Une agression mortelle impliquant deux mineurs placés dans un lieu de vie et d'accueil n'est pas susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat. Telle est la solution d'un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 17 décembre 2010 (CE 1° et 6° s-s-r., 17 décembre 2010, n° 334797, publié au recueil Lebon
N° Lexbase : A6754GNH). L'ordonnance attaquée (CAA Bordeaux, 2 décembre 2009, n° 09BX02536
N° Lexbase : A6805GND) a condamné l'Etat à verser au Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions, à titre de provision, une somme de 55 000 euros correspondant aux indemnités que celui-ci a versées aux membres de la famille d'un mineur, décédé à la suite de l'agression commise par un autre mineur dans le lieu de vie auquel ils avaient été tous deux confiés par décisions judiciaires prises en application de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945, relative à l'enfance délinquante (
N° Lexbase : L4662AGR). Si, peut être recherchée, devant la juridiction administrative, la responsabilité de l'Etat en raison d'une agression commise par des mineurs placés dans un foyer dépendant de la PJJ (CE 1° et 6° s-s-r., 13 novembre 2009, n° 306517
N° Lexbase : A1565ENB et lire
N° Lexbase : N4569BM8), toutefois, cette responsabilité ne saurait être engagée sur le même fondement vis-à-vis des usagers du service public, qui ne se trouvent pas, face à un tel risque, dans une situation comparable à celle des tiers. Or, les deux mineurs, placés dans le même lieu de vie par décision de l'autorité judiciaire, avaient tous deux la qualité d'usagers du service public. Cette circonstance faisait, dès lors, obstacle à la mise en oeuvre du régime de responsabilité sans faute de l'Etat sur le fondement du risque spécial. En outre, la décision par laquelle une juridiction des mineurs confie la garde d'un mineur, dans le cadre d'une mesure prise en vertu de l'ordonnance du 2 février 1945, à l'une des personnes privées mentionnées au 3° de son article 10 ou au 2° de son article 16, transfère à celle-ci, la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler la vie du mineur. La responsabilité sans faute de l'Etat ne pouvait donc être engagée sur ce fondement, dès lors que le lieu de vie en cause, institution autonome ne relevant pas d'un service de l'Etat, exerçait la garde des deux mineurs. La Haute juridiction maintient ainsi sa jurisprudence "Thouzellier" (CE, 3 février 1956
N° Lexbase : A7164GNN), aux termes de laquelle la responsabilité de l'Etat est engagée en raison du risque créé par le non-enfermement des mineurs délinquants.
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