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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication
Le 27 Mars 2014
Je lui dis, alors, que la loi sur le travail dominical (loi n° 2009-974, 10 août 2009, réaffirmant le principe du repos dominical et visant à adapter les dérogations à ce principe dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines grandes agglomérations pour les salariés volontaires) avait été promulguée et que les touristes -puisque ce sont eux qui semblaient être visés par les motivations de la loi- pouvaient, enfin, faire leurs emplettes dominicales. Mais attention ! Sous certaines conditions afférentes à la zone géographique concernée, aux protections sociales, etc. comme nous le rappelle, cette semaine, Sébastien Tournaux, Maître de conférences à l'Université de Montesquieu Bordeaux IV.
A vrai dire, je sentais que la perspective de pouvoir acheter un sac à main de grande marque ou la dernière compilation du feu roi de la "pop", le dimanche, sans passer pour un bourreau social aux yeux de la loi française, ne l'émouvait pas plus que cela...
Aussi, je lui contais qu'il fut beaucoup question de pandémies, sur fond d'un ersatz d'histoire belge, comme seuls les français sont capables de les inventer ; une de ces histoire où, avec Benjamin Constant, dans Cécile, on risquait de conclure que "les précautions [...] pour que ce pressentiment ne se réalisât point furent précisément ce qui le fit se réaliser".
Mal des pays riches, pour la première fois, le juge judiciaire, par une ordonnance des référés du tribunal de grande instance de Créteil, du 11 août 2009, intimait à une société de télécommunication, non pas de démonter une installation-relais pour la téléphonie mobile, mais de ne pas l'édifier, malgré l'autorisation administrative préalablement délivrée à cet effet. Et, pour la première fois, également, le juge judiciaire se prononçait pour l'application du principe de précaution en faveur des habitants d'un immeuble riverain représentés par leur syndic de copropriété. Et, Anne-Laure Blouet-Patin, Directrice de notre rédaction, de vous proposer un entretien avec Sébastien Palmier et Laurent Frölich, avocats, Cabinet Palmier & Associés, avocats des demandeurs.
Ce faisant, depuis près d'un an, on ne compte plus les décisions judiciaires arguant du principe de précaution, principe international conventionnel de l'article 174 du Traité d'Amsterdam, repris dans notre législation sur l'environnement, pour la protection des riverains et le démantèlement de plusieurs antennes-relais. Mais, les juges judiciaires marquent, désormais, le pas, faisant fi des expertises contradictoires relatives aux risques sanitaires afférents à ces antennes, et appliquent le principe de précaution pour éviter, jugements après jugements, une pandémie qui serait liée à la nocivité des ondes électromagnétiques.
Alors qu'ils aient lu Platon ("Je ne sais qu'une seule chose, c'est que je ne sais rien") ou Bossuet ("La santé dépend plus des précautions que des médecins"), les juges en déduisent, presque, étymologiquement, qu'il s'agit de prendre garde (praecautio est tiré de cavere) à l'éventualité d'un risque. Le prochain opus est attendu le 23 septembre, auprès du tribunal de grande instance de Quimper qui devra se prononcer, dans une affaire où tous les experts écartent le risque d'éventuels dysfonctionnements de la valve régulant le liquide céphalorachidien de la plaignante, dus au rayonnement électromagnétique d'une antenne-relais.
L'affaire devrait se corser, encore, pour les magistrats, lorsque l'on sait qu'une étude française, publiée en avril dernier, montre que l'exposition aux ondes est maximale à environ 280 mètres de l'antenne-relais de téléphonie mobile et non en dessous de l'antenne elle-même (étude pilotée par Jean-François Viel, CNRS et université de Besançon, et publiée par la revue britannique Occupational & Environmental Medicine). Sans que l'on sache encore quels sont les risques. Mais, au moins, les hommes -et, au demeurant les magistrats- semblent avoir le pouvoir d'enrayer cette possible pandémie, à coup d'ordonnances... non remboursées par la Sécurité sociale.
Par ailleurs, mal des pays pauvres, sur toutes les ondes nocives ou pas -je ne sais-, la France s'est inquiétée, tout l'été, après que l'OMS ait relevé son niveau d'alerte en phase 6, des risques d'une pandémie de la grippe A (H1N1). Et, le Gouvernement de publier circulaires (notamment, la circulaire 2009/16 du 3 juillet 2009) et arrêtés, sur lesquels notre édition sociale revient cette semaine, aux fins d'alerter et d'encourager les administrations publiques, comme les entreprises privées, à se prémunir contre le développement du virus et à en limiter les effets sur la continuité des services publiques ou l'activité économique par l'adoption d'un PCA (plan de continuation de l'activité). Tout risque courant sur la santé, déjà fragile, des entreprises ou activités rescapées de la pandémie financière de l'été 2008 étant jugée inacceptable par nos responsables politiques. D'où les milliards d'euros déjà dépensés, en France, pour la gestion prévisionnelle de ce risque de pandémie... Mais, c'est que l'on avait tous en mémoire les vers de La Fontaine, dans Les animaux malade de la peste :
"Un mal qui répand la terreur,
Mal que le Ciel en sa fureur
Inventa pour punir les crimes de la terre,
La Peste (puisqu'il faut l'appeler par son nom)
Capable d'enrichir en un jour l'Achéron,
Faisait aux animaux la guerre".
Tels Janus, le même été, les français devaient maudire les ondes électromagnétiques... qui portent les informations et les conseils de prévention nécessaires à la gestion de la crise sanitaire. C'est à croire, avec Kipling, que, finalement, "il faut toujours prendre le maximum de risques avec le maximum de précautions". Et, mon ami étranger, un brin sarcastique, de me rappeler l'épilogue du fabuliste :
"Rien que la mort n'était capable
D'expier son forfait : on le lui fit bien voir.
Selon que vous serez puissant ou misérable,
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir".
*L'auteur remercie Jean d'Ormesson, pour cet emprunt à Manger son chapeau, lu dans Le Figaro du 27 août 2009
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Réf. : Décret n° 2009-982 du 20 août 2009, relatif aux pénalités financières prévues à l'article L. 162-1-14 du Code de la Sécurité sociale et à diverses mesures intéressant la lutte contre la fraude (N° Lexbase : L6550IEC)
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N7444BLB
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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit de la Sécurité sociale"
Le 07 Octobre 2010
I - Définition de la fraude et nature des sanctions
La loi n° 2004-810 du 13 août 2004, relative à l'assurance maladie (N° Lexbase : L0836GT7), avait réformé la procédure des pénalités financières en cas d'abus ou de fraude des professionnels, des établissements de santé et des assurés (3). Mais ce dispositif avait montré des limites : en 2006, 48 pénalités ont été prononcées pour un montant total de 66 000 euros, alors que, pour la même année, 4 661 cas de fraude ont été détectés. En 2007, le nombre de pénalités prononcées s'élève à 207, pour un montant total de 307 000 euros (4). La LFSS pour 2009 a ainsi réformé le régime des pénalités financières en cas d'abus ou de fraude des professionnels, des établissements de santé et des assurés : ces dispositions législatives ont été rendues opératoires par le décret n° 2009-982.
A - Définition générale
La définition de la fraude, contenue à l'article L. 162-1-14 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L3029IC8), introduit par la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 (art. 23-1), est complétée par le décret n° 2009-982, introduisant dans le Code de la Sécurité sociale un nouvel article R. 147-11 (N° Lexbase : L6581IEH), selon lequel sont qualifiés de fraudes les faits commis dans le but d'obtenir ou de faire obtenir un avantage ou le bénéfice d'une prestation injustifiée au préjudice d'un organisme d'assurance maladie ou, s'agissant de la protection complémentaire en matière de santé, de l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé ou de l'aide médicale de l'Etat, lorsqu'aura été constatée l'une des circonstances suivantes :
- l'établissement ou l'usage de faux, la notion de faux étant caractérisée par toute altération de la vérité sur toute pièce justificative, ordonnance, feuille de soins ou autre support de facturation, attestation ou certificat, sous forme écrite ou électronique, ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet de permettre l'obtention de l'avantage ou de la prestation en cause ;
- la falsification, notamment par surcharge, la duplication, le prêt ou l'emprunt d'un ou plusieurs documents originairement sincères ou enfin l'utilisation de documents volés de même nature ;
- l'utilisation par un salarié d'un organisme local d'assurance maladie des facilités conférées par cet emploi ;
- le fait d'avoir bénéficié, en connaissance de cause, des activités d'une bande organisée, sans y avoir activement participé ;
- ou la facturation répétée d'actes ou prestations non réalisés, de produits ou matériels non délivrés.
B - Typologie des fraudes
Le décret n° 2009-982 complète les dispositions législatives issues de la LFSS pour 2009 (CSS, art. L. 162-1-14) en introduisant dans le Code de la Sécurité sociale un nouvel article R. 147-6 (N° Lexbase : L6555IEI). Désormais, peuvent faire l'objet d'une pénalité :
- les assurés sociaux qui, dans le but d'obtenir, de faire obtenir ou de majorer un droit aux prestations d'assurance maladie, d'invalidité, d'accident de travail, de maternité, de maladie professionnelle ou de décès ou un droit à la protection complémentaire en matière de santé, à l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé ou à l'aide médicale de l'Etat, fournissent de fausses déclarations relatives à l'état civil, la résidence, la qualité d'assuré ou d'ayant droit ou les ressources, omettent de déclarer la modification d'une ou plusieurs de ces mêmes déclarations ;
- les assurés sociaux qui, dans le but d'obtenir ou de faire obtenir un avantage injustifié, procèdent à la falsification, y compris par surcharge, à la duplication, au prêt ou à l'emprunt, de tout document conditionnant la prise en charge d'un acte, produit ou prestation, ou à l'utilisation de documents volés de même nature ; abusent de leur qualité d'assuré social ou de bénéficiaire de l'aide médicale de l'Etat pour obtenir des produits de santé sans lien avec leur état de santé ; se font rembourser une prestation alors qu'ils font l'objet d'un refus de prise en charge ; obtiennent la suppression de la participation (prévue aux 3° et 4° de l'article L. 322-3 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L4517H98) par le non-respect du protocole ; ne respectent pas le caractère personnel de la carte (mentionnée à l'article L. 161-31 du même code N° Lexbase : L7916G7C) et les obligations qui en découlent ; ne respectent pas, pour bénéficier d'indemnités journalières, la condition d'être dans l'incapacité de continuer ou de reprendre son travail ;
- ou les assurés sociaux ayant empêché ou tenté d'empêcher l'exercice des activités de contrôle d'un organisme d'assurance maladie par le refus d'accès à une information, l'absence de réponse ou la réponse fausse, incomplète ou abusivement tardive à toute demande de pièce justificative, d'information, d'accès à une information, ou à une convocation, émanant de l'organisme local d'assurance maladie ou du service du contrôle médical, dès lors que la demande est nécessaire à l'exercice du contrôle ou de l'enquête.
Peuvent faire l'objet d'une pénalité les employeurs :
- qui portent des indications erronées sur les attestations (mentionnées aux articles R. 323-10 N° Lexbase : L6803ADC et R. 441-4 N° Lexbase : L0815HHN du Code de la Sécurité sociale), ayant pour conséquence la majoration du montant des indemnités journalières servies ;
- dont la responsabilité a été reconnue dans le bénéfice irrégulier par un assuré d'indemnités journalières ;
- qui n'ont pas procédé à la déclaration d'accident du travail (selon les modalités prévues aux articles R. 441-1 N° Lexbase : L7280ADY, R. 441-2 N° Lexbase : L7281ADZ et R. 441-4) ;
- ou qui n'ont pas respecté l'obligation de remise de la feuille d'accident, prévue à l'article L. 441-5 (N° Lexbase : L5288AD9) (CSS, art. R. 147-7 N° Lexbase : L6573IE8 et R. 147-7-1 N° Lexbase : L6579IEE).
Les pénalités financières prononcées à l'égard des professionnels de santé, fournisseurs et prestataires de services et laboratoires de biologie médicale sont définies par le décret n° 2009-982 aux articles R. 147-8 (N° Lexbase : L6565IEU) et R. 147-8-1-I (N° Lexbase : L6567IEX) du Code de la Sécurité sociale.
Peuvent faire l'objet d'une pénalité les professionnels de santé libéraux, fournisseurs et prestataires de services, laboratoires de biologie médicale et praticiens statutaires à temps plein des établissements publics de santé dans le cadre de leur activité libérale :
- ayant obtenu ou tenté d'obtenir, pour eux-mêmes ou pour un tiers, le versement d'une somme ou le bénéfice d'un avantage injustifié en ayant présenté ou permis de présenter au remboursement des actes ou prestations non réalisés ou des produits ou matériels non délivrés ;
- n'ayant pas respecté les conditions de prise en charge des actes produits ou prestations soumis au remboursement dans certains cas (non-respect des conditions de prise en charge ou prescription prévues lors de l'inscription au remboursement par l'assurance maladie des actes, produits ou prestations ou, encore, non-respects des conditions de prescriptions spécifiques ; non-respect, de manière répétée, de l'obligation de mentionner le caractère non remboursable des produits, prestations et actes qu'ils prescrivent en dehors des indications ouvrant droit à prise en charge ; non-respect, de manière répétée, des obligations pour le prescripteur, de mentionner le nom du pharmacien chargé de délivrer les soins ou traitements susceptibles de faire l'objet de mésusage, d'un usage détourné ou abusif et, pour le pharmacien, de ne procéder à la délivrance que si son nom est mentionné sur la prescription s'agissant des soins ou traitement en cause ; non-respect, de manière répétée, de l'obligation faite au pharmacien de délivrer le conditionnement le plus économique compatible avec les mentions figurant sur l'ordonnance ; utilisation abusive de la feuille d'accident consistant dans l'inscription sur celle-ci d'actes ou de délivrances ne relevant pas du livre IV ; non-respect, de manière répétée, de l'obligation de conformité des prescriptions avec le protocole ; non-respect du mode de transport prescrit ou des modalités de facturation des frais de transport ; facturation par une entreprise de transports sanitaires terrestres réalisés avec des moyens en véhicules et en personnels non conformes ; facturation par une entreprise de taxi à l'assurance maladie de transports réalisés sans être titulaire d'une autorisation de stationnement sur la voie publique ou d'une carte professionnelle en cours de validité) ;
- ayant empêché ou tenté d'empêcher l'exercice des activités de contrôle d'un organisme d'assurance maladie par le refus d'accès à une information, l'absence de réponse ou la réponse fausse, incomplète ou abusivement tardive à toute demande de pièce justificative, d'information, d'accès à une information ou à une convocation émanant de l'organisme local d'assurance maladie ou du service du contrôle médical, dès lors que la demande est nécessaire à l'exercice du contrôle, de l'enquête ou de la mise sous accord préalable ;
- n'ayant pas respecté, de manière répétée, certaines formalités administratives, comme la présentation des documents auxquels sont subordonnées la constatation des soins et l'ouverture du droit aux prestations de l'assurance maladie ; l'obligation de mentionner le caractère non remboursable des produits, prestations et actes qu'ils prescrivent ; l'obligation de faire figurer sur la feuille d'accident les actes accomplis au titre du livre IV ; l'obligation de mentionner, sur les documents destinés au service du contrôle médical, les éléments d'ordre médical justifiant les arrêts de travail, y compris les heures de sortie, et les transports qu'ils prescrivent ; ou, encore, l'obligation d'apposer sur l'ordonnance les mentions relatives aux délivrances des médicaments relevant des listes I et II et des médicaments stupéfiants ;
- ou pour lesquels l'organisme aura constaté, après deux périodes de mise sous accord préalable, un niveau de prescriptions ou de réalisations du même acte, produit ou prestation ou groupe d'actes, produits ou prestations, significativement supérieur à la moyenne régionale et pour une activité comparable.
Le décret n° 2009-982 complète les dispositions législatives de la LFSS pour 2009, en fixant un nouveau régime de pénalités financières prononcées à l'égard des établissements de santé (CSS, art. R. 147-9 N° Lexbase : L6582IEI et R. 147-9-1 N° Lexbase : L6560IEP). Peuvent faire l'objet d'une pénalité les établissements de santé :
- ayant obtenu ou tenté d'obtenir, pour eux-mêmes ou pour un tiers, le versement d'une somme ou le bénéfice d'un avantage injustifié en cas de facturation d'actes ou de prestations de soins de suite ou de réadaptation, de psychiatrie ou de soins de longue durée, non réalisés ; de facturation d'un acte, produit ou prestation déjà pris en charge par l'une des dotations (CSS, art. L. 174-1 N° Lexbase : L0265DPI et L. 162-22-13 N° Lexbase : L5265IEQ) ou par le forfait annuel (CSS, art. L. 162-22-8 N° Lexbase : L3099ICR) ;
- n'ayant pas respecté les conditions de prise en charge des actes, produits ou prestations soumis au remboursement en cas de manquement aux règles de facturation et de cotation des actes et prestations de soins de suite ou de réadaptation, de psychiatrie ou de soins de longue durée ; d'inobservation des règles de prise en charge (CSS, art. L. 162-1-7 N° Lexbase : L3019ICS) ;
- ayant empêché ou tenté d'empêcher l'exercice des activités de contrôle d'un organisme d'assurance maladie par le refus d'accès à une information, l'absence de réponse ou la réponse fausse, incomplète ou abusivement tardive à toute demande de pièce justificative, d'information, d'accès à une information, ou à une convocation, émanant d'un organisme local d'assurance maladie ou du service du contrôle médical, dès lors que la demande est nécessaire à l'exercice du contrôle, de l'enquête ou de la mise sous accord préalable ;
- n'ayant pas respecté les formalités administratives de facturation ou n'ayant pas respecté, de manière répétée, l'obligation faite à tout établissement de santé délivrant des médicaments relevant des listes I et II et des médicaments stupéfiants d'apposer sur l'ordonnance les mentions relatives aux délivrances ;
- ou pour les faits mentionnés à l'article R. 147-8 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L6565IEU) du fait de leurs salariés.
Peuvent faire l'objet d'une pénalité les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes :
- qui ne respectent pas le caractère forfaitaire de la prise en charge des actes, prestations et produits couverts par le forfait de soins partiel ou global du tarif journalier, lorsqu'il aura été constaté des facturations individuelles répétées de prestations d'assurance maladie déjà couvertes par les forfaits ;
- ayant empêché ou tenté d'empêcher l'exercice des activités de contrôle d'un organisme d'assurance maladie par le refus d'accès à une information, l'absence de réponse ou la réponse fausse, incomplète ou abusivement tardive, à toute demande de pièce justificative, d'information, d'accès à une information, ou à une convocation, émanant d'un organisme local d'assurance maladie ou du service du contrôle médical, dès lors que la demande est nécessaire à l'exercice du contrôle ou de l'enquête ;
- n'ayant pas respecté les formalités administratives relatives à la transmission des éléments prévus à l'article R. 314-169 du Code de l'action sociale et des familles (N° Lexbase : L6644G79), dès lors que cette transmission n'a pas été effectuée dans un délai de quinze jours après relance par le directeur de l'organisme local concerné ; l'obligation d'établir la demande de prise en charge prévue au c de l'article R. 174-15 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L3378HWZ) ou la transmission du tableau prévu à l'article D. 174-3 du même code (N° Lexbase : L9082ADQ) ;
- ou pour les faits mentionnés à l'article R. 147-8 (N° Lexbase : L6565IEU) du fait de leurs salariés (CSS, art. R. 147-10 N° Lexbase : L6583IEK).
II - Prononcé des sanctions
A - Recouvrement des indus et procédure de contrainte
Afin d'améliorer l'efficacité de la lutte contre la fraude, le législateur (LFSS, art. 118, créant un article L. 161-1-5 au Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L2949IC9) a, en 2008, étendu à tous les organismes de Sécurité sociale le droit de recourir à la procédure de la contrainte pour récupérer des prestations indues et autorisé les organismes débiteurs de prestations familiales à récupérer l'indu d'une prestation sur les autres aides versées à l'allocataire même si cette compensation se fait sur une prestation qui est financée sur un autre fonds que le Fonds national des prestations familiales, dont l'objet est de financer les prestations familiales.
La procédure de la contrainte existe depuis de nombreuses années pour recouvrer les dettes de cotisations sociales. Elle est utilisée très fréquemment par les Urssaf qui disposent ainsi d'un mécanisme simplifié de recouvrement. L'article L. 244-9 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L4979ADR) permet au directeur d'une Urssaf, après avoir envoyé au débiteur de cotisations sociales une mise en demeure resté sans effet, d'émettre un titre exécutoire dans des conditions dérogatoires au droit commun. L'article L. 161-1-5 reprend la même rédaction pour définir les effets juridiques de la contrainte que celle déjà existante pour la branche du recouvrement. L'ensemble des organismes de Sécurité sociale peuvent désormais recourir à cette procédure d'exécution pour recouvrer les prestations indues.
Il existe deux autres procédures permettant aux caisses de Sécurité sociale de recourir à la procédure de la contrainte. Cette possibilité est offerte, tout d'abord, pour le recouvrement des pénalités administratives qui visent à sanctionner les infractions commises par les bénéficiaires des prestations familiales, des prestations de l'assurance vieillesse et des prestations de l'assurance maladie, pour chercher à obtenir des prestations indues. Elle est aussi possible pour recouvrer les prestations indues auprès des professionnels de santé ou des établissements de soins lorsqu'ils n'ont pas respecté les règles de tarification ou de facturation. Cette extension de la procédure de contrainte permet d'éviter aux organismes de Sécurité sociale, en cas d'échec de la procédure amiable de recouvrement des indus, de devoir saisir le tribunal des affaires de Sécurité sociale pour obtenir un titre exécutoire et exercer le recouvrement selon les voies de droit commun, ce qui induit des frais de gestion, un allongement des délais de recouvrement et un encombrement des tribunaux.
B - Procédure des pénalités financières
L'article 115 de la LFSS 2009 a réformé la procédure des pénalités financières introduite par la loi n° 2004-810 du 13 août 2004. Ces pénalités financières visent à sanctionner les abus, les fraudes, les omissions volontaires permettant de percevoir un montant majoré de prestations et tout autre manquement délibéré aux prescriptions du Code de la Sécurité sociale commis soit par les bénéficiaires de l'assurance maladie, les professionnels de santé et les établissements de soins. La sanction est prononcée par le directeur de l'organisme local de l'assurance maladie après une procédure contradictoire et l'avis d'une commission constituée par des administrateurs de l'organisme qui apprécie la responsabilité du contrevenant et module la pénalité selon la gravité des faits. L'objectif recherché était de disposer d'une procédure de sanction administrative qui soit dissuasive en prévoyant une pénalité financière modulable, mais qui soit moins lourde que le recours à une procédure pénale ou à une procédure ordinale dans le cas des professionnels de santé.
Trois ans après la mise en oeuvre effective de cette procédure, il apparaît qu'elle a été peu utilisée en raison de la lourdeur du dispositif et du caractère peu dissuasif du montant des pénalités. La LFSS 2009 a donc procédé à une réécriture de l'article L. 162-1-14 du Code de la Sécurité sociale.
Ces mesures ont été complétées par le décret n° 2009-982. Désormais, l'organisme local d'assurance maladie compétent pour mener la procédure et prononcer la pénalité financière est celui qui a ou aurait supporté l'indu ou le préjudice résultant des abus, fautes ou fraudes en cause. En l'absence d'indu ou de préjudice, l'organisme compétent est alors celui dans lequel les contrôles, la procédure de mise sous accord préalable ou la bonne gestion des services ou du contrôle médical ont été affectés ou empêchés ; dans le ressort duquel exerce, à titre principal, le professionnel qui a récidivé après deux périodes de mise sous accord préalable ; dans le ressort duquel exerce, à titre principal, le professionnel (visé au 8° du II de l'article L. 162-1-14) ; auquel est affilié l'assuré pour lequel l'employeur n'a pas respecté les obligations mentionnées à l'article R. 147-7 ; auquel est rattaché le bénéficiaire de la protection complémentaire en matière de santé, de l'aide médicale de l'Etat ou de l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé (CSS, art. R. 147-1-I).
Lorsque des faits de même nature, commis par l'une des personnes mentionnées au premier alinéa du VI de l'article L. 162-1-14, ont causé un préjudice à plusieurs organismes locaux d'assurance maladie, les organismes compétents peuvent mandater l'un d'entre eux pour mener l'ensemble de la procédure (CSS, art. R. 147-1-II). L'organisme mandaté prononce la pénalité, recouvre et conserve la totalité de son montant au titre de ses frais de gestion, sauf mention contraire dans le ou les mandats.
Surtout, le décret donne des indications précieuses sur le régime du prononcé des sanctions (CSS, art. R. 147-2-I). Lorsqu'il a connaissance de faits susceptibles de faire l'objet de la pénalité financière, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie adresse à la personne physique ou morale en cause la notification par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Lorsque ces faits ont donné lieu à l'engagement de la procédure mentionnée à l'article L. 315-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L4682H9B), la notification ne peut intervenir qu'à l'issue de cette procédure. Cette notification précise les faits reprochés et le montant de la pénalité encourue et indique à la personne en cause qu'elle dispose d'un délai d'un mois à compter de sa réception pour demander à être entendue, si elle le souhaite, ou pour présenter des observations écrites. Lorsque la procédure de sanction est engagée à l'encontre d'un établissement de santé, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie en informe simultanément la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation.
Après que le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou son représentant, accompagné par un représentant du service du contrôle médical, a présenté ses observations, et après avoir entendu la personne en cause, la commission rend un avis motivé, portant notamment sur la matérialité et la gravité des faits reprochés, la responsabilité de la personne et le montant de la pénalité ou de chacune des pénalités susceptible d'être appliquée. La commission doit adresser son avis au directeur de l'organisme local, ainsi qu'à la personne en cause dans un délai maximum de deux mois à compter de sa saisine (CSS, art. R. 147-2-II).
A compter de la réception de l'avis de la commission ou de la date à laquelle celui-ci est réputé avoir été rendu, le directeur peut soit décider d'abandonner la procédure, auquel cas il en informe la personne dans les meilleur délais, soit décider de poursuivre la procédure, auquel cas il dispose d'un délai d'un mois pour notifier la pénalité à la personne en cause par une décision motivée et par tout moyen permettant de rapporter la preuve de la date de réception. Cette notification de payer précise la cause, la nature, le montant des sommes réclamées au titre de la pénalité ou de chacune des pénalités prononcées et mentionne l'existence d'un délai d'un mois, à partir de sa réception, imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées, ainsi que les voies et les délais de recours (CSS, art. R. 147-2-III).
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Réf. : Circ. DGT n° 2009/16 du 3 juillet 2009, relative à la pandémie grippale (N° Lexbase : L4592IES) ; circ. DGT n° 2009/15 du 26 juin 2009, relative au rôle des acteurs de santé au travail en cas de pandémie grippale (N° Lexbase : L4591IER)
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par Gwenaëlle Marie, SGR - Droit social
Le 07 Octobre 2010
D'une manière générale, l'employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (C. trav., art. L. 4121-1 N° Lexbase : L1448H9I). La circulaire prévoit qu'il relève de la responsabilité de chaque employeur de constituer un stock de masques qu'elles pourront délivrer à leurs salariés en cas de pandémie, le type de masque ("chirurgicaux", destinés à protéger les personnes à qui l'on fait face, ou "FFP2" pour prémunir les personnes qui les portent) dépendant de l'évaluation des risques et de la consultation du CHSCT. |
Les entreprises, de toute taille et de tout secteur d'activité, sont invitées à constituer un plan de continuité d'activité (PCA), afin de maintenir l'activité au niveau le plus élevé possible si la pandémie se déclare. Le chef d'entreprise ou d'établissement conduit la préparation d'un PCA en consultant les institutions représentatives du personnel. Il est conseillé d'associer à cette élaboration un maximum de collaborateurs (DRH, service juridique, risk manager, etc.). Le plan comporte une analyse des conséquences les plus significatives d'une pandémie grippale sur l'activité habituelle de l'entreprise et établit les missions prioritaires de l'entreprise devant être assurées en toutes circonstances et les moyens humains, matériels et financiers, alors, nécessaires. En cas de pandémie, l'employeur peut procéder à des modifications ou aménagements de l'exécution de la prestation de travail en ayant recours à des aménagements de poste, de nouveaux horaires, en jouant sur la durée du travail ou son lieu d'exécution, en faisant appel à la polyvalence des salariés pour remplacer le personnel absent ou, encore, au télétravail. Par ailleurs, les mesures du PCA doivent être graduées en fonction de la gravité de la crise. Il importe de partir d'hypothèses de travail réalistes prenant en compte les taux d'absentéisme envisagés (les principaux pouvant être de 25 % tout au long de la vague pandémique s'étalant entre 8 et 12 semaines ou de 40 % sur les deux semaines de pointe de la vague pandémique). Enfin, le PCA doit prévoir d'actualiser le document unique d'évaluation des risques (DUER), le programme annuel d'actions de prévention, ainsi que le règlement intérieur. |
L'employeur peut adapter l'organisation de son entreprise et le travail des salariés par la négociation avec les IRP ou, à défaut, par décision unilatérale après avis du CE ou des DP. Rappelons qu'il convient de ne pas perdre de vue la distinction entre un simple "changement des conditions de travail" (par exemple, augmentation du volume horaire par la sollicitation d'heures supplémentaires) et la "modification du contrat de travail" nécessitant l'accord du salarié (il en va ainsi de l'obligation de travailler à domicile). Le télétravail, forme d'organisation ou de réalisation du travail utilisant les technologies de l'information permettant de réaliser le travail hors des locaux de l'employeur de manière régulière, est une option qu'il peut être utile d'envisager. Dans cette hypothèse, l'accord écrit, mais réversible, du salarié est indispensable. Les catégories de salariés concernés peuvent être précisées par accords de branche ou d'entreprise. Par ailleurs, notons qu'en cas d'urgence, la durée du travail peut être modifiée par l'employeur ou sur autorisation de l'inspection du travail. Enfin, le prêt de main-d'oeuvre entre entreprises pour contrer un fonctionnement dégradé de l'économie peut s'avérer opportun. |
Pour limiter les risques de transmission, les entreprises doivent veiller à restreindre l'accès aux lieux de travail aux clients, aux intervenants extérieurs et aux visiteurs. Une autre piste consiste à éviter les rassemblements de personnes, lors de la restauration ou de réunions et à leur préférer respectivement des alternatives à la restauration collective ou la communication par courriel, téléphone ou visioconférence. |
Dans l'hypothèse où un salarié présent sur son lieu de travail est identifié comme cas possible de grippe A/H1N1, la procédure de prise en charge définie par les autorités sanitaires, consultable sur le site internet de l'Institut de veille sanitaire, lui est appliquée. Le salarié devra porter immédiatement un masque chirurgical et consulter un médecin. |
L'employeur peut recourir à des intérimaires ou embaucher des salariés sous CDD. Le contingent annuel d'heures supplémentaires peut être utilisé ou, après épuisement de celui-ci, le dispositif des heures choisies. Une autre possibilité consiste à utiliser des astreintes. |
Dans la mesure où l'employeur a mis en oeuvre les dispositions prévues par le Code du travail et les recommandations nationales, visant à protéger la santé et à assurer la sécurité de son personnel, qu'il a informé et préparé son personnel, notamment, dans le cadre des IRP, le droit individuel de retrait ne peut, en principe, trouver à s'appliquer. |
Précisons que les réponses apportées par cette circulaire sont susceptibles d'être complétées ou amendées en fonction de l'évolution de la situation, des connaissances et des décisions de la cellule interministérielle de crise. Ainsi, une circulaire relative aux stages professionnels et aux voyages scolaire sera présentée, le 16 septembre 2009, lors d'une des réunion de cette dernière par le ministère de l'Education nationale.
Enfin, notons que le décret n° 2008-733 du 25 juillet 2008 (N° Lexbase : L7293IAD), crée un Comité de lutte contre la grippe, placé auprès du ministre chargé de la Santé et constitué pour une durée de cinq ans, qui sera chargé d'apporter au ministre chargé de la Santé une expertise sur l'ensemble des mesures à mettre en oeuvre pour contrôler et réduire l'impact d'une épidémie de grippe ou d'une pandémie grippale.
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Réf. : CE 3° et 8° s-s-r., 31 juillet 2009, n° 296052, Société Fiteco, Publié au Recueil Lebon (N° Lexbase : A1242EK9)
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N7490BLY
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par Frédéric Dieu, Rapporteur public près la cour administrative d'appel de Marseille
Le 07 Octobre 2010
1.1. Une imposition jusqu'alors fondée sur l'article 161 du CGI
Le régime fiscal des actionnaires personnes physiques (mais la jurisprudence ne distingue pas leur situation de celle des actionnaires personnes morales, cf. infra), dont les titres sont rachetés par la société émettrice, dépend de la procédure juridique de rachat utilisée par la société. Lorsque le rachat est réalisé en vue d'une attribution des titres rachetés aux salariés (C. com., art. L. 225-208 N° Lexbase : L5391G7S), ou en vue d'un rachat par une société cotée opéré dans le cadre d'un plan de rachat d'actions cotées sur un marché réglementé (C. com., art. L. 225-209 N° Lexbase : L7002ICC à L. 225-12), c'est le régime des plus-values mobilières (CGI, art. 112, 6° N° Lexbase : L2650HNH qui renvoie à : CGI, art. 150-0 A N° Lexbase : L3635ICM ou CGI, art. 150-0 B N° Lexbase : L2312HL9) qui s'applique. En revanche, lorsque le rachat est réalisé en vue d'une réduction de capital non motivée par des pertes (C. com., art. L. 225-207 N° Lexbase : L8298GQE), c'était le régime des revenus de capitaux mobiliers (CGI, art. 109 ; CGI, art. 112, 1° ; CGI, art. 120, 3° N° Lexbase : L2125HLB et CGI, art. 161) qui devait s'appliquer de manière exclusive à cette procédure juridique. La loi de finances rectificative pour 2005 (loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 N° Lexbase : L6430HEU) a, cependant, modifié ce dispositif en prenant en compte, notamment, l'enrichissement réel des actionnaires (personnes physiques) depuis l'acquisition ou la souscription des titres jusqu'au rachat et en leur permettant, également, de constater les moins-values subies lors de ces rachats. Ces mesures n'ont remis en cause ni l'imposition dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers du boni réalisé lors d'un rachat, ni ses modalités de calcul (CGI, art. 161 modifié).
L'on voit donc que deux régimes étanches coexistent : d'un côté, celui des cessions d'actions ou autres droits sociaux à des tiers qui sont soumis au régime des plus-values de cessions, taxées à un taux proportionnel ; de l'autre, celui des rachats d'actions ou de droits sociaux par les sociétés émettrices, qui sont considérés comme des distributions de bénéfices, l'actionnaire étant alors soumis à l'impôt sur le revenu au taux progressif.
Précisément, la jurisprudence du Conseil d'Etat a eu pour but de maintenir ce cloisonnement en affirmant que le gain provenant du rachat de titres par une société soumise à l'impôt sur les sociétés constitue pour un associé personne physique, en l'absence de disposition de la loi prévoyant un autre traitement fiscal et dans la mesure où le prix d'acquisition par celui-ci est supérieur au montant de l'apport remboursable en franchise d'impôt, "non un gain net en capital relevant du régime d'imposition des plus-values de cession, mais un boni de cession qui a la même nature qu'un boni de liquidation, imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers" (CE, 9° et 10° s-s-r., 29 décembre 2000, n° 179647, M. Roesch N° Lexbase : A1979AI7, Dr. fisc., 2001, n° 15, comm. 337, concl. J. Courtial, RJF, 2001, n° 310, BDCF, 2001, n° 38, concl. J. Courtial ; CE, 3° s-s., 30 juillet 2003, n° 220260, M. Boutin N° Lexbase : A2708C98, Dr. Sociétés, 2003, comm. 218, note J.-L. Pierre ; CE, 9° et 10° s-s-r., 28 février 2007, n° 284565, Ministre c/ Mme Persicot N° Lexbase : A4284DU9, RJF, 2007, n° 599, BDCF, 2007, n° 61, concl. L. Vallée). Dans ces décisions, le Conseil d'Etat s'est appuyé sur l'article 161 du CGI, pour qualifier de revenus de capitaux mobiliers les gains provenant des rachats de droits sociaux effectués conformément aux dispositions de l'article L. 225-207 du Code de commerce (rachat par une société de ses propres actions en vue d'une réduction de son capital non motivée par des pertes). Aux termes de cet article 161 : "le boni attribué lors de la liquidation d'une société aux titulaires de droits sociaux en sus de leur apport n'est compris, le cas échéant, dans les bases de l'impôt sur le revenu que jusqu'à concurrence de l'excédent du remboursement des droits sociaux annulés sur le prix d'acquisition de ces droits dans le cas où ce dernier est supérieur au montant de l'apport", et "la même règle est applicable dans le cas où la société rachète au cours de son existence les droits de certains associés".
Jusqu'à l'intervention de la décision "Fiteco" du 31 juillet 2009, le Conseil d'Etat considérait, donc, que l'imposition de l'excédent du remboursement des droits sociaux rachetés à ses actionnaires par une société était fondée sur les seules dispositions de l'article 161 du CGI, se démarquant ainsi de l'administration qui fondait cette imposition sur une combinaison des articles 112-1° et 161 du CGI. Selon l'administration, en effet, l'article 161 du CGI était seulement un texte d'assiette, c'est-à-dire une disposition permettant de calculer l'impôt, et non un texte d'imposition, c'est-à-dire une disposition fondant l'impôt. Ce faisant, l'administration était cependant conduite (et peut-être était-ce là la principale justification de son raisonnement) à toujours fixer la base imposable au titre des revenus mobiliers entre les mains des actionnaires à la différence entre la somme reçue par ces derniers en remboursement des titres cédés à la société et le prix ou la valeur d'acquisition de ces titres, ce même dans le cas où le prix d'acquisition était inférieur à la valeur de l'apport. Au contraire, la jurisprudence du Conseil d'Etat visait et vise -car, sur ce point, la décision "Fiteco" du 31 juillet 2009 n'innove pas- à fixer en principe l'assiette de ces revenus de capitaux mobiliers à la différence entre la somme reçue par les actionnaires en remboursement des titres cédés à la société et le prix ou la valeur d'acquisition de ces titres, sauf dans le cas où le prix d'acquisition était inférieur à la valeur de l'apport : dans ce cas, en effet, le Conseil d'Etat fixe l'assiette de l'imposition à la différence entre le remboursement et le montant de l'apport. En se fondant sur le seul article 161 du CGI, le Conseil d'Etat prenait ainsi une position plus favorable aux actionnaires, justifiée par la nature de revenus de capitaux mobiliers du boni de liquidation. Dès lors que l'article 161 assimile le boni de cession dégagé par le rachat d'actions au boni de liquidation, ce boni de cession ne pouvait qu'appartenir à la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Selon le Conseil, les dispositions de l'article 161 constituaient, donc, "un régime particulier de taxation des revenus mobiliers" (J. Courtial, conclusions sous la décision "Roesch"). Placer ainsi l'article 161 du CGI à part des autres articles consacrés aux revenus de capitaux mobiliers était d'ailleurs assez logique puisque, bien que rattaché à ces revenus, il répond à une approche d'imposition des plus-values et ne peut donc se combiner avec des dispositions qui ont pour objet d'imposer la totalité d'une somme perçue.
Ajoutons que, jusqu'à la décision "Fiteco", le considérant de principe relatif à l'imposition de l'excédent des rachats d'actions, imposition fondée, donc, sur le seul article 161 du CGI, semblait subordonner l'application de cette imposition à l'annulation des droits sociaux rachetés, le Conseil se référant, en effet, à "l'excédent éventuel du remboursement des droits sociaux annulés sur le prix d'acquisition de ces droits".
Dès 2006, dans l'arrêt qui a été annulé par la décision "Fiteco", la cour administrative d'appel de Nantes s'était cependant écartée de la jurisprudence traditionnelle du Conseil d'Etat en considérant que c'étaient les dispositions de l'article 109-1, 2° (selon lequel sont des revenus de capitaux mobiliers "toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés [...] et non prélevées sur les bénéfices") qui s'appliquaient aux sommes versées par une société à l'un de ses actionnaires pour le rachat des actions que celui-ci détenait dans la société, la cour qualifiant, en effet, ces sommes de revenus distribués (CAA Nantes, 1ère ch., 22 mai 2006, n° 04NT00710 N° Lexbase : A7752DQ8, RJF, 2006, n° 1539, Dr. fisc., 2007, n° 12, comm. 305, concl. C. Hervouet).
Plus récemment, quelques mois avant la décision "Fiteco", la cour administrative d'appel de Paris s'est également écartée de la jurisprudence traditionnelle du Conseil d'Etat en considérant cette fois que c'est la combinaison des dispositions de l'article 109-1, 2° et des dispositions de l'article 161 du CGI qui doit conduire à taxer dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers les plus-values tirées du rachat de droits sociaux opéré au titre de l'article L. 225-207 du Code de commerce (CAA Paris, Formation plénière, 19 décembre 2008, n° 06PA03782, Société Pfizer Holding France N° Lexbase : A6610ECS, RJF, 2009, n° 743 ; cf. aussi, sur ce point, CAA Paris, 2ème ch., 4 février 2009, n° 08PA00863, Mlle Erra N° Lexbase : A5219EDN, RJF, 2009, n° 642). Ces arrêts de la cour administrative d'appel de Paris ont, ainsi, ouvert la voie à la solution retenue par le Conseil d'Etat dans la décision "Fiteco" du 31 juillet 2009.
Précisons, enfin, que la jurisprudence ne traite pas différemment les actionnaires personnes morales des actionnaires personnes physiques. En effet, si les associés concernés par les rachats de droits sociaux étaient, dans les décisions "Roesch" et "Boutin", des personnes physiques, il s'agissait, dans un arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon, d'une société civile (CAA Lyon, 2ème ch., 31 mai 2001, n° 00LY02511, Société Fields service N° Lexbase : A8740AZQ, Dr. Sociétés, 2002, comm. 33, note J.-L. Pierre, Dr. fisc., 2002, n° 14, comm. 288, concl. C. Millet) et, dans l'arrêt "Société Pfizer Holding France" de la cour administrative d'appel de Paris, d'une société de droit étranger. Cette dernière solution est donc particulièrement importante pour les sociétés étrangères : elle leur évite, lorsque l'opération de rachat de droits sociaux qu'elles détiennent se traduit (pour elles) par une moins-value, de faire l'objet d'une imposition sur une assiette égale au montant du rachat ou à une partie de celui-ci.
1.2. Une imposition résultant, désormais, de la combinaison des dispositions des articles 109, 1-2° et 161 du CGI
La décision du 31 juillet 2009 s'est donc prononcée sur la solution rendue par la cour administrative d'appel de Nantes dans l'arrêt du 22 mai 2006. Dans cet arrêt, le Conseil indique, d'abord, que "le rachat par une société, au cours de son existence, à certains de ses associés ou actionnaires personnes physiques, des droits sociaux qu'ils détiennent, notamment sous forme d'actions, correspond, sous réserve des dispositions de l'article 112 du Code général des impôts, à une mise à disposition au sens du 2° du 1 de l'article 109 du même code, susceptible de donner lieu à l'application de la retenue à la source prévue au 2 de l'article 119 bis du code". Sur ce point, le Conseil d'Etat a confirmé la solution qui avait été retenue par la cour administrative d'appel de Nantes dans l'arrêt qui lui était soumis en tant que juge de cassation et il a donc nettement affirmé, pour la première fois, que l'imposition de l'excédent du remboursement des droits sociaux rachetés à ses actionnaires par une société était fondée sur les dispositions de l'article 109-1, 2° du CGI et non sur celles de l'article 161 du CGI. La décision "Fiteco" modifie, donc, le fondement de cette imposition et, rejoignant, sur ce point, la position traditionnelle de l'administration, fait de l'article 161 du CGI un texte d'assiette, le Conseil affirmant que, "en vertu du second alinéa de l'article 161 du même code, qui, en se référant à la même règle' que celle prévue au premier alinéa, ne renvoie, eu égard à la différence d'objet entre les deux alinéas de cet article, qu'au mode de calcul de l'assiette, le prix du rachat ne correspond, pour chaque actionnaire, à un revenu distribué qu'à concurrence de l'écart, s'il est positif, entre le prix de ce rachat et celui auquel il a lui-même acquis les actions".
La situation est donc, aujourd'hui, la suivante : l'article 109, 1-2° du CGI est le fondement juridique de l'imposition de l'excédent du remboursement des droits sociaux rachetés à ses actionnaires par une société ; l'article 161 du CGI est l'assiette de cette imposition et permet de la calculer. En conséquence, lorsqu'une société rachète des titres à l'un de ses actionnaires résidant à l'étranger, elle doit soumettre la somme représentative de l'écart entre le prix de rachat (par elle) et le prix d'acquisition (par son actionnaire) des titres à une retenue à la source, à condition que cet écart soit positif pour l'actionnaire. Cette application de la retenue à la source est rendue possible par la modification du fondement de l'imposition : en effet, si le Conseil d'Etat avait persisté à fonder cette imposition sur les seules dispositions de l'article 161 du CGI, la retenue à la source prévue par l'article 119 bis du CGI n'aurait pu s'appliquer, puisque ces dispositions s'appliquent seulement aux "produits visés aux articles 108 à 117 bis". En revanche, dès lors que le fondement de l'imposition est l'article 109, 1-2° du CGI, la retenue à la source doit s'appliquer et être opérée par la société qui procède au rachat des actions.
S'agissant du mode de calcul de la retenue à la source ainsi opérée, le Conseil d'Etat a nettement infirmé la solution retenue par la cour administrative d'appel de Nantes dans l'arrêt du 22 mai 2006 puisqu'il a considéré "qu'en jugeant que l'administration fiscale était fondée à asseoir la retenue à la source assignée à la société sur la totalité du prix du rachat versé à son actionnaire, alors que les sommes versées ne peuvent être regardées comme un revenu distribué à l'actionnaire qu'à concurrence de l'excédent du remboursement des droits sur leur prix d'acquisition, en application du second alinéa de l'article 161 du Code général des impôts, la cour [avait] entaché sa décision d'une erreur de droit". En effet, dans son arrêt, la cour administrative d'appel de Nantes avait écarté l'application des dispositions de l'article 161 du CGI au motif que le rachat d'actions en cause n'avait pas été suivi de l'annulation des titres rachetés. Ce faisant, la cour n'avait fait que reprendre la solution résultant du considérant de principe de la décision "Roesch". Souhaitant affirmer l'applicabilité de cet article, comme texte d'assiette, à tous les rachats d'actions (qu'ils soient ou non suivis de l'annulation des titres rachetés), le Conseil d'Etat a été conduit à revenir sur sa jurisprudence antérieure, affirmant désormais que "ces dispositions relatives au rachat de droits sociaux [les dispositions de l'article 161 du CGI] trouvent application que les droits sociaux aient été ou non annulés après leur rachat par la société émettrice". Dans l'arrêt "Erra" précité, la cour administrative d'appel de Paris avait d'ailleurs déjà écarté la condition relative à l'annulation des titres. Outre que cette solution était économiquement nécessaire pour ne pas défavoriser l'actionnaire non-résident en asseyant, en l'absence d'annulation des titres rachetés, la retenue à la source sur la totalité du prix du rachat qui lui avait été versé, elle peut juridiquement se fonder sur la distinction des articles 161-1° et 161-2° : en effet, si le premier alinéa de l'article borne son champ d'application aux liquidations de sociétés impliquant mécaniquement l'annulation des titres, son deuxième alinéa étend cette application au cas du rachat d'actions par la société sans la conditionner à leur annulation.
2. Une combinaison contestable mais permettant tout de même de limiter l'imposition due par les actionnaires non-résidents
2.1. L'application des dispositions de l'article 109, 1-2° du CGI est contestable lorsque les titres rachetés par la société ne sont pas annulés par elle
En fondant l'imposition de l'excédent du remboursement des droits sociaux rachetés à ses actionnaires par une société sur les dispositions de l'article 109, 1-2° du CGI, le Conseil d'Etat a retenu une solution contestable, en particulier dans le cas où la société ne procède pas à l'annulation des titres rachetés.
En effet, comme l'avait fait le commissaire du Gouvernement C. Hervouet, dans ses conclusions sous l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 22 mai 2006, il faut souligner que, d'un point de vue logique, les sommes versées par la société pour le rachat de ses actions ne sont pas véritablement versées à l'actionnaire en sa qualité d'actionnaire, mais le sont en contrepartie de la perte de sa qualité d'actionnaire. Or, si le bénéficiaire des sommes en cause ne peut plus être véritablement qualifié d'actionnaire, il ne peut y avoir distribution au sens des dispositions de l'article 109, 1-2°, et les sommes en cause s'apparentent, alors, plutôt à un produit de cession. Cette remarque vaut en particulier dans le cas où la société ne procède pas à l'annulation des titres rachetés. Dans ce cas, en effet, le rachat des actions n'a eu aucun impact, au bilan, sur la valeur globale de l'actif net, puisque la société ne s'est pas appauvrie en rachetant ses actions, les liquidités ayant disparu de son actif étant ensuite compensées par des titres de valeur égale. Dans ce cas, la société se trouve dans une situation identique à celle dans laquelle l'associé aurait directement cédé ses titres à un tiers. Cette situation est donc différente de l'opération de rachat de titres suivie d'une réduction de capital : dans ce cas, en effet, il peut exister des réserves et des bénéfices qui sont susceptibles d'être appréhendés par l'associé. En revanche, lorsque la société ne procède pas à l'annulation des titres rachetés, le droit aux bénéfices et aux réserves de celle-ci est préservé et elle ne connaît pas de changement dans la composition de ses capitaux propres, seule étant modifiée l'identité de l'associé détenant ces titres, ce qui va donc plutôt dans le sens de reconnaissance d'une cession des titres et non d'une quelconque appréhension de revenus distribués.
Ajoutons que les dispositions de l'article L. 225-214 du Code de commerce (N° Lexbase : L8272GQG) imposent que les actions rachetées en vue d'être annulées soient cédées dans un délai d'un an ou, à défaut, annulées. Aussi longtemps que la société n'annule pas les actions qu'elle a acquises auprès de ses actionnaires, on peut s'interroger sur la reconnaissance d'un "désinvestissement" pour cette société, puisque celle-ci reçoit bien une contrepartie en échange de la somme qu'elle a versée à son actionnaire, cette contrepartie étant représentée par l'acquisition d'un élément d'actif d'égale valeur. Or, la jurisprudence traditionnelle du Conseil d'Etat conditionne la taxation au titre de l'article 109, 1-2° du CGI, à l'existence d'un désinvestissement au niveau de la société (CE, plén., 5 décembre 1984, n° 46962, Mme Etienvre N° Lexbase : A4105ALM, Dr. fisc., 1985, n° 22-23, comm. 1068, RJF, 1985, n° 251, concl. M.-A. Latournerie, p. 96 et s., C. David, O. Fouquet, B. Plagnet et P.-F. Racine, Les grands arrêts de la jurisprudence fiscale, Dalloz 2003, 4ème éd., thème 39, n° 8).
Au total, dans le cas où la société ne procède pas à l'annulation des titres rachetés, la qualification de revenus distribués des sommes versées à son actionnaire pour le rachat de ces titres s'accorde mal avec l'absence d'appauvrissement de sa part.
2.2. L'application des dispositions de l'article 161 du CGI permet de "neutraliser" l'assiette plus large de l'article 119 bis du CGI
En indiquant que la retenue à la source opérée par la société rachetant des actions à un actionnaire non-résident doit être calculée sur le fondement des dispositions de l'article 161 du CGI, le Conseil d'Etat, outre qu'il a infirmé la solution retenue par la cour administrative d'appel de Nantes, a condamné le raisonnement suivi par l'administration qui estimait que, dans le cas où le rachat n'était pas suivi d'une réduction de capital, la retenue à la source était exigible sur la totalité du prix de rachat, entièrement considérée comme un revenu distribué et non pas seulement sur la fraction de ce prix excédant le montant des apports réels ou assimilés (Doc. adm. 4 J-1224, n° 16). Cette position était particulièrement défavorable aux actionnaires non-résidents et de nature à les dissuader de céder leurs actions. L'application pure et simple des dispositions de l'article 119 bis du CGI conduisait, ainsi, à une impasse économique : l'assiette de cette retenue litigieuse est la totalité des "produits", c'est-à-dire des sommes distribuées ; or, l'on ne peut raisonnablement imposer la cession d'une action qu'à raison de la plus-value dégagée par l'actionnaire, la décision d'imposer la totalité du produit rendant de fait impossible la cession par les non-résidents d'actions aux sociétés.
En opérant une combinaison des articles 119 bis et 161 du CGI, le Conseil d'Etat, de manière purement prétorienne, mais dans le but de ne pas décourager la cession d'actions à la société émettrice des titres par les actionnaires non-résidents, a décidé d'asseoir la retenue à la source non sur le montant brut des sommes transférées, mais sur le montant net du profit effectivement réalisé par le non-résident eu égard au prix d'achat qu'il a lui-même supporté. Cette solution était d'ailleurs nécessaire pour assurer la conformité de la retenue à la source au droit communautaire, dans le cas où l'actionnaire auquel les actions sont rachetées est un résident communautaire. En effet, la CJCE a jugé que les articles 59 et 60 du Traité CEE devaient être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une législation nationale excluant que le débiteur de la rémunération versée à un prestataire de services non-résident, déduise, lorsqu'il procède à la retenue à la source de l'impôt, les frais professionnels que ce prestataire lui a communiqués et qui sont directement liés à ses activités dans l'Etat membre où est effectuée la prestation, alors qu'un prestataire de services résident de cet Etat ne serait soumis à l'impôt que sur ses revenus nets, c'est-à-dire sur ceux obtenus après déduction des frais professionnels (CJCE, 3 octobre 2006, aff. C-290/04, FKP Scorpio Konzertproduktionen GmbH c/ Finanzamt Hamburg-Eimsbüttel N° Lexbase : A3689DR3, RJF, 2007, n° 115).
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Le 07 Octobre 2010
Les objectifs de la création du régime de l'enregistrement sont présentés dans le rapport du ministère de l'Ecologie, de l'Energie, du Développement durable et de l'Aménagement du territoire (ci-après désigné "MEEDDAT") au Président de la République, relatif à l'ordonnance du 11 juin 2009. Il s'agit de :
- l'optimisation de l'intervention étatique : la création du régime de l'enregistrement a, en premier lieu, pour objectif de centrer l'intervention de l'Etat d'une part, sur les dossiers présentant un fort enjeu au plan de la protection de l'environnement et, d'autre part, sur le contrôle des installations ;
- l'allégement des procédures administratives pour les installations concernées : le régime de l'enregistrement a également pour objectif d'alléger les procédures administratives pour les petites installations dans les cas où les risques significatifs présentés par le projet peuvent être prévenus par le respect de prescriptions standardisées. Les installations qui seront soumises à enregistrement bénéficieront ainsi de délais réduits d'instruction, de quatre ou cinq mois, contre un délai de plus d'un an aujourd'hui pour les installations soumises à autorisation ;
- la définition d'un cadre clair et connu à l'avance par les exploitants : les prescriptions techniques applicables aux ICPE soumises à enregistrement, définies au niveau national, seront connues des exploitants avant le démarrage de la procédure administrative de demande d'enregistrement. Les exploitants pourront donc intégrer ces exigences en amont de la conception de leurs projets.
II - Le champ d'application du nouveau régime
Le champ d'application du régime de l'enregistrement est prévu par l'article L. 512-7, I. du Code de l'environnement (N° Lexbase : L3409IEY) qui dispose que "sont soumises à [...] enregistrement les installations qui présentent des dangers ou inconvénients graves [... pour l'environnement], lorsque ces dangers et inconvénients peuvent, en principe, eu égard aux caractéristiques des installations et de leur impact potentiel, être prévenus par le respect de prescriptions générales édictées par le ministre chargé des installations classées".
De surcroît, l'article L. 512-7, I., précise que les activités pouvant relever du régime d'enregistrement concernent les secteurs ou technologies dont les enjeux environnementaux et les risques sont bien connus, lorsque les installations :
- ne sont pas soumises à la Directive 2008/1/CE du 15 janvier 2008, relative à la prévention et à la réduction intégrée de la pollution (N° Lexbase : L7892H3P) ;
- ne sont pas soumises une obligation d'évaluation environnementale systématique au titre de l'annexe I de la Directive 85/337/CEE du 27 juin 1985, concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement (N° Lexbase : L9615AUN).
40 % environ des installations autorisées chaque année devraient répondre à ces critères. Une première phase de mise en oeuvre de la réforme pourrait en concerner la moitié.
Les secteurs proposés par la Direction générale de la prévention des risques (ci-après désignée "DGPR") pour une première vague d'enregistrement seront les suivants :
- transformation des matériaux de construction (broyage, matériel vibrant, enrobage) ;
- logistique (entrepôts, stations-services, réfrigération, blanchisserie) ;
- travail mécanique du bois, du plastique et des métaux ;
- agroalimentaire (caves, petites distilleries, divers produits agroalimentaires).
III - Le régime de l'enregistrement
Il convient d'examiner successivement les règles de procédure (A), les prescriptions (B) et les sanctions applicables (C).
A - Les règles de procédure
Les règles de procédure, fixées par les articles L. 512-7-1 (N° Lexbase : L3385IE4) et suivants du Code de l'environnement, prévoient la constitution d'un dossier mis à disposition du public, son instruction et la délivrance ou le refus d'un arrêté d'enregistrement. L'arrêté d'enregistrement est pris par le préfet après avis des conseils municipaux concernés.
L'article L. 512-7-3 du Code de l'environnement (N° Lexbase : L3369IEI) soumet l'obtention de l'arrêté d'enregistrement à la justification par le demandeur :
- que les conditions de l'exploitation projetée garantissent le respect de l'ensemble des prescriptions applicables ;
- qu'il possède les capacités techniques et financières pour assurer tant l'exploitation de l'installation que la remise en état du site après son arrêt définitif.
La procédure d'enregistrement est donc simplifiée par rapport à la procédure d'autorisation en ce qu'elle ne prévoit pas la production par l'exploitant d'une étude d'impact, d'une étude de dangers et la réalisation d'une enquête publique.
En vertu de l'article L. 512-7-2 du Code de l'environnement (N° Lexbase : L3381IEX), le préfet peut décider que la demande d'enregistrement sera instruite selon les règles de procédure de l'autorisation de droit commun, si :
- au regard de la localisation du projet, la sensibilité environnementale du milieu le justifie ;
- le cumul des incidences du projet avec celles d'autres projets d'installations, ouvrages ou travaux situés dans cette zone le justifie ;
- l'aménagement des prescriptions générales applicables à l'installation, sollicité par l'exploitant, le justifie.
Dans ce cas, le préfet notifie sa décision motivée au demandeur, en l'invitant à déposer le dossier correspondant. Sa décision est rendue publique.
L'article L. 512-7-4 (N° Lexbase : L3420IEE) prévoit que pour certaines ICPE, du fait de leur utilisation croissante du sol ou du sous-sol, l'enregistrement fixe la durée maximale de l'exploitation ou de la phase d'exploitation concernée et, le cas échéant, le volume maximal de produits stockés ou extraits.
Dans le cas où une demande de permis de construire a été déposée, le permis peut être accordé mais les travaux ne pourront être exécutés avant que le préfet ait pris l'arrêté d'enregistrement (C. envir., art. L. 512-7-3 N° Lexbase : L3369IEI).
B - Les prescriptions applicables
Deux types de prescriptions peuvent coexister :
Elles peuvent, notamment, prévoir :
- des conditions d'intégration du projet dans son environnement local ;
- l'éloignement des installations des habitations, des immeubles habituellement occupés par des tiers, des établissements recevant du public, des cours d'eau, des voies de communication, des captages d'eau ou des zones destinées à l'habitation par des documents d'urbanisme opposables aux tiers.
La procédure d'adoption de l'arrêté fixant les prescriptions générales d'exploitation est prévue par l'article L. 512-7-1, III., du Code de l'environnement : les prescriptions générales sont fixées par arrêté du ministre chargé des Installations classées, après publication du projet d'arrêté, transmission pour avis du Conseil supérieur des installations classées et consultation des ministres intéressés.
Concernant l'application du régime d'enregistrement dans le temps, il convient de noter que la publication d'un arrêté de prescriptions générales est nécessaire à l'entrée en vigueur du classement d'une rubrique de la nomenclature dans le régime d'enregistrement. De surcroît, l'arrêté fixant des prescriptions générales s'impose de plein droit aux installations nouvelles. Il précise, après avis des organisations professionnelles intéressées, les délais et les conditions dans lesquels il s'applique aux installations existantes (C. envir., art. L. 512-7-1, III.).
Le préfet a la possibilité d'assortir l'enregistrement de prescriptions particulières complétant, renforçant ou incluant des aménagements aux prescriptions générales applicables à l'installation, notamment en raison des circonstances locales (C. envir., art. L. 512-7-3).
De surcroît, en vertu de l'article L. 512-7-5 du Code de l'environnement (N° Lexbase : L3376IER), si l'exécution des prescriptions générales applicables à l'exploitation n'est pas suffisante pour assurer la protection de l'environnement après la mise en service de l'installation, le préfet pourra imposer, par arrêté complémentaire, toutes prescriptions nécessaires.
C - Les sanctions applicables
Deux types de sanctions sont envisageables :
L'article L. 514-2 du Code de l'environnement (N° Lexbase : L2313IEE), relatif aux sanctions administratives applicables en cas d'exploitation d'une ICPE sans titre, intègre les installations soumises à enregistrement. Les sanctions sont similaires à celles encourues par les exploitants d'installations classées soumises à autorisation ou à déclaration.
L'article L. 514-7 du Code de l'environnement (N° Lexbase : L3415IE9) intègre également l'enregistrement : cet article prévoit la suspension de l'exploitation de l'installation présentant pour l'environnement des dangers ou inconvénients qui n'étaient pas connus lors de son enregistrement.
Aux termes de l'article L. 514-9 du Code de l'environnement (N° Lexbase : L3379IEU), le fait d'exploiter une installation sans l'enregistrement requis est puni d'un an d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. En cas de condamnation, le tribunal peut interdire l'utilisation de l'installation. L'interdiction cesse de produire effet si un enregistrement intervient ultérieurement. L'exécution provisoire de l'interdiction peut être ordonnée.
Aux termes de l'article L. 514-11, II. (N° Lexbase : L3401IEP), le fait de poursuivre l'exploitation de l'installation sans se conformer à l'arrêté de mise en demeure d'avoir à respecter, au terme d'un délai fixé, les prescriptions techniques relatives aux ICPE soumises à enregistrement, est puni de six mois d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.
Aux termes de l'article L. 514-11, III., le fait de ne pas se conformer à l'arrêté de mise en demeure de prendre, dans un délai déterminé, les mesures de surveillance ou de remise en état prescrites en vertu des dispositions concernant les ICPE soumises à enregistrement lorsque l'activité a cessé, est puni de six mois d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.
Le régime d'enregistrement des installations classées constitue donc une autorisation simplifiée permettant aux exploitants de bénéficier de délais d'instruction réduits, avec le garde-fou constitué par la possibilité accordée au préfet de revenir à la procédure d'autorisation s'il l'estime nécessaire au regard des caractéristiques du dossier.
L'abandon de la production d'une étude d'impact, d'une étude de danger et de la tenue d'une enquête publique lors de la demande d'exploitation pour les ICPE "E" suscite, toutefois, des interrogations quant à l'équivalence de la prise en compte de l'environnement pour ces installations par rapport aux installations soumises à autorisation.
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Réf. : TGI Créteil, 11 août 2009, n° 09/00658, Syndicat de copropriétaires Tour Antoine & Cléopatre c/ SA Orange France (N° Lexbase : A7629EKR)
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par Anne-Laure Blouet Patin, directrice de la rédaction
Le 07 Octobre 2010
Sébastien Palmier et Laurent Frölich : C'est une affaire qui concerne des particuliers qui contestent l'installation, non encore effectuée, d'une antenne relais sur le toit de l'immeuble qui se trouve à côté du leur, antenne relais qui, si elle avait été érigée, se serait trouvée à 12,5 mètres de leur appartement.
Nous avons donc invoqué le risque pour la santé des requérants au regard du principe de précaution rappelé par l'article L. 110-1 du Code de l'environnement (N° Lexbase : L2175ANU) (2) en demandant l'interdiction d'édifier cette antenne relais.
Lexbase : Quels sont les éléments novateurs qui ressortent de cette ordonnance ?
Sébastien Palmier et Laurent Frölich : D'abord, le tribunal considère que la société Orange a méconnu tout à la fois le devoir de prudence et le principe de précaution. En réalité, les juges ont constaté l'existence d'un risque, qui ressort de plusieurs études scientifiques, de répercussions des ondes sur l'état de santé des habitants de l'immeuble du fait du nombre de volts par mètre émis : ce risque pouvant se traduire selon les rapports des experts par des maux de tête, des difficultés de sommeil, des nausées voire des cancers.
Ainsi, le tribunal reconnaît l'existence d'un risque au regard du principe de précaution alors que les juridictions ont toujours des réticences à faire application de ce principe que beaucoup considèrent comme un grand principe un peu incantatoire mais que l'on peut difficilement appliquer dans la vie quotidienne. Et là le tribunal accepte d'en faire l'application.
Ensuite, le tribunal considère que le syndicat des copropriétaires a un intérêt à agir pour le compte de l'ensemble des habitants de l'immeuble. En effet, en application de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 (loi n° 65-557, fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, art. 14 N° Lexbase : L4807AHI), le syndicat de copropriétaires a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes
Un autre élément innovant de cette ordonnance est que les rares jugements favorables obtenus jusqu'alors concernaient la nécessité d'assurer la protection de populations plus sensibles que d'autres aux ondes émises par les antennes relais, et notamment les enfants, ce qui était le cas dans le cadre de la décision prononcée par le TGI d'Angers du 5 mars 2009. En clair, l'interdiction d'installer une antenne relais était prononcée lorsqu'elle se trouvait à proximité d'une école ce qui n'est pas le cas ici, puisque les plaignants sont des adultes, de simples habitants d'un immeuble à côté duquel la société Orange souhaitait installer son antenne relais.
Il faut également savoir que les niveaux sur la limitation de l'exposition du public aux champs électriques, donc le nombre de volts par mètre en fonction de la fréquence des réseaux, sont plus stricts en Belgique et en Italie qu'en France.
De plus, le rapport du Directeur général de la santé de janvier 2001(3) préconisait la mise en place de périmètre d'exclusion de 100 mètres à l'intérieur desquels certains bâtiments sensibles comme les écoles, les crèches et les hôpitaux ne pouvaient pas être implantés, périmètre d'exclusion qui n'a jamais été intégré dans la réglementation française. Au final, avec cette décision, le juge judiciaire renforce la protection due aux riverains des antennes relais et qui n'a pas encore été accordée par les pouvoirs publics.
Enfin, l'on peut relever, dans cette décision, la sévérité de la condamnation prononcée par le juge des référés puisque la société Orange se voit interdire la construction de l'antenne sous astreinte de 5 000 euros par jour et par infraction constatée.
Pour aller plus loin : comme nous l'avons évoqué dans nos propos introductifs, la question des antennes relais est l'une des questions récurrentes de ces derniers mois en matière environnementale. Et tout le débat réside dans la question de l'existence d'un risque pour la santé ou non. Alors qu'une étude conduite par l'Afsset en 2005 sur demande du Gouvernement avait conclu à l'absence de risque pour la santé des riverains, le rapport bioinitiative, validé par le Parlement européen en septembre 2008, sur lequel s'appuient de nombreuses associations, montre des conséquences importantes sur la santé des riverains. Celle-ci est toutefois décriée par l'Académie de médecine qui énonce que "d'une part les antennes de téléphonie mobile émettent exclusivement en haute fréquence ; d'autre part, le risque d'exposition aux champs d'extrêmement basses fréquences n'est pas considéré par le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) comme démontré". Enfin, bien que très attendue, l'étude internationale baptisée Interphone (4) est toujours en cours de réalisation. Toutes ces données seront prises en compte pour une nouvelle étude qui sera rendue publique par l'Afsset d'ici à la fin du mois de septembre 2009. Ce travail a été commandité en août 2007 par les ministères en charge de l'Ecologie et de la Santé qui souhaitaient mettre à jour un avis de 2005 de l'Afsset sur la téléphonie mobile (5). Pour cette nouvelle expertise, l'Afsset élargit son travail à toutes les applications radiofréquences, comme la radio et la télévision, la téléphonie mobile, ou les nouvelles technologies comme le Wi-Fi, WiMAX et la télévision mobile personnelle. Et, en fin d'année 2009, l'agence complétera le travail sur les champs électromagnétiques en rendant une autre expertise sur les basses fréquences.
Du côté des perspectives législatives et règlementaires, le Parlement européen a adopté, le 2 avril 2009, une résolution sur les préoccupations quant aux effets pour la santé des champs électromagnétiques. La controverse au sein de la communauté scientifique relative aux possibles risques sanitaires dus aux champs électromagnétiques s'est amplifiée depuis le 12 juillet 1999 et la fixation de limites d'exposition du public aux champs électromagnétiques (0 Hz à 300 GHz) par la recommandation 1999/519/CE (transposée en droit national par l'ordonnance n° 2000-914 du 18 septembre 2000, relative à la partie législative du Code de l'environnement). La Commission européenne est donc invitée à procéder à la révision de la base scientifique et du bien-fondé des limites fixées pour les champs électromagnétiques dans la recommandation 1999/519/CE et à en faire rapport au Parlement. Parallèlement ou alternativement à cette modification des normes européennes pour les champs électromagnétiques, la Commission devrait élaborer, en coordination avec les experts des Etats membres et les secteurs industriels concernés, un guide des options technologiques disponibles et efficaces dans la réduction de l'exposition aux champs électromagnétiques. Concernant les antennes relais, les députés encouragent les administrations chargées de délivrer les autorisations d'installation des antennes de téléphonie mobile à passer des accords, en coopération avec les opérateurs du secteur, pour le partage des infrastructures, afin d'en réduire le nombre. Les Etats membres et les autorités locales et régionales sont invitées à se doter d'un régime unique pour les autorisations relatives à l'installation d'antennes relais, ainsi qu'à inclure dans leurs plans d'urbanisation un plan régional de répartition des antennes. Enfin, les députés estiment qu'il est dans l'intérêt général de favoriser des solutions reposant sur le dialogue entre acteurs industriels, pouvoirs publics, autorités militaires et associations de riverains quant aux critères d'installation de nouvelles antennes GSM ou de lignes à haute tension. Dans ce contexte, il convient de veiller, au moins, à ce que les écoles, les crèches, les maisons de repos et les établissements de santé soient tenus à une distance donnée de ce type d'équipements, déterminée sur la base de critères scientifiques. Au niveau national, le projet de loi portant engagement national pour l'environnement, dit "Grenelle II", sur lequel le Parlement devrait se pencher dans les mois à venir, comporte un article relatif aux ondes électromagnétiques. Son article 72 vise à renforcer l'encadrement réglementaire existant, accroître l'information du public et développer la recherche sur les ondes électromagnétiques pour prévenir l'exposition des populations aux ondes électromagnétiques. L'article L. 32-1, II du Code des postes et communications électroniques (N° Lexbase : L2801IBD), qui permet au ministre chargé des Communications électroniques et à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) de prendre des mesures de régulation du secteur des communications électroniques et leur demande, dans le cadre de leurs attributions, de veiller au respect de certains intérêts visant, notamment, au maintien et au développement du service public des communications électroniques ainsi qu'à la protection du consommateur, serait complété afin qu'ils puissent, conjointement avec les ministres chargés de la Santé et de l'Ecologie, veiller, également, à un niveau élevé de protection de l'environnement et de la santé de la population et que cet objectif soit systématiquement pris en compte dans leur mission. De son côté, l'article L. 34-9-1 du Code des postes et des communications électroniques (N° Lexbase : L3811HHM) impose le respect de valeurs limites de champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de communications électroniques ou par certaines installations lorsque le public y est exposé. Le respect de ces valeurs peut être vérifié sur place par des organismes répondant aux exigences de qualité fixées par décret. Le projet de loi propose de rendre systématique la transmission des résultats de ces mesures à l'Agence nationale des fréquences (ANFr) par ces organismes, afin que celle-ci puisse disposer d'un état des lieux de l'état des champs de radiofréquence le plus complet possible et le rendre public sur le site internet cartoradio.fr. Au final, force est de constater que le juge judiciaire brave les rapports scientifiques, voire parlementaires (6) dans un objectif de protection de la population. Et la situation s'avère paradoxale : d'un côté l'Etat impose aux opérateurs d'installer des antennes, dans le cadre de leurs obligations légales de couverture du territoire et de qualité de service ; de l'autre, le juge ordonne le démontage des antennes conformes à la réglementation ou annule les décisions d'autorisation de construction. D'autres affaires du même ordre sont pendantes devant les juridictions qui devraient faire pencher la balance d'un côté ou de l'autre. |
(1) CA Versailles, 14ème ch., 4 février 2009, n° 08/08775, SA Bouygues Télécom c/ Epoux Lagouge époux Gravier, époux Laharotte (N° Lexbase : A9361ECP) ; TGI Carpentras, 16 février 2009, n° RG 08/00707, Monsieur Gilbert Boutin, Madame Huguette Boutin c/ Société SFR Cegetel (N° Lexbase : A6793EDX) ; TGI Angers, 5 mars 2009, n° RG 08/00765, Madame Madeleine Girardeau épouse Cassegrain et autres c/ SA Orange France, SAS Spis Ouest Centre (N° Lexbase : A0737EEZ). Pour aller plus loin, lire également, Réseaux de téléphonie mobile et préservation de la santé, à l'orée des lois "Grenelle 1 et 2" - Questions à Marie-Laetitia de La Ville-Baugé, collaboratrice au sein du cabinet Baker & McKenzie, Lexbase Hebdo n° 105 du 2 avril 2009 - édition publique (N° Lexbase : N9952BIG).
(2) Le principe de précaution a été codifié en droit français par l'ordonnance n° 2000-914 du 18 septembre 2000, relative à la partie législative du Code de l'environnement (N° Lexbase : L8585AIS).
(3) Les Téléphones mobiles, leurs stations de base et la santé : état des connaissances et des recommandations, Denis Zmirou, Janvier 2001, La Documentation française.
(4) L'étude épidémiologique internationale "Interphone" vise à déterminer si l'utilisation de téléphones mobiles accroît le risque de cancer et si les champs électromagnétiques de radiofréquences émis par les téléphones mobiles sont cancérogènes. Elle est coordonnée par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) et a été initiée en 1999. Cette étude rassemble une série d'études cas-témoins réalisées avec un protocole central commun par 13 pays : Allemagne, Australie, Canada, Danemark, Finlande, France, Israël, Japon, Norvège, Nouvelle-Zélande, Royaume-Uni et Suède. La publication des résultats est réalisée par chaque pays au fur et à mesure de la finalisation des études. Les résultats partiels actuellement disponibles, analysés par le CIRC, ne permettent pas encore de conclure sur le lien entre l'utilisation du téléphone mobile et le risque de cancer, notamment en raison de la difficulté de l'analyse de certains biais. Il est nécessaire de disposer de la consolidation de l'ensemble de ces études et d'atteindre une puissance statistique suffisante pour apporter une analyse objective des résultats. La publication des conclusions globales de cette étude est attendue courant 2009.
(5) Rapport Afsset, 2005.
(6) Le rapport remis le 9 juillet 2009 par la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire souligne le fait que l'arrêt rendu par la cour d'appel de Versailles, le 4 février 2009, condamnant un opérateur à démonter une antenne relais, est en contradiction avec la jurisprudence du Conseil d'Etat (CE 7 s-s., 22 août 2002, n° 245622, SFR N° Lexbase : A3013AZM). L'opérateur concerné s'est, d'ailleurs, pourvu en cassation. Et, les rapporteurs de souligner, à la lecture des avis des pouvoirs publics et des autorités sanitaires internationales et nationales, que la décision divergente de la cour d'appel de Versailles peut paraître surprenante. A cet égard, ils rappellent la conclusion de la Table ronde gouvernementale "Radiofréquences, santé, environnement", du 25 mai 2009 : "l'expertise internationale est à ce jour convergente sur la question des antennes et conclut, qu'en l'état actuel des connaissances scientifiques, et compte tenu des faibles niveaux d'exposition autour de ces installations [...], l'hypothèse d'un risque pour la santé des populations vivant à proximité des antennes relais de téléphonie mobile ne peut être retenue".
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Le 07 Octobre 2010
Tous les moyens sont bons ! Toutes les techniques sont employées par des personnes avides d'argent -peu soucieuses du respect de la paix des familles et de la volonté de leurs aînés et proches- pour tenter de récupérer le capital d'un contrat d'assurance vie. Et de prétendre que la clause bénéficiaire ne doit pas être interprétée de telle ou telle manière ; et de soutenir même que le souscripteur, assuré ne disposait pas de toutes ses facultés mentales au moment de la passation du contrat, de tel avenant ou de telle modification. Nous n'avions quasiment jamais rencontré ce type d'argument (1), tout au moins devant la Cour de cassation : c'est chose faite avec cet arrêt de la première chambre civile, en date du 1er juillet 2009.
En trois ans, à la fin des années 1980, une femme avait souscrit cinq contrats d'assurance vie. Le tiers bénéficiaire de quatre de ceux-ci était sa belle-soeur, l'épouse de son frère, Mme C.. Fin juillet 2003, changeant d'avis, comme le fonctionnement de telles assurances le lui permet, elle avait décidé, après avoir été hospitalisée au cours du mois de juin, de modifier la clause bénéficiaire et de désigner à la place de sa belle-soeur, deux de ses neveux. La vie familiale n'a-t-elle pas de ces rebondissements ? Et au fond, quoi de plus logique, a priori, puisque l'espérance de vie de neveux est plus grande que celle de leurs aînés. Leurs besoins financiers sont, également, plus élevés, parfois, que ceux de leurs parents, même si des exceptions sont indubitables.
Conscient de cet ordre des choses, tous les membres de la famille auraient pu se féliciter de ce changement. Que nenni ! Ce fut, au contraire, l'occasion de se disputer âprement les gains, pour ne pas parler de sources de conflits graves et irrémédiables entre des individus qui se doivent aide et assistance. Et l'on en viendrait presque à comprendre pourquoi Pothier (2), Portalis et tant d'autres (3) étaient hostiles aux assurances vie. Le père de pages mémorables, dans son discours préliminaire du Code civil, sur le droit de la famille, ses vertus et la nécessité de préserver celle-ci à tout prix doit se retourner dans sa tombe (4). Bref ! Loin de rencontrer un tel enthousiasme désintéressé, c'est l'appât du gain qui prédomine.
En effet, la souscriptrice étant décédée, à 92 ans, deux mois après avoir modifié la clause bénéficiaire, sa belle-soeur s'est empressée, et d'invoquer son insanité d'esprit, et d'assigner ses deux fils, tiers bénéficiaires, en annulation de la modification réalisée au mois de juillet, sur les fondements des articles 489 (N° Lexbase : L3043ABC) et 901 (N° Lexbase : L3550AB4) du Code civil. Rappelons que ceux-ci prévoient, respectivement, que "pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit", et que, "pour faire une donation ou un testament, il faut être sain d'esprit". Or, ces textes, applicables à l'espèce, n'ont pas été l'objet de la moindre modification à l'occasion des réformes récentes, comme celle issue de la loi du 5 mars 2007 (loi n° 2007-308, portant réforme de la protection juridique des majeurs N° Lexbase : L6046HUH) ; ils s'appliquent, à l'espèce comme de manière générale, dans ce type de situation.
N'excluons pas, certes, que les deux neveux, manipulateurs, aient su inciter leur tante à leur attribuer cette qualité avantageuse. De là à ce qu'elle soit considérée comme ayant perdu ses facultés mentales, il y a un pas qui ne pouvait être franchi aussi rapidement que d'aucuns le désiraient. En tous les cas, la Cour de cassation ne le souhaite pas et l'on ne peut que saluer son sens de la nuance et du respect d'autrui, fut-il âgé. Ajoutons enfin -et c'est encore là, notamment, une preuve supplémentaire du caractère "éclaté" de la famille qui a peu de chance de se recomposer avec ses membres initiaux- que la soeur des deux gratifiés, nièce de l'assurée et souscriptrice, était intervenue à l'instance pour soutenir les prétentions de sa mère.
Les premiers juges vont commencer par opposer à la mère des neveux et donc à la belle-soeur de cette souscriptrice, son absence d'intérêt à agir. En effet, outre qu'elle n'était plus tiers bénéficiaire, elle n'était pas davantage héritière de l'assurée décédée. Seule la nièce, fille de la bénéficiaire initiale, écartée ensuite, est jugée autorisée à engager une action, mais pour elle-même. Et c'est à ce titre que les magistrats vont prononcer la nullité de l'avenant intervenu en juillet 2003, ce qui a pour conséquence de restituer à la mère de cette nièce et belle-soeur de la défunte, la qualité de bénéficiaire de quatre des contrats conclus. Cette conclusion est reprise -du moins par motifs propres- par la cour d'appel de Reims dans un arrêt en date du 28 janvier 2008. Cette dernière estime, en effet, que la souscriptrice avait "un état cérébral lacunaire" et qu'elle "n'était donc plus en mesure de contracter à la date de signature de l'avenant". Propos graves et lourds de conséquences qui vont permettre à la Cour de cassation d'exercer sa censure.
Nos Hauts magistrats ne vont pas raisonner ainsi, en se fondant sur l'article 489 du Code civil, qui ne se résume pas seulement à l'affirmation rappelée ci-dessus, et comporte deux autres dispositions tout aussi fondamentales : "c'est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental au moment de l'acte" et, en outre, "du vivant de l'individu, l'action en nullité ne peut être exercée que par lui, ou par son tuteur ou curateur, s'il lui en a été nommé un. Elle ne s'éteint que par le délai prévu à l'article 1304 (N° Lexbase : L8527HWQ)", c'est-à-dire suivant une prescription abrégée de cinq années. La Cour de cassation, estimant qu'une telle preuve n'a pas été rapportée, casse donc l'arrêt d'appel. Elle rappelle la distinction à effectuer selon que la personne suspectée d'insanité d'esprit est encore vivante ou qu'elle est décédée. Et lorsqu'elle est décédée, comme dans le cas présent, sans, en plus, avoir été placée sous sauvegarde de justice, curatelle ou tutelle, les actes qu'elle a passés ne peuvent être attaqués pour cause d'insanité d'esprit que s'ils portent, en eux-mêmes, la preuve d'un trouble mental. Dans le cas contraire, l'action ne peut être engagée que par la personne elle-même n'étant plus saine d'esprit, soit son tuteur, soit son curateur. Or, la Cour de cassation estime là encore que les faits de l'espèce ne correspondent à aucun de ces trois cas prévus par l'article 489 du Code civil pour son application.
Une approbation totale de cet arrêt s'impose sur de nombreux plans. Tout d'abord, il convient de ne pas associer l'insanité avérée, constatée de manière officielle, c'est-à-dire par un médecin, et ce qui n'est que supposé, soupçonné, à tort ou à raison. Encore de telles constatations ne peuvent-elles être effectuées par n'importe quel médecin : le médecin traitant habituel n'est pas habilité. Il faut que cet homme de soins figure sur une liste validée par le tribunal de grande instance. Il doit, en outre, émette un avis précis sur le degré de perte d'autonomie de la personne, pour utiliser tant la formule officielle qu'édulcorée pour évoquer les pertes de mémoire des personnes âgées. Or, il est vrai que la nouvelle coqueluche -si nous pouvons nous permettre ce mauvais jeu de mot- de l'opinion publique, ces dernières décennies, s'appelle Alzheimer. S'il ne s'agit, en aucun cas, de contester l'amplification de l'horrible phénomène, il convient aussi d'en respecter les caractéristiques médicales reconnues, et donc de ne pas attribuer à n'importe quelle personne âgée cette terrible maladie.
Ensuite, eu égard aux faits, la solution est bienvenue car, dans une société vieillissante, il ne saurait être question d'admettre que tous les individus de plus de 80 ans, par exemple, après avoir souvent été qualifiés d'inutiles, soient également considérés incapables, dans tous les sens du terme. Il y a là une dérive qu'il convient de ne pas laisser s'amplifier et que la Cour de cassation, dans son infinie sagesse, n'a pas manqué d'entrevoir. Tout juste bons à s'être sacrifiés des années pour accumuler quelques subsides sur lesquels certains vont se ruer.... Enfin et surtout, en droit pur, la solution est à porter au fronton de l'équilibre, du respect d'autrui et de la dignité de la personne humaine réunis.
Car les termes ont un sens. Le Code civil exige une insanité d'esprit, c'est-à-dire -pour exprimer l'idée de manière plus abrupte, mais exacte en droit, selon les propos du dictionnaire Cornu (5)- la démence ou aliénation mentale. Nul doute que l'état cérébral lacunaire constitue au moins un stade antérieur à cette altération grave des facultés mentales. La cour d'appel n'avait qu'à mieux motiver, en droit, sa décision. Et la meilleure preuve que là se situe surtout le reproche de la Cour de cassation, c'est que celle-ci ne casse pas pour manque de base légale -caractéristique de l'insuffisance de faits probants- mais pour violation de la loi, motif utilisé pour sanctionner l'absence de respect des conditions d'un texte. De plus, la Cour de cassation ne ferme pas la porte à toute admission d'une stipulation faite de manière irraisonnée ; elle a, d'ailleurs, déjà déclaré nulles des dispositions prises peu de temps avant le décès du souscripteur. Pour autant, des règles précises doivent être respectées et la motivation soigneusement élaborée.
Pour toutes ces raisons l'arrêt doit être salué. Et pour conclure, disons que les faits de l'espèce ne donnent guère envie d'épargner au cours de sa vie. C'est à ne plus souhaiter avoir des tiers bénéficiaires à désigner dans des contrats d'assurance vie... Heureusement que les généreux stipulants ne voient pas leurs proches se déchirer ainsi, ensuite, sur l'autel de la cupidité.
Véronique Nicolas, Professeur agrégé, Faculté de droit de l'Université de Nantes, Directrice du master II "Responsabilité civile et assurances", vice-doyen, membre de l'IRDP
En toute objectivité, ces derniers temps le contentieux du droit des assurances vie devient passionnant pour tout juriste, a fortiori chercheur. Non pas qu'il soit plus volumineux que dans d'autres matières ; mais il ne manque pas de richesse, au singulier ; il gagne en densité. En effet, l'imagination débordante des praticiens eux-mêmes, attisée sans doute par les requêtes nouvelles voire toujours plus insolites des assurés ou souscripteurs, offre une pléiade de litiges intellectuellement intéressante, sans évoquer -bien entendu- les enjeux financiers. A bien y regarder, rien d'étonnant à ce constat : les multiples clauses contractuelles que comprennent les polices d'assurance constituent un vivier pour réaliser des constructions ou montages juridiques adaptés à l'évolution des moeurs, du droit et des besoins économiques des individus.
Pour être précis, indiquons que c'est surtout la clause bénéficiaire qui ouvre des perspectives qui apparaissent, pour l'heure, sans limites. Chaque contrat étant particulier, des formules originales sont ainsi inventées. Et de ce seul et strict point de vue, on ne peut donc que constater qu'une nouvelle étape a été franchie. En effet, il y a quelques mois encore, il était souvent exposé et répété qu'il convenait, pour le souscripteur, d'être attentif au libellé exact retenu, dans son contrat, de la clause bénéficiaire. Et nous fustigions, à l'envi, les méfaits des clauses bénéficiaires standards (6). Il est donc rafraîchissant et encourageant de constater qu'une évolution s'opère, plus vite sans doute que dans d'autres domaines. Les cocontractants débordent d'imagination pour biaiser les moyens fournis par le droit dans des perspectives correspondant davantage à leurs besoins.
En l'espèce, un homme avait souscrit un contrat d'assurance vie dans lequel, de manière classique, il avait désigné comme tiers bénéficiaires son fils et sa fille, issus de son premier mariage. Là où il a fait preuve d'originalité, c'est en rédigeant un testament authentique par lequel il instituait ces mêmes enfants légataires universels "à charge pour eux de délivrer à sa seconde épouse le capital décès du contrat d'assurance". Pervers ? Qui a dit pervers ? Car l'arrêt n'indique pas, bien entendu, si les relations entre les enfants et cette seconde épouse -pour plagier Françoise Chandernagor (7)- étaient houleuses ou non. Si elles ne l'étaient pas, elles le sont devenues après cette découverte de l'imagination débordante de leur père ou de son absence de transparence, pour employer un euphémisme.
L'assureur -sans que l'on puisse le lui reprocher étant donné les circonstances- ayant versé le capital aux enfants du de cujus, la seconde femme de l'assuré les a assignés en vue de récupérer les sommes correspondantes. Le legs était sans ambiguïté ; ils liaient les enfants. Par conséquent, c'est sans surprise que l'on apprend que les premiers juges ont fait droit à la prétention de la seconde femme de l'assuré. La cour d'appel ayant statué dans le même sens, les enfants s'étaient donc pourvus en cassation. Notre Haute juridiction de droit privé commence par approuver la cour d'appel d'avoir considéré que le testament réalisé s'analysait en un legs universel avec charges, ce qui était prévisible. Puis elle rappelle -ce qui ne fait aucun doute pour qui connaît les articles L. 132-13 (N° Lexbase : L0142AAI) et L. 132-16 (N° Lexbase : L0145AAM) du Code des assurances instituant des dérogations par rapport au droit commun des successions- que "le capital stipulé payable lors du décès de l'assuré à un bénéficiaire déterminé ou à ses héritiers n'entre pas dans la masse de calcul de la réserve et de la quotité disponible".
Sur ce deuxième aspect, il ne saurait non plus être question d'en être ébaubi : depuis le XIXème siècle la règle est acquise. A partir de la décision de la Cour de cassation de modeler la stipulation pour autrui de l'article 1121 du Code civil (N° Lexbase : L1209ABE) afin de donner une assise juridique aux assurances vie, toute la construction n'a eu pour objectif que de faire sortir du patrimoine du stipulant les sommes qui seront octroyées au tiers bénéficiaire grâce au droit direct qu'il a sur le promettant, assureur. Or, si le capital ne figure plus dans le patrimoine de celui qui, en droit des assurances, est le souscripteur, les dispositions relatives au calcul de la réserve et de la quotité disponible n'ont plus lieu d'être. La Cour de cassation ne pouvait, en l'espèce, devant l'obstination des enfants de l'assuré et souscripteur, que rappeler ce qui peut apparaître comme des évidences.
Pour finir, nos Hauts magistrats estiment que le legs universel ayant pour objet le capital décès, les enfants du de cujus ne pouvait demander une réduction du capital à hauteur de la quotité disponible. En d'autres termes, la Cour de cassation admet que le contrat d'assurance vie soit l'objet d'une disposition testamentaire. L'opération dans son ensemble est donc validée. Ce qui ne manque pas de retenir l'attention, c'est le montage réalisé et son caractère presque provocateur à l'égard des tiers bénéficiaires officiels, fort marris de découvrir un autre bénéficiaire, non pas en sous-ordre, mais bien, au contraire, qui vient prendre place à leurs côtés. Pourquoi faire simple lorsque l'on peut faire compliqué disait notre bon maître (8) ? Telle est la remarque qui s'impose en l'espèce. En effet, il était plus simple à cet homme de modifier la clause bénéficiaire de son contrat d'assurance en faveur de sa seconde épouse. Ce ne fut pas son choix ; il le pouvait.
En effet, l'article L. 132-8, alinéa 6, du Code des assurances (N° Lexbase : L6141H9C) a permis que la désignation des tiers bénéficiaires puisse ne pas être effectuée dans l'une des clauses du contrat d'assurance, comme c'est le cas de manière classique. Ce texte énumère les modalités de désignation autorisées ; mais, en réalité, la jurisprudence a effectué une application large des quelques cas énumérés au sein de cet article. Ainsi au-delà de la possibilité de procéder à la désignation bénéficiaire au moyen d'un avenant au contrat, le texte admet la cession de créance, à condition que les formalités de l'article 1690 du Code civil (N° Lexbase : L1800ABB) soient respectées, l'endossement lorsque la police d'assurance est à ordre, ainsi que le testament comme mode de désignation du ou des tiers bénéficiaires.
Or, cette dernière hypothèse avait été inscrite, en toutes lettres, selon le voeu délibéré du législateur, en 1930, afin justement de démontrer ainsi que même dans cette circonstance, les règles du droit du contrat d'assurance s'appliquent et non celles du droit des successions (9). Si, pendant quelques temps, cette faculté n'a peut-être pas été autant exploitée qu'elle aurait pu l'être, elle a été de nouveau conseillée -et notre assuré avait bien compris le système- à tout souscripteur d'un contrat d'assurance vie qui ne souhaite pas que le ou les tiers bénéficiaires aient connaissance, avant son décès, de l'avantage qui leur était ainsi conféré. Il ne saurait donc être envisagé de remettre en cause ce qui a été construit de manière volontaire et consacré.
Une telle remise en question serait d'autant plus malvenue que le législateur, au travers de la loi du 17 décembre 2007 (loi n° 2007-1775, permettant la recherche des bénéficiaires des contrats d'assurance sur la vie non réclamés et garantissant les droits des assurés N° Lexbase : L5472H33), a renforcé les droits du souscripteur, stipulant qu'il peut s'opposer à l'acceptation, par les tiers, de la stipulation faite, a priori, à leur profit. Au-delà de la règle elle-même, l'esprit de l'évolution réalisée est significatif. Le but du législateur est de desserrer l'étau qui entourait souvent le souscripteur, pas toujours conscient des enjeux, ou pas assez conseillé sur les dangers de l'attitude bienveillante consistant à avertir le tiers bénéficiaire de l'avantage lui ayant été octroyé. Or, gratifier une personne signifie souvent en sacrifier d'autres, ce qui est toujours source de désillusions voire d'aigreur et de rancoeur. Autant ne pas assister de son vivant au triste spectacle de cette réalité quelque peu sordide et conserver quelques illusions sur la réaction de ceux qui ont été, au moins en partie, évincés. Et dans le cas présent, il ne peut qu'être constaté soit que le souscripteur a eu raison d'agir ainsi, soit qu'il avait une connaissance précise des relations entre les protagonistes.
Véronique Nicolas, Professeur agrégé, Faculté de droit de l'Université de Nantes, Directrice du master II "Responsabilité civile et assurances", vice-doyen, membre de l'IRDP
Le bénéfice de la responsabilité décennale de l'article 1792 du Code civil (N° Lexbase : L1920ABQ) est réservé, par la lettre de cet article, au "maître ou [à] l'acquéreur de l'ouvrage".
C'est donc sur le terrain de la qualité à agir que s'opère un filtre parmi tous ceux qui pourraient avoir intérêt à agir contre le constructeur.
La notion de maître de l'ouvrage est, traditionnellement, comprise comme visant le propriétaire de l'immeuble. La Cour de cassation a, ainsi, qualifié l'obligation de garantie décennale de "protection légale attachée à la propriété de l'immeuble et peut être invoquée par tous ceux qui succèdent au maître de l'ouvrage, en tant qu'ayant cause, même à titre particulier, dans cette propriété" (10).
Est-ce à dire que tous ceux qui ne seraient titulaires que d'un droit personnel leur permettant d'user de l'immeuble sont exclus du bénéfice de la responsabilité décennale et voués à user du droit commun (responsabilité délictuelle ou contractuelle) ?
Le demandeur au pourvoi dans l'arrêt rapporté du 1er juillet 2009 tentait de s'opposer à cette logique.
En l'espèce, une société locataire de locaux sis dans un centre commercial a fait réaliser des travaux d'aménagement qui présenteront des désordres. Elle assigne, notamment, l'entrepreneur ayant réalisé les travaux et son assureur.
Les juges du fond ont déclaré le locataire irrecevable à agir sur le fondement de l'article 1792 du Code civil, ont condamné l'entrepreneur sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun, et ont débouté le locataire de sa demande contre l'assureur "RC décennale" de l'entrepreneur.
L'entrepreneur a tenté de voir son assureur condamné en soutenant que "la qualité de locataire n'est pas exclusive de celle de maître de l'ouvrage, laquelle appartient à celui qui a commandité les travaux ; qu'en déclarant la société Siana-CDM irrecevable à agir à l'encontre de la société Mottard sur le fondement de la garantie décennale, tout en constatant l'existence d'un contrat d'entreprise conclu entre ces deux sociétés, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1792 et 1792-1 du Code civil (N° Lexbase : L1921ABR)"
Cette définition du maître de l'ouvrage comme le cocontractant d'un contrat de louage d'ouvrage correspond sans doute à celle du droit des contrats. Mais elle n'est pas en phase avec le droit de la construction.
Il est, en effet, bien établi que le locataire n'a pas qualité à agir sur le fondement de l'article 1792. La jurisprudence a eu l'occasion de l'énoncer, en 2006 (11) à l'égard du crédit-preneur, dont le crédit-bailleur avait acquis un immeuble auprès du maître de l'ouvrage, qui quelques temps plus tard présentera des désordres, en énonçant que : "le crédit-preneur est locataire, qu'en cette qualité il ne peut bénéficier des articles 1792 et suivants du Code civil, que, par contre, il est recevable à agir sur le fondement délictuel", précisant qu'à ce titre, il "ne pouvait pas demander, sur ce fondement, la somme correspondant à la réparation des désordres de construction, mais seulement l'indemnisation du préjudice en résultant, la cour d'appel a violé les textes susvisés".
L'espèce jugée le 1er juillet 2009 est comparable, hormis le fait qu'ici c'est le locataire qui avait "commandé" les travaux à l'origine des désordres, ce qui explique que le fondement adéquat soit la responsabilité contractuelle et non, comme dans l'espèce précitée, délictuelle.
On ne sera donc pas surpris que, dans cet arrêt du 1er juillet 2009, la troisième chambre civile réitère cette solution en énonçant très clairement que "la cour d'appel a retenu, à bon droit, qu'en sa qualité de locataire, la société Siana-CDM n'était titulaire que d'un simple droit de jouissance sur l'ouvrage dont elle n'avait pas la propriété, ce qui ne lui permettait pas de se prévaloir de la qualité de maître de l'ouvrage et qu'elle ne disposait donc pas de l'action en garantie décennale que la loi attache à la propriété de l'ouvrage, et non à sa jouissance" (c'est nous qui soulignons).
L'arrêt examiné vient ainsi s'inscrire dans une ligne ferme, ayant déjà jugé, notamment, que n'ont pas qualité à agir sur le fondement de l'article 1792, l'associé d'une société d'attribution (seule la SCI étant propriétaire de l'immeuble) (12), le locataire-attributaire (13) ou encore une association syndicale qui ne fait qu'assurer la gestion des ouvrages atteints de désordres (14).
Quant au locataire, privé du droit d'agir sur ce fondement, son sort n'est nullement modifié par la circonstance que son bailleur ayant commandité les travaux du local loué les a lui-même exécutés, étant par ailleurs entrepreneur.
C'est l'enseignement d'un arrêt du 17 février 1999 (Cass. civ. 3, 17 février 1999, n° 96-19.888, Compagnie UAP aux droits de laquelle vient la société Axa assurances IARD, société anonyme c/ Société Gary, société anonyme et autres, inédit N° Lexbase : A6364CUA). Au visa de l'article 1792 du Code civil, la Cour de cassation avait alors censuré les juges d'appel ayant retenu que le bailleur "étant à la fois maître d'oeuvre et maître de l'ouvrage pour la construction réalisée, il y a lieu de retenir sa responsabilité en tant que constructeur", aux motifs que "en statuant ainsi, sans constater que la société G. [comprendre le locataire] avait conclu un contrat de louage d'ouvrage avec M. X, la cour d'appel a violé le texte susvisé".
Peut-être le demandeur au pourvoi de l'arrêt du 1er juillet 2009 s'était-il convaincu d'une possibilité de lire a contrario la motivation de ce précédent pour permettre à un locataire qui, lui, aurait bien conclu un tel louage d'ouvrage, d'agir sur le fondement de l'article 1792 du Code civil.
Cette porte se ferme, définitivement. Il faut s'en réjouir. Reste à la victime à utiliser les ressources du droit commun et à vérifier si l'entrepreneur, garanti en décennale, ne jouissait pas d'une garantie facultative couvrant sa responsabilité de droit commun...
L'insistance du demandeur permet, en l'espèce, d'en douter, et peut-être est-ce la crainte d'une insolvabilité de l'entrepreneur qui l'avait poussé à soutenir, jusqu'au bout, la recevabilité d'une action en garantie décennale d'un locataire ?
Sébastien Beaugendre, Maître de conférences en droit privé, Faculté de droit de Nantes, Membre de l'Institut de Recherche en droit privé (IRDP)
(1) A l'exception d'une ou deux vagues tentatives, non couronnées de succès : Cass. com., 12 juillet 1971, n° 70-11.102, Epoux D. c/ B. et autres, publié (N° Lexbase : A1924CHQ) ; Cass. soc., 8 janvier 1953, Bull. civ. V, n° 22, p. 16.
(2) Pothier, par M. Bugnet, Oeuvres, Tome V, Paris, 1861, n° 27, p. 276. Sous le titre "Quelles sont les choses qu'on peut assurer", ces propos sont tenus : "L'ordonnance de la Marine, titre des assurances, art. 10, défend de faire aucune assurance sur la vie des personnes". Et l'auteur d'ajouter, en note de bas de page : "Cette défense ne subsiste plus, mais peut-être eût-il été plus sage de la maintenir". Pothier poursuit en indiquant : "La raison est, qu'il est contre la bienséance et l'honnêteté publique de mettre à prix la vie des hommes. D'ailleurs la nature du contrat d'assurance étant que l'assureur se charge de payer l'estimation de la chose assurée, la vie d'un homme libre n'étant susceptible d'aucune estimation (Liberum corpus estimationem non recipit), elle ne peut par conséquent être susceptible du contrat d'assurance".
(3) Au premier chef : Colbert, en 1681, dans l'Ordonnance de la marine, seule référence, à l'époque, à l'assurance qui est avant tout maritime et non encore terrestre, prohibe les assurances vie jugées immorales. A. Plessis, Histoire de l'assurance en France : une longue perspective, Rev. Risques, 1996, n° 25, p. 154. Voir ainsi : Emerigon (d'), Traité des assurances et des contrats à la grosse, par P.-S. Boulay-Paty, Tome premier, 1827, p. 13, selon lequel : "l'assurance ne peut devenir pour l'assuré un moyen d'acquérir. [...] La nature du contrat s'y oppose".
(4) Portalis, Discours préliminaire sur le projet de Code civil.
(5) G. Cornu, Dictionnaire juridique, Association H. Capitant, PUF. Voir : Insanité d'esprit. Pour une comparaison, l'ouvrage propose même de se reporter au terme de folie.
(6) V. Nicolas, Des conséquences de la généralité des clauses bénéficiaires en assurance-vie (Cass. civ. 1, 5 novembre 2008, n° 07-14.598, FS-P+B+I N° Lexbase : A1613EBD), in La chronique en droit des assurances dirigée par Véronique Nicolas, Professeur, avec Sébastien Beaugendre, Maître de conférences, Lexbase Hebdo n° 329 du 4 décembre 2008 - édition privée générale (N° Lexbase : N9085BHX).
(7) Auteur d'un ouvrage intitulé La première épouse.
(8) Le doyen Jacques Héron décédé il y a dix ans fin juin.
(9) Cass. civ., 24 février 1902, D., 1903, 1, p. 433, note P. Dupuich ; S., 1902, 1, p. 165 ; Traité de droit des assurances : les assurances de personnes, Tome IV, sous la direction de J. Bigot, LGDJ, 2007, n° 309, p. 268 par L. Mayaux.
(10) Cass. civ. 1, 28 novembre 1967, D., 1968, p. 163.
(11) Cass. civ. 3, 18 janvier 2006, n° 03-20.999, Société Alpha Desquiens ingénierie environnement c/ Société Santé assistance promotion, FS-P+B (N° Lexbase : A3961DMN), Responsabilité civile et assurances, n° 4, avril 2006, comm. 122.
(12) Cass. civ. 3, 13 décembre 1989, n° 88-15.111, publié (N° Lexbase : A3697CHE), Bull. civ. III, n° 235, D., 1990, inf. rap., p. 11 ; Cass. civ. 3, 19 juillet 1995, n° 93-13.395, Société de crédit immobilier de la Somme c/ Epoux Beauvais et autres (N° Lexbase : A7676ABW), Bull. civ. III, n° 200, Rép. Defrénois, 1995, p. 1464, note Ph. Dubois, qui énonce : "qu'en statuant ainsi, alors que la garantie décennale est attachée à la propriété de l'édifice et que les associés attributaires en jouissance ne disposent que d'un droit mobilier incorporant un droit de créance sur la SCI, seul propriétaire de l'immeuble, la cour d'appel a violé le texte susvisé".
(13) Cass. civ. 3, 25 janvier 1989, n° 87-16.071, M Moreau c/ Coopérative d'HLM habitat girondin et autres (N° Lexbase : A2964AHA), Bull. civ. III, n° 21 ; Cass. civ. 3, 11 octobre 1995, n° 93-21.102, Entreprise Legendre et Lureau, société anonyme et autres c/ Société HLM Clair Logis d'Aquitaine (N° Lexbase : A6604CRZ), RD imm., 1996, p. 219, obs. Ph. Malinvaud et B. Boubli.
(14) C. Paris, 23ème ch., sect. A, 19 mai 1999, Construction et Urbanisme, 1999, comm., n° 328, note D. Sizaire.
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par Anne Lebescond, Journaliste juridique
Le 07 Octobre 2010
Lexbase : Quels sont les enjeux de la qualification de l'adresse IP ?
Aude Spinasse et Nicolas Quoy : La question qui se pose, concernant la qualification de l'adresse IP, est celle de savoir s'il s'agit d'une donnée à caractère personnel au sens de l'article 3 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés (N° Lexbase : L8794AGS) (ci-après la "loi"). Aux termes de ces dispositions, la qualification s'applique à "toute information relative à une personne physique identifiée ou qui peut être identifiée, directement ou indirectement, par référence à un numéro d'identification ou à un ou plusieurs éléments qui lui sont propres". Or, l'adresse IP permet d'identifier un ordinateur, non une personne.
Si l'on devait considérer que l'adresse IP est une donnée à caractère personnel, son traitement (défini largement par la loi, comme étant "toute opération ou tout ensemble d'opérations, automatisées ou non, effectuées sur celle-ci, quel que soit le procédé utilisé") serait soumis à la réglementation stricte fixée par cette loi.
En effet, cette dernière pose les conditions de licéité des traitements et les modalités de leur mise en oeuvre. Elle institue, notamment, un système de déclaration préalable à leur mise en place auprès d'une autorité administrative indépendante -la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL)- et, le cas échéant, d'autorisation donnée après un examen de l'autorité, notamment sur la proportionnalité du traitement eu égard au but poursuivi. Par ailleurs, la CNIL dispose d'un pouvoir de sanction des responsables de traitement qui auraient mis en place des traitements de données à caractère personnel non conformes à la réglementation applicable. Les sanctions peuvent être doubles, puisque l'amende peut être assortie de la publication de la décision de sanction de la CNIL, redoutable en termes d'image.
De plus, la loi prévoit une obligation d'information des intéressés à la charge des responsables de traitements.
Enfin, les intéressés disposent, pour leur part, d'un droit d'accès, de rectification et d'opposition au traitement des données les concernant.
Lexbase : En l'état du droit positif, l'adresse IP est-elle une donnée à caractère personnel ?
Aude Spinasse et Nicolas Quoy : La jurisprudence a beaucoup évolué sur ce point ces dernières années. A ce jour, la question n'est pas encore définitivement tranchée.
Les juges ont eu à envisager l'adresse IP sous deux angles différents, dans le cadre de deux types de contentieux bien distincts : l'un est relatif aux sociétés de gestion collective et au traitement des identités numériques, en vue d'identifier des contrefacteurs, et l'autre est afférent au respect par les fournisseurs d'accès et les hébergeurs de leurs obligations de collecter et de conserver les données permettant l'identification des personnes mettant des contenus en ligne posées par la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance en l'économie numérique (N° Lexbase : L2600DZC).
La question se pose, dans ce dernier cas, de savoir si la conservation par les fournisseurs d'accès et les hébergeurs du nom et de l'adresse IP du fournisseur de contenu est suffisante pour remplir leurs obligations, à savoir permettre l'identification des auteurs de contenu. La réponse donnée par les tribunaux est, ici, positive, ce qui laisse supposer que l'adresse IP est une donnée à caractère personnel (cf., not., TGI Paris, 3ème ch., 24 juin 2009, n° 08/03717, M. Jean-Yves Lambert dit Lafesse c/ Société Google Inc. N° Lexbase : A8079EI3 et CA Rennes, 3ème ch., 23 juin 2008, n° 07/01021, Le Coroller Thierry N° Lexbase : A5457D9Y).
Concernant le traitement des adresses IP par les sociétés de gestion collective, la jurisprudence n'est pas encore définitivement fixée. Cependant, une tendance autour de la qualification de donnée à caractère indirectement personnel se dessine (cf., not., TGI Paris, 5 mars 2009, n° 09/51770, Roland Magdane c/ Société de droit américain Youtube N° Lexbase : A3711EHW). Nous pouvons, en effet, penser que les quelques décisions qui n'admettent pas une telle qualification sont pour la plupart, des décisions d'opportunité et des simples cas d'espèce dans lesquels les juges souhaitent, avant tout, arriver à la sanction du contrefacteur. C'est le cas, notamment, d'un arrêt rendu par la cour d'appel de Paris du 15 mai 2007 (CA Paris, 13ème ch. sect. A, n° 06/01954, 15 mai 2007, Monsieur H. S. c/ Ministère public, société civile des producteurs phonographiques), dans lequel les juges ont énoncé que cette série de chiffres "ne constitue en rien une donnée indirectement nominative relative à la personne, dans la mesure où elle ne se rapporte qu'à une machine et non à l'individu qui utilise l'ordinateur pour se livrer à la contrefaçon".
Plus récemment, la Chambre criminelle de la Cour de cassation aurait pu clore le débat à l'occasion d'un arrêt rendu le 13 janvier 2009 (Cass. crim., 13 janvier 2009, n° 08-84.088 N° Lexbase : A7085ECE), espèce dans laquelle était mise en cause la régularité d'un procès-verbal dressé par un agent assermenté, afin d'établir des actes de contrefaçon, sans avoir obtenu l'autorisation préalable de la CNIL. Les magistrats ont, pourtant, choisi de ne pas se prononcer directement sur la question. Ainsi, sans dire si l'adresse IP recueillie par l'agent était ou non une donnée à caractère personnel, les juges ont retenu la validité du procès-verbal : "les constatations visuelles effectuées sur internet et les renseignements recueillis [...] par un agent assermenté qui, sans recourir à un traitement préalable de surveillance automatisée, utilise un appareillage informatique et un logiciel de pair à pair, pour accéder manuellement, aux fins de téléchargement, à la liste des oeuvres protégées irrégulièrement proposées sur la toile par un internaute, dont il se contente de relever l'adresse IP pour pouvoir localiser son fournisseur d'accès en vue de la découverte ultérieure de l'auteur des contrefaçons, rentrent dans les pouvoirs conférés à cet agent par la disposition précitée et ne constituent pas un traitement de données à caractère personnel". Dès lors, la CNIL n'avait pas à donner d'autorisation préalable au relevé de l'adresse IP par l'agent assermenté. Nous pouvons nous étonner d'un tel raisonnement de la part des juges de la Cour de cassation qui semblent instaurer une distinction entre un traitement automatisé -qualifié de traitement de donnée à caractère personnel- et un traitement manuel qui exclut cette même qualification, alors que la loi prend le soin de préciser expressément qu'elle s'applique tant aux traitements automatisés qu'aux autres. La qualité de la personne à l'origine du traitement -un agent assermenté- n'est certainement pas indifférente au sens de la décision. La décision de la cour de renvoi sera peut-être plus explicite que celle de la Haute juridiction sur le sujet.
Enfin, nous pouvons, également, imaginer que le vote prochain du projet de loi "Hadopi 2", adopté par le Sénat en première lecture le 8 juillet 2009 après engagement de la procédure accélérée, pourrait mettre un terme au débat. L'adresse IP est au centre du dispositif, puisque c'est sur la base de celle-ci que les avertissements seront adressés et les sanctions décidées, le cas échéant. Il est à noter, également, que deux sénateurs, Yves Détraigne et Anne-Marie Escoffier ont signé un rapport, présenté le 3 juin 2009, intitulé "La vie privée à l'heure des mémoires numériques", qui plaide pour une clarification de la qualification et de la valeur numérique de l'adresse IP et souligne le caractère personnel de telles données.
Lexbase : Qu'en est-il de la position de la CNIL ?
Aude Spinasse et Nicolas Quoy : La CNIL n'a cessé de considérer que l'adresse IP est une donnée à caractère personnel dont le traitement est soumis aux dispositions de la loi. Elle se montre, d'ailleurs, particulièrement stricte dans l'octroi de ses autorisations, relevant souvent que le traitement envisagé n'est pas proportionné au but poursuivi.
Ainsi, selon la CNIL, l'adresse IP "permet d'identifier indirectement la personne physique titulaire d'un abonnement à internet". Cette position est celle adoptée par le groupe de travail dit de l'"Article 29", regroupant toutes les autorités de protection européennes, et institué par la Directive 95/46 du 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (N° Lexbase : L8240AUQ).
Lexbase : Le parallèle est souvent fait entre l'utilisation des adresses IP et les plaques d'immatriculation des véhicules. Qu'en pensez-vous ? Pourquoi le premier fait-il débat quand le second ne donne lieu à aucune discussion ?
Aude Spinasse et Nicolas Quoy : Il est vrai que les plaques d'immatriculation des véhicules et les adresses IP ont exactement la même fonction dans les domaines qui les concernent respectivement et posent la même question d'identité et d'imputabilité des infractions. L'adresse IP est, ainsi, considérée comme la plaque d'immatriculation de l'ordinateur. La plaque d'immatriculation est communément qualifiée de donnée à caractère personnel. La logique voudrait que la même qualification juridique s'applique aux deux notions. Pour autant, les enjeux ne sont pas du tout les mêmes, ce qui explique certainement le fait que la qualification de l'adresse IP fasse débat, alors que celle de la plaque d'immatriculation ne pose pas de problème particulier. Il s'agit, dans le premier cas, de sanctionner des actes de contrefaçon (devenus courants avec l'évolution des technologies) et, dans le second cas, de sanctionner des infractions routières pouvant avoir des conséquences dramatiques sur la sécurité des personnes.
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Réf. : Loi n° 2009-974 du 10 août 2009, réaffirmant le principe du repos dominical et visant à adapter les dérogations à ce principe dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines grandes agglomérations (N° Lexbase : L6524IED)
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par Sébastien Tournaux, Maître de conférences à l'Université Montesquieu - Bordeaux IV
Le 07 Octobre 2010
L'article 2-I de la loi du 10 août 2009 modifie le premier alinéa de l'article L. 3132-3 du Code du travail (N° Lexbase : L6342IEM). Enrichissant la phrase originelle de ce texte qui prévoyait que le repos hebdomadaire soit, par principe, pris le dimanche, le législateur ajoute une incise aux termes de laquelle cette règle est fixée "dans l'intérêt des salariés".
A la première lecture, ces quelques mots sont bien difficiles à analyser. Il paraît, en effet, évident que la fixation du repos hebdomadaire le dimanche n'est pas une règle prise dans l'intérêt de l'employeur, voire de l'intérêt général. Au contraire, il s'agit bien de permettre l'épanouissement de la vie personnelle du salarié ce qui, malgré les interconnexions entre vie privée et vie professionnelle, ne peut guère se produire que durant ses temps de repos. Le dimanche, journée de repos du plus grand nombre, sera toujours celui des réunions familiales, des repas entre amis, de l'investissement associatif.
Au-delà de ces considérations finalement superficielles, se pose rapidement la question de l'intérêt juridique d'un tel rajout.
Le rapport rendu au Parlement par M. Mallié, au nom de la Commission des affaires culturelles familiales et sociales, nous apprend qu'il aurait été procédé à cet ajout pour prendre en compte la jurisprudence constante de la Cour de cassation (1). Pour autant, une recherche minutieuse des arrêts rendus par la Haute juridiction relatifs au repos dominical n'apporte pas la preuve de son attachement particulier à lier repos dominical et intérêt des salariés. Au contraire, il semblerait que l'argument ait toujours été farouchement rejeté. Certains employeurs, dirigeants de grosses structures commerciales bravant l'interdiction du travail du dimanche, ont, en effet, tenté de faire valoir cet argument pour éviter une condamnation pour concurrence déloyale dans des affaires engagées par des unions de petits commerçants concurrents. Ces actions en concurrence déloyale sont accueillies par la Cour depuis un arrêt de l'Assemblée plénière rendu en 1993 (2). Les contrevenants ont pourtant continué d'invoquer l'exclusif intérêt des salariés attaché à la règle pour tenter de démontrer l'absence de préjudice subi par les concurrents du fait de sa violation (3).
Bien malin qui pourra dire s'il y avait, dans l'esprit du législateur, une volonté d'infléchir cette jurisprudence. Toujours est-il que cette modification de l'article L. 3132-3 ne devrait pas aboutir à un tel résultat. En effet, la Chambre sociale de la Cour de cassation ne s'est pas contentée de rejeter cet argument dans les affaires qui lui étaient présentées, elle l'a tout bonnement ignoré en ne répondant pas sur le fondement de "l'intérêt des salariés" mais seulement sur celui de la rupture d'égalité avec les commerçants respectant les dispositions légales (4). En outre, on se souviendra que la Cour de cassation a toujours accepté que le principe de la fixation du repos hebdomadaire le dimanche constitue, au moins implicitement, une mesure prise dans l'intérêt des salariés. En effet, elle estimait déjà, dans les années 1980, que les syndicats, dans leur rôle de défense des intérêts de la profession, puissent obtenir l'indemnisation du préjudice subi du fait de la violation des règles relatives au repos hebdomadaire qu'elle considérait alors comme relevant de "l'intérêt de l'ensemble des travailleurs" (5).
L'incise ajoutée nous paraît finalement n'avoir qu'une portée bien limitée. Il en va autrement de la modification des règles d'indemnisation des salariés exceptionnellement privés du repos dominical.
Sans qu'il faille y voir une quelconque portée symbolique, l'article premier de la loi modifie sensiblement le premier alinéa de l'article L. 3132-27 du Code du travail (N° Lexbase : L6323IEW) et, par là-même, la manière dont sera indemnisé le travail du dimanche. Il convient, dès à présent, de préciser que cette modification ne concerne qu'une seule exception au principe du repos dominical, celle permettant au maire d'une commune d'accorder à chaque commerce de détail cinq dimanches au cours desquels le repos est supprimé.
Jusqu'à présent, les salariés concernés bénéficiaient d'une majoration de salaire égale à 1/30ième de leur salaire mensuel, majoration à laquelle s'ajoutait un repos compensateur dont la durée n'était pas précisée par le texte. Désormais, les salariés percevront un salaire double pour le dimanche travaillé et un repos compensateur d'une durée équivalente au temps travaillé le dimanche.
S'il est évident qu'une telle modification est favorable aux salariés, on ne peut qu'être interpellé par la différence de traitement mise en oeuvre entre les différents types de dérogations.
Une première inégalité concerne les salariés placés dans une situation de dérogation permanente au principe du repos dominical par application des articles L. 3132-12 (N° Lexbase : L0466H97) et L. 3132-13 du Code du travail (N° Lexbase : L6343IEN) qui ne perçoivent aucune compensation de droit pour leur travail dominical, même s'il faut relever que de nombreuses conventions collectives de branche des secteurs concernés aménagent quelques compensations.
Notons, ensuite, une deuxième situation d'inégalité s'agissant des autres dérogations temporaires qui ne sont pas placées sous le même régime que celui de l'exception accordée aux maires.
La dérogation, issue de l'article L. 3132-20 (N° Lexbase : L0473H9E), accordée par le préfet en cas de préjudice au public ou de compromission du fonctionnement normal de l'établissement et la dérogation, issue du nouvel article L. 3132-25-1 (N° Lexbase : L6345IEQ), accordée par l'autorité administrative aux commerces de détail placés dans des périmètres urbains de consommation exceptionnelle (PUCE) (6) sont placés dans une situation différente. Les salariés privés de repos dominical en raison de ces dérogations bénéficieront de compensations déterminées soit par accord collectif d'entreprise, soit par décision unilatérale de l'employeur approuvée par référendum. Dans cette dernière hypothèse, la décision unilatérale ne peut descendre en-deçà d'un plancher constitué du doublement du salaire pour la journée travaillée et d'un repos compensateur dont, cette fois, la durée n'est pas précisée.
Aucun plancher n'a, en revanche, été fixé par le législateur dans l'hypothèse de la négociation d'un accord collectif. La seule certitude est que l'accord doit comporter des contreparties. Le nouvel article L. 3132-25-3 (N° Lexbase : L6301IE4) prévoit également l'hypothèse d'une substitution d'un accord collectif conclu postérieurement à une mise en place de la dérogation par décision unilatérale de l'employeur. Conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation en ce domaine, le texte prévoit que l'accord collectif se substitue à la décision unilatérale (7). Aucune garantie n'étant offerte par le texte quant au maintien du niveau des contreparties issues de la décision unilatérale, il y a tout lieu de penser que, là encore, les contreparties du nouvel accord collectif pourront figurer en-deçà du doublement du salaire journalier.
Enfin, une troisième inégalité, certainement la plus criante de ce nouveau régime des dérogations au principe du repos dominical, consiste dans l'absence d'indemnisation pour les salariés privés de repos dominical sur le fondement de l'article L. 3132-25 (N° Lexbase : L6302IE7), c'est-à-dire des salariés travaillant dans des communes touristiques ou thermales (8). Sous réserve, comme pour les dérogations permanentes, de négociation collective de branche étendue introduisant quelque compensation, les salariés de ces commerces travailleront le dimanche sans aucune contrepartie.
Il y a, pour tout dire, un certain cynisme à intituler une loi "loi réaffirmant le principe du repos dominical" et à maintenir, dans le même temps, de telles inégalités entre salariés selon la dérogation au principe dont ils relèvent. Qu'un principe comporte des exceptions, cela n'est pas critiquable et peut d'ailleurs même être sain pour la cohérence des hypothèses composant le principe (9). En revanche, que les exceptions au principe n'apportent pas aux salariés des garanties similaires est difficilement tolérable, en particulier à l'heure de l'extension du principe d'égalité de traitement ou du principe "à travail égal, salaire égal" (10). En réalité, faute de contrepartie à certaines dérogations, le principe du repos dominical n'existe pas. Espérons, comme certains auteurs, qu'une harmonisation par le haut des contreparties au travail dominical pourra voir le jour (11).
L'inégalité est d'autant plus criante qu'elle n'apparaît pas seulement au sujet des contreparties au travail du dimanche, mais qu'elle concerne également la recherche du consentement du salarié au travail dominical
Signalons-le immédiatement, les exigences nouvelles relatives au consentement du salarié au travail du dimanche sont limitées aux seules dérogations temporaires issues des articles L. 3132-20 et L. 3132-25-1 du Code du travail. Les dérogations permanentes, les dérogations pour les zones touristiques et les dérogations accordées par le maire cinq fois l'année ne sont pas concernées (12). La seule disposition protectrice du salarié qui semble être accordée dans tous les cas de figure est celle introduite au nouvel article L. 3132-3-1 du Code du travail (N° Lexbase : L6306IEB) qui dispose que "le refus d'un demandeur d'emploi d'accepter une offre d'emploi impliquant de travailler le dimanche ne constitue pas un motif de radiation de la liste des demandeurs d'emploi".
La protection du consentement du salarié est, en revanche, préservée pour les dérogations préfectorales de l'article L. 3132-20 et les dérogations dans les PUCE de l'article L. 3132-25-1. Plusieurs dispositifs sont mis en oeuvre pour assurer cette protection par le nouvel article L. 3132-25-4 du Code du travail (N° Lexbase : L6308IED).
D'abord, "seuls les salariés volontaires ayant donné leur accord par écrit à leur employeur" pourront travailler le dimanche. Il s'agit d'une véritable renonciation au principe du repos dominical, renonciation qui n'était jusqu'ici pas permise par la Cour de cassation (13). Sa formalisation par écrit est la bienvenue tant on estime le plus souvent que toute renonciation doit être entourée tant de garanties de fond que de garanties de forme (14).
Outre cette garantie de forme, des garanties de fond sont également mises en place, de manière, il faut bien le reconnaître, bien désordonnée. L'article L. 3132-25-4 prévoit en effet qu'une entreprise "ne peut prendre en considération le refus d'une personne de travailler le dimanche pour refuser de l'embaucher", que le salarié "qui refuse de travailler le dimanche ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail" et, enfin, que ce refus "ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement ".
N'aurait-il pas été plus simple d'ajouter à la liste de l'article L. 1132-1 du Code du travail (N° Lexbase : L6053IAG) un nouveau motif illicite constitué du refus de travailler le dimanche ? La réponse est bien entendu affirmative, mais elle aurait alors impliqué que l'ensemble des actes prohibés pour un motif discriminatoire soient concernés. La rédaction du texte ne paraît prohiber pour motif illicite que le refus d'embauche et les mesures prises dans le cadre de l'exécution du contrat de travail : rémunération, accès aux formations, mutations, etc.. Elle semble, en revanche, exclure les sanctions disciplinaires et le licenciement. Il est probable que le législateur n'ait pas souhaité instaurer une nouvelle hypothèse de nullité de licenciement et, subséquemment, de réintégration du salarié.
Cette manière de procéder dans la loi du 10 août 2009 nous paraît particulièrement contestable en ce qu'elle créée une sorte de gradation dans les motifs discriminatoires. Certains motifs comme l'âge, le sexe ou l'état de santé auraient des effets absolus en prohibant tout acte figurant dans la liste de l'article L. 1132-1. En revanche, d'autres motifs n'auraient que des effets relatifs, limités à certains actes. Il y aurait donc des motifs moins discriminatoires que d'autres...
Le texte prévoit, enfin, qu'un accord collectif "fixe les conditions dans lesquelles l'employeur prend en compte l'évolution de la situation personnelle des salariés privés de repos dominical". Si le contenu plus précis de l'accord sur ce point n'est pas détaillé, quelques indices sur la forme qu'il pourrait revêtir figurent quelques lignes plus loin, puisque le texte impose des obligations particulières à l'employeur qui aurait mis en place la dérogation par décision unilatérale. Ces obligations tiennent à s'enquérir annuellement auprès du salarié s'il souhaite arrêter de travailler le dimanche, s'il souhaite bénéficier d'une priorité pour retrouver un emploi identique ou équivalent sans activité dominicale dans le même établissement ou, à défaut, dans la même entreprise. Toujours en l'absence d'accord collectif, le salarié conserve la faculté de refuser de travailler trois dimanches par an à condition de respecter un délai de prévenance d'un mois. Malgré ces indices, comme pour l'accord collectif destiné à déterminer les contreparties dont bénéficient les salariés privés de repos dominical, la loi ne fixe aucune obligation minimale aux partenaires sociaux.
C'est dans ces trois points que tient le volet de réaffirmation du principe du repos dominical issu de la loi éponyme. Outre les contrastes qui en émanent et les arrières pensées que l'on devine, ce titre comporte une forte dose d'hypocrisie qui n'est qu'à peine atténuée par la suite du titre de la loi : l'adaptation des dérogations au principe du repos dominical.
II - L'extension sensible des exceptions au repos dominical
L'article 2-V de la loi du 10 août abroge l'article L. 3132-25 du Code du travail et le remplace par une suite de sept articles relatifs à la dérogation dans les zones touristiques et thermales, à la nouvelle dérogation dans les PUCE. Les autres dérogations permanentes ou provisoires sont maintenues, quoique parfois aménagées.
L'article L. 3132-25 du Code du travail, relatif aux dérogations temporaires dans les communes touristiques et thermales et dans les zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente, est, en partie, refondu par la loi.
La dérogation est sensiblement étendue. L'ancien texte limitait cette dérogation aux "établissements de vente au détail qui mettent à disposition du public des biens et des services destinés à faciliter son accueil ou ses activités de détente ou de loisirs d'ordre sportif, récréatif ou culturel", rédaction qui faisait encore difficulté il y a quelques mois (15). La condition a été sérieusement allégée, puisque peuvent désormais bénéficier de la dérogation, sans autre précision, les "établissements de vente au détail" ! Si le nouveau critère a le mérite de la simplicité, il devrait surtout accroître le nombre de commerces ouverts le dimanche dans ces zones touristiques sans malheureusement que les produits vendus n'aient de rapport avec l'activité touristique du lieu. La seule véritable limite, qui constitue d'ailleurs plus une incompatibilité qu'une limite, découle du nouvel article L. 3132-25-5 (N° Lexbase : L6293IES) qui exclut la possibilité de bénéficier de cette dérogation aux "commerces de détail alimentaire qui bénéficient des dispositions de l'article L. 3132-13" du Code du travail (16).
L'assouplissement ne s'arrête pas là puisque l'article dispose désormais que l'employeur peut donner le repos hebdomadaire par roulement "de droit". L'article R. 3132-17 (N° Lexbase : L9520H9H) imposait jusqu'alors aux commerçants d'obtenir une autorisation préfectorale, cela ne sera désormais plus le cas. A partir du moment où la zone dans laquelle se trouve le commerce sera située dans une commune classée comme touristique ou thermale ou dans une zone touristique d'affluence exceptionnelle (17), les employeurs pourront, sans procédure particulière, ni accord du salarié, supprimer le repos hebdomadaire.
Il est possible d'accepter l'idée que d'autres commerces de vente au détail puissent ouvrir le dimanche et non seuls ceux destinés à faciliter les activités de détente et de loisirs. Un quincaillier ou un magasin de jouets peuvent être utiles aux touristes d'une station balnéaire le dimanche. En revanche, la suppression ipso jure de l'autorisation préfectorale au profit d'une simple faculté de faire travailler ses salariés le dimanche de plein droit est hautement contestable, et ce pour au moins deux raisons. La première tient à ce qu'il n'existe désormais plus de garde-fous à l'ouverture du dimanche de ces commerces en zones touristiques, ni la limitation tenant aux produits vendus, ni la limitation tenant à l'autorisation au cas par cas. Tous les salariés du secteur du commerce de ces zones peuvent travailler le dimanche. La seconde tient à ce que, comme nous l'avons déjà souligné, ces salariés ne bénéficieront d'aucune contrepartie obligatoire pour travailler le dimanche et ne pourront refuser de travailler le dimanche sous peine de commettre une faute disciplinaire. Si l'on ajoute à cela que de nombreux salariés des zones touristiques sont des saisonniers dont la précarité de l'emploi et la piètre qualité des conditions de travail n'est plus à décrire, on comprendra notre réserve face à l'extension de cette dérogation.
Si elle est entourée de meilleures garanties, la création d'une nouvelle dérogation pour les périmètres urbains de consommation exceptionnelle n'est pas, elle non plus, exempte de toute critique.
L'article L. 3132-25-1 du Code du travail introduit une nouvelle dérogation au principe du repos dominical. Cette dérogation trouvera à s'appliquer dans les périmètres urbains de consommation exceptionnelle, définis comme des unités urbaines de plus d'un million d'habitants. L'unité urbaine était déjà utilisée par quelques articles du Code général des impôts et, surtout, du Code général des collectivités territoriales dont l'article R. 2334-7 (N° Lexbase : L1966G9P) renvoie à la définition établie par l'INSEE (18). Concrètement, ces zones devraient concerner Paris, Lyon, Marseille-Aix et Lille-Roubaix. Le choix du million d'habitants est assez arbitraire. Comment les commerçants des agglomérations toulousaine, bordelaise, nantaise ou strasbourgeoise pourraient ne pas ressentir un sentiment d'inégalité et revendiquer, rapidement, une extension de la dérogation à d'autres zones moins peuplées (19) ?
La liste exacte de ces unités urbaines sera déterminée par le préfet de région en application de l'article L. 3132-25-2 du Code du travail (N° Lexbase : L6321IET), après consultation de l'organe délibérant de la communauté de communes, de la communauté d'agglomération ou de la communauté urbaine, lorsqu'elles existent, sur le territoire desquelles est situé ce périmètre.
Dans ces zones, seuls certains commerces pourront bénéficier de la dérogation. La loi énonce que la dérogation sera applicable, sur autorisation administrative, aux "établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services dans un périmètre d'usage de consommation exceptionnel caractérisé par des habitudes de consommation dominicale, l'importance de la clientèle concernée et l'éloignement de celle-ci de ce périmètre". Si l'on pouvait se plaindre de la faible lisibilité de la définition désormais abandonnée des commerces pouvant ouvrir dans les zones touristiques avant la réforme (20), le moins que l'on puisse dire est que cette nouvelle délimitation pour les commerces placés dans des PUCE n'est pas plus explicite (21). Un regard jeté aux travaux parlementaires permet tout de même d'avoir une explication plus concrète de la signification de cette délimitation : la dérogation s'appliquerait, "autrement dit, dans les lieux où l'on a l'habitude de consommer le samedi et le dimanche, sur les sites où il existe des flux de clientèle importants ces jours-là". Dans quels lieux, jusqu'à présent, pouvait-on avoir des habitudes de consommation le dimanche, à l'exception bien entendu des zones touristiques de l'article L. 3132-25 ? Le nouveau texte donne, en réalité, la désagréable sensation de légitimer des pratiques illégales d'ouverture dominicale dans des centres commerciaux depuis suffisamment longtemps pour avoir généré des habitudes (22). Toujours est-il que la définition donnée ne concernera pas les commerces de détail alimentaire qui bénéficient des dispositions de l'article L. 3132-13, les deux dérogations étant incompatibles au titre de l'article L. 3132-25-5 du Code du travail.
Quant à l'autorisation administrative nécessaire à chaque établissement, elle ne pourra être délivrée qu'à la suite de la conclusion d'un accord collectif ou d'une décision unilatérale de l'employeur, approuvée par référendum d'entreprise (23). En outre, elle ne sera accordée que pour une durée limitée, après avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d'industrie, de la chambre des métiers et des syndicats d'employeurs et de salariés intéressés de la commune. La multiplication des avis, consultations et formalités préalables devrait être source de nombreuses erreurs si bien qu'il fait peu de doute que bien des autorisations préfectorales seront contestées devant les juridictions administratives.
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par Fany Lalanne, Rédactrice en chef Lexbase Hebdo - édition sociale
Le 07 Octobre 2010
Jean-François Amadieu : Effectivement, le tribunal correctionnel de Paris avait jugé que les faits de discrimination n'étaient pas établis, car il n'y avait pas de victimes identifiées dans cette affaire. La décision de la Cour de cassation du 23 juin 2009 ne dit, d'ailleurs, pas le contraire. Il s'agit là du premier enseignement à tirer de cette espèce. Une entreprise peut être condamnée alors qu'il n'y a pas de discrimination constatée, mais une intention de discriminer attestée par une "annonce" discriminante. Finalement, cela révèle une certaine cohérence. En effet, il était, ici, inutile de chercher des victimes dans la mesure où il existait bel et bien une annonce à caractère discriminatoire. Le délit était donc constaté. C'est indiscutable. Au pénal, l'intention de discriminer suffit.
Pour les entreprises, en revanche, cela ouvre des perspectives importantes, même s'il faut insister sur le fait que, dans cette affaire, ce n'est pas un système discriminatoire qui est dénoncé et mis en évidence par une approche statistique ou par l'existence de victimes, mais une demande qui est faite à un intermédiaire.
Lexbase : Par cet arrêt du 23 juin 2009, la Chambre criminelle condamne donc non seulement une personne, mais également, et surtout, un "processus collectif de décisions discriminatoires", pour reprendre les termes employés par la Halde. C'est vraisemblablement là l'un des apports majeurs de la décision. Pouvez-vous revenir sur ce point ?
Jean-François Amadieu : Quand on regarde la décision, sont concernées des personnes qui auraient des niveaux de responsabilité suffisants pour engager l'entreprise, donc il ne s'agirait pas d'un acte isolé, mettant en cause une seule personne. C'était là toute la question. La Cour rappelle d'ailleurs qu'il y avait déjà eu des antécédents. Au-delà, c'est surtout la mise en cause de Garnier qui est ici en jeu et, a fortiori, celle de L'Oréal, et pas seulement celle de Districom et d'Adecco, alors même qu'il n'y avait pas de traces écrites, donc pas d'évidence, l'ordre éventuel restant oral. C'est donc là tout l'enjeu que d'impliquer le donneur d'ordre (Garnier), sans preuve directe.
La condamnation du donneur d'ordre est, dans cette affaire, confirmée en cassation. Il y a donc mise en cause d'une entreprise en dépit du fait qu'il n'y avait pas de faits établis. Pour autant, la mise en cause de Garnier peut être discutable. En effet, elle constitue un risque, pour les entreprises, dans la mesure où elle implique qu'un simple employé, travaillant, par exemple, comme ici, pour le compte d'un fournisseur de main d'oeuvre, peut conduire à la mise en cause de l'entreprise donneur d'ordre, voire de la société-mère elle-même, comme c'est le cas dans cette affaire, avec les répercutions médiatiques de la condamnation de Garnier. Il y aurait donc un impact sur le groupe L'Oréal lui-même et les répercussions peuvent être considérables. En dehors des sanctions pécuniaires, finalement symboliques, 30 000 euros d'amende, c'est l'image même du groupe qui peut être atteinte.
Lexbase : Quels sont les autres apports de l'arrêt ?
Jean-François Amadieu : Les avocats de L'Oréal faisaient remarquer que, certes, Garnier était peut-être à l'origine de la discrimination, mais que, parallèlement, la société restait garante d'une certaine image de diversité. La Cour de cassation ne retient pas cet argument. Ce qui est intéressant, pour les entreprises, c'est de savoir si l'attitude du juge peut être modifiée du fait de l'attitude "vertueuse" de l'entreprise en la matière et de tous les efforts mis en place afin de garantir une certaine diversité. Ici, la réponse est non. Et si les faits sont anciens et les efforts indéniablement accomplis depuis, le juge s'appuie sur les faits de l'époque, les codes "BBR" étaient alors bien réels. C'est suffisant pour reconnaître une situation discriminatoire, même si l'entreprise est, par la suite, devenue "exemplaire" en la matière. On sait, de même, que les entreprises de travail temporaire, dont Adecco, ont joué un rôle précurseur dans la lutte contre les discriminations, précisément pour corriger les mauvaises pratiques en usage dans ce secteur il y a quelques années.
Lexbase : Pensez-vous que l'utilisation du code "BBR" ait constitué une circonstance aggravante ?
Jean-François Amadieu : Il y a ici quelque chose d'important. Le cas est intéressant car, dans cette affaire, il y a, à l'origine, quatre motifs de discrimination (l'âge, le sexe, l'appartenance physique et la "race"). Or, l'arrêt du 23 juin 2009 ne porte que sur le code "BBR", donc sur la "race". On pourrait le comprendre s'il y avait des victimes identifiées, car c'est SOS Racisme qui a agi, mais à partir du moment où c'est l'annonce qui est discriminatoire, c'est plus difficile à concevoir. C'est dommage, car c'était l'occasion, pour la Cour de cassation, d'apporter certains éléments de réponse en matière de discrimination multiple. Or, la Haute juridiction, en ne retenant que le code "BBR", élude la question.
Le code "BBR" ne constitue donc pas, à proprement parler, une "circonstance aggravante", même s'il reste le seul critère discriminatoire retenu par les juges. Il y a peut-être là une certaine fragilité qui se révèle pour le droit de la discrimination. En effet, si cet arrêt était l'occasion, pour la Cour de cassation, de clarifier les discriminations multiples, il aurait été intéressant de s'attarder sur les autres motifs, comme le fait que le candidat doive être de sexe féminin. Est-ce que le fait d'être une femme est un critère légitime pour vendre tel type de produits ? Pareil pour la taille ou l'âge. Est-ce que ces critères étaient plus justifiés que le code "BBR" ?
Dès lors, implicitement, si l'employeur justifie du critère discriminatoire à l'embauche au regard de l'emploi proposé, les juges seront susceptibles d'accepter un tel critère. Si l'on pousse le raisonnement jusqu'au bout, s'il s'avère qu'un profil physique soit plus vendeur qu'un autre, l'entreprise peut justifier de la discrimination.
A la limite, dans cette affaire, si Garnier avait justifié du code "BBR", la discrimination aurait pu être écartée. Il est donc maintenant intéressant de savoir comment le juge va trancher à l'avenir et ce qu'il va en être des motifs utilisés. Pour cela, il faut attendre de voir ce que cela va donner en pratique.
Lexbase : Les poursuites pénales pour discrimination raciale à l'embauche restent, encore aujourd'hui, rares. Pourtant, le Code pénal, comme le Code du travail, sont tout à fait clairs à ce sujet. Comment expliquer cette timidité jurisprudentielle ?
Jean-François Amadieu : Le constat fait par la Halde, notamment, est qu'il faut déjà convaincre les juges eux-mêmes de l'importance de la discrimination dans le processus de recrutement, puis de déroulement de carrière. Il y a ici tout un travail de sensibilisation qui reste à faire. C'est là le premier point à souligner. Ensuite, il faut remarquer que le Parquet pourrait peut-être davantage solliciter les juges.
Surtout, souvent, la preuve reste difficile à établir. Dans l'affaire qui nous intéresse, il existe bien une preuve concrète, le fax, mais on ne peut établir une discrimination dont auraient été victimes des individus clairement identifiés. En effet, il y a condamnation à partir d'une annonce, en revanche, si on recherche des victimes, les faits doivent être requalifiés.
En matière de recrutement, les choses ne sont pas simples. Les annonces discriminantes sont rares et elles restent aujourd'hui "politiquement correctes". Il y a donc peu de preuve directe d'intention discriminante. Il faudrait s'appuyer sur les testings (4)... mais SOS Racisme n'a jamais réussi à remporter une affaire (en matière d'emploi) sur ces fondements. En effet, aucune entreprise n'admet la moindre discrimination. Il y a ici une abnégation totale. La preuve va être d'autant plus difficile à apporter que les entreprises développent un arsenal terrible consistant à démontrer que le testing n'est pas fiable. De même, les éléments statistiques ne sont guère plus probants. En effet, les entreprises ne sont pas obligées de garder la trace des personnes ayant postulé à un emploi. Dans ce cadre, comment prouver la discrimination ? Ce serait, d'ailleurs, peut-être là une réforme à mener pour l'avenir, mais, pour le moment, le problème de la preuve ne trouve pas de véritable solution.
Si, sur le terrain racial, la difficulté est donc de recueillir les faits, pour les autres motifs de discrimination, à l'inaction des parquets s'ajoute le manque d'associations pour agir. Sur des cas où les faits sont faciles à établir, cela ne choque personne et tout le monde semble s'en accommoder. Cela est particulièrement flagrant concernant la nationalité ou, encore, la situation matrimoniale des femmes. En effet, lorsque, lors de la procédure de recrutement, une entreprise demande la nationalité ou, encore, la situation matrimoniale d'une femme, comment peut-elle le justifier au regard de l'emploi ? Ces informations, systématiquement demandées, ne sont-elles pas à l'origine de discriminations ? Il y a là une contradiction énorme, il suffit de lire le Code du travail, que personne ne semble relever...
(1) Loi n° 2004-1486 du 30 décembre 2004, portant création de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (N° Lexbase : L5199GU4).
(2) C. pén., art. 225-2 (N° Lexbase : L0449DZN).
(3) CA Paris, 11ème ch., sect. A, 6 juillet 2007, n° 06/07900, Coulange Thérèse, Delsaut Jacques, Dubois Laurent, SAS Adecco travail temporaire, SAS Ajilon sales & marketing, Société Gemey Maybeline Garnier (N° Lexbase : A8443EKW).
(4) Il s'agira, par exemple, pour une même offre d'emploi, d'envoyer des CV équivalents en modifiant seulement les critères à tester, afin de déceler une éventuelle discrimination.
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