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N6601BGL
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Le 07 Octobre 2010
- Cass. soc., 2 juillet 2008, n° 07-40.618, Société Geci France, F-D (N° Lexbase : A6381D99) : ayant procédé à une interprétation nécessaire exclusive de dénaturation des termes ambigus de la clause contractuelle dite de non-détournement de clientèle, la cour d'appel qui a constaté que son libellé très large et imprécis aboutissait, en fait, à interdire à M. L. l'accès aux entreprises oeuvrant dans le secteur aéronautique et donc à lui interdire l'exercice d'une activité conforme à sa formation et à son expérience professionnelle, a décidé que la clause litigieuse devait s'analyser en une clause de non-concurrence déguisée illicite puisque dépourvue de contrepartie financière .
- Cass. soc., 2 juillet 2008, n° 06-46.310, Société Téléperformance, F-D (N° Lexbase : A6214D9Z) : la cour d'appel, qui a relevé que la clause de non-concurrence figurant dans le contrat de travail du salarié ne prévoyait pas de contrepartie financière et constaté, sans inverser la charge de la preuve du non-respect de ladite clause, qu'aucun élément ne permettait de penser que M. A. n'avait pas respecté cette clause de non-concurrence illicite, a souverainement évalué le montant du préjudice nécessairement subi du fait de cette absence de contrepartie financière .
- Cass. soc., 2 juillet 2008, n° 07-42.299, M. Richard Martin, F-D (N° Lexbase : A7100D9T) : la cour d'appel qui a retenu que la prise d'acte de la rupture produisait les effets d'une démission et a condamné le salarié à indemniser l'employeur pour non-respect du préavis, conformément à l'article 27 de la Convention collective de la métallurgie N° Lexbase : E1016BCM), a légalement justifié sa décision .
- Cass. soc., 8 juillet 2008, n° 06-43.802, Société Valéo Cablage, venant aux droits de la société anonyme Cablea, F-D (N° Lexbase : A6191D98) : appréciant souverainement les éléments de fait qui lui étaient soumis, sans limiter son examen à la situation de l'entreprise ou des divisions, la cour d'appel a retenu que le secteur d'activité du groupe dont relevait l'entreprise ne connaissait pas de difficulté économique, à l'époque des licenciements. Elle en a déduit, à bon droit, sans excéder ses pouvoirs et abstraction faite du motif inopérant et surabondant critiqué par la sixième branche du moyen, relatif à la seule situation de la société C., que les suppressions d'emplois décidées en raison de la fermeture de l'établissement de Dreux ne reposaient pas sur une cause réelle et sérieuse .
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Réf. : Cass. soc., 25 juin 2008, n° 07-41.065, Société Bronzavia c/ M. Monllor, F-P+B (N° Lexbase : A3739D9D)
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N6486BGC
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par Stéphanie Martin-Cuenot, Ater à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV
Le 07 Octobre 2010
Résumé Seule l'absence ou l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi entraîne la nullité de la procédure de licenciement. Si l'employeur a manqué à son obligation non contestée d'informer les salariés, en temps utile, sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, par une lettre individualisée adressée à leur domicile, ce manquement n'entraîne pas la nullité de la procédure de licenciement ; il permet, seulement, d'obtenir la suspension de la procédure, si celle-ci n'est pas terminée ou, à défaut, la réparation du préjudice subi. |
Commentaire
I - Teneur de l'obligation de reclassement
Dans les entreprises de 50 salariés et plus, lorsque le nombre de licenciement pour motif économique est, au moins, égal à 10 sur une même période de 30 jours, l'employeur est tenu d'établir et de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi .
Ce plan a pour objectif d'éviter les licenciements ou d'en limiter le nombre et de faciliter le reclassement du personnel dont le licenciement ne peut être écarté, notamment, des salariés âgés ou qui présentent des caractéristiques sociales et de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile (C. trav., art. L. 1233-61).
L'article L. 1233-62 du Code du travail donne des exemples des mesures que doit contenir le plan de sauvegarde de l'emploi.
Cette disposition précise que le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit, notamment, des actions en vue du reclassement interne des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord des salariés, sur des emplois de catégorie inférieure (sur le reclassement interne voir circ CDE, n° 94-20 du 7 juin 1994 N° Lexbase : L8922ASA), des créations d'activités nouvelles par l'entreprise, des actions favorisant le reclassement externe, notamment, par le soutien à la réactivation du bassin de l'emploi, des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés, des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur des emplois équivalents, des mesures de réduction ou d'aménagement du temps de travail...
Le plan de sauvegarde de l'emploi doit contenir un plan de reclassement.
Les mesures proposées dans le plan doivent être réelles et effectives (Cass. soc., 16 novembre 2004, n° 03-44.056, F-D N° Lexbase : A9582DDA) et ne peuvent substituer aucune autre proposition de l'employeur (Cass. soc., 20 novembre 2007, n° 06-41.410, FP-P+B N° Lexbase : A7172DZN). Elles doivent, en outre, être précises (Cass. soc., 10 juin 1997, n° 95-19.818, Société Vestra c/ Comité central d'entreprise de la société Vestra N° Lexbase : A2002AC7, Bull. civ. V, n° 216).
Le législateur considère que la procédure de licenciement est nulle et de nul effet tant qu'un plan visant au reclassement de salariés s'intégrant au plan de sauvegarde n'est pas présenté par l'employeur aux représentants du personnel, qui doivent être réunis, informés et consultés (C. trav., art. L. 1235-10 N° Lexbase : L0006HXI). La jurisprudence considère que l'insuffisance du plan social équivaut à son absence et qu'il y a donc lieu de prononcer la nullité (Cass. soc., 16 avril 1996, n° 93-15.417, Société Sietam industries c/ Comité central d'entreprise de la société Sietam industries N° Lexbase : A3972AAD).
Outre la consultation des représentants du personnel sur le contenu du plan, le législateur impose à l'employeur de porter le contenu du plan à la connaissance des salariés par voie d'affichage sur les lieux du travail.
L'obligation pour l'employeur d'élaborer un plan de sauvegarde de l'emploi ne préjuge en rien de son obligation individuelle de reclassement des salariés (Cass. soc., 6 juillet 1999, n° 96-45.665, Société Plastic Omnium c/ M. Morisot et autre N° Lexbase : A4667AGX, Bull. civ. V, n° 258 ; Cass. soc., 22 février 1995, n° 93-43.404, Mutuelle nationale des étudiants de France c/ M. Balvet et autres, publié N° Lexbase : A4022AA9).
Le fait qu'un salarié soit contenu dans un projet de gros licenciement pour motif économique ne dispense pas l'employeur de son obligation de reclassement individuel, cette obligation valant pour tout type de licenciement pour motif économique. Il appartient, en effet, à l'employeur, même quand il existe un plan de sauvegarde de l'emploi, de rechercher s'il existe des possibilités de reclassement prévues, ou non, dans le plan de reclassement et de proposer à chaque salarié pris individuellement les postes disponibles (Cass. soc., 7 juillet 2004, n° 02-42.089).
La notification des propositions doit faire l'objet d'un écrit adressé individuellement aux salariés .
La sanction classique du non-respect de l'obligation de reclassement est l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement économique prononcé (Cass. soc., 17 mars 1999, n° 97-40.515, M. Stenger c/ Société Massini N° Lexbase : A4688AGQ). Cette sanction est, également, celle préconisée par l'administration (circ. DGEFP/DRT/DSS n° 2002/1 du 5 mai 2002 N° Lexbase : L6282A4G). On comprend donc aisément la cassation de la décision rendue par les juges du fond dans l'arrêt commenté.
Dans cette espèce, un salarié, licencié pour motif économique, avait saisi la juridiction prud'homale d'une demande portant sur l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi et le non-respect par l'employeur de son obligation individuelle de reclassement.
Pour la cour d'appel, l'absence d'information en temps utile du salarié privait le plan de sauvegarde de l'emploi de toute pertinence, ce qui avait pour conséquence d'entraîner la nullité de la procédure et des licenciements subséquents.
La Cour de cassation ne voit pas les choses de la même manière. Elle rappelle, en premier lieu, que seule l'absence ou l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi entraîne la nullité de la procédure de licenciement.
Elle affirme, en second lieu, que le fait, pour l'employeur, d'avoir manqué à son obligation d'informer les salariés en temps utile, n'entraîne pas la nullité de la procédure de licenciement, mais permet, seulement, de suspendre la procédure si elle n'est pas terminée ou à défaut d'indemniser le préjudice subi.
Cette solution ne peut qu'être approuvée et la pédagogie de la Haute juridiction saluée.
II - Graduation des sanctions entourant l'obligation de reclassement
Ce n'est, en effet, pas la première fois que la Cour de cassation refuse de caractériser la nullité de la procédure de licenciement en cas de non-respect par l'employeur de son obligation de reclassement, qu'il s'agisse de l'obligation d'information collective des salariés sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi ou de l'obligation de reclassement individuelle des salariés concernés.
En présence d'un licenciement collectif pour motif économique, la Cour de cassation avait, en effet, été amenée à considérer que le défaut d'affichage du plan social dans les conditions prévues par l'article L. 321-4-1 du Code du travail (N° Lexbase : L8926G7Q) n'entraîne pas la nullité de la procédure de licenciement et ne constitue pas un trouble manifestement illicite, cette irrégularité permettant seulement d'obtenir la suspension de la procédure de licenciement si elle n'est pas terminée ou, à défaut, la réparation du préjudice subi (Cass. soc., 9 mai 2000, n° 98-20.588, M. Amini et autres c/ Société CIDEB N° Lexbase : A9368AT7, D., 2000, IR 157 ; Dr. soc., 2000, 789, obs. G. Couturier, RJS, 2000, 452, n° 655).
De la même manière, concernant l'obligation de notification individuelle aux salariés des mesures de reclassement dont ils peuvent faire l'objet, la Cour de cassation considère dans une espèce dans laquelle cette notification faisait défaut que la preuve de la satisfaction par l'employeur de son obligation de reclassement n'était pas rapportée et que, par voie de conséquence, le licenciement prononcé était dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 10 octobre 2002, n° 00-43.922, F-D N° Lexbase : A9710AZN ; Cass. soc., 20 septembre 2006, n° 04-45.703, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A2799DR4 et les obs. de S. Tournaux, Les propositions de reclassement écrite et précises : formalisme ou condition de fond, Lexbase Hebdo n° 230 du 5 octobre 2006 - édition sociale N° Lexbase : N3461ALR).
Dans une autre espèce, elle rejetait expressément la nullité dans ce cas. Dans un arrêt du 26 février 2003, elle était en effet venue affirmer que la nullité ne se présume pas et que par voie de conséquence, la méconnaissance de l'obligation individuelle de reclassement prévue par l'article L. 321-1 du Code du travail (N° Lexbase : L8921G7K, art. L. 1233-3, recod. N° Lexbase : L9888HW7) n'est pas sanctionnée par la nullité de la procédure et l'obligation de réintégration qui en résulterait (Cass. soc., 26 février 2003, n° 01-41.030, F-P N° Lexbase : A2923A7E).
Comme le souligne la Haute juridiction dans cette dernière décision, la nullité ne se présume pas et est d'application stricte. Il est donc, en principe, impossible d'en faire application en dehors des cas expressément prévus par le législateur. La nullité est, en outre, prévue de manière très restrictive et n'est prononcée que dans les cas prévus en matière de licenciement. Elle pose, en effet, en la matière, des difficultés pratiques, notamment, la réintégration du salarié qui prescrit une utilisation limitée aux hypothèses légales.
Dans la mesure où seule l'absence de plan de reclassement intégré au plan de sauvegarde de l'emploi est susceptible d'entraîner la nullité de la procédure de licenciement et des licenciements corrélatifs, il n'y a pas lieu de la prononcer en dehors de cette hypothèse.
Cette solution est parfaitement conforme tant à la lettre de l'article L. 1235-10 du Code du travail qu'à l'esprit des textes régissant la matière.
L'article L. 1235-10 du Code du travail dispose, dans son premier alinéa, que, "dans les entreprises de cinquante salariés et plus, lorsque le projet de licenciements concerne dix salariés ou plus dans une même période de trente jours, la procédure de licenciement est nulle tant que le plan de reclassement des salariés prévu à l'article L. 1233-61 et s'intégrant au plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas présenté par l'employeur aux représentants du personnel, qui doivent être réunis, informés et consultés".
L'employeur, qui n'a pas satisfait à ses obligations ou qui n'y a pas convenablement satisfait, doit être sanctionné, puisqu'il ne remplit pas son obligation de reclassement de résultat, la procédure doit donc, pour cette raison, être annulée.
La sanction ne pouvait pas non plus être celle retenue en cas de méconnaissance par l'employeur de son obligation individuelle de reclassement. La disqualification du licenciement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse n'aurait pas été, ici, raisonnable.
Dans l'espèce commentée, comme le souligne la Haute juridiction, l'employeur avait seulement omis "d'informer les salariés, en temps utile". L'information avait donc bien eu lieu, mais elle avait été tardive.
La sanction ne pouvait donc être que celle applicable à la violation ou le non-respect d'une obligation de pure forme. C'est donc logiquement que la Haute juridiction étend à l'information individuelle tardive, la sanction retenue en cas de défaut d'affichage du plan de sauvegarde de l'emploi (Cass. soc., 9 mai 2000, D., 2000 IR 157 ; Dr. soc., 2000, 789, obs. G. Couturier, RJS, 2000. 452, n° 655).
Cette unicité ne peut qu'être approuvée.
Décision
Cass. soc., 25 juin 2008, n° 07-41.065, Société Bronzavia c/ M. Monllor, F-P+B (N° Lexbase : A3739D9D) |
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N6491BGI
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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication
Le 27 Mars 2014
Pour conjurer ces craintes, plusieurs missions d'expertise ont été chargées d'évaluer les risques biologiques de ces technologies. Lors de l'exposition aux radiofréquences d'un mobile, les données scientifiques indiquent de manière peu contestable l'existence d'effets biologiques variés (profil de l'électro-encéphalogramme, temps de réaction...) pour des niveaux d'énergie n'occasionnant pas d'accroissement de la température locale. Mais, tous les travaux de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail, depuis le rapport "Zmirou" en 2001, concluent dans le même sens : l'absence d'effets nocifs, démontrables en l'état actuel des connaissances scientifiques, des ondes électromagnétiques de faible fréquence sur le corps humain.
C'est, alors, tout le débat sur la généralisation du principe de précaution qui s'orchestre. "L'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles" : tel est le canon du principe de précaution applicable en droit français, comme en droit conventionnel (Traité d'Amsterdam, art. 174). C'est bien évidemment en vertu de ce principe que les pouvoirs publics, comme les associations, tentent de ralentir la croissance des installations des antennes relais, soit auprès des tribunaux, soit par arrêtés municipaux. La jurisprudence foisonne, désormais, sur cette question. Pour autant, elle semble souffler le chaud et le froid, comme le souligne Yann Le Foll, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo édition publique, à la lecture d'un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 2 juillet dernier. Le droit immobilier, le droit de l'urbanisme et le droit de la copropriété semblent constituer, étrangement, plus sûrement, un rempart au développement "tout azimut" des antennes relais, que le principe général de précaution ou de protection de l'environnement.
D'abord, parce que, comme le rappellent régulièrement les Hauts magistrats, rien ne permet aujourd'hui de remettre en cause la téléphonie mobile, en l'absence de conclusions certaines ou même probables sur le caractère dangereux de sa technologie. Or, si le principe de précaution ne peut être invoqué que, dans l'hypothèse d'un risque potentiel, il ne peut, en aucun cas, justifier une prise de décision arbitraire. Le recours au principe de précaution n'est, en effet, justifié que lorsque trois conditions préalables sont remplies : l'identification des effets potentiellement négatifs, l'évaluation des données scientifiques disponibles et l'étendue de l'incertitude scientifique. Ensuite, parce que, parallèlement à l'inquiétude des populations face à l'appréhension de cette technologie invisible, les opérateurs ont conclu et favorisé le développement de chartes de bonne conduite, avec les collectivités locales, afin d'expliquer, de rassurer et de respecter le cadre de vie des habitants des communes concernées.
Mais, plus fondamentalement, ce débat autour du principe de précaution illustre les difficultés de notre appréhension de la "vérité scientifique". N'en déplaise à ceux qui croient intimement à la nocivité de la téléphonie mobile -en dehors de nos comportements pavloviens en présence d'un téléphone portable-, la vérité scientifique, telle qu'elle est traditionnellement admise par Descartes et sa suite, est qu'il n'y a pas de conséquence dangereuse sur notre organisme. En effet, une proposition relève de la vérité scientifique lorsqu'elle a été établie suivant une méthode scientifique à partir du nombre le plus faible possible d'hypothèses arbitraires. Elle doit avoir été construite par un raisonnement rigoureux à partir de présuppositions communément admises, et vérifiée par l'expérience. Une proposition relevant d'un choix idéologique ne peut avoir statut de vérité si elle est invérifiable par la méthode scientifique, encore moins si la vérité scientifique est contraire. Aussi, sauf à admettre que la vérité scientifique ne relève plus de la "connaissance objective", mais converge vers une connaissance "plus vraie" du monde, comme Karl Raimund Popper, le paradoxe de Hempel fait que l'expertise scientifique viole, aujourd'hui, l'intuition des opposants aux antennes relais.
Il s'agit donc pour une population, dont l'intérêt national est le développement de la téléphonie mobile, mais dont l'intérêt particulier est la préservation de sa santé, de choisir le risque médian en dehors de toute légitimité scientifique. L'exemple des codes de bonne conduite auxquels les opérateurs téléphoniques sont parties, évoqué supra, en est une illustration. La régulation ne pourra se faire sur le terrain de la crainte collective. C'est, en substance, ce que vient de rappeler le Conseil d'Etat dans son arrêt du 2 juillet 2008.
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N6524BGQ
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par Frédéric Dal Vecchio, Juriste-Fiscaliste et Chargé d'enseignement à l'Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines
Le 07 Octobre 2010
La juridiction administrative réaffirme l'opposabilité d'une décision de gestion du contribuable lorsque ce dernier opte pour le régime spécial de l'article 210 A du CGI (1) et prend position au regard du traitement fiscal de provisions constituées par la société absorbante à la suite de détournements frauduleux commis au sein de la société absorbée avant la fusion (2).
1. L'opposabilité d'une décision de gestion à l'administration fiscale (CAA Versailles, 3ème ch., 27 mars 2008, n° 06VE02302, Société Finindusco N° Lexbase : A0695D8A)
L'activité de la société anonyme Finindusco est d'acquérir et gérer des participations de sociétés. Après l'acquisition de la totalité du capital social de la SARL Investold, la contribuable décide, le 17 décembre 1993, de la dissoudre et de se prévaloir des dispositions de l'article 210 A du CGI au regard de la plus-value de 884 630 euros constatée au titre de cette opération qualifiée de fusion.
A la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a contesté le droit de la société Finindusco de se prévaloir du régime de l'article 210 A du CGI dès lors qu'aucun moyen d'exploitation permanent n'a été apporté à la société absorbante, car le seul actif de la société absorbée était constitué de liquidités. Par conséquent, le vérificateur a considéré que l'opération ne s'inscrivait pas dans le cadre d'une fusion au sens de l'article 1844-4 du Code civil (Code civil art. 1844-4 N° Lexbase : L2024ABL).
En première instance (TA Cergy-Pontoise, 4 juillet 2006, n° 0201431, Société Finindusco N° Lexbase : A1700D8H), la juridiction a opéré une distinction entre les opérations de fusion-absorption régies par l'article 1844-4 du Code civil et les opérations de dissolution d'une société après réunion de toutes les parts sociales en une même main visées par l'article 1844-5 du Code civil (C. civ., art. 1844-5). Rappelons que l'article 1844-5 du Code civil résulte de la loi n° 88-15 du 5 janvier 1988 et que sa mise en oeuvre entraîne "la transmission universelle du patrimoine de la société à l'associé unique sans qu'il y ait lieu à liquidation". Le juge du premier degré déduit des faits de l'espèce que l'acquisition de la totalité des parts sociales de la société Investold et la décision de dissolution relevaient de la qualification juridique de dissolution-confusion de sorte que cette opération n'était pas éligible à l'option pour le régime de l'article 210 A du CGI compte tenu de la rédaction des textes en vigueur antérieurement à la loi de finances pour 2002.
Cette décision est critiquable sur deux points : d'une part, nous souscrivons à l'idée selon laquelle la nature juridique de la dissolution-confusion est celle de la fusion (7) ; cette dernière se caractérisant par la dissolution de la société sans liquidation, le transfert universel du patrimoine, l'échange de titres de la société bénéficiaire contre des titres de la société absorbée. Mais, depuis l'adoption de la loi n° 88-17 du 5 janvier 1988, la loi commerciale dispose qu'"il n'est pas procédé à l'échange de parts ou actions de la société bénéficiaire contre des parts ou actions des sociétés qui disparaissent lorsque ces parts ou actions sont détenues [...] par la société bénéficiaire" (loi du 24 juillet 1966, art. 372-1 N° Lexbase : L6202AGS ; aujourd'hui, C. com., art. L. 236-3 N° Lexbase : L6353AI7). Par conséquent, l'échange de titres ne caractérise plus la fusion ce qui permet d'avancer que la dissolution sans liquidation visée à l'article 1844-5 du Code civil est une forme de fusion (contra : DB 411 § 3, 1er novembre 1995 (8)). Partant, il n'y avait pas de raison de ne pas lui appliquer le régime de l'article 210 A du CGI dans sa rédaction antérieure à la loi de finances pour 2002 (contra : DB 411 § 3, 1er novembre 1995 (9)). D'autre part, la position de la doctrine administrative écartant les dissolutions-confusions du régime de l'article 210 A du CGI nous semble contraire au droit communautaire (Directive (CE) 90/434 du 23 juillet 1990 N° Lexbase : L7670AUM), dès lors que l'opération visée par l'article 1844-5 du Code civil répond à la définition de la fusion donnée par ce texte (10)).
En appel, les conseillers de la juridiction versaillaise (CAA Versailles, 3ème ch., 27 mars 2008, n° 06VE02302, Société Finindusco N° Lexbase : A0695D8A) vont censurer le jugement du tribunal administratif car il ressort des pièces que l'assemblée générale du 17 décembre 1993 a approuvé le projet de traité de fusion signé en août 1993. La cour administrative d'appel considère que les parties ont adopté une décision de gestion opposable à l'administration fiscale consistant à recourir à la fusion de sociétés plutôt qu'au mécanisme de dissolution-confusion.
L'administration a tenté de contester la réalité même de cette opération sans se placer sur le terrain de l'article L. 64 du LPF (N° Lexbase : L5565G4U). Ainsi, selon le ministre, "l'opération en cause n'a pas abouti à la remise de titres de la société absorbante aux associés de la société absorbée, d'autre part, [...] la société absorbée n'a apporté à la société absorbante aucun moyen d'exploitation et qu'enfin, la répartition des actifs entre les associés avait débuté antérieurement à l'opération de fusion". Or, ces dernières conditions soulevées par le ministre, quant à la validité de la fusion considérée, ne sont pas imposées par le législateur ou le pouvoir réglementaire selon la cour administrative d'appel.
Il est, par ailleurs, intéressant de constater que, lorsque le contribuable opte pour la solution la plus conforme à ses intérêts, et que l'analyse juridique de l'opération n'abonde pas dans le sens de l'administration fiscale, cette dernière peut être tentée de contester les circonstances entourant la réalisation de l'opération afin de la déclarer comme lui étant inopposable quant à ses effets. Telle fut la thèse -rejetée par le Conseil d'Etat- soutenue par l'administration fiscale à raison d'un apport partiel d'actif (APA) (11) effectué par une société ayant auparavant fait l'objet d'un substantiel redressement au titre de la TVA à raison de la branche d'activité complète apportée (12) (CE 9° et 10° s-s-r., 4 août 2006, n° 260436, SA Financière de l'Erable N° Lexbase : A7928DQP).
2. Déductibilité d'une provision constituée à raison de détournements frauduleux antérieurs à la fusion (CE 3° et 8° s-s-r., 6 juin 2008, n° 285629, SA Gustave Muller N° Lexbase : A9537D8Q)
Les restructurations d'entreprises entraînent parfois des déconvenues : dans l'hypothèse d'une fusion réalisée sur la base d'une comptabilité falsifiée, dans quelle mesure la société absorbante pouvait-elle déduire fiscalement les provisions relatives à des pertes résultant de détournements frauduleux commis avant la fusion ?
Le Conseil d'Etat apporte, par la présente décision, d'importantes précisions : "si, en cas notamment de fusion de sociétés ou d'apport d'actif par voie de scission, la société issue de la fusion ou bénéficiaire de l'apport est tenue de prendre en charge l'intégralité du passif transmis en contrepartie de l'actif recueilli et regardé par suite comme un élément du coût d'acquisition de cet actif, ce passif ne saurait comprendre que les dettes et charges qu'il était possible de connaître ou de prévoir lors de la fusion, compte tenu des diligences normales incombant à la société issue de la fusion ou bénéficiaire de l'apport".
En octobre 1983, la société anonyme Gustave Muller a absorbé par voie de fusion la société européenne de céréales (SEC) avec effet rétroactif au 1er janvier de la même année. L'examen des comptes, postérieurement à l'opération de restructuration, a permis d'établir, en mars 1984, l'existence "de graves malversations [...] constituées par des détournements de biens sociaux réalisés pendant une période fixée par la SA Gustave Muller elle-même du 1er mai 1980 au 30 septembre 1983, soit 35 mois". En conséquence, la société absorbante a constitué des provisions à raison des dettes non comptabilisées par la société absorbée et des créances douteuses alors découvertes.
Lors d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a remis en cause la déductibilité de ces provisions et a obtenu gain de cause devant la juridiction d'appel (CAA Nancy, 2ème ch., 4 août 2005, n° 98NC02201, Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie c/ SA Gustave Muller N° Lexbase : A6699DLP) qui a remis les impositions déchargées par le tribunal administratif à la charge de la contribuable.
Le Conseil d'Etat censure la cour administrative d'appel de Nancy car "en jugeant, sans rechercher si les pertes dues à ces détournements étaient prévisibles à la date de la fusion, compte tenu des diligences normales incombant à la société absorbante lors d'une telle opération, que ces pertes correspondaient à une dette de la [société absorbée] née antérieurement à la fusion et que, en conséquence, elles devaient être assimilées à un élément du prix consenti par la [société absorbante] pour l'acquisition de la [société absorbée], la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit".
Réglant l'affaire au fond (CJA, art. L. 821-2 N° Lexbase : L3298ALQ), la Haute juridiction considère que la société absorbante pouvait opposer à l'administration fiscale son ignorance, au moment de la fusion, des détournements commis au sein de la société absorbée. Les provisions inscrites en comptabilité à raison des pertes probables causées par ces détournements sont déductibles des résultats de l'absorbante dès lors "qu'elle a accompli les diligences normales qui lui incombaient, les pertes nées de ces détournements doivent être regardées comme impossibles à connaître ou à prévoir au moment de l'opération". La décision du Conseil d'Etat est avantageuse lorsque le contribuable est victime d'une délinquance astucieuse fondée sur des falsifications comptables et qu'il a accompli les diligences normales. Les considérants ne rapportant pas la teneur de ces "diligences normales", on peut supposer que le recours au commissaire à la fusion -qui est une obligation légale dans une telle circonstance (13)- en faisait partie (C. com., art. L 236-10 N° Lexbase : L6360AIE). En effet, aux termes de la loi, les commissaires à la fusion "établissent sous leur responsabilité un rapport écrit sur les modalités de la fusion. Ils peuvent obtenir auprès de chaque société communication de tous documents utiles et procéder à toutes vérifications nécessaires. [Ils] vérifient que les valeurs relatives attribuées aux actions des sociétés participant à l'opération sont pertinentes et que le rapport d'échange est équitable". Sans nul doute, au cas d'espèce, le rapport formulé par le commissaire à la fusion participe de la crédibilité de la contribuable lorsqu'elle déclare "n'avoir pas eu connaissance au moment de la fusion des détournements opérés" au sein de la société absorbée. Sa situation aurait peut-être été plus inconfortable si elle avait opté pour la dissolution-confusion (C. civ., art. 1844-5 N° Lexbase : L2025ABM) car, dans cette hypothèse -couramment retenue pour des questions de rapidité, de simplicité et de coût-, le commissaire à la fusion n'intervient pas. Cet état de fait, conjugué avec l'existence de formalités fort réduites, n'incitera guère le contribuable à la prudence ce qui, au regard de la jurisprudence "SA Gustave Muller", n'est pas neutre fiscalement.
Le Conseil d'Etat précise, également, s'agissant de la période antérieure à la fusion, que le fait que les mandataires sociaux de la société absorbée n'ignoraient pas l'existence de ces détournements est sans incidence quant à la déductibilité des pertes pour la société absorbante. Le ministre ne pouvait prétendre qu'il s'agissait en réalité de transférer des déficits dissimulés de la société absorbée au profit de la société absorbante dont le transfert était, au moment des faits, soumis à un agrément ministériel discrétionnaire (14), dès lors que ces détournements sont considérés, par la Haute juridiction administrative, comme une perte de la société absorbante.
Enfin, le fait que ces deux sociétés étaient contrôlées par la même société mère est sans incidence au regard de la déductibilité des pertes subies par la société absorbante.
Quant à l'acte anormal de gestion qu'aurait commis la société absorbante en s'abstenant d'agir en responsabilité à l'encontre de la société mère, le juge de cassation y répond en soulignant que le point était "étranger au redressement en litige".
Aux termes des articles 201 (N° Lexbase : L3705HLS) et 221 (N° Lexbase : L4147HL8) du CGI, la transformation d'une société anonyme en société non soumise à l'impôt sur les sociétés est assimilée à une cessation d'entreprise. Il est toutefois possible d'en atténuer les conséquences fiscales à la double condition qu'aucune modification ne soit apportée aux écritures comptables et que l'imposition des bénéfices en sursis d'imposition et les plus-values latentes demeure possible sous le nouveau régime fiscal applicable après la transformation (CGI, art. 221 bis N° Lexbase : L4153HLE ; CE 9° et 10° s-s-r., 28 juillet 2000, n° 138342, Société civile agricole Les Chapelains N° Lexbase : A9653AGM).
Les faits de l'espèce rapportent qu'à l'issue d'une assemblée générale extraordinaire tenue en octobre 1991, la société anonyme Lamy s'est transformée en société en nom collectif avec effet rétroactif au 1er janvier 1991 en escomptant pouvoir conférer à la rétroactivité un effet au regard du fait générateur de l'impôt.
A la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration a remis en cause le raisonnement de la contribuable -qui prétendait alors être assujettie à l'impôt sur le revenu depuis le 1er janvier 1991- en la soumettant à l'impôt sur les sociétés pour les bénéfices réalisés du 1er janvier 1991 au 18 octobre 1991 ainsi que les plus-values à long terme (15).
Saisie par la contribuable après rejet de sa requête par le tribunal administratif de Lyon (16), la cour administrative d'appel (CAA Lyon, 5ème ch., 13 avril 2006, n° 01LY02519, SNC Lamy N° Lexbase : A4139DPY) va délivrer une analyse qui sera confirmée par le Conseil d'Etat (CE 3° et 8° s-s-r., 16 mai 2008, n° 294305, SNC Lamy N° Lexbase : A6509D8L) : les juges du second degré n'ont pas commis d'erreur de droit, d'une part, quant à l'atténuation des conséquences de la cessation d'entreprise qui ne concerne que les seuls bénéfices en sursis d'imposition et les plus-values latentes incluses dans l'actif social et qui ne s'étend pas à l'ensemble des bénéfices non encore imposés ; d'autre part "une clause de rétroactivité insérée dans l'acte de transformation ne [peut] avoir pour effet de remettre en cause la réalisation [du] fait générateur de l'impôt".
L'argumentation de la requérante n'aurait été recevable que dans l'hypothèse où le législateur n'aurait pas adopté un texte spécifiquement applicable dans une telle circonstance. Or, le législateur a pris soin, lorsqu'une entreprise soumise à l'IS se transforme en société relevant par défaut de l'IR, de permettre à l'administration d'assujettir immédiatement la société considérée lorsqu'elle cesse totalement ou partiellement d'être soumise à l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun (CGI, art. 219 N° Lexbase : L4057HLT) (17) du fait de sa transformation ; cette dernière étant fiscalement assimilée à une cessation d'entreprise. La volonté du contribuable n'a ici aucune prise quant au fait générateur de l'impôt et il ne permet pas d'empêcher l'administration "d'établir cet impôt en fonction de la situation de fait et de droit existant à cette date" (V. également concernant l'inopposabilité de l'effet rétroactif d'un traité de fusion au regard du fait générateur de la TVA : CE Contentieux, 18 mars 1992, n° 62403, Société anonyme Leybold-Heraeus-Sogev N° Lexbase : A5254ARZ).
(1) Le régime optionnel profite également aux dissolutions sans liquidation -aussi appelées dissolution-confusion- visées par l'article 1844-5 du Code civil (N° Lexbase : L2025ABM) ; aux scissions et aux apports partiels d'actif : "1 Les dispositions de l'article 210 A s'appliquent à l'apport partiel d'actif d'une branche complète d'activité ou d'éléments assimilés lorsque la société apporteuse prend l'engagement dans l'acte d'apport : a De conserver pendant trois ans les titres remis en contrepartie de l'apport ; b De calculer ultérieurement les plus-values de cession afférentes à ces mêmes titres par référence à la valeur que les biens apportés avaient, du point de vue fiscal, dans ses propres écritures. Les dispositions de l'article 210 A s'appliquent à la scission de société comportant au moins deux branches complètes d'activités lorsque chacune des sociétés bénéficiaires des apports reçoit une ou plusieurs de ces branches et que les associés de la société scindée s'engagent, dans l'acte de scission, à conserver pendant trois ans les titres représentatifs de l'apport qui leur ont été répartis proportionnellement à leurs droits dans le capital. Toutefois, l'obligation de conservation des titres n'est exigée que des associés qui détiennent dans la société scindée, à la date d'approbation de la scission, 5 % au moins des droits de vote ou qui y exercent ou y ont exercé dans les six mois précédant cette date, directement ou par l'intermédiaire de leurs mandataires sociaux ou préposés, des fonctions de direction, d'administration ou de surveillance et détiennent au moins 0,1 % des droits de vote dans la société" (CGI, art. 210 B N° Lexbase : L3941HLK).
(2) Le législateur a, notamment, introduit une définition fiscale des fusions (CGI, art. 210-0 A N° Lexbase : L2491HNL) interprétée par l'administration fiscale comme un élargissement du champ d'application du régime optionnel aux dissolutions sans liquidation (instruction du 7 juillet 2003, BOI 4 I-1-03 N° Lexbase : X5337ABB).
(3) "L'application de ces dispositions est subordonnée à la condition que la société absorbante s'engage, dans l'acte de fusion, à respecter les prescriptions suivantes : a) Elle doit reprendre à son passif : d'une part, les provisions dont l'imposition est différée ; d'autre part, la réserve spéciale où la société absorbée a porté les plus-values à long terme soumises antérieurement au taux réduit de 10 %, de 15 %, de 18 %, de 19 % ou de 25 % ainsi que la réserve où ont été portées les provisions pour fluctuation des cours en application du sixième alinéa du 5° du 1 de l'article 39 ; b) Elle doit se substituer à la société absorbée pour la réintégration des résultats dont la prise en compte avait été différée pour l'imposition de cette dernière ; c) Elle doit calculer les plus-values réalisées ultérieurement à l'occasion de la cession des immobilisations non amortissables qui lui sont apportées d'après la valeur qu'elles avaient, du point de vue fiscal, dans les écritures de la société absorbée ; d) Elle doit réintégrer dans ses bénéfices imposables les plus-values dégagées lors de l'apport des biens amortissables. La réintégration des plus-values est effectuée par parts égales sur une période de quinze ans pour les constructions et les droits qui se rapportent à des constructions ainsi que pour les plantations et les agencements et aménagements des terrains amortissables sur une période au moins égale à cette durée ; dans les autres cas, la réintégration s'effectue par parts égales sur une période de cinq ans. Lorsque le total des plus-values nettes sur les constructions, les plantations et les agencements et aménagements des terrains excède 90 % de la plus-value nette globale sur éléments amortissables, la réintégration des plus-values afférentes aux constructions, aux plantations et aux agencements et aménagements des terrains est effectuée par parts égales sur une période égale à la durée moyenne pondérée d'amortissement de ces biens. Toutefois, la cession d'un bien amortissable entraîne l'imposition immédiate de la fraction de la plus-value afférente à ce bien qui n'a pas encore été réintégrée. En contrepartie, les amortissements et les plus-values ultérieurs afférents aux éléments amortissables sont calculés d'après la valeur qui leur a été attribuée lors de l'apport ; e) Elle doit inscrire à son bilan les éléments autres que les immobilisations pour la valeur qu'ils avaient, du point de vue fiscal, dans les écritures de la société absorbée. A défaut, elle doit comprendre dans ses résultats de l'exercice au cours duquel intervient l'opération le profit correspondant à la différence entre la nouvelle valeur de ces éléments et la valeur qu'ils avaient, du point de vue fiscal, dans les écritures de la société absorbée."
(4) CGI, art. 54 septies (N° Lexbase : L6759HWA). Une amende de 5 % des sommes omises est prévue en cas de défaut de production ou du caractère inexact ou incomplet de ces documents (CGI, art. 1763 N° Lexbase : L4748HWR).
(5) Lorsque l'agrément discrétionnaire était délivré, le déficit transféré ne dépassait pas 40 % de la valeur des actifs industriels apportés. La doctrine rapporte que "le transfert de déficit a été accordé aux secteurs non industriels à haute intensité capitalistiques tels que les transports et le BTP par exemple", Dr. fisc., 2002, ét. 1, p. 15.
(6) Du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004, le déficit de la société apporteuse pouvait être transféré -dans la limite la plus importante- soit de la valeur brute des éléments de l'actif immobilisé de la société apporteuse affectés à l'exploitation (hors immobilisations financières) ; soit la valeur d'apport de ces éléments.
(7) J.-J. Daigre, La dissolution d'une filiale à 100 % est une fusion : A propos de l'article 1844-5, alinéa 3, du Code civil, JCP éd. E, 1992, ét. 152.
(8) "Ce régime fiscal ne concerne pas les dissolutions de sociétés réalisées dans le cadre des dispositions de l'article 1844-5 du Code civil, qui ne constituent pas juridiquement des fusions" (QE n° 13889, de M. Ceccaldi-Raynaud, réponse publiée au JOAN du 10 octobre 1994, p. 5020, n° 13889 N° Lexbase : L9305H87).
(9) "Le régime de faveur prévu à l'article 210 A du code général des impôt peut donc s'appliquer à une opération de fusion qui ne donne pas lieu à l'émission de titres par la société absorbante, dès lors que cette opération est réalisée dans les conditions prévues aux articles 371 et suivants de la loi du 24 juillet 1966 susvisée. Ce dispositif ne peut s'appliquer aux opérations de dissolution sans liquidation qui sont réalisées dans le seul cadre des dispositions de l'article 1844-5 du code civil".
(10) Art. 2 : "Aux fins de l'application de la présente directive, on entend par a) fusion : l'opération par laquelle : [...] une société transfère, par suite et au moment de sa dissolution sans liquidation, l'ensemble de son patrimoine, activement et passivement, à la société qui détient la totalité des titres représentatifs de son capital social".
(11) "Considérant que, lorsqu'une société apporte une partie de son actif à une autre société et que, d'un commun accord entre les parties, cette opération est, comme le permet l'article L. 236-22 du code de commerce, soumise aux dispositions des articles L. 236-16 à L. 236-21 de ce code, relatives aux scissions de société, il s'opère, sauf dérogation expresse prévue dans le traité d'apport ou circonstance telle qu'une fraude à l'égard de tiers, de nature à la rendre inopposable à ceux-ci, une transmission universelle de tous les droits, biens et obligations de la société apporteuse, afférents à la branche d'activité faisant l'objet de l'apport, à la société qui bénéficie de celui-ci ; qu'il résulte, en particulier, dans ce cas, des dispositions de l'article L. 236-20 du code de commerce que la société bénéficiaire de l'apport devient seule débitrice des dettes qui s'y rattachent et qui ont été contractées par la société apporteuse, à laquelle elle est substituée à l'égard des créanciers ; Considérant qu'il suit de là qu'en jugeant que l'administration avait à bon droit poursuivi le recouvrement de la créance du Trésor authentifiée par l'avis de mise en recouvrement du 10 avril 1996 émis au nom de la S.A. FINANCIERE DE L'ERABLE à l'encontre de cette dernière, nonobstant la transmission universelle de tous droits, biens et obligations à la S.A. Fournier TP résultée de l'apport partiel d'actif fait à celle-ci le 26 décembre 1995, et soumis au régime des scissions de société, la cour administrative d'appel a méconnu que cette opération avait eu légalement pour effet de rendre la seconde société débitrice envers le Trésor en lieu et place de la première ; que la S.A. FINANCIERE DE L'ERABLE est, par suite, fondée à demander que l'article 2 de l'arrêt attaqué, entaché d'erreur de droit, soit annulé".
(12) "qu'aucune des circonstances invoquées par le ministre, telles que l'adresse commune des sièges sociaux des deux sociétés, la participation détenue par l'une dans le capital de l'autre, ou encore la reprise par la société bénéficiaire de l'apport du nom commercial qui constituait la précédente dénomination de la société apporteuse, n'est de nature à caractériser, comme il le soutient à titre subsidiaire, une situation qui justifierait de regarder comme inopposable à l'administration la transmission universelle de patrimoine opérée du fait de l'apport partiel d'actif intervenu". V. également : Cass. com., 5 mars 1991, n° 88-19.629, Société Coignet c/ M Burgaud (N° Lexbase : A1185ABI) ; Cass. com., 12 décembre 2006, n° 05-15.619, Société Hydraulique PB, FS-P+B+I+R (N° Lexbase : A8546DSC).
(13) V. cependant la loi n° 2008-649 du 3 juillet 2008 (JORF du 4 juillet 2008) portant diverses dispositions d'adaptation du droit des sociétés au droit communautaire (NOR : JUSX0767256L N° Lexbase : L7047H77) et modifiant, notamment, l'article L. 236-10 : "Sauf si les actionnaires des sociétés participant à l'opération de fusion en décident autrement dans les conditions prévues au II du présent article, un ou plusieurs commissaires à la fusion, désignés par décision de justice et soumis à l'égard des sociétés participantes aux incompatibilités prévues à l'article L. 822-11, établissent sous leur responsabilité un rapport écrit sur les modalités de la fusion. [...] La décision de ne pas faire désigner un commissaire à la fusion est prise, à l'unanimité, par les actionnaires de toutes les sociétés participant à l'opération. A cette fin, les actionnaires sont consultés avant que ne commence à courir le délai exigé pour la remise de ce rapport préalablement à l'assemblée générale appelée à se prononcer sur le projet de fusion" ; G. de Foresta, Rapports du commissaire à la fusion : formalités inutiles ou bien inutilité de la réforme ?, Lexbase Hebdo n° 290 - édition privée générale (N° Lexbase : N8682BDW).
(14) Ce qui signifie que le refus n'avait pas à être motivé (CAA Paris, 3ème ch., 22 juin 1995, n° 94PA01204, Société Pharmadom N° Lexbase : A0115AXK ; CE Contentieux, 1er juin 1988, n° 79550, Société Berto SA N° Lexbase : A8208APP).
(15) La société Lamy a également été assujettie à un supplément d'IS, au taux de 42 %, sur les revenus réputés distribués à la date de transformation (CGI, art. 219 N° Lexbase : L4057HLT). Pour le Conseil d'Etat, "ce supplément ne saurait avoir une assiette plus large que celle de l'impôt initialement dû au titre de chacun de ces exercices en cause".
(16) TA Lyon, 25 septembre 2001, n° 9700485 et n° 9700486.
(17) Soit 34 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1991, période correspondant à la date des faits de l'espèce. Il était fixé à 37 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1990, à 39 % pour les exercices ouverts entre le 1er janvier 1989 et le 31 décembre 1989, à 42 % pour les exercices ouverts entre le 1er janvier 1988 et le 31 décembre 1988 et à 45 % pour les exercices ouverts entre le 1er janvier 1987 et le 31 décembre 1987. Le taux de 33,33 % aujourd'hui encore en vigueur est applicable depuis le 1er janvier 1993.
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par Cédric Tahri, Chargé d'enseignement à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV
Le 07 Octobre 2010
Il n'est pas toujours aisé de fixer la frontière entre les affaires qui sont communicables (A) et celles qui ne le sont pas (B). Une tendance se dessine cependant : l'approche restrictive du domaine de l'article 425 du Code de procédure civile semble avoir les faveurs de la Cour de cassation.
A - Les affaires communicables au ministère public
Touchant à l'ordre public familial, les affaires relatives à l'établissement et à la contestation de la filiation sont toujours communicables au ministère public (5).
Les unes font l'objet d'une communication spéciale en vertu du dernier alinéa de l'article 425 du Code de procédure civile, issu du décret n° 81-500 du 12 mai 1981 : "Le ministère public doit également avoir communication de toutes les affaires dans lesquelles la loi dispose qu'il doit faire connaître son avis". Ainsi, en est-il des procédures d'adoption, qu'elles soient gracieuses (6) ou contentieuses (7). Il en va également ainsi des demandes en déclaration d'abandon (8) et en restitution de l'enfant (9). Ces dispositions spéciales sont opportunes car elles viennent préciser le champ de l'obligation de communiquer. Pour autant, elles sont parfois inutiles car redondantes. A titre d'exemple, la communication d'une affaire gracieuse d'adoption relève de plusieurs dispositions éparses du Code de procédure civile : articles 425 alinéa 1er, et dernier alinéa, 798 (N° Lexbase : L3081ADH) et 1170 (N° Lexbase : L2002ADI). Dans ce cas, un toilettage du Code ne serait-il pas le bienvenu ? Certes, il pourrait être rétorqué qu'il vaut mieux plusieurs dispositions législatives plutôt qu'aucune dans une matière aussi sensible. Il n'en demeure pas moins que l'effort de simplification du droit, initié par la Chancellerie, devrait naturellement conduire à remédier à cette situation.
A côté des textes spéciaux, la communication au ministère public est rendue obligatoire par l'article 425, alinéa 1er, dont la vocation est plus générale. Nonobstant la clarté du principe qui y est énoncé, les praticiens se heurtent parfois à une difficulté de taille : que doit-on entendre par "affaires relatives à la filiation" ? A ce sujet, la Cour de cassation est venue apporter des précisions, loin d'être superflues, mais qui suscitent parfois des interrogations de la part de la doctrine. En effet, la Haute juridiction considère comme communicables les affaires relatives à l'établissement de la filiation. Tel est le cas de l'action en recherche de paternité (10) ou des causes relatives à la possession d'état d'enfant naturel (11). Il en va pareillement des affaires relatives à la contestation de la filiation. L'action en contestation d'une légitimation (12) et l'action en contestation de paternité (13) en sont de bonnes illustrations.
Un critère semble donc se dégager de la jurisprudence de la Cour de cassation. Sont considérées comme des "affaires relatives à la filiation" les actions ayant pour finalité la filiation. Plus précisément, l'article 425, alinéa 1er, du Code de procédure civile s'applique dans la mesure où le lien de filiation est en cause. Autrement dit, les affaires communicables mettent en jeu des rapports personnels, ceux entre les enfants et leurs parents. Mais aussi séduisant qu'il puisse paraître, ce critère est mis à mal par la soumission aux prescriptions du premier alinéa de l'article 425 de l'action à fins de subsides (14), prévue aux articles 342 et suivants du Code civil (N° Lexbase : L8874G9K). Que cette action puisse être assimilée à une affaire relative à la filiation laisse dubitatif (15). Après tout, il résulte des termes du Code de procédure civile que le législateur a entendu dissocier ces deux types d'actions (16). En outre, l'action à fins de subsides poursuit un but essentiellement alimentaire, pour ne pas dire pécuniaire, contrairement aux autres affaires communicables. Elle ne devrait donc pas être soumise aux dispositions de l'article 425, alinéa 1er. Certes, la solution de la Cour de cassation s'explique par le fait qu'en droit de la famille l'action à fins de subsides est traditionnellement assimilée aux actions relatives à la filiation. Mais la cohérence du système est mise à rude épreuve par cette solution, aussi ancienne qu'elle soit. Tout au plus, les actions relatives aux subsides devraient faire l'objet d'une communication facultative, soit à l'initiative du juge (17), soit à l'initiative du ministère public lui-même, s'il le désire (18). Ou alors, afin d'apaiser les craintes d'une communication facultative, l'action à fins de subsides devrait être soumise aux prescriptions du dernier alinéa de l'article 425, le seul obstacle résidant alors dans l'absence de texte spécial. Il appartiendrait donc au législateur d'insérer dans le Code de procédure civile un article 1156-1 prévoyant expressément l'avis du ministère public.
B - Les affaires non communicables au ministère public
Certaines affaires n'ont pas à être obligatoirement communiquées au ministère public soit parce que leur nature s'y oppose, soit parce qu'elles ont déjà été transmises au parquet en cours de procédure.
En premier lieu, la Cour de cassation est intervenue afin d'écarter du champ de l'article 425, alinéa 1er, du Code de procédure civile certaines demandes qui, par leur nature, ne sont pas susceptibles de remettre en cause le lien de filiation entre l'enfant et ses parents. Il en est ainsi de l'action tendant au changement de nom d'un enfant naturel (19), de la demande formée par le père d'un enfant mineur tendant seulement à l'obtention d'un droit de visite et d'hébergement (20) et de l'action en exequatur d'un jugement étranger prononçant la condamnation d'un père présumé à une pension alimentaire (21). Il n'y a pas non plus de communication au ministère public lorsque la contestation quant à la filiation soulevée au cours d'une action en pétition d'hérédité ne met pas en jeu l'état du successible, mais tend seulement à mettre en cause la continuité de la chaîne des parentés le reliant au de cujus (22). Enfin, les prescriptions de l'article 425 du Code de procédure civile n'ont pas lieu de s'appliquer aux demandes d'acte de notoriété établissant la possession d'état de l'enfant adressées au juge sur le fondement de l'ancien article 311-3 du Code civil (23). Cette dernière solution a été critiquée par une partie de la doctrine. Le professeur Pierre Murat estime, par exemple, qu'une communication systématique au ministère public des demandes de délivrance d'acte de notoriété renforcerait la fiabilité de ce dernier (24). Il est vrai qu'une transmission du dossier au parquet n'est jamais nuisible et constitue une garantie supplémentaire de bonne justice. Toutefois, la solution s'explique au regard du critère que nous avons mis en lumière précédemment. La délivrance de l'acte de notoriété n'affecte pas directement le lien de filiation de l'enfant. L'acte de notoriété constate seulement la possession d'état. En d'autres termes, ce n'est pas véritablement lui qui établit la filiation, mais l'existence même de cette possession d'état, dont il est seulement la preuve. Au surplus, l'acte de notoriété se présente comme une mesure d'administration judiciaire (25) puisqu'il n'est sujet à aucun recours (26). Mais face à de telles subtilités, on ne peut que regretter le laconisme des magistrats de la Cour de cassation.
En second lieu, la double communication au ministère public dans une même affaire n'a pas lieu d'être. Ainsi, il ne peut être reproché à une cour d'appel de s'être prononcée sur une action en recherche de paternité malgré le défaut de communication de la cause au parquet, dès lors qu'il résulte d'une mention d'un arrêt de la même cour d'appel rectifiant un précédent arrêt avant-dire droit rendu dans la même procédure, que le dossier avait fait l'objet d'une communication au ministère public (27). De la même façon, la cause relative à l'action en majoration de subsides, dont le principe a été admis dans une précédente décision, n'a pas à être communiquée à nouveau au ministère public (28).
Néanmoins, il a été récemment jugé que l'obligation de communication doit être renouvelée en appel auprès du procureur général alors même que l'affaire a été communiquée au ministère public en première instance (29). Comme l'a justement fait remarquer le professeur Etienne Vergès (30), la solution est sévère car l'on pourrait considérer que le parquet a été correctement informé en recevant communication du dossier en première instance. Par ailleurs, elle ne se justifie guère au regard du principe de l'indivisibilité du ministère public. Pourtant, certains auteurs envisagent sa généralisation aux autres voies de recours (31). Mais n'est-ce pas là renforcer à outrance le formalisme procédural dans un domaine où le ministère public apparaît moins comme un contradicteur que comme un donneur d'avis? Surtout, n'est-ce pas là une vision irréaliste des choses au regard des moyens de la Justice ? En multipliant les hypothèses de communication, ne prend-on pas le risque de voir les magistrats se livrer à un simulacre ? Trop de communications tuent la communication...
II - L'exécution de l'obligation de communiquer au ministère public les affaires relatives à la filiation
La communication obligatoire des causes relatives à la filiation est une règle d'ordre public (32) dont la violation est un motif de cassation. Plus précisément, il s'agit d'une obligation légale à la charge du juge (A) dont le non-respect est assorti d'une sanction particulièrement dissuasive : la nullité du jugement (B).
A - Le débiteur de l'obligation de communiquer
La communication des affaires relatives à la filiation ne repose pas sur les épaules des parties (33). Elle est réalisée à la diligence du juge (34). Ce magistrat du siège, débiteur de l'obligation de communiquer, peut être le président de la juridiction saisie ou son délégataire chargé de la distribution des affaires, le magistrat qui préside la formation de jugement, le juge aux affaires familiales ou le conseiller de la mise en état, si celle-ci s'avère nécessaire. Dans tous les cas, il doit s'assurer que la communication a été effectuée. S'il s'aperçoit qu'elle n'a pas eu lieu, il doit nécessairement la prescrire, quitte à rouvrir les débats. De plus, le juge doit veiller à ce que la communication de l'affaire se fasse "en temps utile pour ne pas retarder le jugement", selon les termes de l'article 428 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2666AD7). A ce propos, il serait souhaitable que le ministère public soit averti le plus tôt possible de l'affaire sur laquelle il doit rendre un avis (35). Les articles 163 (N° Lexbase : L2360ADR) et 277 (N° Lexbase : L2486ADG) du Code de procédure civile, permettant au ministère public d'assister à la réalisation des mesures d'instruction, militent en ce sens. En effet, une communication tardive de l'affaire fait obstacle à une connaissance approfondie des faits permettant au ministère public de rendre un avis éclairé et pertinent. Elle rend également la présence du ministre public aux débats pour le moins improbable (36).
En vérité, le défaut de communication révèle un manque de diligence du juge et donc un mauvais fonctionnement du service judiciaire (37). Elle trouve sa source vraisemblablement dans le fait que les magistrats sont souvent submergés par la masse de dossiers à traiter. Il est alors tentant de confier la communication des affaires relatives à la filiation aux services du greffe. Une telle solution, qui a l'apparence de la simplicité, pourrait donner lieu à des dérives comme l'usage immodéré du tampon attestant que les prescriptions de l'article 425 ont bien été respectées (38). Les communications seraient alors purement formelles, l'objectif étant d'éviter à tout prix la nullité du jugement.
B - La sanction de l'obligation de communiquer
La sanction du défaut de communication consiste dans la nullité du jugement. En effet, la jurisprudence voit dans la communication obligatoire une formalité substantielle (39) qui s'impose à tous les degrés de juridiction (40). Seules les parties à l'instance peuvent arguer d'un défaut de communication au ministère public dans la mesure où ce dernier, partie jointe, ne peut se prévaloir d'une nullité du jugement rendu sans ses réquisitions préalables. L'irrégularité sera alors invoquée dans le cadre des voies de recours : elle pourra être prononcée sur appel si le jugement est en premier ressort ou sur pourvoi en cassation si le jugement est en dernier ressort.
La nullité apparaît comme une sanction extrêmement rigoureuse conduisant au réexamen complet de l'affaire devant les juges du fond. Dès lors, elle peut être perçue différemment par les plaideurs. Pour ceux ayant obtenu gain de cause, il s'agira d'un contretemps regrettable, source de tracasseries et de frais supplémentaires. Il est vrai qu'un plaideur accepte toujours difficilement la perte d'un procès pour une simple question de procédure. En revanche, pour d'autres, il s'agira d'une nouvelle opportunité d'obtenir le succès de leurs prétentions.
La nullité peut cependant être évitée en recourant à deux techniques susceptibles de sauver le jugement. La première est issue de la pratique judiciaire. Il s'agit des présomptions de régularité. La procédure est alors considérée comme régulière afin d'éviter son annulation, sauf si la partie qui allègue une irrégularité arrive à la prouver (41). Admises un temps (42), les présomptions de communication ont finalement été écartées par la Chambre mixte de la Cour de cassation (43) : l'absence d'indication dans le jugement ne saurait présumer la transmission de l'affaire au ministère public.
La seconde technique résulte des dispositions de l'article 459 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2698ADB) : la communication peut s'effectuer par tout moyen. En pratique, la preuve de l'accomplissement de cette formalité découlera le plus souvent d'une mention au jugement (44), à condition que celle-ci ne soit pas équivoque (45). Ainsi, la communication est démontrée lorsque le jugement s'y réfère expressément (46) ou bien lorsqu'il contient des allusions à la présence du ministère public aux débats (47) ou à ses conclusions (48). A défaut, la preuve de la communication peut aussi résulter d'une décision avant dire droit (49) ou d'un jugement rectificatif d'une décision avant dire droit (50). Enfin, la preuve de la communication pourra être établie par les pièces de la procédure (51), le registre d'audience (52) ou tout autre moyen (53). Généralement, le magistrat du siège appose une mention sur le dossier en usant des formules suivantes : "sur l'avis du ministère public", "le ministère public entendu", "le greffier avise le procureur de la République", "le ministère public doit avoir communication", "pour le procureur général", "vu au parquet général"...
Encore faut-il ne pas confondre communication et vérification... Que le dossier ait été communiqué au ministère public est une chose, mais que celui-ci en ait pris connaissance en est une autre !
(1) V. C. proc. civ, art. 424 (N° Lexbase : L2663ADY). Le ministère public n'est pas tenu de développer son avis. Il peut simplement s'en remettre à la décision des juges. S'il décide de donner un avis, celui-ci peut être exposé oralement à l'audience ou donné par écrit sous la forme de réquisitions. Ce choix est, cependant, exclu lorsqu'un texte impose sa participation à l'audience (C. proc. civ., art. 431 N° Lexbase : L2670ADA). Par exemple, dans le cadre d'une procédure gracieuse d'adoption, il résulte de l'article 800 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L3083ADK) que le ministère public doit assister aux débats devant le TGI si ces derniers ont lieu.
(2) Contra, v. M. Rolland, Le ministère public en droit français, JCP, 1956, I, 1281, n° 20.
(3) V. G. Cornu et J. Foyer, Procédure civile, PUF, 3ème éd., 1996, n° 88, p. 398.
(4) Sur ce phénomène, v. Familles & Justice. Justice civile et évolution du contentieux familial en droit comparé, sous la direction de M.-T. Meulders-Klein, Bruylant LGDJ, 1997.
(5) V. G. Sutton, L'office du juge dans le contentieux de la filiation, in Mélanges D. Huet-Weiller, PUS LGDJ, 1994, p. 462.
(6) V. C. proc. civ., art. 1167 (N° Lexbase : L1999ADE) et 1170.
(7) Pour la procédure relative à la révocation de l'adoption simple, v. C. proc. civ., art. 1177 (N° Lexbase : L2013ADW).
(8) V. C. proc. civ., art. 1161 (N° Lexbase : L1994AD9).
(9) V. C. proc. civ., art. 1164 (N° Lexbase : L1997ADC).
(10) V. Cass. civ. 1, 15 mai 2008, n° 07-17.407, M. Raymond Erin, F-P+B (N° Lexbase : A5394D8B) ; Cass. civ. 1, 2 juin 1992, n° 89-21.282, Consorts X c/ Mme Y (N° Lexbase : A4813AHQ), Bull. civ. I, n° 171.
(11) V. Cass. civ. 1, 11 juillet 1988, n° 86-18.372, M. X c/ Consorts Y et autres (N° Lexbase : A2138AHN), D., 1988, som., p. 401, obs. D. Huet-Weiller ; Cass. civ. 1, 12 juillet 1994, n° 92-18.949, Consorts V. c/ M. André, G.-A., inédit (N° Lexbase : A0748CSI), Defrénois, 1995, p. 318, obs. J. Massip.
(12) V. Cass. civ. 1, 12 mai 1987, n° 84-14472, M. X c/ Consorts Y, publié (N° Lexbase : A1757CHK), Bull. civ. I, n° 150, Gaz. Pal., 1988, 1, p. 321, obs. J. Massip. Cette action est vouée à disparaître depuis la suppression de la légitimation par l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 (ordonnance portant réforme de la filiation N° Lexbase : L8392G9P).
(13) V. Cass. civ. 1, 31 octobre 2007, n° 06-20.684, M. P. c/ Mme F, F-P+B (N° Lexbase : A2404DZ3), Les Petites Affiches, n° 59, 21 mars 2008, p. 10, note J. Massip ; Cass. civ. 1, 13 juin 1997, n° 95-18.431, Mme X c/ M. Y et autre (N° Lexbase : A0655ACA), Bull. civ. I, n° 183, Gaz. Pal., 1998, 2, 793, note Du Rusquec ; V. Cass. civ. 1, 6 février 2008, n° 06-22.141, M. Mario Arethas, F-P+B (N° Lexbase : A7245D44).
(14) V. Cass. civ. 1, 17 octobre 2007, n° 06-16.923, Alix B. c/ Marie-Françoise H., F-P+B (N° Lexbase : A8077DYS), Dr. fam., 2007, comm. 202, note P. Murat ; Cass. civ. 1, 12 mai 1987, n° 85-16.899, Mlle X c/ M. Y (N° Lexbase : A7543AAM), Bull. civ. I, n° 149 ; Cass. civ. 1, 29 mai 1985, n° 84-11.007, T. c/ Mlle B. (N° Lexbase : A4560AA7), Bull. civ. I, n° 168 ; Cass. civ. 1, 7 octobre 1980, n° 79-14.980, A. c/ Dame R., publié (N° Lexbase : A5023CG7), Bull. civ. I, n° 243, D., 1981, IR, p. 298, obs. D. Huet-Weiller.
(15) V., notamment, M. Douchy-Oudot, note sous Cass. civ. 1, 17 octobre 2007, n° 06-16.923, M. Alix Belim, F-P+B (N° Lexbase : A8077DYS), Procédures n° 2, février 2008, comm. 50.
(16) V. C. proc. civ., art. 1149 (N° Lexbase : L6775HNA). Au surplus, le chapitre VI du titre I du livre troisième s'intitule "La filiation et les subsides". Cette distinction se retrouve aussi au sein du Code civil.
(17) V. C. proc. civ., art. 427 (N° Lexbase : L2666AD4).
(18) V. C. proc. civ., art. 426 (N° Lexbase : L2665AD3).
(19) V. Cass. civ. 1, 25 juin 1991, n° 90-10.545, Mme X c/ M. Y (N° Lexbase : A5027AHN), Bull. civ. I, n° 211, Gaz. Pal., 1992, 1, som., p. 10, note J. Massip.
(20) V. Cass. civ. 1, 17 juin 1986, n° 84-16.014, Mme H. c/ Epoux H. (N° Lexbase : A4790AAN), Bull. civ. I, n° 171, Gaz. Pal., 1987, 1, som., p. 175, obs. S. Guinchard et T. Moussa.
(21) V. Cass. civ. 1, 15 décembre 1981, n° 80-12.244, M. c/ S., publié (N° Lexbase : A6371CHG), Bull. civ. I, n° 380.
(22) V. Cass. civ. 1, 2 juin 1987, n° 85-15.159, Consorts Y c/ Consorts Z (N° Lexbase : A7509AAD), Bull civ. I, n° 179, D., 1988, jur., p. 405, obs. J. Massip.
(23) V. Cass. civ. 1, 4 juillet 2007, n° 05-20.204, M. René Sinquin, F-P+B (N° Lexbase : A0727DX9), Dr. fam., 2007, comm. 169, obs. P. Murat. A noter que l'ancien article 311-3 a été remplacé par l'article 317 du Code civil (N° Lexbase : L8818G9H) à la suite de l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005.
(24) V. P. Murat, note sous Cass. civ. 1, 4 juillet 2007, précitée.
(25) Ibidem.
(26) V. C. civ., art. 72 (N° Lexbase : L3233ABD).
(27) V. Cass. civ. 1, 14 novembre 1984, n° 83-13.320, M. X c/ Mme C. (N° Lexbase : A2469AAP), Bull. civ. I, n° 306.
(28) V. Cass. civ. 1, 5 janvier 1999, Bull. civ. I, n° 8, Gaz. Pal., 25-26 août 1999, p. 16, obs. J. Massip.
(29) V. Cass. civ. 1, 15 mai 2008, précité. En ce sens, v. aussi Cass. civ. 1, 13 juin 1997, précité.
(30) V. E. Vergès, Chronique de procédure civile, Lexbase Hebdo n° 309 - édition privée générale (N° Lexbase : N3595BGA).
(31) V. notamment P. Cagnoli, Ministère public, Rép. pr. civ. Dalloz, septembre 2004, n° 44, p. 7.
(32) V. Cass. civ. 1, 14 décembre 1983, n° 82-15383, Consorts R. c/ Dame B., Dame G., publié (N° Lexbase : A4955CHY), Bull. civ. I, n° 297, D., 1984, IR, p. 315, obs. D. Huet-Weiller.
(33) V. Cass. civ. 2, 8 octobre 1986, n° 85-10.225, M. Ladet c/ M. André (N° Lexbase : A5679AAL), Bull. civ. II, n° 149, Gaz. Pal., 1987, som., p. 281, obs. S. Guinchard et T. Moussa.
(34) V. C. proc. civ., art. 428 (N° Lexbase : L2666AD7).
(35) Pour une communication dès l'enrôlement de l'affaire, v. G. Sutton, La communication des affaires au ministère public, Gaz. Pal., 1973, 1, doctr. 342 ; T. Le Bars, Droit judiciaire privé, Paris, Montchrestien, coll. Domat droit privé, 3ème éd., 2006, n° 450, p. 359.
(36) V. C. proc. civ., art. 429 (N° Lexbase : L2668AD8).
(37) V. A. Perdriau, La communication au ministère public des affaires de faillite, JCP éd. G, 1986, I, 3228, n° 63.
(38) V. A. Perdriau, op. cit., n° 43.
(39) V. Cass. mixte, 21 juillet 1978, 2 arrêts, n° 75-14.731, Société d'Exploitation de la Patinoire de Compiègne SARL, Dole, Dehay c/ Les Loisirs SA, Couespel (N° Lexbase : A4393CIK) et n° 75-14.832, Lambert de Guise c/ Berthemy (N° Lexbase : A4394CIL), Bull. civ. n° 4 et 5, RTDCiv., 1979, 192, obs. R. Perrot ; Cass. civ. 1, 21 mai 1997, n° 95-13.883, Mme X c/ M. Y et autre (N° Lexbase : A0434AC3), Bull. civ. I, n° 166 ; Cass. civ. 1, 12 février 2002, n° 98-22.606, Caisse de Crédit mutuel Marseille Gambetta c/ M. Philippe Turk, FS-P (N° Lexbase : A9935AXA), Bull. civ. I, n° 58.
(40) V. Cass. civ. 1, 21 mai 1997, n° 95-13.883, Mme X c/ M. Y et autre (N° Lexbase : A0434AC3), Bull. civ. I, n° 166, D., 1998, som., p. 25, obs. F. Granet.
(41) V. T. Le Bars, op. cit., n° 492, p. 387.
(42) V. Cass. civ. 1, 3 juin 1975, n° 73-10.877, C. c/ Dame B., publié (N° Lexbase : A8796CEI), Bull. civ. I, n° 190. contra, Cass. civ. 2, 11 juin 1975, n° 74-10.385, G. c/ B., publié (N° Lexbase : A0506CH9), Bull. civ. II, n° 169.
(43) V. Cass. mixte, 21 juillet 1978, précités.
(44) V. Cass. civ. 2, 12 février 2004, n° 02-11.913, M. Denis Elhaik c/ M. Jean Bunel, F-P+B 1er et 4ème moyens (N° Lexbase : A2715DB8), Bull. civ. II, n° 64, Procédures, mai 2004, n° 98, note R. Perrot : la mention dans le jugement de la communication du dossier au ministère public suffit aux exigences des textes imposant la communication ; Cass. com., 10 octobre 1978, n° 76-13.464, Voland c/ Ardant, publié (N° Lexbase : A9511CGD), Bull. civ. IV, n° 221 : la mention dans la décision de l'accomplissement de cette formalité n'est prévue par aucun texte.
(45) V. Cass. com., 16 février 1993, n° 91-10.179, Société Sofirem c/ Mme Gadeyne, ès qualités de syndic de la liquidation des biens de la société ITM et autre (N° Lexbase : A5498ABA), Bull. civ. IV, n° 59.
(46) V. Cass. civ. 1, 14 novembre 1984, n° 83-13.320, M. X c/ Mme C. (N° Lexbase : A2469AAP), Bull. civ. I, n° 306.
(47) V. Cass. civ. 2, 13 mai 1987, n° 84-17.129, Epoux Kitoskis de Boutselis c/ M. Mathieu (N° Lexbase : A7373AAC), Bull. civ. II, n° 111.
(48) V. Cass. com., 1er décembre 1987, n° 86-14.992, M. Pirault et autres c/ M. Laureau et autre, publié (N° Lexbase : A6985CEG), Bull. civ. IV, n° 257.
(49) V. Cass. civ. 1, 10 février 1993, n° 91-14.248, Consorts X c/ M. Y et autres (N° Lexbase : A3645ACY), Bull. civ. I, n° 68.
(50) V. Cass. civ. 1, 14 novembre 1984, précité.
(51) V. Cass. civ. 2, 17 mai 1993, n° 90-17.906, Mme de Comeiras c/ M. de Comeiras (N° Lexbase : A3194ACB), Bull. civ. II, n° 174 : conclusions écrites du ministère public dans le dossier de la procédure.
(52) V. Cass. civ. 1, 12 juillet 1994, n° 92-15.735, Mme X c/ Association tutélaire des Alpes-de-Haute-Provence et autres (N° Lexbase : A7035AB8), Bull. civ. I, n° 251 : visa du procureur de la République en marge de l'avis de la date d'audience.
(53) V. Cass. mixte, 21 juillet 1978, préc., Bull. civ. n°4 : visa "pour le procureur général" en marge des conclusions d'une partie déposées au greffe.
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Réf. : Cass. soc., 24 juin 2008, n° 07-11.411, Fédération nationale des mines et de l'énergie CGT, FS-P+B+R (N° Lexbase : A4114D9A)
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par Sébastien Tournaux, Ater à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV
Le 07 Octobre 2010
Résumé
Le défaut de réunion, d'information et de consultation des institutions représentatives du personnel, lorsqu'elles sont légalement obligatoires, porte atteinte à l'intérêt collectif de la profession et ouvre, aux syndicats, le droit d'exercer une action judiciaire en application de l'article L. 2132-3 du Code du travail . La nouvelle organisation des relations contractuelles entre l'entreprise et ses sous-traitants, ayant vocation à s'étendre sur tout le territoire national et à emporter des conséquences sur les emplois et les conditions de travail, implique la consultation du comité central d'entreprise, en application de l'article L. 2323-6 du Code du travail . La loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, faisant obligation aux employeurs d'engager, tous les trois ans, une négociation sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, il en résulte que ces derniers disposent, en toute hypothèse, d'un délai expirant le 19 janvier 2008 pour y procéder. |
Commentaire
I - Précisions quant au domaine des obligations de consultation du comité d'entreprise en matière d'organisation de l'entreprise
L'article L. 2323-6 du Code du travail dispose que "le comité d'entreprise est informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise et, notamment, sur les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, la durée du travail, les conditions d'emploi, de travail et de formation professionnelle". Ces dispositions imposent à l'employeur de consulter le comité d'entreprise dans de nombreuses situations.
Ainsi, par exemple, est-il tenu de recueillir son avis dans la quasi-totalité des hypothèses de restructuration de l'entreprise (1), qu'il s'agisse d'une cession de parts de l'entreprise (2), d'une prise de participation (3) ou, bien sûr, de l'intervention d'une fusion-acquisition (4). Le texte trouve, également, à s'appliquer en cas de réorganisation interne à l'entreprise, telle que la réorganisation d'un service (5) ou la réorganisation juridique de l'entreprise (6). Ces dispositions ont, souvent, été interprétées de manière extensive par la jurisprudence. Ainsi, on se souviendra que la Cour de cassation impose, sur le fondement de cette règle, la consultation du comité d'entreprise préalablement à la conclusion d'un accord collectif intéressant l'organisation, la gestion ou la marche générale de l'entreprise (7).
Pour autant, l'hypothèse d'un regroupement de marchés distincts, conclus avec différents sous-traitants, sous la supervision d'un sous-traitant unique n'avait jamais été soumise à la Cour de cassation. Ce cas de figure impliquait-il la consultation du comité d'entreprise ?
En l'espèce, la société EDF décidait de regrouper, sous la supervision d'un sous-traitant unique, l'ensemble des marchés jusqu'alors confiés à divers sous-traitants en matière de maintenance de ses centres nucléaires de production d'électricité. En prévision de l'extension du système à l'ensemble de ces centres, la société avait préalablement expérimenté le mécanisme pour ses "plaques" Nord-Ouest et Atlantique. Il convient de rappeler que la société EDF ne comporte pas de véritable comité central d'entreprise, ni de comités d'établissements, mais d'un conseil supérieur consultatif et de comités mixtes paritaires, lesquels disposent, par application des statuts de l'entreprise publique, peu ou prou, des mêmes attributions que le comité d'entreprise et les comités d'établissement.
Faisant application de l'obligation à laquelle elle se savait tenue de consulter les institutions représentatives du personnel, la société s'était contentée de consulter les comités mixtes paritaires des "plaques" Nord-Ouest et Atlantique, sans pour autant recueillir l'avis du conseil supérieur consultatif. Un recours avait alors été introduit, en référé, par diverses organisations syndicales estimant que les dispositions de l'ancien article L. 432-1, alinéa premier, du Code du travail (N° Lexbase : L3116HIA) n'avaient pas été respectées.
Deux questions s'élevaient donc devant la Cour de cassation. Il lui fallait, en effet, tout d'abord, se pencher sur l'intérêt à agir d'un syndicat s'agissant de règles spécifiquement relatives à la consultation du comité d'entreprise. Une fois cette question traitée, il lui fallait, encore, déterminer si la simple consultation des comités mixtes paritaires était suffisante ou si, au contraire, la consultation de l'organe central devait être imposée.
L'article L. 2132-3 du Code du travail permet aux syndicats d'introduire des actions en justice afin d'"exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession" (8). Alors qu'un arrêt récent de la Chambre sociale nous laissait penser que la Cour de cassation semblait restreindre cette faculté d'agir des syndicats, en adoptant une conception restrictive des "intérêts collectifs", l'arrêt commenté paraît, au contraire, revenir à une conception plus large (9). En effet, les juges retiennent que "le défaut de réunion, d'information et de consultation des institutions représentatives du personnel lorsqu'elles sont légalement obligatoires port[e] atteinte à l'intérêt collectif de la profession".
Accueillir l'action syndicale dans ce cas de figure paraît amplement logique. Il semble, en effet, aller de soi que les règles relatives à la consultation du comité d'entreprise concernent effectivement les intérêts collectifs des salariés. C'est, pourtant, à notre connaissance, la première fois que la Cour de cassation se prononce en ce sens.
Il faut, en outre, relever la formulation particulièrement générale adoptée par la Chambre sociale. En effet, celle-ci ne limite pas son argumentation au seul cas de consultation du comité d'entreprise prévu par l'article L. 2323-6 du Code du travail. En estimant que c'est "le défaut de réunion, d'information et de consultation des institutions représentatives du personnel lorsqu'elles sont légalement obligatoires" qui justifie l'intérêt à agir du syndicat, elle étend manifestement celui-ci bien au-delà de la consultation du comité d'entreprise en matière d'organisation et de gestion de l'entreprise.
Il convient, enfin, de remarquer que cette solution renforce encore un peu plus le sentiment d'entremêlement des compétences des différents représentants des salariés dans l'entreprise. Alors que, d'un côté, le comité d'entreprise doit être consulté dans le cadre de la négociation collective, empiétant ainsi sur le champ de compétence "naturel" (10) des syndicats (11), à l'inverse, les syndicats sont, ici, rendus compétents pour interférer dans les affaires du comité d'entreprise qui aurait légitimement pu seul introduire une telle instance. Ce sentiment est, encore, accentué par la formulation large précédemment décrite. La rationalisation des compétences devient une véritable urgence...
Deuxième apport de la solution, la Cour de cassation étend donc aux hypothèses de modification des relations avec les sous-traitants de l'entreprise l'obligation de recueillir l'avis du comité d'entreprise, en application de l'article L. 2323-6 du Code du travail. Néanmoins, ces modifications dans les relations contractuelles externes de la société ne paraissent pas se suffire à elles-mêmes pour imposer une telle consultation, puisque la Chambre sociale relève qu'EDF avait mis en place une "cellule de gestion des emplois avec pour objectif, notamment, de minimiser au mieux de l'intérêt des parties prenantes, y compris d'EDF, l'impact qu'il pouvait avoir en termes d'emplois". En outre, le projet "avait justifié la création d'un comité professionnel des prestataires de services en matière d'assainissement radioactif".
Autrement dit, à partir du moment où l'évolution des relations de la société avec ses sous-traitants peut avoir des conséquences sur l'emploi et sur les conditions de travail des salariés, la consultation devient obligatoire. A contrario, il paraît donc raisonnable d'estimer que les modifications des relations contractuelles de la société avec ses sous-traitants devront revêtir une importance et des conséquences suffisantes pour que les institutions représentatives du personnel soient mobilisées.
Enfin, dernier apport de la solution, la Cour de cassation tranche, en partie, la question de savoir si seuls les comités d'établissement (ici les comités mixtes paritaires) doivent être consultés, s'agissant de modification des relations contractuelles avec les sous-traitants limitées à ces établissement, ou si, au contraire, le comité central d'entreprise (ici, le conseil supérieur consultatif) doit être réuni. La Chambre sociale penche, en effet, pour la deuxième solution, estimant, ainsi, que le comité central d'entreprise devait être consulté, au même titre, d'ailleurs, que l'ensemble des comités d'établissements concernés.
Cependant, là encore, l'argumentation développée ne permet pas de faire de cette affirmation une règle générale. En effet, la Haute juridiction rend cette décision en analysant que, si les modifications contractuelles avec les sous-traitants n'avaient été expérimentées que dans certains établissements de l'entreprise, elles avaient "vocation à s'étendre sur tout le territoire national". Il est probable que cet élément ait pesé de manière essentielle dans la décision et que, par conséquent, des modifications, n'ayant, en définitive, d'effets que dans certains établissements de l'entreprise, ne nécessiteraient que la consultation des comités d'établissement.
Si l'arrêt présenté apporte donc un certain nombre de précisions aux règles de consultation du comité d'entreprise, il comporte, également, des éléments fondamentaux en matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.
II - Précisions quant à l'obligation de négociation d'un accord de GPEC
Le moins que l'on puisse dire, c'est que le mécanisme de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, mis sur pied par la loi du 18 janvier 2005, a déjà fait couler beaucoup d'encre (12).
Introduisant un article L. 320-2 à l'ancien Code du travail (N° Lexbase : L4207HWQ), la loi prévoit que, dans les entreprises de plus de 300 salariés, l'employeur est tenu d'engager tous les trois ans une négociation portant sur la mise en place d'un dispositif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Les juridictions du fond et la doctrine s'étaient surtout intéressées aux interactions entre cette obligation et l'engagement d'une procédure de licenciement pour motif économique (13). Ce n'est, pourtant, pas sur ce thème que fut, pour la première fois, saisie la Cour de cassation, s'agissant de l'application des nouveaux articles L. 2242-15 et suivants du Code du travail .
Dans notre affaire, les syndicats, auteurs de l'action, avaient réclamé, toujours en référé, la suspension de la mise en oeuvre de l'opération de regroupement des différents sous-traitants sous la supervision d'un sous-traitant unique tant que la négociation sur la GPEC, prévue par l'ancien article L. 320-2, n'avait pas été engagée. Contrairement à ce qu'un raisonnement par analogie avec la décision rendue par la cour d'appel de Paris le 7 mars 2007 (CA Paris, 14ème ch., sect. A, 7 mars 2007, n° 06/17500, Société Nextiraone France c/ Syndicat CGT UFICT du personnel de Nextiraone France N° Lexbase : A7707DUY) aurait pu laisser penser, la cour d'appel de Versailles refuse de suspendre les opérations de réorganisation des relations contractuelles avec les sous-traitants. Elle estime que le texte du Code du travail ne faisait obligation à l'employeur d'engager des négociations relatives à la GPEC qu'au plus tard au 19 janvier 2008, soit très exactement trois ans après l'édiction de la loi du 18 janvier 2005.
La Cour de cassation confirme nettement cette interprétation et estime que la cour d'appel a fait une juste application de l'article L. 320-2 du Code du travail. En soi, la solution n'est guère étonnante, puisqu'il n'était aucunement question, dans cette affaire, de licenciements collectifs pour motif économique. Dès lors, les questions relatives au supposé conflit entre les dispositions relatives à la GPEC et celle spécifique à la consultation des IRP en cas de licenciement collectif, noeud de discorde entre la cour d'appel de Paris et la doctrine, n'étaient pas en cause. Aucune obligation d'anticiper la négociation ne pouvait efficacement être avancée.
Pour autant, une incidente de l'argumentation, aux allures d'obiter dictum, permet de penser que la Chambre sociale de la Cour de cassation utilise l'occasion présentée pour annoncer la solution qui devrait être la sienne s'agissant de l'articulation de la GPEC et d'un projet de licenciement économique.
En effet, les juges décident qu'il résultait de l'article L. 320-2 du Code du travail, pour les employeurs, "que ces derniers disposaient en toute hypothèse d'un délai expirant le 19 janvier 2008 pour engager cette négociation" (14). A quelle autre "hypothèse" que celle d'un concours entre obligation de négocier une gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences et respect de la procédure de licenciement économique la Cour de cassation pourrait-elle bien faire référence ? A n'en pas douter, la Chambre sociale devrait, dans un avenir proche, donner raison aux Professeurs Auzero et Antonmattéi, d'après lesquels, la suspension de la procédure de consultation des IRP dans le cadre d'un licenciement économique, dans l'attente d'une négociation d'un accord de GPEC, n'a ni cohérence, ni véritable utilité.
(1) V. A. Lyon-Caen, Le comité d'entreprise et les restructurations, Dr. soc., 2004, p. 285.
(2) Cass. crim., 2 mars 1978, n° 76-92.008, Comité d'entreprise des entreprises Haulotte, Syndicat départemental c/ Haulotte (N° Lexbase : A3394AGS), JCP éd. G, 1979, II, 19052, note Ph. Salvage ; Dr. soc., 1978, p. 369, note J. Savatier.
(3) Cass. crim., 3 février 2004, n° 03-80.784, Modolo Gérard, F-P+F (N° Lexbase : A3336DB8), RJS, 2004, n° 561, p. 381.
(4) Par application de l'article L. 2323-19 du Code du travail .
(5) Cass. crim., 6 novembre 1975, n° 74-92.833, Syndicat National du Personnel Hachette CFDT c/ De Roquemaurel, Azuelos, Société Librairie Hachette, publié (N° Lexbase : A3796CGP), Dr. soc., 1976, p. 394, obs. J. Savatier.
(6) A condition, toutefois, que celle-ci emporte des effets sur l'emploi, v. Cass. soc., 9 juillet 1996, n° 94-19.722, Société Française de Production, (SFP) et autres c/ M. Antonio Gomez et autres, inédit (N° Lexbase : A3731CQA), RJS, 1996, n° 940, p. 602.
(7) Cass. soc., 5 mai 1998, n° 96-13.498, Conseil supérieur consultatif des comités mixtes à la production et c/ Electricité de France (EDF) et autres (N° Lexbase : A2677AC7), JCP éd. E, p. 1407, note Th. Aubert-Monpeyssen ; Dr. soc., 1998, p. 585, rapp. J.Y. Frouin ; RJS, 6/1998, n° 750. Dans cette affaire, comme dans l'espèce commentée, l'entreprise concernée était, déjà, Electricité de France... Sur la consultation préalable à la dénonciation d'un accord, v. Cass. soc., 5 mars 2008, n° 07-40.273, Société Oce Business services et a. c/ Syndicat CGT Oce France, FS-P+B+R (N° Lexbase : A3373D73) et les obs. de G. Auzero, Le comité d'entreprise doit être consulté sur la dénonciation d'un accord d'entreprise, Lexbase Hebdo n° 297 du 20 mars 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N4357BE4).
(8) Sur cette question, v. J.- M. Verdier, Accords collectifs et action syndicale' en justice : le rôle fondateur de l'article L. 411-11 du Code du travail, réflexions à partir de l'arrêt Euro Disney du 12 juin 2001, D., 2002, chron. 503 ; E. Wagner, Le rôle des syndicats et des associations dans la défense des droits et l'accès à la justice des salariés, Dr. ouvrier, 1990, 291.
(9) V. Cass. soc., 23 janvier 2008, n° 05-16.492, Société Amadeus France service, FP-P+B (N° Lexbase : A0883D4H) et nos obs., La limitation du droit d'ester en justice des syndicats pour la défense des intérêts collectifs de la profession, Lexbase Hebdo n° 291 du 7 février 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N0432BEQ).
(10) Rappelons que le Conseil constitutionnel, sans dénier la faculté aux autres institutions représentatives du personnel de négocier des accords collectifs estime, néanmoins, que les syndicats conservent une "vocation naturelle" à mener ces négociations (décision n° 96-383 DC du 6 novembre 1996 N° Lexbase : A8346AC4), Dr. soc., 1997, 25, note M.- L. Morin ; RJS, 1996. 833, n° 1296.
(11) V. Cass. soc., 5 mai 1998, n° 96-13.498, préc..
(12) Loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, de programmation pour la cohésion sociale (N° Lexbase : L6384G49). Parmi une bibliographie déjà conséquente, v. H.- J. Legrand, Sur un nouvel objet juridique non identifié : la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, Dr. soc., 2006, p. 330 ; Ph. Rozec, Négociation sur la gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences, JCP éd. S, 2005, 2011 ; B. Teyssié, A propos d'une négociation triennale : commentaire de l'article L. 320-2 du Code du travail, Dr. soc., 2005, p. 377 ; les obs. de G. Auzero, GPEC et licenciement pour motif économique : la position de la cour d'appel de Paris, Lexbase Hebdo n° 255 du 5 avril 2007 - édition (N° Lexbase : N6192BAL).
(13) V. P.-H. Antonmattéi, GPEC et licenciement pour motif économique : le temps des confusions judiciaires, Dr. soc., 2007, p. 289 ; et les obs. de G. Auzero, GPEC et licenciement pour motif économique : la position de la cour d'appel de Paris, préc.. La question n'est, toujours, pas tranchée par la Cour de cassation...
(14) Nous soulignons.
Décision
Cass. soc., 24 juin 2008, n° 07-11.411, Fédération nationale des mines et de l'énergie CGT, FS-P+B+R (N° Lexbase : A4114D9A) Cassation partielle, CA Versailles, 14ème ch., 29 novembre 2006, n° 06/00807, SA EDF e.a. c/ Fédération des travailleurs de la métallurigie CGT e.a (N° Lexbase : A9970DTG) Textes visés ou concernés : C. trav., art. L. 2132-3 , art. L. 2323-6 ; circulaire PERS n° 873 du 23 mars 1987 relative au conseil supérieur consultatif des comités mixtes à la production d'EDF Mots-clés : syndicats ; droit d'action en justice ; intérêt collectif de la profession ; défaut de consultation des institutions représentatives du personnel ; GPEC ; obligation de négociation. Liens base : et |
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Réf. : Cass. civ. 1, 25 juin 2008, n° 06-19.556, M. Devis Mascia, FS-P+B (N° Lexbase : A3605D9E)
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par David Bakouche, Professeur agrégé des Facultés de droit
Le 07 Octobre 2010
La jurisprudence et la doctrine affirment, classiquement, que l'action de in rem verso a un caractère subsidiaire (6). Il en résulte, d'abord, que l'action doit être écartée lorsque l'appauvri dispose à l'égard de l'enrichi d'un autre moyen d'obtenir satisfaction (7), ou bien lorsqu'il a la possibilité, à cette fin, d'agir contre un tiers, une caution par exemple (8). On déduit, ensuite, de l'exigence de subsidiarité que l'action de in rem verso est exclue lorsque l'action normale dont disposait l'appauvri lui est fermée par l'effet d'une règle de droit. Ainsi a-t-il été jugé que l'action fondée sur l'enrichissement sans cause ne peut-être admise qu'à défaut de toute autre action ouverte au demandeur ; qu'elle ne peut l'être, notamment, pour suppléer à une autre action que le demandeur ne peut intenter par suite d'une prescription, d'une déchéance ou forclusion ou par l'effet de l'autorité de la chose jugée ou parce qu'il ne peut apporter les preuves qu'elle exige ou par suite de tout autre obstacle de droit (9).
On remarquera que, en l'espèce, si la Cour qualifie l'action de in rem verso de "subsidiaire", elle censure tout de même les juges du fond qui, pour rejeter la demande, avaient relevé "qu'une telle action n'est pas ouverte pour suppléer une absence de preuves de l'existence du contrat de mandat de gestion allégué" par le demandeur. On pourrait ainsi s'interroger, à la suite de ce qui a été rappelé précédemment, sur le point de savoir si la Cour n'est pas de fait prête à admettre l'action de in rem verso malgré l'existence d'un obstacle de droit au jeu de l'action ordinaire. Certaines décisions avaient, au reste, déjà permis de se poser la question (10). A suivre donc...
(1) Cass. req., 15 juin 1892, Grands arrêts de la jurisprudence civile, 11ème éd., n° 227.
(2) En ce sens, J. Carbonnier, Droit civil, T. 4, Thémis, n° 307.
(3) Voir J. Djoudi, La faute de l'appauvri : un pas de plus vers une subjectivisation de l'enrichissement sans cause, D., 2000, chron., p. 609.
(4) Cass. civ. 1, 15 décembre 1998, n° 96-20625, M. de Bartillat c/ Société RMV GITEM, publié (N° Lexbase : A6428CHK), RTDCiv., 1999, p. 400, obs. Mestre ; Cass. com., 19 mai 1998, n° 96-16.393, Société UGC ciné cité Ile-de-France c/ Société Agora cinémas et autres (N° Lexbase : A2752ACW), RTDCiv., 1999, p. 106, obs. Mestre.
(5) Cass. civ. 1, 11 mars 1997, n° 94-17.621, Société Flandrin Capucines et autre c/ Société financière de banque et autre (N° Lexbase : A9966ABQ), D., 1997, p. 407, note Billiau ; Cass. civ. 1, 3 juin 1997, n° 95-13.568, M. Vallet c/ Compagnie La Préservatrice foncière et autres (N° Lexbase : A0425ACQ), JCP éd. G, 1998, II, 10102, note Viney.
(6) Cass. civ., 2 mars 1915, DP, 1920, 1, 102 ; Grands arrêts de la jurisprudence civile n° 228 ; Cass. civ. 3, 4 décembre 2002, n° 01-03.907, FS-P+B (N° Lexbase : A1891A4S) ; Cass. civ. 1, 14 janvier 2003, n° 01-01.304, F-P (N° Lexbase : A6835A4W) ; Cass. civ. 1, 26 septembre 2007, n° 06-14.422, Mme Odyle Tapie-Debat, épouse Castetbieilh, F-P+B (N° Lexbase : A5818DY7) ; P. Drakidis, La "subsidiarité", caractère spécifique et international de l'action d'enrichissement sans cause, RTDCiv., 1961, p. 577 et s..
(7) Cass. civ. 1, 24 octobre 1973, n° 71-14.159, Sakamoto c/ Doale (N° Lexbase : A4591AYP), Bull. civ. I, n° 280 ; Cass. com., 15 mars 1988, n° 86-16.691, Société anonyme générale française d'emballage (GEFREM) c/ Société de droit allemand Deutsche Apparate Vertriebs Organisation GMBH et COHG dite DAVO et autre (N° Lexbase : A7752AAD), JCP éd. G, 1988, IV,192.
(8) Cass. com., 10 octobre 2000, n° 98-21.814, Société Pleine Forme c/ Banque populaire de la région économique de Strasbourg (N° Lexbase : A7786AHT), Bull. civ. IV, n° 150.
(9) Cass. civ. 3, 29 avril 1971, n° 70-10.415, Dame Masselin c/ Decans, publié (N° Lexbase : A4284CKU), Bull. civ. III, n° 277 ; Cass. com., 10 octobre 2000, préc., Bull. civ. IV, n°150.
(10) Cass. civ. 1, 14 mars 1995, n° 92-21.919, M. Claude Massa c/ M. Roland Henry et autres (N° Lexbase : A0200CTL), JCP éd. G, 1995, II, 22516, note Roussel ; Cass. civ. 1, 3 juin 1997, n° 95-13.568, préc..
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Le 07 Octobre 2010
L'un des contentieux importants de l'application de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005, de sauvegarde des entreprises (N° Lexbase : L5150HGT), tient aux conditions et aux effets de la résolution du plan de continuation. Nous avons, déjà, dans ces colonnes, apporté un certain nombre de précisions sur cette problématique (1). L'occasion nous est, à nouveau, donnée de revenir sur cette question.
En l'espèce, deux époux placés en redressement judiciaire obtiennent, en 1996, un plan de continuation. Près de dix ans plus tard, ce plan est résolu par le tribunal, qui prononce, également, la liquidation judiciaire des deux époux, en se fondant sur l'âge des exploitants et le fait qu'ils sont déjà en retraite, que diverses parties de l'exploitation ont été vendues, que le chiffre d'affaires est en nette régression et que les exploitants ont subi une perte d'exploitation, tous ces éléments permettant d'accréditer l'idée que l'entreprise est moribonde et que le maintien d'un plan de redressement est sans intérêt et même nuisible. La cour d'appel va confirmer, par motifs propres et adoptés, le jugement entrepris.
La question qui se posait à la Cour de cassation était de savoir si de tels éléments pouvaient, après le 1er janvier 2006, justifier la résolution du plan et le prononcé de la liquidation judiciaire. Sans surprise, la Cour de cassation va répondre négativement à la question posée et censurer doublement l'arrêt de la cour d'appel, en faisant droit à deux des moyens soulevés par le pourvoi.
Elle va, d'abord, pour rejeter la possibilité de résolution du plan de continuation, reprocher à la cour d'appel de ne pas avoir constaté que "les débiteurs n'avaient pas exécuté leurs engagements dans les délais fixés par le plan".
Elle va, ensuite, reprocher à la cour d'appel d'avoir prononcé la résolution du plan de continuation, sans avoir constaté la cessation des paiements des débiteurs.
A cet égard, il faut soigneusement distinguer, comme le fait la Cour de cassation, entre deux situations.
La première situation concerne l'hypothèse dans laquelle le plan de continuation est résolu avant le 1er janvier 2006. En ce cas, il faut appliquer exclusivement la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises (N° Lexbase : L7852AGW), non seulement pour apprécier les conditions de la résolution du plan de continuation, mais encore pour déterminer les effets de cette dernière (2). La deuxième situation concerne l'hypothèse dans laquelle la résolution du plan de continuation n'est pas intervenue au 1er janvier 2006. Il y a, alors, lieu d'appliquer exclusivement l'article L. 626-27 du Code de commerce (N° Lexbase : L4076HBL), qui, en vertu de l'article 191-2° de la loi du 26 juillet 2005, de sauvegarde des entreprises, est, par exception, applicable aux procédures de redressement judiciaire en cours. Précisons, à cet égard, que la procédure de redressement judiciaire est en cours au 1er janvier 2006, même si un plan de continuation a été arrêté préalablement, dès lors qu'à la date du 1er janvier 2006 ce plan n'a pas été résolu (3).
S'agissant des conditions de la résolution du plan de continuation avant le 1er janvier 2006, il y a lieu d'appliquer l'article L. 621-82 du Code de commerce (N° Lexbase : L6934AIN), selon lequel "si le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan, le tribunal peut, d'office ou à la demande d'un créancier, le commissaire à l'exécution du plan entendu, prononcer la résolution du plan et l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire". La résolution du plan suppose une inexécution des engagements inscrits dans le plan. A cet égard, même si, en l'espèce, la question de la résolution du plan de continuation s'était posée avant le 1er janvier 2006, les arguments retenus par la juridiction pour prononcer la résolution du plan de continuation étaient absolument inadaptés. Il ne faut pas confondre les conditions de l'adoption du plan avec celles de sa résolution. Si le plan de continuation, sous l'empire de la loi du 25 janvier 1985, ne peut être arrêté que s'il existe des chances sérieuses de redressement et d'apurement du passif, la disparition, en cours d'exécution du plan, des chances de redressement n'est pas de nature à justifier la résolution du plan. Seule compte, donc, au stade de la résolution, l'inexécution par le débiteur des engagements contenus dans le plan.
Les conditions de la résolution d'un plan de continuation après le 1er janvier 2006, qui sont aussi celles de la résolution d'un plan de sauvegarde ou de redressement, ont été partiellement modifiées. L'article L. 626-27 du Code de commerce envisage deux hypothèses distinctes.
En son I, cet article reprend la solution du droit antérieur, en disposant que "le tribunal qui a arrêté le plan peut, après avis du ministère public, en décider la résolution si le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan". La résolution du plan peut, donc, avant comme après le 1er janvier 2006, être fondée sur l'inexécution par le débiteur des engagements contenus au plan. Il n'y a pas, faute de distinction des textes, à opérer un distinguo en fonction du type d'engagements inexécutés. Il pourra, par conséquent, s'agir d'une inexécution financière, tout autant que du non-respect des engagements sociaux. Cette résolution, fondée sur l'inexécution des engagements du plan, est, avant comme depuis le 1er janvier 2006, toujours facultative. Le tribunal, comme lorsqu'il statue sur la demande de prononcé de la résolution d'un contrat, doit apprécier la gravité du manquement constaté, pour laisser, a priori, sans sanction l'inexécution de moindre portée. En l'espèce, les arguments retenus par le tribunal pour prononcer la résolution du plan après le 1er janvier 2006 étaient, manifestement, inadaptés, puisque celui-ci n'avait pas relevé la moindre inexécution du plan, mais s'était contenté de fonder sa solution sur l'absence de pérennité de l'entreprise débitrice. La cassation de l'arrêt d'appel, qui avait confirmé la décision des premiers juges, était inévitable.
En son II, l'article L. 626-27 innove, en faisant de l'apparition de la cessation des paiements en cours d'exécution du plan, une cause autonome de résolution du plan. Il dispose, en ce sens, que "lorsque la cessation des paiements du débiteur est constatée au cours de l'exécution du plan, le tribunal qui a arrêté ce dernier décide, après avis du ministère public, sa résolution et prononce la liquidation judiciaire". Cette nouveauté législative n'est, en réalité, que la consécration d'une solution jurisprudentielle. En effet, il avait été jugé, dès avant la loi de sauvegarde des entreprises, que, si le débiteur avait laissé impayées des dettes nées après le plan de continuation, celles-ci pouvaient justifier un état de cessation des paiements qui conduisait à l'ouverture d'une nouvelle procédure (4).
En l'espèce, les premiers juges n'avaient pas constaté la cessation des paiements des débiteurs. Ils ne pouvaient, donc, pas prononcer la résolution du plan de continuation, faute de pouvoir la fonder sur le I ou sur le II de l'article L. 626-27 du Code de commerce, applicables aux faits de l'espèce.
L'absence de caractérisation de la cessation des paiements a, également, conduit la Cour de cassation à censurer la cour d'appel, au stade des effets de la résolution du plan de continuation.
Prolongeant la distinction opérée entre les deux causes de prononcé de la résolution du plan de continuation, mais aussi du plan de sauvegarde et de redressement, l'article L. 626-27 du Code de commerce entend distinguer, au stade des effets de la résolution du plan, selon que celle-ci s'accompagne ou non de la cessation des paiements du débiteur.
L'article L. 626-27, II, du Code de commerce envisage l'hypothèse d'une résolution du plan lorsqu'il y a cessation des paiements. En ce sens, il dispose que "lorsque la cessation des paiements du débiteur est constatée au cours de l'exécution du plan, le tribunal qui a arrêté ce dernier décide, après avis du ministère public, sa résolution et prononce la liquidation judiciaire". Ainsi, si la résolution du plan est prononcée au motif qu'il y a cessation des paiements, le prononcé de la liquidation judiciaire est, non seulement possible, mais il est, encore, obligatoire. Il se peut, aussi, que la résolution soit prononcée au motif de l'inexécution du plan. En ce cas, également, il y a place au prononcé obligatoire de la liquidation judiciaire. La lettre de l'article L. 626-27, II, du Code de commerce, par sa généralité, permet, donc, de s'émanciper de la cause de la résolution du plan pour le prononcé de celle-ci, seule important la caractérisation de la cessation des paiements. En l'espèce, le tribunal avait prononcé la résolution du plan et la liquidation judiciaire, sans constater que le débiteur était en état de cessation des paiements. La cassation de l'arrêt d'appel, qui avait confirmé le jugement de première instance, s'imposait.
Il faut remarquer que, malgré le silence du législateur de 1985 sur ce point, la Cour de cassation avait posé en règle que l'apparition, en cours d'exécution du plan de continuation, de la cessation des paiements justifiait la résolution du plan, mais encore, le prononcé de la liquidation judiciaire. La Cour de cassation, après l'entrée en vigueur de la loi n° 94-475 du 10 juin 1994, relative à la prévention et au traitement des difficultés des entreprises (N° Lexbase : L9127AG7), avait, en effet, refusé de distinguer entre résolution du plan pour inexécution et résolution du plan consécutive à la constatation d'un nouvel état de cessation des paiements (5).
Ainsi, en cas de cessation des paiements, la loi du 26 juillet 2005 pose-t-elle, clairement, en règle l'obligation de prononcer la résolution du plan et celle d'ouvrir une liquidation judiciaire. La solution contraste avec la demande en résolution du plan formée en l'absence de cessation des paiements. En ce cas, la résolution du plan est facultative et l'ouverture d'une nouvelle procédure collective n'est pas prévue. Est-elle pour autant interdite ? Les textes gouvernant la question de la résolution du plan restent muets. Faute de cessation des paiements, le redressement et la liquidation judiciaires sont, évidemment, inconcevables. Mais l'ouverture d'une procédure de sauvegarde serait-elle envisageable ? A cet égard, l'article L. 620-2, alinéa 2, du Code de commerce (N° Lexbase : L4126HBG), issu de la rédaction que lui a donnée la loi du 26 juillet 2005, dispose, en effet, qu'"il ne peut être ouvert de nouvelle procédure de sauvegarde à l'égard d'une personne déjà soumise à une telle procédure, à une procédure de redressement judiciaire (6) ou de liquidation judiciaire, tant qu'il n'a pas été mis fin aux opérations du plan qui en résulte ou que la procédure de liquidation n'a pas été clôturée". Ce texte n'est, cependant, ici, d'aucun secours, dans la mesure où la résolution du plan marque bien le terme de la procédure initialement ouverte. Rien ne semble, en conséquence, prohiber l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, alors surtout, que la résolution du plan a pour effet d'emporter la suppression des remises et délais accordés et que l'état de cessation des paiements n'est, sans doute, pas très loin. Le débiteur rencontre, donc, bien des difficultés de nature à conduire à la cessation des paiements, critère actuel d'ouverture de la sauvegarde. Indiquons, pour terminer, que le projet d'ordonnance modifiant la réforme de la loi de sauvegarde envisage d'assouplir encore, et peut-être, à l'excès, les critères d'ouverture de la sauvegarde, puisque les difficultés justifiant l'ouverture de cette procédure n'auront plus à être de nature à conduire à la cessation des paiements.
Pierre-Michel Le Corre, Professeur à l'Université de Nice Sophia Antipolis, Directeur du CERDP (ex Crajefe) et Directeur du Master 2 Droit des difficultés d'entreprises
Le débiteur faisant l'objet d'une procédure collective peut-il invoquer, en cause d'appel, un nouveau motif de contestation de créance ? C'est à cette question que répond un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 24 juin 2008.
En l'espèce, un banquier avait déclaré sa créance au passif d'une société faisant l'objet d'une procédure de redressement judiciaire.
Dans un premier temps, dans le cadre de la procédure de vérification des créances, le débiteur avait élevé une contestation de créance, au motif d'une prétendue irrégularité de la déclaration. Insensible à l'argumentation, le juge-commissaire avait admis la créance, par ordonnance ultérieurement frappée d'appel par le débiteur.
En cause d'appel, le débiteur soulevait une contestation tenant, cette fois, non plus à la régularité de la déclaration de la créance, mais au fond de la créance. En effet, il arguait du caractère prétendument non exigible et non certain de la créance litigieuse, argument qui n'avait pas été évoqué devant le premier juge. La cour d'appel (7) avait déclaré irrecevable la demande de la société débitrice, tendant au rejet de la créance, en retenant que "si le débiteur est recevable à interjeter appel des décisions du juge-commissaire statuant sur l'admission des créances, il est irrecevable à élever devant la cour d'appel une contestation qui n'a pas été émise par le représentant des créanciers dans les conditions de l'article L. 621-47 du Code de commerce (N° Lexbase : L6899AID) (8), dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, et qui, n'ayant pas été débattue devant le juge-commissaire, constitue une demande nouvelle en appel".
Sur pourvoi formé par le débiteur, la Chambre commerciale de la Cour de cassation casse l'arrêt d'appel, en considérant que, dès lors que "le débiteur avait contesté devant le juge-commissaire la régularité de la déclaration de créance [...] la contestation relative au fond de la créance, qui tendait aux mêmes fins n'était pas nouvelle". Ainsi, dès lors que le débiteur a contesté la créance devant le juge-commissaire, il peut, en appel, se prévaloir d'un autre motif de contestation.
Au regard des règles de procédure civile, l'arrêt est parfaitement fondé. Il résulte des dispositions de l'article 564 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2814ADL) que les parties ne peuvent pas soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions. C'est le principe de l'immutabilité du litige. Comme le souligne la doctrine la plus éminente en la matière (9), l'appel est destiné à vérifier que les premiers juges ont accompli leur mission. Le litige est, donc, transmis à la cour d'appel dans les conditions connues des premiers juges (10). En outre, l'exigence d'un double degré de juridiction interdit qu'une demande ne soit pas soumise à un examen du premier juge. Ainsi, une prétention nouvelle est irrecevable en cause d'appel. Cependant, le législateur n'apporte aucune définition de la prétention nouvelle. L'article 565 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2815ADM) se contente d'en définir les contours par un raisonnement a contrario : "les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent". Ainsi, il ne faut s'attacher qu'au but recherché et il importe, donc, peu, en cause d'appel, que le plaideur présente des moyens juridiques différents, dès lors que la fin est identique (11).
En l'espèce, le débiteur avait, en première instance, contesté devant le juge-commissaire la régularité de la déclaration de créance, puis, devant la cour d'appel, le caractère exigible et certain de la créance. Ainsi, si le moyen tenant au fond de la créance était, certes, différent, la prétention n'était, au regard de la législation applicable aux faits de l'espèce, pas nouvelle, dans la mesure où elle tendait aux mêmes fins que celle soumise au premier juge : entraîner l'absence d'admission de la créance et, partant, l'extinction de celle-ci. Les Hauts magistrats devaient, donc, naturellement, maintenir la position qu'ils avaient eu précédemment l'occasion d'adopter (12), en admettant, qu'en cause d'appel, le débiteur puisse soulever un nouveau motif de contestation, dès lors qu'il avait déjà contesté la créance devant le premier juge.
La solution serait-elle la même sous l'empire de la loi de sauvegarde des entreprises ? La réponse n'est pas certaine.
Sous l'empire de la loi du 25 janvier 1985, l'absence d'admission de la créance, pour quelque motif que ce soit, entraînait l'extinction de celle-ci. Sous l'empire de la loi nouvelle, il n'en est plus ainsi. En effet, l'irrecevabilité de la déclaration de créance fondée sur une irrégularité de cette déclaration est, désormais, sanctionnée, non par l'extinction de la créance, mais, de l'avis de la doctrine quasi-unanime sur la question, par une inopposabilité de la créance à la procédure collective (13) : la créance demeure, mais, dans le cadre de la procédure collective, le créancier ne peut plus se présenter comme créancier. En revanche, en dehors de la procédure collective, la créance reste parfaitement opposable, notamment, à l'égard des débiteurs accessoires (14). Lorsque, cette fois, le motif de contestation est un motif ayant trait au fond de la créance et, non plus simplement, un motif tenant à la régularité de la déclaration de créance, ce qui est discuté est, désormais, l'existence même de la créance, et non plus l'inopposabilité de celle-ci. Dès lors que les conséquences du succès des deux motifs de contestation sont différentes, il est permis de se poser la question de savoir si, sous l'empire de la législation actuelle, la contestation relative au fond de la créance tend aux mêmes fins que la contestation relative à la régularité de la déclaration de créance. Si la réponse est affirmative, la solution posée dans l'arrêt rapporté doit être reconduite. Dans la négative, dès lors que le débiteur a, dans un premier temps devant le juge-commissaire, seulement contesté la régularité de la déclaration de créance, il lui serait interdit, dans un deuxième temps devant la cour d'appel, de soulever une contestation relative au fond de la créance. Nous inclinons vers cette dernière solution, de sorte que la position adoptée sous l'empire de la législation ancienne par la Chambre commerciale de la Cour de cassation ne devrait plus être reconduite sous l'empire de la loi du 26 juillet 2005.
La prétention tenant à l'irrégularité de la déclaration de créance -susceptible d'entraîner l'irrecevabilité de cette déclaration et conduisant à l'inopposabilité de la créance- n'aspire pas aux mêmes fins que la prétention tenant à la contestation, au fond, de la créance -susceptible d'entraîner le rejet de la créance-.
Emmanuelle Le Corre-Broly, Maître de conférences des Universités, Directrice du Master 2 droit de la banque de la faculté de Toulon
(1) Cass. com., 18 mars 2008, n° 06-21.306, M. Gérard Boudin de l'Arche, FS-P+B+I+R (N° Lexbase : A4155D7Z) et lire nos obs., Chronique mensuelle de droit des entreprises en difficulté, Lexbase Hebdo - édition privée générale n° 302 du 24 avril 2008 (N° Lexbase : N7479BEQ).
(2) Cass. com., 18 mars 2008, n° 06-21.306, M. Gérard Boudin de l'Arche, FS-P+B+I+R, préc., D., 2008, AJ, p. 977, note A. Lienhard, D., 2008, chron. C. cass., p. 1233, n° 5, note I. Orsini, Act. proc. coll., 2008/7, n° 114, note J. Vallansan, Dr. Sociétés, 2008/5, p. 24, n° 100, note J.-P. Legros, lire nos obs., Chronique mensuelle de droit des entreprises en difficulté, Lexbase Hebdo - édition privée générale n° 302 du 24 avril 2008, préc., et Cass. com., 1er avril 2008, n° 06-21.075, Mme Jeannette Daumas, F-D (N° Lexbase : A7657D7Q).
(3) Cass. com., 18 mars 2008, n° 06-21.306, M. Gérard Boudin de l'Arche, FS-P+B+I+R, préc. et les réf. préc..
(4) Cass. Avis, 10 juillet 2000, n° 02-02.000, M. X. (N° Lexbase : A3902A7N), Bull. Avis, n° 4, Act. proc. coll., 2000/18, n° 225, note C. Régnaut-Moutier, D., 2000, jur., p. 404, obs. A. Lienhard, JCP éd. E, 2001, chron. 2-A-5, obs. M. Cabrillac et Ph. Pétel, RTD com., 2001, p. 219, obs. C. Saint-Alary-Houin ; Cass. com., 28 novembre 2000, n° 98-11.514, Société Decize céramiques industries, Société anonyme c/ M. Ouizille (N° Lexbase : A5428AWX), Act. proc. coll., 2001, n° 28, obs. C. Régnaut-Moutier.
(5) Cass. com., 2 juin 2004, n° 02-14.235, Mme Denise Houdeville, épouse Duval c/ M. Daniel Blery, F-D (N° Lexbase : A5108DC8) ; Cass. com., 10 mai 2005, n° 03-18.797, M. Jean-François Torelli, mandataire judiciaire, agissant en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de M. Francis Pinchelimouroux c/ M. Francis Pinchelimouroux, FS-P+B (N° Lexbase : A2270DIW), Bull. civ. IV, n° 99, D., 2005, AJ, p. 1413, note A. Lienhard, Act. proc. coll., 2005/10, n° 123, note C. Régnaut-Moutier, Gaz. proc. coll., 2005/2, p. 17, obs. D. Voinot, JCP éd. E, 2005, chron. 1274, p. 1423, n° 6, obs. M. Cabrillac.
(6) Pour une application du principe, v. CA Paris, 3ème ch., sect. A, 16 octobre 2007, n° 07/02111, Mme le chef de service comptable du service des impôts des entreprises centralisateur de Paris centre c/ M. Jacques Salomon (N° Lexbase : A3686D3W), Act. proc. coll., 2008/3, n° 40.
(7) CA Paris, 3ème ch., sect. A, 27 mars 2007, n° 06/04057, SARL Lunette Optic c/ Maître Loïc Thoux (N° Lexbase : A0773DWK).
(8) Devenu l'article L. 622-27 du Code de commerce (N° Lexbase : L3747HBE) depuis la loi de sauvegarde des entreprises.
(9) Vincent et Guinchard, Procédure civile, Précis Dalloz, 24ème éd., p. 864.
(10) V. sur la question, Droit et pratique de la procédure civile, Dalloz action, n° 541.280.
(11) Cass. civ. 3, 4 mai 2000, n° 98-14.014, Mme Laurence Cohen, épouse Levy c/ Société civile professionnelle (SCP) Jacques Dumont et associés, inédit au bulletin (N° Lexbase : A4271CM7).
(12) Cass. com., 4 février 2003, n° 00-13.356, M. Gabriel Baudier c/ M. Gilles Pellegrini, F-D (N° Lexbase : A9194A4B), Act. proc. coll., 2003/7, n° 81.
(13) V. sur la question, P.-M. Le Corre, Droit et pratique des procédures collectives, Dalloz action, 2008-2009, n° 665.75.
(14) V. sur la question, P.-M. Le Corre, Droit et pratique des procédures collectives, Dalloz action, 2008-2009, n° 665.78.
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Réf. : Cass. soc., 24 juin 2008, n° 06-45.870, Mme Sandrine Pernette et autres, FS-P+B (N° Lexbase : A3616D9S)
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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen
Le 07 Octobre 2010
Résumé
Avant tout licenciement pour motif économique, l'employeur est tenu de rechercher toutes les possibilités de reclassement existant dans le groupe dont il relève, parmi les entreprises dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer des permutations de personnels et de proposer, ensuite, aux salariés dont le licenciement est envisagé, tous les emplois disponibles de la même catégorie ou, à défaut, d'une catégorie inférieure. L'employeur ne peut limiter ses offres en fonction de la volonté présumée des intéressés de les refuser. |
I - Du droit du créancier de refuser un emploi de reclassement
La jurisprudence a reconnu aux salariés le droit de refuser un emploi de reclassement, déclinaison du droit de refuser un emploi, c'est-à-dire, de la liberté du travail. Les conséquences juridiques attachées au refus du salarié d'accepter un emploi de reclassement permettent d'en mesurer l'importance.
A - Termes et conditions du droit pour un salarié de refuser un emploi de reclassement
Il convient de distinguer deux hypothèses de refus d'un emploi de reclassement, selon l'origine du licenciement : pour motif économique ou consécutif à un avis d'inaptitude.
La jurisprudence reconnaît aux salariés menacés de licenciement pour motif économique le droit de refuser les mesures de reclassement qui leur sont proposées par l'employeur (1). En l'espèce, une cour d'appel avait constaté que les salariés s'étaient bornés à ne pas adhérer à la mesure de préretraite interne prévue par le plan social, à refuser une mutation géographique et à ne pas recourir aux services d'un cabinet d'outplacement : pour les juges du fond, les salariés n'avaient fait qu'exercer leur droit. L'employeur, qui avait procédé à un licenciement pour faute grave en raison de leur refus délibéré de toute tentative de reclassement, pouvait donc être sanctionné, le licenciement des salariés étant dépourvu de cause réelle et sérieuse.
La Cour de cassation, en utilisant une formule très générale, donne à ce droit une portée très large, puisqu'elle n'en limite pas la portée aux seules mesures de reclassement prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi. A priori, toutes les mesures de reclassement sont visées (mesures de reclassement internes ou externes). Le salarié a donc le droit de refuser toute mesure de reclassement, que cette dernière soit issue du plan de sauvegarde de l'emploi ou non et quel que soit le nombre de licenciements envisagés. En outre, peu importe le nombre de mesures refusées (en l'espèce, les salariés avaient refusé trois mesures de reclassement).
La jurisprudence a précisé les contours du droit pour un salarié, de refuser un poste de reclassement, dans l'hypothèse précise d'une inaptitude consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle. Les juges apprécient les conditions du refus du poste de reclassement et procèdent eux-mêmes à la qualification du refus du poste de reclassement selon un classement en deux catégories : le refus par le salarié est valable ou abusif.
Le refus par le salarié de l'emploi proposé qui déboucherait sur une modification du contrat de travail (telle qu'une baisse de la rémunération) ne peut être abusif. Pour être opposable au salarié, la modification doit, dans ce cas, requérir son accord (2). N'est pas abusif le refus, par un salarié, du poste de reclassement, dès lors que la proposition entraîne une modification du contrat de travail. La cour d'appel doit donc rechercher si le poste de travail proposé constitue une telle modification (3). Ainsi, l'affectation dans un emploi administratif de nature différente de l'emploi de vendeuse constitue une modification du contrat de travail et, en ce cas, ne peut être abusif le refus par un salarié du poste de reclassement proposé par l'employeur (4).
Le refus du poste de reclassement par le salarié est légitime dans la mesure où le poste proposé ne correspond pas aux prescriptions du médecin du travail (5). L'emploi proposé au salarié lui imposait des déplacements et ne correspondait pas à l'avis du médecin du Travail qui avait prescrit un poste sédentaire.
Mais, la Cour de cassation qualifie d'abusif le refus du salarié, sans motif légitime, d'un poste approprié à ses capacités et comparable à l'emploi précédemment occupé (6). Le refus par le salarié du poste de reclassement est abusif lorsque celui-ci est conforme à ses capacités et similaire à son ancien emploi. Il en est de même si le poste a été spécialement aménagé pour être adapté au salarié (7). Le refus par le salarié des postes proposés en vue de son reclassement dans l'entreprise est abusif lorsque le salarié refuse systématiquement tous les postes proposés, révélant, ainsi, sa mauvaise foi (8).
B - Conséquences juridiques attachées au refus du salarié d'accepter un emploi de reclassement
Premièrement, selon la jurisprudence, le refus, par un salarié, d'un poste proposé par l'employeur dans le cadre de son obligation de reclassement n'implique pas, à lui seul, le respect, par celui-ci, de cette obligation, précision étant faite que la solution retenue porte sur un reclassement consécutif à un accident du travail ou une maladie professionnelle (9).
Deuxièmement, même si le salarié a le droit de refuser une proposition de reclassement, le licenciement de ce dernier restera possible en cas de refus de sa part, non pas pour faute, mais pour motif économique. Dans cette hypothèse, le licenciement sera justifié si l'employeur démontre qu'il a, notamment, satisfait à son obligation de reclassement (10).
Troisièmement, s'agissant du reclassement du salarié inapte, le législateur prévoit que le licenciement prononcé en méconnaissance de l'obligation de justifier l'impossibilité de proposer un autre emploi et du refus du salarié du nouvel emploi proposé ouvre droit à réintégration avec maintien des avantages acquis . Selon la jurisprudence, le salarié déclaré inapte au travail peut refuser le poste de reclassement proposé par l'employeur. L'employeur doit, alors, rechercher un autre poste ou prouver l'impossibilité de le reclasser (11).
II - Obligation de reclassement de l'employeur et volonté présumée des salariés de le refuser
A - La volonté présumée des salariés de refuser des emplois de reclassement face au silence du législateur et de la doctrine
La position du créancier (le salarié) de l'obligation de reclassement à la charge de l'employeur n'est envisagée dans la loi que dans deux hypothèses.
S'agissant du reclassement antérieur à un licenciement pour motif économique, la loi évoque la situation du salarié dont l'emploi de reclassement implique une modification du contrat de travail en raison d'un déclassement (emploi d'une catégorie inférieure) : le salarié doit, alors, donner son accord exprès. Il est dans une posture active : son accord d'un emploi de catégorie inférieure ne se présume pas. Mais, hors cette situation particulière d'un emploi de reclassement opérant déclassement, le législateur ne précise pas si le refus de reclassement par le salarié doit être exprès ou simplement présumé, alors même qu'il a pris le soin de préciser que l'offre de reclassement par l'employeur doit, elle, être écrite et précise (C. trav., art. L. 1233-4, al. 3).
S'agissant du reclassement consécutif à un avis d'inaptitude pour accident du travail ou maladie professionnelle, la loi écarte, également, la renonciation du salarié à un poste de reclassement, dans la mesure où l'employeur doit justifier du refus du salarié de l'emploi de reclassement s'il veut rompre le contrat de travail . De même, l'employeur peut être dispensé de verser l'indemnité spéciale de licenciement, prévue à l'article L. 1226-14, alinéa 1er, du Code du travail , s'il établit que le refus du reclassement par le salarié était abusif (C. trav., art. L. 1226-14, al. 2) : la formule employée par le législateur écarte donc clairement un refus de reclassement émanant du salarié, par simple présomption.
B - La solution jurisprudentielle et sa portée
La doctrine n'a pas envisagée cette question de la forme que doit revêtir le refus de reclassement d'un salarié, exprès ou simplement par présomption (12).
En l'espèce, pour décider que l'obligation de reclassement n'avait pas été méconnue par l'employeur et que les licenciements étaient fondés sur une cause économique, la cour d'appel de Lyon avait retenu que les salariés avaient refusé, pour des raisons personnelles ou familiales, des propositions de reclassement à Paris, dans leur domaine de compétence, et qu'il ne pouvait raisonnablement être reproché à la société de ne pas leur avoir offert d'autres postes disponibles à l'étranger, dès lors que les intéressés avaient, par leur refus d'une mutation à Paris, clairement manifesté leur volonté de ne pas s'éloigner de la région lyonnaise. S'ils avaient refusé un poste de reclassement localisé à Paris, a fortiori, le feraient-ils pour un poste situé à l'étranger.
Finalement, l'employeur avait déduit du refus d'un reclassement de salariés lyonnais de postes localisés à Paris, le refus probable de postes situés à l'étranger. Le raisonnement tirait sa justification et sa légitimité d'une forme de bon sens, mais n'était pas juridique. En effet, pour la Cour de cassation, avant tout licenciement pour motif économique, l'employeur est tenu, d'une part, de rechercher toutes les possibilités de reclassement existant dans le groupe dont il relève, parmi les entreprises dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer des permutations de personnels et, d'autre part, de proposer aux salariés, dont le licenciement est envisagé, tous les emplois disponibles de la même catégorie ou, à défaut, d'une catégorie inférieure. Aussi, l'employeur ne peut limiter ses offres en fonction de la volonté présumée des intéressés de les refuser.
L'employeur se voit, au final, assez lourdement sanctionné (car les licenciements pour motifs économiques des salariés ayant refusé le reclassement à Paris, et, implicitement, à l'étranger), puisque la Cour de cassation décide que les licenciements ne sont pas fondés sur une cause économique. Le reproche formulé à l'employeur peut paraître mineur, car il a anticipé un refus de reclassement, assez maladroitement. Il eût été plus inspiré de proposer des postes de reclassement dans les autres structures composant le groupe, c'est-à-dire, son établissement parisien, mais, aussi, le (ou les) établissement (s) localisé (s) à l'étranger.
Ce qui peut paraître finalement comme une simple exigence formelle, revêt, pourtant, une portée large et plus fondamentale : sur l'employeur pèse une obligation légale, constamment réaffirmée par la jurisprudence, de reclassement, antérieure au licenciement, qu'il soit prononcé pour motif économique ou consécutif à un avis d'inaptitude professionnelle. A cet égard, la solution retenue par la Cour de cassation, s'agissant du reclassement au titre d'un plan de sauvegarde de l'emploi, doit pouvoir être transposée aux autres licenciements économiques, collectifs (plus de dix salariés) ou individuels. La question ne se posant pas pour le licenciement consécutif à un avis d'inaptitude, en raison du régime probatoire du refus de reclassement par le salarié (C. trav., art. L. 1226-12).
(1) Cass. soc., 29 janvier 2003, n° 00-46.322, Société Total raffinage distribution c/ M. Fernand Fresquet, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A7667A4Q), Bull. civ. V, n° 28 et les obs. de S. Koleck-Desautel, La Cour de cassation consacre le droit pour le salarié menacé de licenciement économique de refuser un reclassement, Lexbase Hebdo n° 58 du 12 février 2003 - édition sociale (N° Lexbase : N5903AAU).
(2) Cass. soc., 15 juillet 1998, n° 95-45.362, Monsieur Sauzet c/ Société MPG (N° Lexbase : A5399ACX) ; Cass. soc., 14 juin 2000, n° 98-42.882, M. Faure c/ Société Exedim (N° Lexbase : A8765AH4).
(3) Cass. soc., 15 octobre 2002, n° 00-40.929, M. Pierre Pinzetta c/ Société Bat Elia, FS-D (N° Lexbase : A2520A3Q).
(4) Cass. soc., 16 novembre 2004, n° 02-45.775, Mme Liliane Lemercier c/ M. Eric Aubin-Boivin, F-D (N° Lexbase : A9474DDA).
(5) Cass. soc., 9 mai 1995, n° 91-45.017, Société anonyme Renosol c/ M. Jean-Paul Cornaire (N° Lexbase : A9542AAN).
(6) Cass. soc., 7 mai 1996, n° 92-42.572, Société Cadiou c/ M. Duthil (N° Lexbase : A1980AAL), Bull. civ. V, n° 178 p. 125 ; RJS, 6/96, n° 668, p. 425 ; JCP éd. G, II, 1419, note D. Carrignan-Carsin.
(7) Cass. soc., 7 mai 1996, n° 92-42.572, préc. ; Cass. soc., 7 décembre 1994, n° 90-40.840, M. Granveau c/ Menuiserie Sainvillaise et autres (N° Lexbase : A0959AAR).
(8) Cass. soc., 27 mars 1991, n° 87-42.718, M. Cassan c/ Société Domage (N° Lexbase : A4069AGS).
(9) Cass. soc., 29 novembre 2006, n° 05-43.470, Association pour adultes et jeunes handicapés (APAJH) des Yvelines, F-P+B (N° Lexbase : A7899DSD) et les obs. de S. Martin-Cuenot, L'obligation de reclassement : une obligation plénière ?, Lexbase Hebdo n° 240 du 14 décembre 2006 - édition sociale (N° Lexbase : N3097A9L).
(10) Cass. soc., 28 octobre 2002, n° 00-42.350, M. Gérard Maignan c/ Société Soritec, F-D (N° Lexbase : A3975A3M) ; Cass. soc., 6 novembre 2002, n° 00-40.693, M. Eugène Weiss c/ Société Etablissements Dakomex, F-D (N° Lexbase : A6726A3I) et les obs. de S. Koleck-Desautel, Le contenu de la lettre de licenciement pour motif économique, Lexbase Hebdo n° 49 du 28 novembre 2002 édition sociale (N° Lexbase : N4798AAX).
(11) Cass. soc., 11 octobre 2000, n° 98-45.056, M. Victor Estèves Docouto c/ Société Azevedo, société à responsabilité limitée et autres (N° Lexbase : A8323AHQ).
(12) F. Héas, Le classement du salarié en droit du travail, LGDJ, coll. Bibliothèque de droit social, tome 34, spéc. n° 176-185, à propos du droit du salarié de refuser un reclassement.
Décision
Cass. soc., 24 juin 2008, n° 06-45.870, Mme Sandrine Pernette et autres, FS-P+B (N° Lexbase : A3616D9S) Cassation, CA Lyon, 5ème ch., 28 septembre 2006, 7 arrêts, n° 05/03553, Mme Valérie Dieppe (N° Lexbase : A3779DUI) ; n° 05/03554, M. Marshall Berton c/ SA Fideuram Wargny (N° Lexbase : A3778DUH) ; n° 05/03557, Mme Sandrine Pernette c/ SA Fideuram Wargny (N° Lexbase : A3777DUG) ; n° 05/03558, Mme Catherine Vial c/ SA Fideuram Wargny (N° Lexbase : A3781DUL) ; n° 05/03561, M. Pierre Blouin c/ SA Fideuram Wargny (N° Lexbase : A3682DUW) ; n° 05/03563, Mme Armelle Moulin c/ SA Fideuram Wargny (N° Lexbase : A3780DUK) et n° 05/05545, SA Banque privée Fideuram Wargny c/ M. Patrick Périgot (N° Lexbase : A3783DUN) Textes concernés : C. trav., art. L. 122-14-3 (N° Lexbase : L5568AC9) et L. 321-1 (N° Lexbase : L8921G7K), devenus, respectivement, art. L. 1233-2 et L. 1233-4 Mots-clés : plan de sauvegarde de l'emploi ; postes de reclassement ; localisation ; étranger ; refus poste de reclassement ; volonté présumée des salariés. Lien base : |
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par Marine Parmentier, Avocat à la cour d'appel de Paris
Le 07 Octobre 2010
Par un important arrêt en date du 2 juillet 2008, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a précisé, au visa de l'article 3 de la loi du 2 janvier 1970, dite loi "Hoguet" (loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce N° Lexbase : L7546AIC), que le syndic professionnel ne peut poursuivre ses fonctions en l'absence de renouvellement ou en cas de retrait de sa carte professionnelle.
En l'espèce, un copropriétaire avait assigné le syndicat des copropriétaires de son immeuble en annulation de l'assemblée générale du 8 décembre 1997 pour avoir été convoquée et tenue par un syndic non titulaire de la carte professionnelle exigée pour l'exercice de sa profession. La cour d'appel avait rejeté cette demande en estimant que le non renouvellement de la carte professionnelle du syndic au cours de son mandat n'est pas une circonstance qui permet à un copropriétaire ou au syndicat de remettre en cause les actes accomplis par ce dernier.
Cette analyse est censurée par la Cour de cassation dans l'arrêt du 2 juillet 2008.
Elle indique en effet qu'en statuant ainsi, alors que le syndic professionnel ne peut poursuivre ses fonctions en l'absence de renouvellement ou en cas de retrait de sa carte professionnelle, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 3 de la loi "Hoguet".
Rappelons qu'il résulte, notamment, de l'article 3 de la loi "Hoguet" que les activités visées à l'article 1er (N° Lexbase : L7537AIY) ne peuvent être exercées que par les personnes physiques ou morales titulaires d'une carte professionnelle, délivrée par le préfet, précisant celles des opérations qu'elles peuvent accomplir. L'application des dispositions de cette loi à l'activité de syndic ne souffre plus, aujourd'hui, de discussion (voir, notamment, Cass. civ. 3, 4 janvier 1996, n° 93-19.238, Syndicat des copropriétaires de l'immeuble Les Glovettes c/ M. Dourlens et autre N° Lexbase : A9428ABS). Il résulte, également, d'une jurisprudence constante que la désignation comme syndic d'une personne non titulaire de la carte professionnelle est nulle (voir, notamment, l'arrêt du 4 janvier 1996, précité).
L'apport de l'arrêt du 2 juillet 2008 consiste en une importante précision d'ordre pratique : pour exercer valablement ses fonctions pendant toute la durée de son mandat, le syndic doit avoir obtenu le renouvellement de sa carte ou qu'elle ne lui ait pas été retirée. Dans le cas contraire, il ne peut se maintenir en place et les actes accomplis sont susceptibles d'annulation. Précisons, enfin, que le copropriétaire demandant la nullité de l'assemblée générale pour avoir été convoquée et tenue par un syndic non titulaire de la carte professionnelle exigée pour l'exercice de sa profession doit, vraisemblablement, agir dans le délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal de l'assemblée, délai prévu par l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 (loi n° 65-557, fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, art. 42 N° Lexbase : L4849AH3 ; voir, notamment, Cass. civ. 3, 4 octobre 1995, n° 94-10.178, M. Roger Soriano c/ Association des copropriétaires Port Plaisance, inédit au bulletin N° Lexbase : A6331CMG).
Pour limiter les pouvoirs d'un copropriétaire majoritaire, l'article 22 de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4822AH3) prévoit que, lorsqu'un copropriétaire possède une quote-part dans les parties communes supérieure à la moitié, le nombre de voix dont il dispose est réduit à la somme des voix des autres copropriétaires.
La question s'est posée de savoir si, pour calculer la somme des voix des autres copropriétaires, il fallait tenir compte uniquement des copropriétaires présents ou représentés lors de l'assemblée générale ou alors de l'ensemble des copropriétaires composant le syndicat.
Dans l'arrêt du 2 juillet 2008, la Cour de cassation précise qu'il convient de prendre en considération l'ensemble des copropriétaires et non pas uniquement ceux présents ou représentés lors de l'assemblée. En l'espèce, un copropriétaire majoritaire prétendait que l'assemblée générale du 7 juin 2004 avait à tort réduit ses voix à hauteur des voix détenues par les copropriétaires présents ou représentés. Il avait, alors, assigné le syndicat en annulation de diverses décisions de cette assemblée. Les premiers juges n'avaient pas fait droit à sa demande et avaient retenu que le calcul devait être fait lors de chaque assemblée générale et à l'occasion de chaque vote, en fonction des voix des copropriétaires minoritaires présents ou représentés.
Saisie d'un pourvoi, la Cour de cassation censure cette analyse en rappelant les dispositions d'ordre public de l'article 22 de la loi du 10 juillet 1965 précitées. Il n'y a pas lieu de distinguer là où la loi ne distingue pas. Les dispositions de ce texte sont d'interprétation stricte.
Ainsi a-t-il également été précisé que ces dispositions n'ont vocation à s'appliquer que dans l'hypothèse où un seul copropriétaire possède une quote-part dans les parties communes supérieure à la moitié. Elles ne s'appliquent pas lorsque deux ou plusieurs copropriétaires disposent de cette majorité et en profitent pour imposer leur volonté à la copropriété (voir CA Lyon, 10 février 1999, Loyers et copr., 1999, comm., n° 278).
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Réf. : Cass. civ. 3, 9 juillet 2008, n° 07-16.605, Mme Anne de Langle, veuve de Maistre, FS-P+B+I (N° Lexbase : A5450D9Q)
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par Julien Prigent, Avocat à la cour d'appel de Paris
Le 07 Octobre 2010
Le loyer en renouvellement doit, en principe, être fixé au montant de la valeur locative, elle-même déterminée selon cinq critères (C. com., art. L. 145-33 N° Lexbase : L5761AI9) :
Toutefois, le taux de variation du loyer en renouvellement ne peut, en principe, excéder la variation de l'indice INSEE du coût de la construction intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré (C. com., art. L. 145-34 N° Lexbase : L5762AIA).
Ce tempérament connaît, lui-même, une exception, qui entraîne un retour au principe, à savoir, la fixation du loyer en renouvellement au montant de la valeur locative, lorsqu'il existe une modification notable de l'un des quatre premiers éléments déterminant la valeur locative (C. com., art. L. 145-34).
II - Le déplafonnement pour modification notable des éléments de la valeur locative
A - Tout d'abord, pour justifier un déplafonnement, la modification notable doit porter sur l'un des quatre premiers éléments de la valeur locative énumérés à l'article L. 145-33, 1° à 4°, du Code de commerce. Ainsi, l'évolution notable, au cours du bail écoulé, du prix des loyers couramment pratiqué dans le voisinage ne peut pas constituer un motif de déplafonnement au sens de l'article L. 145-34 du Code de commerce (Cass. civ. 3, 6 novembre 2001, n° 00-13.836, F-D N° Lexbase : A0462AXE et Cass. civ. 3, 30 mai 2006, n° 05-14.209, F-D N° Lexbase : A7609DPI). Il est vrai que la codification des dispositions du décret n° 53-960 du 30 septembre 1953 (N° Lexbase : L9107AGE) dans le Code de commerce (par l'ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000, relative à la partie législative du Code de commerce N° Lexbase : L2955AIB) avait pu susciter un doute sur ce point, doute levé par le législateur (loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001, portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, art. 33, VI N° Lexbase : L0265AWQ) mais, également, par la Cour de cassation (Cass. civ. 3, 19 mars 2003, n° 02-10.537, FS-P+B N° Lexbase : A5256A7S et cf. nos obs., L'incidence de la codification sur les motifs de déplafonnement du bail renouvelé, Lexbase Hebdo - édition affaires n° 66 du 10 avril 2003 N° Lexbase : N6788AAN).
B - Ensuite, la modification notable des éléments de la valeur locative doit être... notable (Cass. civ. 3, 30 juin 2004, n° 03-10.754, F-P+B+I N° Lexbase : A9043DCW), c'est-à-dire, suffisamment importante pour justifier une dérogation à la règle du plafonnement.
L'appréciation du caractère notable ressortit du pouvoir souverain des juges du fond (Cass. civ. 3, 22 janvier 1992, n° 90-13.587, M. Jankiel Grichendler (dit Grichet) et autres c/ Mme Suzanne Grynberg, épouse Solvet et autres N° Lexbase : A7958AH9), mais ils doivent caractériser cette modification notable (Cass. civ. 3, 8 janvier 1997, n° 95-11.482, Consorts Loge-Munerel c/ M Soulenq N° Lexbase : A0321ACU).
S'il n'est pas nécessaire que tous les éléments concernés constitutifs de la valeur locative aient subi une modification notable (Cass. civ. 3, 22 février 1978, n° 76-14.363, Société la Rabelaisienne SARL c/ Dame de Mathan N° Lexbase : A7237AG7), la modification de plusieurs de ces éléments qui, pris individuellement, ne serait pas suffisamment importante, peut, dans sa globalité, être notable (Cass. civ. 3, 2 décembre 1998, n° 97-12.138, Société Technic Antenne c/ Mme Pascaud N° Lexbase : A6398AG3).
C - La modification notable doit être intervenue pendant la période située entre la date d'effet du bail à renouveler et celle du nouveau bail, les modifications intervenues au cours du bail précédent le bail à renouveler ne pouvant entraîner le déplafonnement (Cass. civ. 3, 14 octobre 1992, n° 91-10.217, Société Grenelle automobile c/ Société de mécanisme et d'optique de la Seine N° Lexbase : A3583ACP et Cass. civ. 3, 8 janvier 1997, n° 95-12.685, Société Boucherie Lamartine Prosperet compagnie c/ Mme Hamelin-Gapin N° Lexbase : A1773ACN). La date butoir étant la date d'effet du nouveau bail et non la date d'expiration du bail à renouveler, la modification notable intervenue après cette dernière date et avant l'exercice du droit de repentir doit, en conséquence, être prise en compte (Cass. civ. 3, 11 décembre 1996, n° 95-11.753, M. Gautron c/ Epoux Alfieri N° Lexbase : A0333ACC).
Dans l'espèce commentée, l'application de cette règle semble, selon l'une des branches du pourvoi, avoir justifié la mise à l'écart du déplafonnement par les juges du fond, qui avaient considéré que les travaux n'avaient pas eu lieu au cours du bail expiré, dans la mesure où l'installation de l'ascenseur avait été facturée après la date d'effet du nouveau bail. La Cour de cassation ne s'est pas prononcée directement sur ce point, mais elle s'est attachée, à travers l'analyse de la motivation des juges du fond, à l'incidence de ces travaux sur l'activité du preneur, "abstraction faite d'un motif surabondant". C'est, en effet, l'incidence concrète des travaux au cours du bail expiré qui doit être prise en compte et, en aucun cas, la date de leur facturation, qui n'a aucune influence sur la valeur locative en elle-même.
Il existe une exception notable à cette règle, liée à l'effet différé de l'accession des améliorations édictée par l'article R. 145-8 du Code de commerce. Aux termes de ce texte, "les améliorations apportées aux lieux loués au cours du bail à renouveler ne sont prises en considération que si, directement ou indirectement, notamment par l'acceptation d'un loyer réduit, le bailleur en a assumé la charge". La Cour de cassation en a déduit a contrario que les améliorations financées par le preneur ne peuvent justifier, à la condition préalable d'avoir fait accession au bailleur (Cass. civ. 3, 21 mars 2001, n° 99-16.640, Société immobilière Lamenais transactions (Silt) c/ Société Darty Provence-Méditerranée, FS-P+B N° Lexbase : A9901ASI), un déplafonnement, qu'à l'occasion du second renouvellement suivant le bail au cours duquel elles ont été effectuées (Cass. civ. 3, 6 mars 2007, n° 06-10.576, Société civile immobilière (SCI) Labe, F-D N° Lexbase : A6042DUC).
En l'espèce, la modification notable résidait dans l'installation d'un ascenseur dans l'immeuble comprenant les lieux loués. Cette modification semble avoir été qualifiée par les juges du fond de modification des caractéristiques des lieux loués. Elle pourrait, éventuellement, être qualifiée, également, d'amélioration. Toutefois, en l'espèce, compte tenu du fait que le bailleur avait financé les travaux, cette qualification n'emportait aucune conséquence, puisque la règle de l'effet différé de l'accession ne joue qu'en présence d'améliorations financées par le preneur.
Par ailleurs, l'espèce commentée se singularise, en ce que les travaux ne portaient pas directement sur les lieux loués, mais sur les parties communes permettant d'y accéder, à savoir, l'installation d'un ascenseur. La Cour de cassation avait déjà eu l'occasion de préciser que les améliorations portant sur les parties communes (embellissement des parties communes, création d'un ascenseur) pouvaient justifier un déplafonnement (Cass. civ. 3, 9 octobre 1996, n° 95-10.228, Epoux Wandelle c/ Office public d'aménagement et de construction de la ville de Paris N° Lexbase : A0249AC9). La Haute juridiction, bien que n'ayant pas été directement interrogée sur cet aspect, réitère la solution.
III - La nécessité d'une incidence favorable sur l'activité du preneur de la modification des éléments de la valeur locative ?
L'article L. 145-34 du Code de commerce vise la modification notable de l'un des éléments de la valeur locative mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 145-33 du même code, sans référence à l'activité du preneur. La question se pose, en conséquence, de la nécessité de prendre en compte ou non l'influence, positive et/ou négative, de la modification des éléments de la valeur locative sur l'activité du preneur.
La Cour de cassation avait jugé que le loyer pouvait être déplafonné en raison d'une modification notable de la destination du bail, sans avoir à rechercher si cette modification avait pour effet de rendre plus rentable pour le locataire l'exploitation de son fonds, ni si elle présentait des inconvénients pour les bailleurs (Cass. civ. 3, 4 novembre 1998, n° 96-22.251, Société Priminter, Société anonyme c/ Mme Chantal Guillot veuve André et autres N° Lexbase : A3174AU4).
Un arrêt important avait, également, été rendu concernant les facteurs locaux de commercialité, dont le régime est un peu particulier par rapport aux autres éléments de la valeur locative, puisque l'article R. 145-6 du Code de commerce dispose que "les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l'intérêt que présente, pour le commerce considéré, l'importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l'attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l'emplacement pour l'activité considérée et des modifications que ces éléments subissent d'une manière durable ou provisoire". Il subordonne, en conséquence, la prise en compte des facteurs locaux de commercialité à l'intérêt que ses composantes représentent pour le commerce considéré, défini comme le commerce effectivement exercé dans le respect de la destination contractuelle (Cass. civ. 3, 16 juillet 1998, n° 96-13.772, Société La Bastille c/ Société Perrier Rolin Valignat N° Lexbase : A5440ACH). La Cour de cassation rappelle fréquemment cette exigence, en censurant les juges du fond qui ne relèvent pas l'intérêt sur le commerce considéré de la modification des facteurs locaux de commercialité pris en compte (Cass. civ. 3, 21 février 2006, n° 05-12.169, Société Mexi Chic c/ Société civile immobilière (SCI) Maximilien, F-D N° Lexbase : A1898DNM). L'emploi du terme "intérêt" aurait pu être interprété comme imposant la prise en compte des seules modifications des facteurs locaux de commercialité ayant un impact favorable sur le commerce du preneur.
Ce n'est pas le sens que lui a conféré la Cour de cassation qui a jugé, de manière inédite, que, même lorsque la modification des facteurs locaux de commercialité avait une incidence négative sur le commerce considéré, cette modification, si elle était notable, devait entraîner une modification de la valeur locative (Cass. civ. 3, 13 juillet 1999, n° 97-18.295, Mme Bize Soula c/ Société Callard et Ortiz et autre N° Lexbase : A8130AG9). Cette solution avait un effet paradoxal, puisque le loyer en renouvellement pouvait être fortement augmenté, alors même que l'environnement commercial avait pu se dégrader.
La solution avait été justifiée par le fait que l'article L. 145-34 du Code de commerce (anc. art. 23-6 du décret n° 53-960) vise le terme "modification", qui revêt un sens objectif ("tout changement objectivement constaté, sans avoir à tenir compte de son effet favorable ou défavorable"), et que le terme "intérêt" devait, également, être appréhendé dans un sens objectif (cf. rapport de la Cour de cassation pour l'année 1999, Le prix du bail renouvelé : encadrement ou liberté, Agnès Fossaert-Sabatier, conseiller référendaire à la Cour de cassation).
L'arrêt du 9 juillet 2008 abandonne, de manière très claire, l'approche "objective" précédemment retenue, au moins en ce qui concerne les travaux du bailleur. La Haute cour affirme, en effet, que ces derniers ne peuvent constituer une modification notable de l'un des éléments de la valeur locative, qu'à la condition qu'ils aient une incidence favorable sur le commerce du preneur.
En l'espèce, les juges du fond avaient relevé que l'installation d'un ascenseur n'avait pas eu d'incidence particulière sur l'activité du preneur qui exerçait une activité d'enseignement pour laquelle, essentiellement, sa réputation avait valeur attractive, la clientèle concernée par l'activité de vente de sculpture, céramiques et émaux n'étant pas, en outre, une clientèle de passage. L'ascenseur avait même eu un effet négatif sur cette dernière activité, en réduisant le passage dans l'escalier. En conséquence, et selon la nouvelle règle énoncée par cet arrêt, le loyer ne pouvait être déplafonné.
Bien que la Cour de cassation n'ait visé que les travaux du bailleur, il n'est pas à exclure que cette décision, qui abandonne clairement l'approche objective du terme "modification", puisse concerner tous les éléments de la valeur locative et qu'elle remette en cause la solution dégagée par l'arrêt précité du 13 juillet 1999.
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Réf. : Cass. soc., 24 juin 2008, n° 07-41.972 à 07-41.976 (jonction), M. Serge Blin et a. c/ M. Ph. Froehlich et a., FS-P+B (N° Lexbase : A3748D9P)
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par Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV
Le 07 Octobre 2010
Résumé
L'infirmation du jugement d'extension de la procédure de redressement judiciaire à la société employeur entraîne l'annulation, par voie de conséquence, de la décision d'autorisation de licencier prise par le juge-commissaire dans le cadre de cette procédure. Il en résulte que les licenciements prononcés sont dépourvus de cause réelle et sérieuse. Selon les dispositions de l'article L. 621-126 du Code de commerce (N° Lexbase : L6978AIB, art. L. 625-3, nouv. N° Lexbase : L7049AIW), en matière prud'homale, les instances en cours à la date du jugement de redressement ou de liquidation judiciaire de l'employeur, sont poursuivies en présence du représentant des créanciers et de l'administrateur ou ceux-ci dûment appelés. Le représentant des créanciers est, en outre, tenu d'informer, dans les dix jours, la juridiction saisie et les salariés parties à l'instance de l'ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaires. Le représentant des créanciers qui n'a pas informé la juridiction saisie, avant l'ouverture des débats de la liquidation judiciaire de l'employeur, ne peut valablement se prévaloir d'une inopposabilité de la décision rendue. |
Commentaire
I Infirmation du jugement d'extension et sort des licenciements prononcés par le juge-commissaire
Lorsqu'une société se trouve placée en redressement judiciaire, les difficultés constatées peuvent, dès l'ouverture de la période d'observation et pendant toute sa durée, justifier la rupture immédiate de certains contrats de travail. Plus précisément, il résulte de la loi que "lorsque des licenciements pour motif économique présentent un caractère urgent, inévitable et indispensable, pendant la période d'observation, l'administrateur peut être autorisé, par le juge-commissaire, à procéder à des licenciements" (1).
Bien que l'administrateur ait un rôle à jouer en la matière (2), c'est sur les épaules du juge-commissaire que pèse le poids de la décision de licencier pour motif économique. Il convient, d'ailleurs, de rappeler que le licenciement prononcé sans son autorisation est dépourvu de cause réelle et sérieuse (3).
A l'évidence, si le juge-commissaire est appelé à intervenir, c'est qu'une procédure collective a été ouverte par le tribunal de commerce. Or, et la question était au coeur de l'arrêt commenté, il importe de se demander ce qu'il advient des décisions de l'organe en cause lorsque ce jugement d'ouverture est postérieurement infirmé.
Le jugement, qui ouvre ou refuse d'ouvrir, la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, peut faire l'objet des voies de recours. Celles-ci sont, cependant, soumises à un régime spécifique et restrictif, essentiellement justifié par une exigence de rapidité (4). Dès lors qu'un tel recours est possible, il peut conduire la juridiction saisie à infirmer le jugement d'ouverture. C'est ce qui s'était précisément passé dans l'affaire sous examen, dont les faits sont relativement complexes.
Cinq salariés avaient été engagés, entre 1997 et 2001, par la société S., filiale de la société C.. Par jugement du 12 décembre 2001, le tribunal de commerce avait étendu à la société S. la procédure de redressement judiciaire qui avait été ouverte antérieurement à l'égard d'autres sociétés. Le juge-commissaire ayant, par ordonnance du 29 janvier 2002, autorisé le licenciement pour motif économique de vingt-six membres du personnel de la société S., l'administrateur judiciaire avait licencié les cinq salariés, le 13 février suivant. Contestant leur licenciement, ces derniers avaient, alors, saisi la juridiction prud'homale. A la suite de l'infirmation du jugement du tribunal de commerce du 12 décembre 2001, prononcée le 6 février 2003, la société S. avait été remise à la tête de ses biens. Tandis que les débats devant le conseil de prud'hommes avaient eu lieu le 12 février 2004, la société S. avait, en cours de délibéré, le 31 mars 2004, été mise en liquidation judiciaire. Par jugements du 6 mai 2004, rendus sans qu'ait été mis en cause le liquidateur, le conseil des prud'hommes avait décidé que les licenciements étaient dépourvus de cause réelle et sérieuse et condamné ladite société à verser aux salariés diverses sommes. Alors que ces jugements n'avaient pas fait l'objet de voies de recours, le liquidateur judiciaire avait, cependant, invoqué leur inopposabilité à son égard. Les salariés avaient, alors, à nouveau, saisi la juridiction prud'homale aux fins d'inscription des sommes allouées par jugement du 6 mai 2004 sur le relevé de créances.
Pour débouter les salariés de leur demande de prise en charge par l'AGS de leurs créances au titre, notamment, de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, les arrêts attaqués avaient retenu que l'annulation d'un jugement de redressement ou de liquidation judiciaire n'entraîne pas effacement rétroactif des actes accomplis sous l'empire du jugement annulé.
Cette décision est censurée par la Cour de cassation au visa des articles L. 621-37 du Code de commerce (N° Lexbase : L6889AIY), L. 122-14-3, alinéa 1, 1ère phrase, du Code du travail (N° Lexbase : L5568AC9), recodifié sous les articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du même code, l'article L. 321-1, alinéa 1 (N° Lexbase : L8921G7K), devenu L. 1233-3 du Code du travail (N° Lexbase : L9888HW7) et 63 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985, relatif au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises (N° Lexbase : L9117AGR). Prenant l'exact contre-pied de la position des juges du fond, la Chambre sociale considère que "l'infirmation du jugement d'extension de la procédure de redressement judiciaire à la société S. entraînait l'annulation, par voie de conséquence, de la décision d'autorisation de licencier prise par le juge-commissaire dans le cadre de cette procédure, ce dont il résultait que les licenciements étaient dépourvus de cause réelle et sérieuse, de sorte que l'AGS devait sa garantie".
Cette solution mérite approbation, au moins quant aux conséquences qu'elle tire de l'infirmation du jugement d'extension. En effet, quand le recours contre le jugement d'ouverture est accueilli, ce dernier se trouve rétroactivement anéanti et les parties se trouvent placées dans l'état antérieur. Bien plus, et ainsi qu'il est classiquement enseigné, "l'infirmation en appel du jugement d'ouverture entraîne de plein droit l'annulation des décisions qui n'en sont que la suite ou la conséquence, tel, par exemple, le jugement reportant la date de cessation des paiements ou l'ordonnance du juge-commissaire ordonnant la vente des éléments du fonds de commerce" (5). Partant, il faut approuver la Cour de cassation, lorsqu'elle affirme que l'infirmation du jugement d'extension entraîne l'annulation, par voie de conséquence, de la décision d'autorisation de licencier prise par le juge-commissaire dans le cadre de cette procédure.
On peut, en revanche, se montrer plus circonspect à l'égard de la conséquence que la Cour de cassation tire de l'annulation de la décision d'autorisation de licencier prise par le juge-commissaire. Selon la Chambre sociale, il résulte de cette annulation que les licenciements prononcés sont dépourvus de cause réelle et sérieuse. Or, on peut se demander si la nullité de ces mêmes licenciements n'aurait pas constitué une sanction plus adéquate, ces derniers étant intervenus consécutivement à une autorisation du juge-commissaire, annulée à la suite de l'infirmation du jugement d'extension. Cet enchaînement des nullités n'aurait pas été sans rappeler celui qui avait été admis par la Cour de cassation dans le fameux arrêt "La Samaritaine", relativement à la nullité du plan social (6). Mais il est vrai que, dans ce cas, la nullité des licenciements prononcés pouvait s'autoriser d'un texte, certes interprété de manière extensive par la Chambre sociale. Or, et pour en revenir à la question qui nous intéresse, faute de texte spécifique, il est bien difficile d'opter pour la nullité des licenciements. Ne reste, alors, par nécessité pourrait-on dire, que l'absence de cause réelle et sérieuse, dont il faut se satisfaire (7).
II Opposabilité des décisions rendues au profit des salariés au représentant des créanciers
Afin de faciliter le redressement de l'entreprise en difficulté, mais aussi pour assurer une certaine égalité entre les créanciers, la loi impose à ceux-ci des sacrifices, parmi lesquels figure en bonne place l'arrêt des poursuites individuelles (8).
A ce titre, l'article L. 622-21 du Code de commerce (N° Lexbase : L3741HB8) dispose que le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 (N° Lexbase : L3876HB8) et tendant, notamment, à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent. Quoique formulée différemment, cette disposition reprend les prescriptions qui figuraient à l'article L. 621-41 du Code de commerce (N° Lexbase : L6893AI7), applicable au moment des faits (9).
De même, la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005, de sauvegarde des entreprises (N° Lexbase : L5150HGT), a maintenu la dérogation dont bénéfice les salariés. En effet, ainsi que l'affirmait l'article L. 621-126, alinéa 1er, (devenu l'article L. 625-3 du Code de commerce), "les instances en cours devant la juridiction prud'homale, à la date du jugement d'ouverture du redressement judiciaire, sont poursuivies en présence du représentant des créanciers et de l'administrateur lorsqu'il a pour mission d'assurer l'administration ou ceux-ci dûment appelés" (10).
En l'espèce, l'application de ces dispositions ne faisait aucune difficulté. En revanche, le liquidateur soutenait que les jugements du 6 mai 2004, ayant déclaré les licenciements sans cause réelle et sérieuse étaient inopposables à la procédure de liquidation judiciaire faute pour lui d'avoir été mis en cause (11). Repoussée par les juges d'appel, cette argumentation ne trouve pas plus d'écho devant la Cour de cassation qui décide que "le représentant des créanciers qui n'a pas informé la juridiction saisie, avant l'ouverture des débats, de la liquidation judiciaire de l'employeur ne peut valablement se prévaloir d'une inopposabilité de la décision rendue".
Ce faisant, la Cour de cassation fait produire tout leur effet aux dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 621-126 selon lequel, "le représentant des créanciers informe, dans les dix jours, la juridiction saisie et les salariés parties à l'instance de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire" (12). Cette solution n'est pas pour surprendre, dans la mesure où elle avait été antérieurement énoncée par la Chambre sociale dans plusieurs arrêts en date du 17 septembre 2003 (13) et confirmée dans une décision rendue le 24 novembre 2004 (14).
Il convient, toutefois, de relever que, dans l'arrêt sous examen, la Cour de cassation prend soin de souligner que le représentant des créanciers doit informer la juridiction saisie et les salariés "avant l'ouverture des débats". Or, en l'espèce, et par la force des évènements, cette exigence ne pouvait être respectée puisque, précisément, la procédure de liquidation judiciaire avait été prononcée postérieurement à l'ouverture des débats.
(1) C. com., art. L. 621-37 (N° Lexbase : L6889AIY), devenu, postérieurement à la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005, de sauvegarde des entreprises (N° Lexbase : L5150HGT), l'article L. 631-17 (N° Lexbase : L4028HBS) du même code.
(2) Sur l'ensemble de la procédure, lire nos obs., Le fait que le licenciement économique soit notifié par le débiteur en redressement judiciaire ne suffit pas à le priver de cause réelle et sérieuse, Lexbase Hebdo n° 310 du 26 juin 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N3739BGL).
(3) Cass. soc., 3 mai 2001, n° 99-41.813, M. Robert Taguet c/ Imprimerie Douriaut (N° Lexbase : A5335AGP), Bull. civ. V, n° 151.
(4) Pour une présentation d'ensemble de ces voies de recours, v., notamment, F. Pérochon et R. Bonhomme, Entreprises en difficulté Instruments de crédit et de paiement, LGDJ, 7ème éd., 2006, § 223 et s. ; A. Jacquemont, Droit des entreprises en difficulté, Litec, 5ème éd., 2007, § 247 et s..
(5) A. Martin-Serf, Redressement et liquidation judiciaires Voies de recours, J.Cl. Procédures collectives, Fasc. 2205, § 124 et la jurisprudence citée.
(6) Cass. soc., 13 février 1993, n° 96-41.874, Société des Grands Magasins de la Samaritaine c/ Mme Benoist et autre (N° Lexbase : A4174AAT), Bull. civ. V, n° 113.
(7) Cette solution rejoint la jurisprudence précitée de la Cour de cassation, aux termes de laquelle le licenciement prononcé en l'absence d'autorisation du juge-commissaire est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
(8) V. A. Jacquemont, ouvrage préc., pp. 208 et s..
(9) Cet article précisait que, "sous réserve des dispositions de l'article L. 621-126 [du Code de commerce], les instances en cours sont suspendues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le représentant des créanciers et, le cas échéant, l'administrateur dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant".
(10) Relevons que cette disposition déroge, également, à l'article 369 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2600ADN).
(11) Partant, le liquidateur refusait d'inscrire les créances des salariés en cause sur l'état des créances.
(12) Prescriptions qui figurent, désormais, au second alinéa de l'article L. 625-3 du Code de commerce (N° Lexbase : L7049AIW) ("le mandataire judiciaire informe dans les dix jours la juridiction saisie et les salariés parties à l'instance de l'ouverture de la procédure").
(13) Cass. soc., 17 septembre 2003, n° 01-41.255, Société Veni créator C/O Maison Bosc c/ Mme Andrée Beaulieu, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A5404C9Z) et lire nos obs., Conséquences du défaut d'information d'une juridiction concernant l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, Lexbase Hebdo n° 88 du 2 octobre 2003 - édition sociale (N° Lexbase : N8907AA7).
(14) Cass. soc., 24 novembre 2004, n° 02-45.126, M. Pierre Poll Gouater c/ Société CNM Communication, F-P+B (N° Lexbase : A0304DEY), RTD com., 2005, p. 174, obs. J.-L. Vallens.
Décision
Cass. soc., 24 juin 2008, n° 07-41.972 à 07-41.976 (jonction), M. Serge Blin et a. c/ M. Ph. Froehlich et a., FS-P+B (N° Lexbase : A3748D9P) Cassation partielle sans renvoi de CA Colmar, ch. soc., sect. B, 20 février 2007 Textes visés : C. com., art. L. 621-37 (N° Lexbase : L6889AIY) ; C. trav., art. L. 122-14-3, alinéa 1, 1ère phrase (N° Lexbase : L5568AC9, art. L. 1233-2 N° Lexbase : L9887HW4 et L. 1235-1 N° Lexbase : L9997HW8, recod.), art. L. 321-1, alinéa 1 (N° Lexbase : L8921G7K, art. L. 1233-3, recod. N° Lexbase : L9888HW7) et décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985, relatif au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, art. 61 (N° Lexbase : L9117AGR) Mots-clefs : redressement judiciaire ; licenciements économiques ; juge-commissaire ; infirmation du jugement ; absence de cause réelle et sérieuse ; instance prud'homale ; suspension ; inopposabilité du jugement. Lien base : |
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