux dispositions de l'article R. 132-2 […] Elle tient compte des modifications survenues éventuellement depuis l’arrêté de cessibilité ou l’acte en tenant lieu en ce qui concerne la désignation des immeubles ou l’identité des parties». L’article R. 132-2 du même code (N° Lexbase : L2094I7P) renvoie quant à lui aux règles de publicité foncière définies par l’article 7 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955, portant réforme de la publicité foncière (N° Lexbase : L9182AZ4). L’alinéa 2 de cet article prévoit que, lorsqu'il y a division de la propriété du sol entraînant changement de limite, l’acte doit désigner l’immeuble tel qu’il existait avant la division et chacun des nouveaux immeubles résultant de cette division. Dans la plupart des cas, comme le précise le dernier alinéa de cet article, la désignation est faite conformément à un extrait cadastral et «en cas de changement de limite, d’après les documents d’arpentage établis spécialement en vue de la conservation du cadastre». Plus précisément, l’article 25 du décret n° 45-471 du 30 avril 1955, relatif à la conservation du cadastre, précise que «tout changement de limite de propriété doit être constaté par un document d’arpentage qui est soumis au service du cadastre, préalablement à la rédaction de l’acte réalisant le changement de limite, pour vérification et numérotage des nouveaux îlots de propriété».
La Cour de cassation déduit logiquement de ces dispositions qu’en cas «d’expropriation partielle impliquant de modifier les limites des terrains concernés, un document d'arpentage doit être préalablement réalisé afin que les parcelles concernées soient désignées conformément à leur numérotation issue de ce document». Cette position est identique à celle du Conseil d’Etat qui a eu l’occasion récemment de juger qu’un document d’arpentage doit être établi préalablement à l’arrêté de cessibilité en cas d’expropriation de parties de parcelles [6].
En l’espèce, aucun document d’arpentage désignant les parcelles issues de la division opérée par l’expropriation partielle n’avait été réalisé. En conséquence, la Cour de cassation casse l’ordonnance déférée devant elle pour vice de forme.
[1] Cass. civ. 3, 23 juin 1999, n° 98-70.105, inédit (N° Lexbase : A2514CZ7) ; Cass. civ. 3, 3 décembre 2002, n° 01-70.129, F-D (N° Lexbase : A4419A4G) ; Cass. civ. 3, 17 février 2004, n° 03-70.038, F-D (N° Lexbase : A3335DB7) ; Cass. civ. 3, 16 mars 2005, n° 04-70.056, FS-D (N° Lexbase : A3187DHI) ; Cass. civ. 3, 14 septembre 2005, n° 04-70.037, FS-D (N° Lexbase : A4546DKL) ; Cass. civ. 3, 5 juillet 2005, n° 04-70.104 ; Cass. civ. 3, 11 juin 2014, n° 13-18.695, F-D (N° Lexbase : A2125MR7).
[2] CE, 18 janvier 2017, n° 383374 (N° Lexbase : A3259S9L), Constr.-Urb., 2017, comm. 36, note Couton.
[3] C. expr., art. L. 511-5 (N° Lexbase : L8046I4R).
[4] C. expr., art. L. 242-1 s. (N° Lexbase : L7968I4U) et R. 242-1 (N° Lexbase : L2131I73) ; voir Cass civ. 3, 30 novembre 2017, n° 16-24.676, F-D (N° Lexbase : A4749W4N).
[5] V. C. expr., art. L. 132-1 (N° Lexbase : L7945I4Z).
[6] CE 6°et 5° ch. r., 9 juillet 2018, n° 406696 (N° Lexbase : A6535XXC).
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Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 10 juillet 2019, n° 412624, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6819ZIE)
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par Marie-Claire Sgarra
Le 17 Juillet 2019
►Pour la détermination du montant des revenus imposables à l'impôt sur le revenu, le coefficient multiplicateur de 1,25 ne s'applique pas aux revenus réalisés, dans les catégories qu'elles mentionnent, par un contribuable adhérent d'un centre de gestion ou association agréé défini aux articles 1649 quater C (N° Lexbase : L3922IPX) à 1649 quater H (N° Lexbase : L3864KWZ) du Code général des impôts, sans qu'il y ait lieu de distinguer suivant que ces revenus ont leur source en France ou hors de France, alors même qu'avant l'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative pour 2015 (N° Lexbase : L1131KWS), les revenus encaissés à l'étranger n'étaient pas susceptibles d'être contrôlés par ces organismes. Il en est de même pour la détermination du montant du crédit d'impôt auquel ouvrent droit des revenus de source étrangère en vertu d'une convention fiscale bilatérale prévoyant d'éliminer les doubles impositions par l'octroi d'un crédit égal au montant de l'impôt français correspondant à ces revenus.
Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 10 juillet 2019 (CE 9° et 10° ch.-r., 10 juillet 2019, n° 412624, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6819ZIE).
En l’espèce, le requérant, dont le foyer fiscal est situé en France, a perçu en 2013, en sa qualité d’avocat associé d’un cabinet, société de droit britannique, une quote-part des résultats, bénéficiaires ou déficitaires, réalisés par cette société tant en France qu’à l’étranger. Il conteste les modalités de calcul des revenus de source étrangère retenues par l’administration fiscale pour l’établissement de l’impôt sur le revenu et du crédit d’impôt imputable sur cet impôt auquel une partie de ces revenus ouvrait droit, ainsi que celles de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus mise à sa charge. Il se pourvoit en cassation contre l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris qui a rejeté appel du jugement du tribunal administratif de Paris rejetant ses demandes de réduction des cotisations d’impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de restitution d’un crédit d’impôt à raison de ses revenus de source étrangère au titre de l’année 2013.
La société de droit britannique dont le requérant est associé était, pour les besoins de ses activités françaises, adhérente, au cours de l'année en litige, d'une association de gestion agréée. En jugeant que, pour ce motif, il n'y avait pas lieu d'appliquer le coefficient multiplicateur prévu au 7 de l'article 158 du Code général des impôts (N° Lexbase : L2469HNR) aux revenus de source britannique, allemande, espagnole et émiratie du requérant, imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux et correspondant à la quote-part des résultats de cette société lui revenant, pour déterminer le crédit d'impôt auquel ces revenus ouvraient droit conformément aux conventions fiscales bilatérales applicables, la cour n'a pas commis d'erreur de droit (cf. le BoFip - Impôts annoté N° Lexbase : X3855ALD).
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Réf. : CE 8° et 3° ch.-r., 10 juillet 2019, n° 418108, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6833ZIW)
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N9887BXH
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par Marie-Claire Sgarra
Le 17 Juillet 2019
► Une société mère d’un groupe fiscalement intégré et qui a des succursales implantées en Chine, aux Philippines, en Inde, à Singapour et en Thaïlande peut imputer sur ses cotisations d’impôt sur les sociétés des crédits d’impôts correspondant à des retenues à la source auxquelles ont été soumis des intérêts qui lui ont été versés par ses succursales en rémunération de prêts accordés par le siège français.
Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 10 juillet 2019 (CE 8° et 3° ch.-r., 10 juillet 2019, n° 418108, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6833ZIW).
En l’espèce, une société française mère d’un groupe fiscalement intégré, dispose de succursales en Chine, aux Philippines, en Inde, à Singapour et en Thaïlande et leur consent des prêts. La société française a imputé sur ses cotisations d'impôt sur les sociétés des crédits d'impôts correspondant à des retenues à la source auxquelles ont été soumis les intérêts versés par ses succursales en rémunération de ces prêts. L’administration fiscale a remis en cause l’imputation de ces crédits d’impôts. La société a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, la restitution des cotisations d'impôt sur les sociétés correspondant aux crédits d'impôt qu'elle avait omis d'imputer au titre de son exercice clos en 2007, et, d'autre part, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondants auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005, 2006 et 2007. Le tribunal (TA de Montreuil, 9 février 2015, n° 1303525 N° Lexbase : A6687NII) rejette cette demande. La cour administrative d'appel de Versailles (CAA de Versailles, 13 décembre 2017, n° 15VE01061 N° Lexbase : A9940W9Z) rejette l'appel formé contre ce jugement.
Pour refuser le bénéfice des stipulations conventionnelles relatives aux intérêts invoquées par la société, la cour, après avoir qualifié d'intérêts au sens de ces conventions les sommes versées par les succursales au siège de la société, a jugé ces stipulations inapplicables au motif, d'une part, que les débiteurs des intérêts, qu'elle a identifiés comme étant les succursales, n'étaient pas des résidents des Etats dans lesquels ils étaient installés et, d'autre part, qu'il ne résultait pas de l'instruction que ces succursales auraient, dans ces Etats, un établissement stable ou une base fixe pour lequel la dette donnant lieu au paiement des intérêts aurait été contractée et qui supporterait la charge de ces intérêts, de sorte que les intérêts en litige ne pouvaient être regardés comme provenant de l'autre Etat contractant, au sens du 6 des stipulations précitées.
En statuant ainsi alors, d'une part, que la société, ainsi qu'elle le soutenait, devait être regardée comme débitrice de ces intérêts versés par ses succursales, et, d'autre part, qu'elle n'a pas recherché si elle avait en Chine, aux Philippines, en Inde, à Singapour et en Thaïlande, par leur intermédiaire, des établissements stables pour lesquels les dettes donnant lieu au paiement des intérêts ont été contractées et qui supportent la charge de ces intérêts, de sorte que ces intérêts devaient être considérés, pour l'application de ces stipulations, comme provenant de ces pays, la cour a commis une erreur de droit (cf. l’Ouvrage «Conventions fiscales internationales» N° Lexbase : E3341EUB).
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Réf. : CJUE, 27 mai 2019, aff. C-508/18, «parquet de Lübeck» (N° Lexbase : A1496ZDR) et aff. C-509/18, «procureur général de Lituanie» (N° Lexbase : A1497ZDS)
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N9861BXI
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par Blandine Thellier de Poncheville, MCF - HDR de la Faculté de droit de l’Université Jean Moulin Lyon 3, Membre de l’équipe de Recherche Louis Josserand (EA 3707)
Le 17 Juillet 2019
Mots-clés : mandat d’arrêt européen • autorité judiciaire • parquet • ministère public • procureur de la République • procureur général
Résumé : par deux arrêts rendus le 27 mai 2019, la CJUE a précisé les conditions auxquelles les autorités de poursuites non juridictionnelles nationales, telles que le parquet ou ministère public, peuvent avoir la qualité d’autorité judiciaire d’émission d’un mandat d’arrêt européen au sens l’article 6, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002 (N° Lexbase : L2925LHS).
Les questions préjudicielles. Par les arrêts en date du 27 mai 2019 [1], la CJUE a complété sa jurisprudence [2] relative à la notion d’ «autorité judiciaire d’émission» d’un mandat d’arrêt européen [3] au sens de l’article 6, paragraphe 1 [4], de la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre Etats [5]. Plus particulièrement, étaient en cause des mandats d’arrêt européen émis aux fins de poursuites par des représentants des autorités de poursuites au niveau national. Dans le cadre des deux affaires jointes OG et PI, la CJUE a été saisie au sujet du Parquet allemand et devait déterminer si la notion d’ «autorité judiciaire d’émission» vise les parquets d’un Etat membre qui sont compétents pour exercer les poursuites pénales et entretiennent un rapport de subordination à l’égard d’un organe du pouvoir exécutif de cet Etat membre, tel qu’un ministre de la Justice, et peuvent être soumis, directement ou indirectement, à des ordres ou à des instructions individuels de la part de ce dernier dans le cadre de l’adoption d’une décision relative à l’émission d’un mandat d’arrêt européen. (§ 42) [6]. Dans l’affaire «PF», la CJUE devait déterminer si cette notion vise le procureur général de la Lituanie, indépendant du pouvoir exécutif, qui est compétent pour exercer les poursuites pénales tout en étant structurellement indépendant du pouvoir judiciaire.
La notion d’«autorité judiciaire d’émission» : une notion autonome. Après avoir rappelé que le mandat d’arrêt européen était fondé sur les principes de la confiance mutuelle et de reconnaissance mutuelle, la CJUE a précisé qu’il convenait encore d’établir qu’il s’agissait bien d’une «décision judiciaire», ce qui requiert que le mandat d’arrêt européen soit émis par une «autorité judiciaire», au sens de l’article 6, paragraphe 1, de cette décision-cadre (§ 46) [7]. La CJUE a alors rappelé que si, conformément au principe d’autonomie procédurale, les Etats membres peuvent désigner, selon leur droit national, l’«autorité judiciaire» ayant compétence pour émettre un mandat d’arrêt européen, le sens et la portée de cette notion ne sauraient être laissés à l’appréciation de chaque Etat membre (§ 48) [8] de sorte que «ladite notion requiert, dans toute l’Union, une interprétation autonome et uniforme» (§ 49) qui doit être recherchée au regard de la lettre et de l’objectif poursuivi par la décision cadre.
Notion d’autorité judiciaire : «autorité participant à l’administration de la justice pénale». La Cour a alors rappelé, conformément à sa jurisprudence antérieure, que les termes «autorité judiciaire» ne se limitent pas à désigner les seuls juges ou juridictions d’un Etat membre, mais doivent s’entendre comme désignant, plus largement, «les autorités participant à l’administration de la justice pénale de cet Etat membre», à la différence, notamment, des ministères ou des services de police, qui relèvent du pouvoir exécutif (§ 50) [9]. Cette interprétation est d’ailleurs confortée par le libellé de l’article 82, paragraphe 1, sous d), TFUE, qui a remplacé l’article 31 UE, et qui précise désormais que la coopération judiciaire en matière pénale porte sur la coopération entre «les autorités judiciaires ou équivalentes des Etats membres dans le cadre des poursuites pénales et de l’exécution des décisions».
L’autorité de poursuites : une autorité judiciaire au sens de la décision-cadre sur le mandat d’arrêt européen. Afin de déterminer si les autorités de poursuites pouvaient être considérées comme une autorité judiciaire, la CJUE a pris en considération l’objet du mandat d’arrêt européen. Ainsi, a-elle-retenu que dans la mesure où le mandat d’arrêt européen «facilite la libre circulation des décisions judiciaires, préalables au jugement, relatives à l’exercice des poursuites pénales», il y a lieu de considérer que les autorités qui, en vertu du droit national, sont compétentes pour adopter de telles décisions sont susceptibles de relever du champ d’application de ladite décision-cadre (§ 59). En conséquence, un parquet, qui dispose de la compétence, dans le cadre de la procédure pénale, pour exercer des poursuites à l’égard d’une personne soupçonnée d’avoir commis une infraction pénale aux fins qu’elle soit attraite devant une juridiction, doit être considérée comme participant à l’administration de la justice de l’Etat membre concerné (§ 60) [10].
Un parquet sous l’autorité hiérarchique du ministre de la Justice ou ne relevant pas du pouvoir judiciaire : une autorité judiciaire sous condition du respect des droits fondamentaux aux deux stades de la procédure. La CJUE rappelle la nécessité de garantir les droits fondamentaux de la personne dont la remise est réclamée aux deux stades de la procédure. Ainsi, cette garantie doit être assurée, d’une part, dès l’adoption de la décision nationale initiale tel un mandat d’arrêt national (§ 66), ce qui implique qu'une telle décision soit prise par une autorité juridictionnelle (I) et, d’autre part, lors de l’émission du mandat d’arrêt européen par un Parquet, laquelle peut intervenir, le cas échéant, dans des délais brefs, après l’adoption de ladite décision judiciaire nationale (§ 67) (II).
I - La nécessaire garantie du respect des droits fondamentaux lors de la décision initiale
La nature juridictionnelle de la décision nationale initiale. S’agissant d’une mesure qui, telle que l’émission d’un mandat d’arrêt européen, est de nature à porter atteinte au droit à la liberté de la personne concernée, consacré à l’article 6 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (N° Lexbase : L8117ANX), la protection des droits fondamentaux implique, selon la CJUE, qu’une décision satisfaisant aux exigences inhérentes à «une protection juridictionnelle effective» soit adoptée, à tout le moins, à l’un des deux niveaux de la procédure. La CJUE en déduit que lorsque l’autorité d’émission d’un mandat d’arrêt européen n’est pas un juge ou une juridiction, la décision judiciaire nationale, telle qu’un mandat d’arrêt national, sur laquelle se greffe le mandat d’arrêt européen, doit, pour sa part, satisfaire à de telles exigences. En d’autres termes, la décision nationale initiale doit être une décision juridictionnelle, prise par une autorité indépendante et impartiale, adoptée dans le respect des droits fondamentaux et susceptible d’une voie de recours effective. La satisfaction de ces exigences permet ainsi de garantir à l’autorité judiciaire d’exécution que la décision d’émettre un mandat d’arrêt européen aux fins de poursuites pénales est fondée sur une procédure nationale soumise à un contrôle juridictionnel et que la personne qui a fait l’objet de ce mandat d’arrêt national a bénéficié de toutes les garanties propres à l’adoption de ce type de décisions, notamment de celles résultant des droits fondamentaux et des principes juridiques fondamentaux visés à l’article 1er, paragraphe 3, de la décision-cadre 2002/584.
Une exigence conforme à la jurisprudence de la CEDH et confortant le droit interne. La CJUE, par cette condition, répond aux exigences de la CEDH, en ce que la décision sur la privation de liberté relève de la compétence d’une juridiction ou d’un juge présentant «les garanties requises d’indépendance à l’égard de l’exécutif et des parties» [11]. A noter que le droit interne se trouve ainsi conforté. En effet, l’article 695-16 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2343IEI) précise que l’émission d’un mandat d’arrêt européen par le ministère public est une modalité de mise à exécution du mandat d’arrêt décerné par la juridiction d’instruction, de jugement ou d’application des peines, lesquelles décident ainsi du bien-fondé de la privation de liberté. Il en résulte simplement la coexistence de notions voisines mais différentes au regard des fonctions envisagées de l’autorité judiciaire. Ainsi, le ministère public, autorité de poursuites, ne saurait être considéré comme «un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires» aux fins de contrôler la régularité de la privation de liberté, au sens de l’article 5 de la CESDH (N° Lexbase : L4786AQC), mais, sous certaines conditions, il peut avoir la qualité «d’autorité judiciaire d’émission» d’un mandat d’arrêt européen qui n’est que la mise à exécution d’une décision impliquant une privation de liberté.
II - Les conditions d'émission d'un mandat d'arrêt européen par un Parquet
Le contrôle de proportionnalité lors de l’émission du mandat d’arrêt européen. Le second niveau de protection des droits de la personne concernée implique, pour la CJUE, que l’autorité judiciaire compétente, en vertu du droit national, pour émettre un mandat d’arrêt européen contrôle, en particulier, le respect des conditions nécessaires à cette émission et examine le point de savoir si, au regard des spécificités de chaque espèce, ladite émission revêt un caractère proportionné (§ 71) [12]. La proportionnalité du mandat d’arrêt européen n’est pourtant pas une condition visée expressément par la décision-cadre. Néanmoins, c’est une exigence qui se justifie pleinement au regard des incidences de cet instrument sur la liberté individuelle dès lors que, dans l’Etat d’exécution, il peut conduire à une privation de liberté de la personne recherchée en vue de garantir sa remise. En outre, l’exécution du mandat d’arrêt européen caractérise une ingérence dans le droit au respect de la vie privée et familiale de sorte qu’il convient d’en apprécier la proportionnalité (CEDH, art. 8 N° Lexbase : L4798AQR ; Charte des droits fondamentaux de l’UE, art. 7 N° Lexbase : L8117ANX).
Les garanties d’indépendance de l’autorité d’émission du mandat d’arrêt européen. Selon la CJUE, l’autorité d’émission, tel un membre du parquet, doit être en mesure d’exercer cette fonction de façon objective, en prenant en compte tous les éléments à charge et à décharge, et sans être exposée au risque que son pouvoir décisionnel fasse l’objet d’ordres ou d’instructions extérieurs, notamment de la part du pouvoir exécutif, de telle sorte qu’il n’existe aucun doute quant au fait que la décision d’émettre le mandat d’arrêt européen revienne à cette autorité et non pas, en définitive, audit pouvoir (§ 73) [13]. Plus précisément, cette indépendance exige qu’il existe des règles statutaires et organisationnelles propres à garantir que l’autorité judiciaire d’émission ne soit pas exposée, dans le cadre de l’adoption d’une décision d’émettre un tel mandat d’arrêt, à un quelconque risque d’être soumise notamment à une instruction individuelle de la part du pouvoir exécutif (§ 74), qu’importe le point de savoir si, dans les affaires en cause, aucune instruction individuelle n’a été donnée (§ 89). La CJUE en conclut donc, dans les affaires jointes «OG et PI», que la notion d’ «autorité judiciaire d’émission» ne vise pas les parquets d’un Etat membre qui sont exposés au risque d’être soumis, directement ou indirectement, à des ordres ou à des instructions individuels de la part du pouvoir exécutif, tel qu’un ministre de la Justice, dans le cadre de l’adoption d’une décision relative à l’émission d’un mandat d’arrêt européen. Inversement dans l’affaire «PF», elle a retenu que cette notion vise le procureur général d’un Etat membre qui, tout en étant structurellement indépendant du pouvoir judiciaire, est compétent pour exercer les poursuites pénales et dont le statut, dans cet Etat membre, lui confère une garantie d’indépendance par rapport au pouvoir exécutif dans le cadre de l’émission du mandat d’arrêt européen.
Les fonctions d’autorité judiciaire d’émission du Parquet français épargnées. Au vu des conditions d’indépendance énoncées par la CJUE, les prérogatives du ministère public français en matière d’émission d’un mandat d’arrêt européen ne semblent pas menacées dès lors que la loi n° 2013-669 du 25 juillet 2013, relative aux attributions du Garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l'action publique (N° Lexbase : L9267IXI) a supprimé la possibilité pour le Garde des Sceaux de donner des instructions individuelles (C. pr. pén., art. 30 N° Lexbase : L4926IXQ). Ainsi, le seul fait que le Parquet soit sous l’autorité hiérarchique du ministre de la Justice et que celui-ci puisse donner des instructions générales ne devrait pas l'empêcher d’exercer les fonctions d’autorité judiciaire d’émission d’un mandat d’arrêt européen. De même, ces arrêts de la CJUE ne paraissent pas remettre en question l’appréciation faite par le Conseil constitutionnel au sujet du statut du Parquet d’une «conciliation équilibrée entre le principe d'indépendance de l'autorité judiciaire et les prérogatives que le Gouvernement tient de l'article 20 de la Constitution» [14].
Le droit à un recours juridictionnel contre la décision d’émission d’un mandat d’arrêt européen. Bien que la CJUE consente à reconnaître la qualité d’autorité judiciaire d’émission aux autorités de poursuites non juridictionnelles, elle soumet, dans ce cas, la décision d’émission d’un mandat d’arrêt européen à une condition supplémentaire non prévue par la décision-cadre. En effet, la CJUE a ajouté que lorsque le droit de l’Etat membre d’émission attribue la compétence pour émettre un mandat d’arrêt européen à une autorité qui, tout en participant à l’administration de la justice de cet Etat membre, n’est pas elle-même une juridiction, la décision d’émettre un tel mandat d’arrêt et, notamment, le caractère proportionné d’une telle décision doivent pouvoir être soumis, dans ledit Etat membre, à un recours juridictionnel qui satisfait pleinement aux exigences inhérentes à une protection juridictionnelle effective (§ 75). Dans l’affaire «PF», la CJUE a relevé que les éléments du dossier dont elle disposait ne lui ont pas permis de savoir si les décisions de ce procureur d’émettre un mandat d’arrêt européen peuvent faire l’objet d’un recours qui satisfait pleinement aux exigences inhérentes à une protection juridictionnelle effective, ce qu’il appartient donc à la juridiction de renvoi de vérifier (§ 56). En France, un tel recours n’est pas prévu ce qui ne manquera pas de soulever d’importantes difficultés. Il paraît urgent que le législateur français instaure un tel recours même si sa mise en œuvre pratique peut laisser interrogateur dans la mesure où la personne faisant l’objet du mandat d’arrêt européen ne se trouve pas, par hypothèse, sur le territoire de la République, sauf à admettre un recours postérieur à la remise afin de contrôler les conditions d’émission du mandat d’arrêt européen et, notamment, sa proportionnalité. En outre, à supposer qu’un tel recours puisse être exercé à distance, il risque de retarder la remise et éventuellement allonger la privation de liberté destinée à la garantir.
Conclusion. La position adoptée par la CJUE semble tout à la fois respectueuse des systèmes juridiques nationaux et des exigences tenant à la garantie des droits fondamentaux notamment, quant à la nécessité d’un contrôle juridictionnel effectif du bien-fondé de la privation de liberté. Toutefois, il appartiendra aux législateurs nationaux de prévoir dans un tel cas, un recours effectif à l’encontre de la décision d’émission d’un mandat d’arrêt européen par une autorité de poursuites non juridictionnelle.
[1] CJUE, 27 mai 2019, aff. C-508/18, OG et C-82/19 PPU OG et PI (N° Lexbase : A1496ZDR) ; CJUE, 27 mai 2019, aff. C-509/18, PF (N° Lexbase : A1497ZDS), obs. D. Coujard, Gaz. Pal., 18 juin 2019, n° 22, p. 17 ; D., 2019, p. 1175.
[2] Arrêts CJUE, 29 juin 2016, aff. C-486/14, Piotr Kossowski (N° Lexbase : A5736RUY), CJUE, 10 novembre 2016, aff. C-452/16 PPU, Krzysztof Marek Poltorak (N° Lexbase : A3802SGW), CJUE, 29 juin 2016, aff. C-486/14, Piotr Kossowski (N° Lexbase : A5736RUY), CJUE, 10 novembre 2016, aff. C-453/16 PPU, Halil Ibrahim Ozçelik (N° Lexbase : A3803SGX) et CJUE, 10 novembre 2016, aff. C-477/16 PPU, Ruslanas Kovalkovas (N° Lexbase : A3804SGY) : G. Taupiac-Nouvel, Réflexions sur la consécration de la notion européenne d’autorité judiciaire, à propos de la jurisprudence récente de la Cour de justice de l’Union européenne, article disponible ici.
[3] Art. 1 § 1 : «Le mandat d’arrêt européen est une décision judiciaire émise par un Etat membre en vue de l’arrestation et de la remise par un autre Etat membre d’une personne recherchée pour l’exercice de poursuites pénales ou pour l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté».
[4] art. 6 § 1 : «L'autorité judiciaire d'émission est l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission qui est compétente pour délivrer un mandat d'arrêt européen en vertu du droit de cet Etat».
[5] JO 2002, L 190, p. 1
[6] A noter que les numéros de § visés sont toujours ceux de l’arrêt rendu sur les affaires jointes : C-508/18 et C-82/19 PPU OG et PI.
[7] Voir, en ce sens, arrêts du 10 novembre 2016, CJUE, 10 novembre 2016, aff. C-452/16, précité, point 28, et CJUE, 10 novembre 2016, aff. C-477/16 PPU, précité, point 29.
[8] Coir, en ce sens, arrêts du 10 novembre 2016, Poltorak, C‑452/16 PPU, précité, points 30 et 31, ainsi que du 10 novembre 2016, Kovalkovas, C‑477/16 PPU, précité, points 31 et 32.
[9] Voir, en ce sens, arrêts du 10 novembre 2016, Poltorak, C‑452/16 PPU, précité, points 33 et 35, ainsi que du 10 novembre 2016, Kovalkovas, C‑477/16 PPU, précité, points 34 et 36.
[10] Dans le même sens CJUE, 27 mai 2019, aff. C-509/18, PF, précité, § 39 - 42.
[11] CEDH, 29 mars 2010, Req. 3394/03, Medvedyev et autres c/ France ([LXB=])A2353EUP, § 124 : P. Hennion-Jacquet, L’arrêt Medvedyev : un turbulent sur les qualités du parquet français, D., 2010, p. 1390 ; J.-B. Thierry, L’arrêt Medvedyev C/ France du 29 mars 2010 : juge d’instruction : 1 – Parquet : 0, Dr. pénal, n° 6, juin 2010, ét. 12 ; F. Sudre, Le rôle du parquet en question, JCP éd. G, n° 16, p.454 ; J.-F. Renucci, L’affaire Medvedyev devant la grande chambre : les «dits» et les «non-dits» d’un arrêt important, D., 2010, p. 1386 ; CEDH, 23 novembre 2010, Req. 37104/06, Moulin c/ France (N° Lexbase : A7244GKI), D., 2010, actu. 2776, note S. Lavric ; D., 2011, point de vue 26, obs. F. Fourment ; D., 2011, p. 277, obs. J.-F. Renucci ; D., 2011, p. 338, obs. J. Pradel ; Dalloz actualité, 24 novembre 2010, obs. S. Lavric ; RSC, 2011, p. 208, obs. D. Roets ; Procédures, 2011, n° 30, obs. A.- S. Chavent-Leclere; Dr. pénal, 2011, n° 26, obs. A. Maron et M. Haas ; Dr. pénal, chron. 3, obs. E. Dreyer; Dr. pénal, chron. 7, obs. V. Lesclous, Dr. pénal, 2012, chron. 1, obs. E. Georget.
[12] Voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2016, Kovalkovas, C‑477/16 PPU, précité, point 47.
[13] Voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2016, Kovalkovas, C‑477/16 PPU, précité, point 42.
[14] Cons. const., décision n° 2017-680 QPC, du 8 décembre 2017 (N° Lexbase : A6818W4B), v. A. Botton, Lexbase Pénal, janvier 2018 (N° Lexbase : N2219BXH).
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Réf. : CE, 1° et 4° ch.-r., 8 juillet 2019, n° 420434, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A4045ZIN)
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par Charlotte Moronval
Le 17 Juillet 2019
► Si, lorsqu'il prévoit une interdiction de la consommation d’alcool sur le lieu de travail dans le règlement intérieur de l'entreprise, l'employeur doit être en mesure d'établir que cette mesure est justifiée par la nature des tâches à accomplir et proportionnée au but recherché, il n'en résulte ni que le règlement ne pourrait légalement fixer la liste des salariés concernés par référence au type de poste qu'ils occupent, ni que le règlement devrait comporter lui-même cette justification.
Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans un arrêt rendu le 8 juillet 2019 (CE, 1° et 4° ch.-r., 8 juillet 2019, n° 420434, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A4045ZIN).
En l’espèce, une société révise son règlement intérieur dont la nouvelle version comprend une "annexe au règlement intérieur concernant les contrôles d'état d'ébriété" dont il résulte que les salariés occupant des "postes de sûreté et de sécurité ou à risque", tels que définis par cette annexe, sont soumis à une "tolérance zéro alcool".
L’inspectrice du travail exige le retrait de la disposition relative à la "tolérance zéro alcool". La société demande l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail au tribunal administratif de Strasbourg, qui rejette sa demande par un jugement du 7 avril 2016. Elle se pourvoit alors en cassation contre l'arrêt du 6 mars 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy (CAA Nancy, 6 mars 2018, n° 16NC01005 N° Lexbase : A8036XNX) a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement.
En énonçant la règle susvisée, les Hauts magistrats administratifs estiment que la cour administrative d'appel de Nancy a commis une erreur de droit en se fondant, pour estimer que la société requérante n'apportait pas la preuve du caractère justifié et proportionné de l'interdiction imposée aux salariés occupant les postes mentionnés par l'annexe au règlement intérieur, sur la circonstance qu'elle s'était bornée à établir la liste de ces postes, tels que conducteurs d'engins de certains types, utilisateurs de plates-formes élévatrices, électriciens ou mécaniciens. Elle a, de même, commis une erreur de droit en estimant que, pour établir le caractère proportionné de l'interdiction imposée aux salariés occupant les postes ainsi listés, la société ne pouvait se prévaloir du document unique d'évaluation des risques professionnels, dès lors que le règlement intérieur n'y comportait aucune référence (sur les règles relatives aux boissons alcoolisées, cf. l’Ouvrage «Droit du travail» N° Lexbase : E3502ETU).
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Réf. : CJUE, 10 juillet 2019, aff. C-410/18 (N° Lexbase : A4911ZIQ)
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par Charlotte Moronval
Le 17 Juillet 2019
► L’article 45 TFUE et l’article 7, paragraphe 2, du Règlement n° 492/2011 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2011, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l’Union (N° Lexbase : L3701IQ7), doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une législation d’un Etat membre, telle que celle en cause au principal, qui subordonne l’octroi d’une aide financière pour études supérieures aux étudiants non-résidents à la condition que, à la date de la demande d’aide financière, l’un des parents de l’étudiant ait été employé ou ait exercé une activité dans cet Etat membre pendant une durée d’au moins cinq ans sur une période de référence de sept ans calculée rétroactivement à partir de la date de ladite demande d’aide financière, dans la mesure où elle ne permet pas d’appréhender de manière suffisamment large l’existence d’un éventuel lien de rattachement suffisant avec le marché du travail de cet Etat membre.
Ainsi statue la Cour de justice de l’Union européenne dans une décision rendue le 10 juillet 2019 (CJUE, 10 juillet 2019, aff. C-410/18 N° Lexbase : A4911ZIQ ; voir également CJUE, 20 juin 2013, aff. C-20/12 N° Lexbase : A7912KG7 et CJUE, 14 décembre 2016, aff. C-238/15 N° Lexbase : A5291SPN).
Dans cette affaire, M. Nicolas A. réside avec son père, M. Bruno A., dans une ville française proche de la frontière franco-luxembourgeoise. M. Bruno A., travailleur frontalier, a exercé une activité salariée au Luxembourg à partir d’octobre 1991 jusqu’à septembre 2014 avec notamment une interruption entre janvier 2008 et décembre 2012.
M. Nicolas A. a sollicité, en tant qu’étudiant ne résidant pas au Luxembourg, l’octroi d’une aide financière de l’Etat luxembourgeois pour poursuivre ses études supérieures à Strasbourg. A la date de la demande d’aide financière, M. Bruno A. avait été contribuable au Luxembourg et avait cotisé au régime de Sécurité sociale de cet Etat pendant plus de 17 ans.
Par décision du 5 novembre 2014, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche luxembourgeois a refusé de faire droit à cette demande d’aide financière en se fondant sur le non-respect de la condition de durée de travail minimale pendant la période de référence prévue dans la loi luxembourgeoise relative à l’aide financière de l’État pour les études supérieures. En effet, lors de l’introduction de la demande en obtention d’une aide financière pour études supérieures, le 29 septembre 2014, M. Bruno A. n’avait pas travaillé au Luxembourg durant cinq ans au cours d’une période de référence de sept ans ayant précédé la demande.
M. Nicolas A. a donc saisi le tribunal administratif luxembourgeois d’un recours contre la décision du ministre. La juridiction luxembourgeoise décide de demander à la Cour de justice si la condition selon laquelle il faut être enfants de travailleurs ayant été employés ou ayant exercé leur activité au Luxembourg pendant une durée d’au moins cinq ans au cours de la période de référence de sept ans à la date de la demande d’aide financière est nécessaire pour atteindre l’objectif revendiqué par le législateur luxembourgeois de contribuer à l’augmentation de la proportion de personnes titulaires d’un diplôme d’enseignement supérieur.
Enonçant la solution susvisée, la Cour de justice de l’Union européenne relève que cette règle issue de la législation luxembourgeoise, qui subordonne l’octroi aux étudiants non-résidents d’une aide financière pour études supérieures à la condition d’avoir un parent ayant travaillé au Luxembourg pendant une durée minimale de cinq années sur une période de référence de sept années précédant la demande d’aide financière comporte une restriction qui va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif légitime visant à augmenter le nombre des diplômés de l’enseignement supérieur au sein de la population résidente.
La Cour estime que calculer une durée minimale de cinq ans sur une période de référence de sept ans ne permet pas d’apprécier de manière complète l’existence d’un éventuel lien de rattachement avec le marché du travail luxembourgeois.
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