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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la rédaction
Le 27 Mars 2014
*Jean Racine, Bérénice.
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par Charlotte Figerou, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition sociale
Le 07 Octobre 2010
I - Le licenciement
1 - Le licenciement économique
La loi du 18 janvier 2005 a réformé de manière importante le droit applicable en cas de "grand licenciement collectif". La réforme législative porte sur l'articulation des différentes procédures de consultation du comité d'entreprise, le caractère facultatif de l'annulation du licenciement consécutif à un plan de sauvegarde de l'emploi nul, les accords dérogatoires relatifs aux modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise, l'institution d'une obligation de négocier sur les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise sur la stratégie de l'entreprise et ses effets prévisibles sur l'emploi, la mise en oeuvre de délais pour agir en matière de licenciement économique et, enfin, les obligations des entreprises en cas de licenciement collectif affectant l'équilibre du bassin d'emploi.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, Fiche n° 1 : la modification du droit applicable en cas de "grand" licenciement économique, Lexbase Hebdo n° 152 du 27 janvier 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4383ABX).
La loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 (N° Lexbase : L1304AW9) avait, dans son article 118, mis en place des mesures visant à contraindre les entreprises qui procèdent "à des licenciements économiques susceptibles par leur ampleur d'affecter l'équilibre économique du bassin d'emploi considéré" à prendre des mesures destinées à "contribuer à la création d'activités, aux actions de formation professionnelle et au développement des emplois dans le bassin d'emploi". Suspendues par la loi du 3 janvier 2003 (loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques N° Lexbase : L9374A8P), ces dispositions ont été définitivement abrogées par la loi de cohésion sociale (loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, de programmation pour la cohésion sociale N° Lexbase : L6384G49), et remplacées par un dispositif moins contraignant. Un décret n° 2005-1084 du 31 août 2005 pris pour l'application de l'article L. 321-17 du Code du travail (N° Lexbase : L8932G7X) et modifiant ce code (N° Lexbase : L9076HBR) vient préciser les modalités d'application de ces nouvelles dispositions, tant pour les entreprises occupant au moins 1 000 salariés que pour les autres.
(Sur ce sujet, lire Christophe Radé, Précisions réglementaires sur la responsabilité sociale de l'entreprise en cas de licenciement économique, Lexbase Hebdo n° 181 du 15 septembre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N8421AIQ).
L'employeur peut modifier le projet de plan de sauvegarde de l'emploi présenté au comité d'entreprise autant que nécessaire. Mais, il doit à nouveau consulter le comité d'entreprise si le plan de sauvegarde de l'emploi est nouveau. Une irrégularité de procédure n'entraîne pas l'annulation de la procédure de licenciement économique collectif de plus de 10 salariés, mais une simple reprise de la procédure.
(Sur ce sujet, lire Christophe Willmann, Plan de sauvegarde de l'emploi : pour une consultation de bonne foi du comité d'entreprise par l'employeur, Lexbase Hebdo n° 151 du 22 janvier 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4202ABA)
La société ayant cessé définitivement son activité et vendu ses actifs industriels et l'entreprise ayant disparu, la réintégration, demandée dans les seuls emplois que les salariés occupaient dans cette entreprise avant leurs licenciements, était devenue matériellement impossible
(Sur ce sujet, lire Christophe Radé, Affaire "Wolber" : à l'impossible nul n'est tenu !, Lexbase Hebdo n° 173 du 23 juin 2005 - édition sociale N° Lexbase : N5701AIY)
2 - La procédure de licenciement
Un salarié ne peut renoncer au délai minimum de 5 jours imposé par le législateur entre la réception de la convocation à l'entretien préalable et la tenue de cet entretien.
(Sur ce sujet, lire Stéphanie Martin-Cuenot, Le caractère d'ordre public social du délai de convocation à l'entretien préalable, Lexbase Hebdo n° 176 du 14 juillet 2005 - édition sociale N° Lexbase : N6495AIE).
L'employeur doit se prévaloir dans la lettre de licenciement du salarié malade, d'une part, de la perturbation du fonctionnement de l'entreprise et, d'autre part, de la nécessité du remplacement du salarié, dont le juge doit vérifier s'il est définitif.
(Sur ce sujet, lire La justification du licenciement du salarié malade, Lexbase Hebdo n° 188 du 3 novembre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N0288AKU)
3 - La limitation conventionnelle des possibilités de licencier
Pour être d'ordre public, le droit de licencier de l'employeur peut néanmoins faire l'objet d'un certain nombre d'aménagements, que ce soit par l'effet d'une convention collective ou du contrat de travail. Si ces aménagements résident souvent dans l'obligation de respecter une procédure particulière de licenciement, les stipulations conventionnelles ou contractuelles vont parfois au-delà, en limitant le droit de licencier de l'employeur à un certain nombre de causes qu'elles énumèrent. L'importance de ces stipulations n'est plus à souligner, la Cour de cassation considérant avec constance que tout licenciement prononcé en méconnaissance de celles-ci est dépourvu de cause réelle et sérieuse. C'est cette solution que vient confirmer l'arrêt rendu par la Chambre sociale le 25 octobre 2005, dans une espèce où était en cause le statut du personnel des Caisses d'épargne.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, De la nécessité de respecter les dispositions limitant le droit de licencier de l'employeur, Lexbase Hebdo n° 189 du 10 novembre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N0487AKA)
4 - Faute grave
Le droit du travail et, plus spécifiquement, le droit du licenciement connaissent une gradation des fautes auxquelles sont attachées différentes conséquences. Si ces dernières sont aisées à identifier, il n'en va pas de même des fautes et, notamment, de la faute grave. Dans le silence de la loi, la jurisprudence a donné une définition de cette dernière, centrée sur l'impossibilité de maintenir le salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis. La faute grave exige, par conséquent, le départ immédiat du salarié de l'entreprise. Il s'en déduit, fort logiquement, que l'employeur qui laisse son salarié accomplir celui-ci perd le droit d'invoquer la faute grave. En revanche, et ainsi que vient le rappeler avec force la Cour de cassation, dans un arrêt du 5 février 2005, le fait que l'employeur, tout en notifiant une rupture avec effet immédiat ait décidé de verser au salarié une somme équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis ne peut le priver du droit de se prévaloir de la faute grave.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Le versement volontaire d'une indemnité compensatrice de préavis ne prive pas l'employeur du droit d'invoquer la faute grave du salarié, Lexbase Hebdo n° 155 du 17 février 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4619ABP)
Selon l'article L. 230-3 du Code du travail (N° Lexbase : L5947ACA), il incombe à chaque travailleur de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa sécurité et de sa santé ainsi que de celles des autres personnes concernées du fait de ses actes ou de ses omissions au travail. Dès lors, alors même qu'il n'aurait pas reçu de délégation de pouvoir, le salarié répond des fautes qu'il a commises dans l'exécution de son contrat de travail.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, Le licenciement pour faute grave en cas de violation par le salarié de son obligation de sécurité, Lexbase Hebdo n° 185 du 13 octobre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N9527AIP).
5 - La preuve de la faute
Si l'employeur ne peut mettre en oeuvre un dispositif de contrôle de l'activité professionnelle qui n'a pas été porté préalablement à la connaissance des salariés, il peut leur opposer les preuves recueillies par les systèmes de surveillance des locaux auxquels ils n'ont pas accès, et n'est pas tenu de divulguer l'existence des procédés installés par les clients de l'entreprise. Dès lors que la mise en place de la caméra a été décidée par un client et n'a pas pour but de contrôler le travail des salariés mais uniquement de surveiller la porte d'accès d'un local dans lequel ils ne devaient avoir aucune activité, la cour d'appel a pu décider, sans encourir les griefs du moyen, que les enregistrements vidéo litigieux constituaient un moyen de preuve licite.
(Sur ce sujet, lire Stéphanie Martin-Cuenot, Faute, preuve et vidéo, Lexbase Hebdo n° 166 du 5 mai 2005 - édition sociale N° Lexbase : N3922AI4).
6 - La nullité du licenciement
Le régime applicable aux salariés inaptes se précise mais semble encore loin d'être achevé, comme en témoigne une nouvelle fois la Cour de cassation dans cet arrêt du 26 janvier 2005. L'omission, volontaire ou non, par le législateur, des sanctions attachées à la violation de la procédure de licenciement du salarié inapte oblige le juge à prendre position, ce qui n'est pas toujours aisé. Dans cette décision, l'employeur avait engagé la procédure de licenciement immédiatement après que le médecin du travail eut délivré son premier avis d'inaptitude, donc sans attendre le second avis prescrit par le législateur. Le salarié contestait cette rupture, à juste titre, si l'on en croit la Cour de cassation. Elle considère, en effet, que la rupture ne peut être annulée en l'absence de texte, mais que cette précipitation démontre qu'aucune tentative de reclassement n'a été effectuée par l'employeur. La Haute juridiction pose, ainsi, une présomption de non-reclassement au profit du salarié licencié avant que le médecin ne se soit prononcé sur son inaptitude dans les conditions prévues par le législateur. Cette solution, qui constitue un véritable revirement de jurisprudence, tombe sous le sens, même si l'on peut regretter l'insuffisance du texte visé à fonder la solution dégagée par la Haute juridiction.
(Sur ce sujet, lire Stéphanie Martin-Cuenot, Nullité mal fondée doit être remplacée : illustration en matière de licenciement du salarié inapte, Lexbase Hebdo n° 154 du 10 février 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4562ABL).
Lorsque la lettre de licenciement a été envoyée au salarié avant qu'il ne soit victime d'un accident du travail, la circonstance que cette lettre ne lui soit parvenue qu'au cours de la période de suspension de son contrat de travail consécutive à l'accident n'a pas pour conséquence de rendre nul le licenciement précédemment prononcé dont l'effet est reporté à l'expiration de la période de suspension.
(Sur ce sujet, lire Stéphanie Martin-Cuenot, Pas de nullité sans texte : nouvelle illustration en matière de licenciement, Lexbase Hebdo n° 155 du 17 février 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4617ABM)
Si les indemnités prévues par les articles L. 122-32-6 (N° Lexbase : L5524ACL) et L. 122-32-7 (N° Lexbase : L5525ACM) du Code du travail ne sont pas dues en cas de licenciement prononcé en violation de l'article L. 122-32-2 du même Code (N° Lexbase : L5519ACE), le salarié qui n'a pas demandé sa réintégration peut prétendre à l'indemnité légale de licenciement dès lors qu'il remplit la condition d'ancienneté prévue à l'article L. 122-9 du Code du travail (N° Lexbase : L5559ACU). Lorsque le licenciement est nul, le salarié a droit à l'indemnité compensatrice de préavis.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, Les conséquences indemnitaires de la nullité du licenciement, Lexbase Hebdo n° 157 du 3 mars 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4865ABS).
Dans cette hypothèse, le salarié peut prétendre, outre à des indemnités de rupture (indemnité de licenciement et de préavis), à une indemnité d'au moins 6 mois de salaire en réparation du préjudice résultant du caractère illicite de la rupture.
(Sur ce sujet, lire Stéphanie Martin-Cuenot, A rupture illicite, sanction exemplaire, Lexbase Hebdo n° 184 du 6 octobre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N9149AIP).
Les cas de nullité du licenciement, définis précisément dans le Code du travail, donnent lieu à des difficultés juridiques que la jurisprudence tranche progressivement, au cas par cas. Il en va ainsi du salarié ayant perçu pendant une certaine période des allocations chômage et dont le licenciement vient ultérieurement à être annulé par le juge, quelques années plus tard. Quel sera le sort des allocations chômage ainsi indûment perçues ? La question se pose, d'une part, pour le salarié antérieurement chômeur qui devra rembourser les allocations et, d'autre part, pour l'Assédic qui pourra alors engager une action en répétition d'indu. Le régime de ce type d'actions, assez peu connu, a été précisé par la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 21 septembre 2005, appelé à être publié au bulletin des arrêts de la Cour de cassation. La Cour de cassation, s'appuyant sur le droit commun de la prescription, fixe une règle non prévue par les textes, portant sur la prescription de l'action en répétition d'indu de l'Assédic lorsque les allocations chômage se révèlent indues à la suite de l'annulation d'un licenciement.
(Sur ce sujet, lire Christophe Willmann, Nullité du licenciement et action en recouvrement des allocations de chômage par l'Assédic, Lexbase Hebdo n° 184 du 6 octobre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N9203AIP).
7- Le licenciement disciplinaire
Le licenciement disciplinaire doit intervenir dans le délai d'un mois à compter de la date de l'entretien préalable et, s'il est prononcé pendant la période de suspension du contrat de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle, il ne peut l'être que pour une faute grave du salarié ; il en résulte que le délai prévu par l'article L. 122-41 du Code du travail (N° Lexbase : L5579ACM) pour le prononcé d'une sanction n'est ni suspendu ni interrompu pendant la période de suspension du contrat de travail provoquée par un accident du travail ou une maladie professionnelle.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, La procédure de licenciement disciplinaire et la suspension du contrat pour accident du travail, Lexbase Hebdo n° 153 du 3 février 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4496AB7).
S'agissant d'un licenciement prononcé à titre disciplinaire, si la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l'encontre du salarié et les conséquences que l'employeur entend en tirer quant aux modalités de rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués. C'est, dès lors, à bon droit que la cour d'appel a recherché si les faits dénoncés dans la lettre de licenciement n'étaient pas constitutifs d'une faute de nature à conférer une cause réelle et sérieuse au licenciement.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, La requalification par le juge des faits énoncés dans la lettre de licenciement, Lexbase Hebdo n° 158 du 10 mars 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4918ABR).
8 - Indemnité de préavis
La dispense d'exécution du préavis par l'employeur comporte des avantages non négligeables pour le salarié. Celui-ci se voit libéré d'exécuter sa prestation de travail tout en recevant, par ailleurs, une rémunération conforme à celle qu'il aurait perçue s'il avait continué à travailler. En pratique, ce principe n'est pas toujours aisé à mettre en oeuvre. Quels éléments doivent être pris en compte dans le calcul de l'indemnité ? Comment traiter la partie variable de la rémunération ? A quel régime doivent, en particulier, être soumises les heures supplémentaires? L'arrêt du 20 avril 2005 apporte quelques éléments de réponse à ces questions. En effet, pour la première fois à notre connaissance, l'arrêt statue sur la prise en compte des heures effectuées de la 36ème à la 39ème, dans le cadre des lois Aubry. Dans la logique des textes du Code du travail, selon lesquels l'indemnité est calculée à partir de la rémunération qu'aurait perçue le salarié s'il avait continué à travailler, la Cour de cassation décide que les heures accomplies de la 36ème à la 39ème doivent entrer dans le calcul de l'indemnité compensatrice de préavis.
(Sur ce sujet, lire Chrystelle Alour, Calcul de l'indemnité compensatrice de préavis : la prise en compte des heures supplémentaires, Lexbase Hebdo n° 166 du 5 mai 2005 - édition sociale N° Lexbase : N3872AIA).
II - La rupture de l'essai
On a coutume de dire que pendant la période d'essai, la rupture du contrat de travail est libre. Cette assertion est vraie dès lors que l'on signifie par là que lorsque l'employeur prend l'initiative de la rupture, il n'est pas tenu de respecter les règles du licenciement. Il est, en revanche, erroné d'en déduire que cette rupture peut être discrétionnaire. Tout d'abord, le droit de rompre le contrat de travail pendant la période d'essai peut dégénérer en abus. Ensuite, et ainsi que vient le préciser la Cour de cassation dans un important arrêt en date du 16 février 2005, les dispositions de l'article L. 122-45 du Code du travail (N° Lexbase : L5583ACR) sont applicables à la période d'essai. Il faut donc comprendre que la rupture de l'essai ne saurait être fondée sur un motif discriminatoire et, qu'à défaut, celle-ci doit être déclarée nulle.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, La rupture du contrat de travail pendant la période d'essai ne peut être fondée sur un motif discriminatoire !, Lexbase Hebdo n° 157 du 3 mars 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4803ABI).
Destiné à une publication tous azimuts (P+B+R+I), l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 11 mai 2005 présente une importance considérable, tant d'un point de vue pratique que théorique. En affirmant, en effet, que "la rupture d'un contrat de travail se situe à la date où l'employeur a manifesté sa volonté d'y mettre fin, c'est-à-dire au jour de l'envoi de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception notifiant la rupture", la Chambre sociale met un terme à sa jurisprudence antérieure, fixant à la présentation de cette même lettre la date de la rupture. Rendue à propos d'une rupture pendant la période d'essai à l'initiative de l'employeur, cette solution paraît devoir être limitée à cette hypothèse, à l'exclusion du licenciement.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Revirement quant à la date de la rupture du contrat de travail en période d'essai, Lexbase Hebdo n° 169 du 26 mai 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4538AIW).
III - La rupture du CDD
L'article L. 122-3-8 du Code du travail (N° Lexbase : L5457AC4) prévoit que le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu qu'en cas d'accord des parties, de faute grave, de force majeure ou d'embauche en contrat à durée indéterminée. La jurisprudence a longtemps considéré que la "démission" du salarié ne pouvait rompre le contrat de travail à durée déterminée puisqu'elle ne fait pas partie des modes de rupture du CDD limitativement prévus par le législateur. La manifestation de volonté démissionnaire du salarié étant privée d'effet, l'employeur qui refusait de poursuivre l'exécution du contrat était condamné à payer des indemnités pour rupture abusive. Dans l'arrêt commenté du 8 février 2005, la Cour de cassation ne considère plus la démission comme nulle mais seulement comme illicite, ce qui modifie radicalement les conséquences indemnitaires attachées à la rupture du contrat.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, Les conséquences de la démission du salarié en CDD, Lexbase Hebdo n° 156 du 24 février 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4755ABQ).
Aux termes de l'article L. 122-1-2 du Code du travail (N° Lexbase : L9608GQW), le CDD peut, notamment en cas de remplacement d'un salarié absent, ne pas comporter de terme précis. Le contrat arrive alors à échéance à "la fin de l'absence de la personne remplacée" ou à "la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu". L'affaire commentée est l'occasion, pour la Cour de cassation, d'apporter des précisions sur les évènements susceptibles de provoquer l'arrivée du terme du contrat. Dans deux arrêts (l'affaire a donné lieu à deux pourvois en cassation sur deux fondements différents) du 26 mars 2002 et du 20 avril 2005, la Cour rappelle, d'une part, que le changement du motif de l'absence d'un salarié remplacé ne provoque pas l'arrivée du terme et, d'autre part, que le CDD prend fin de plein droit lorsque le salarié remplacé cesse définitivement son activité.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, La cessation du CDD à terme imprécis, Lexbase Hebdo n° 166 du 5 mai 2005 - édition sociale N° Lexbase : N3926AIA).
IV - La rupture des contrats aidés
On savait que la rupture anticipée du contrat d'apprentissage devait suivre des règles strictes de fond et de forme. La Haute juridiction précise aujourd'hui que l'accord exprès mentionné dans la loi ne saurait être assimilé à une démission suivie de son acceptation dans un écrit distinct. Un second arrêt indique, en outre, qu'un employeur ne peut obtenir réparation pour résiliation anticipée du contrat, à la suite de la démission de l'apprenti, lorsqu'il s'est lui-même rendu coupable de manquements à ses obligations. Les règles de rupture anticipée du contrat d'apprentissage, dérogatoire au droit commun font donc l'objet de deux précisions importantes.
(Sur ce sujet, lire Chrystelle Alour, La rupture anticipée du contrat d'apprentissage, Lexbase Hebdo n° 155 du 17 février 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4670ABL)
Le contrat emploi consolidé à durée déterminée ne peut être conclu, en vertu d'une convention avec l'Etat, que pour une durée initiale de 12 mois renouvelable chaque année par avenant dans la limite d'une durée totale de 60 mois. Sa rupture anticipée ne peut donner lieu à indemnisation que jusqu'au terme de la période de 12 mois au cours de laquelle il a été conclu ou renouvelé.
(Sur ce sujet, lire Christophe Willmann, Calcul des indemnités pour rupture anticipée du contrat emploi consolidé, Lexbase Hebdo n° 186 du 20 octobre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N9798AIQ).
V - La prise d'acte de la rupture du contrat de travail
Deux arrêts rendus par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 19 janvier 2005, et promis à la plus large diffusion (P+B+R+I), apportent des précisions importantes sur les conséquences de cette prise d'acte. Il s'agit, en effet, d'un véritable mode de rupture du contrat de travail qui fixe définitivement les droits et obligations des parties, de telle sorte que l'employeur ne peut plus, par la suite, prononcer ou être considéré comme ayant prononcé de licenciement.
(Sur ce sujet, lire Christophe Radé, Nouvelles précisions concernant la prise d 'acte par le salarié de la rupture du contrat, Lexbase Hebdo n° 153 du 3 février 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4456ABN).
La prise d'acte par le salarié de la rupture du contrat de travail rompt ce dernier et l'initiative prise ensuite par l'employeur de le licencier est non avenue. Le délai imparti conventionnellement à l'employeur pour renoncer à la clause de non-concurrence court au jour où il reçoit la lettre de prise d'acte de la rupture du contrat de travail adressée par le salarié.
(Sur ce sujet, lire Christophe Radé, Prise d'acte par le salarié de la rupture du contrat de travail et renonciation par l'employeur à la clause de non-concurrence, Lexbase Hebdo n° 172 du 16 juin 2005 - édition sociale N° Lexbase : N5494AIC)
L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige. Le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.
(Sur ce sujet, lire Christophe Radé, La lettre par laquelle le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur ne fixe pas les limites du litige prud'homal, Lexbase Hebdo n° 175 du 7 juillet 2005 - édition sociale N° Lexbase : N6328AI9).
Le juge, saisi par un salarié d'une demande tendant à l'attribution de dommages-intérêts en raison de la prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de son employeur, doit déterminer si les griefs allégués dans la lettre de rupture de ce dernier étaient fondés ou non, peu important la convocation du salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement.
(Sur cet arrêt, lire Christophe Radé, La prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié prime sur la convocation à l'entretien préalable en vue de son licenciement, Lexbase Hebdo n° 192 du 1er décembre 2005 - édition sociale (N° Lexbase : N1398AKY).
L'employeur est tenu d'une obligation de sécurité de résultat vis-à-vis de ses salariés en ce qui concerne leur protection contre le tabagisme dans l'entreprise. Dès lors qu'il n'a pas satisfait aux exigences imposées par les textes en la matière, les griefs invoqués par le salarié à l'appui de sa prise d'acte justifient la rupture du contrat de travail, de sorte qu'elle produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
(Sur cet arrêt, lire Nicolas Mingant, La prise d'acte de la rupture pour non-respect par l'employeur de la législation anti-tabac, Lexbase Hebdo n° 176 du 14 juillet 2005 - édition sociale N° Lexbase : N6574AIC).
VI - La démission
Ne manifeste pas sa volonté claire et non équivoque de démissionner, le salarié qui s'engage au service d'un nouvel employeur entre le jugement de liquidation judiciaire de sa précédente entreprise et le prononcé de son licenciement économique. La Cour de cassation écarte la qualification de démission alors qu'elle semblait plus que plausible, confirmant ainsi une tendance à réduire autant que possible le domaine de ce mode de rupture qui apparaît, désormais, comme une espèce menacée.
(Sur ce sujet, lire Christophe Radé, La démission, une espèce menacée, Lexbase Hebdo n° 164 du 21 avril 2005 - édition sociale N° Lexbase : N3313AIK).
VII - La résiliation judiciaire
Lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée ; c'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur.
(Sur ce sujet, lire Christophe Radé, Résiliation judiciaire du contrat de travail ou licenciement ?, Lexbase Hebdo n° 157 du 3 mars 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4812ABT).
L'espèce du 12 avril 2005 permet à la Cour de cassation de se prononcer sur une situation tout à fait particulière. Une résiliation judiciaire avait été prononcée et la décision avait été frappée d'appel. L'employeur avait alors procédé à une mise à la retraite du salarié au cours de l'instance d'appel. La Cour de cassation affirme que la mise à la retraite a pour effet de rendre sans objet la demande de résiliation judiciaire. Cette décision nous conduit à nous interroger sur la cohérence de la jurisprudence relative à la rupture survenant en cours d'instance d'appel.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, Résiliation judiciaire et mise à la retraite en cours d'instance d'appel, Lexbase Hebdo n° 165 du 28 avril 2005 - édition sociale N° Lexbase : N3694AIN).
Alors que l'on croyait la jurisprudence stabilisée sur ce point, la Chambre sociale de la Cour de cassation rend le 5 juillet 2005 un nouvel arrêt concernant la résiliation judiciaire du contrat de travail demandée par l'employeur aux torts du salarié. On savait, depuis plusieurs années déjà, que cette demande est normalement irrecevable. Cette fois-ci, la Haute juridiction va encore plus loin, puisqu'elle affirme que la saisine du conseil de prud'hommes manifeste la volonté de rompre le contrat de travail, c'est-à-dire qu'elle constitue un licenciement de fait nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
(Sur ce sujet, lire Christophe Radé, L'employeur qui demande la résiliation judiciaire du contrat de travail manifeste sa volonté de rompre le contrat, Lexbase Hebdo n ° 176 du 14 juillet 2005 - édition sociale N° Lexbase : N6514AI4).
L'employeur, qui dispose du pouvoir de licencier le salarié, ne peut, fût-ce reconventionnellement, demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, L'employeur ne peut, fût-ce reconventionnellement, demander la résiliation judiciaire d'un contrat de travail, Lexbase Hebdo n° 192 du 17 novembre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N0737AKI).
VIII - La retraite
Lorsque le droit à une pension de vieillesse est ouvert à partir de 60 ans dans le régime légal de base d'un premier Etat membre (la France) à un travailleur d'un âge inférieur à 65 ans, ayant accompli des périodes d'activité dans cet Etat et dans un autre Etat membre (les Pays-Bas) où le droit à pension ne s'ouvre pas avant l'âge de 65 ans, les périodes accomplies dans ce dernier Etat peuvent être prises en compte pour déterminer tant les conditions d'ouverture du droit aux prestations susceptibles de lui être versées que le taux de la pension susceptible d'être immédiatement liquidée par l'institution du premier Etat. Lorsqu'un salarié est mis à la retraite dans sa 63ème année, totalisant 187 trimestres d'assurance, régimes d'assurance vieillesse français et néerlandais confondus, à la date de la cessation de son contrat de travail, cette mise à la retraite ne constitue pas un licenciement.
(Sur ce sujet, lire Christophe Willmann, La mise à la retraite du travailleur migrant à l'épreuve du droit social européen, Lexbase Hebdo n° 170 du 2 juin 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4832AIS).
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par Julien Prigent, Avocat à la cour d'appel de Paris
Le 07 Octobre 2010
Le preneur peut valablement opposer à son bailleur, pour faire obstacle à l'exercice par ce dernier de son droit de repentir, l'existence d'un bail commercial conclu avec un tiers même si ce contrat n'a pas date certaine au sens de l'article 1328 du Code civil (N° Lexbase : L1438ABU). En effet, il y a lieu d'appliquer la règle de l'article L. 110-3 du Code de commerce (N° Lexbase : L5547AIB), aux termes de laquelle les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à l'égard des commerçants (voir, déjà, pour une mise à l'écart des dispositions de l'article 1328 du Code civil à propos d'un acte de vente de fonds de commerce, Cass. com., 17 mars 1992, n° 90-10.694, Société Galland frères c/ M. Laurent, ès qualités de syndic de la liquidation des biens N° Lexbase : A4077ABM).
L'occupation illicite du bien loué par un tiers qui en empêche la délivrance au preneur ne constitue une cause étrangère qui ne peut être imputée au bailleur que si elle revêt les caractères de la force majeure.
Cette décision est importante car elle confère à l'obligation de délivrance du bailleur la nature d'obligation de résultat : il ne suffira pas au bailleur de prouver, en cas de manquement à cette obligation, qu'il n'a pas commis de faute pour s'exonérer de sa responsabilité contractuelle. Il devra, en effet, prouver l'existence d'un cas de force majeure. Cette règle est favorable au preneur. Il faut rappeler, également sur le terrain de la preuve, que la Cour de cassation avait déjà affirmé qu'il appartenait au bailleur de prouver qu'il avait exécuté son obligation de délivrance (Cass. civ. 3, 1er octobre 1997, n° 95-20.869, Mme Françoise Parriaux c/ Société Eppe Lamblin Barinet et compagnie N° Lexbase : A8757AGG).(Sur ce sujet, lire D. Bakouche, L'occupation illicite du bien loué par un tiers empêchant sa délivrance au preneur constitue-t -elle pour le bailleur une cause étrangère ?, Lexbase Hebdo n° 185 du 13 octobre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N9413AIH)
Le bailleur ne peut, par le biais d'une clause relative à l'exécution de travaux, s'affranchir de son obligation de délivrer les lieux loués.
Aux termes de l'article 1719 du Code civil (N° Lexbase : L1841ABS), le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée. L'arrêt du 1er juin 2005 permet de constater que l'obligation de délivrance n'épuise pas tous ses effets lors de l'entrée en possession des locaux donnés à bail. Elle trace également les limites de la possibilité reconnue aux parties d'aménager conventionnellement cette obligation de délivrance. En effet, dans cette espèce, le bail stipulait que le "preneur devrait souffrir sans aucune indemnité quelles qu'en soient l'importance et la durée tous les travaux qui pourraient devenir utiles ou nécessaires dans les lieux loués ou dans l'immeuble dont ils dépendent". Or, en cours de bail, le preneur avait été empêché d'exploiter les lieux loués en raison de prescriptions administratives à la suite de travaux dans l'immeuble. Toutefois, il est vrai que la clause portait sur les travaux et que son application, en cas d'impossibilité totale d'exploiter, était délicate, notamment au regard de l'article 1162 du Code civil (N° Lexbase : L1264ABG).
Le bailleur est tenu, aux termes de l'article 1719, 2°, du Code civil, d'entretenir la chose objet du bail en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée. En cas de manquement à cette obligation, il pourra être condamné à effectuer les travaux qui s'imposent ou être condamné à leur paiement. Il pourra également être tenu de réparer, le cas échéant, le préjudice commercial subi par le locataire du fait de ce manquement. Toutefois, la faute commise par le preneur dans la survenance de ce préjudice pourra venir diminuer le montant de la réparation qui pourrait lui être accordé. Dans cet arrêt du 9 février 2005, la Cour de cassation a précisé que le preneur qui a attendu huit ans avant d'avertir le bailleur de l'affaissement des planchers commet une faute ayant contribué à la réalisation des désordres. Il doit en conséquence prendre en charge une partie du coût des travaux de remise en état.
Le défaut d'entretien imputable au bailleur, s'il est à l'origine d'un incendie, est assimilable à un vice de construction, et n'a pas à revêtir les caractères de la force majeure pour exonérer le preneur de sa responsabilité.
Aux termes de l'article 1733 du Code civil (N° Lexbase : L1855ABC), le preneur répond de l'incendie, à moins qu'il ne prouve que celui-ci est arrivé par cas fortuit ou force majeure, ou par vice de construction. La Cour de cassation a, dans un arrêt du 15 juin 2005, précisé que le défaut d'entretien imputable au bailleur devait être assimilé à un vice de construction et, en conséquence, n'avait pas à revêtir les caractères de la force majeure pour permettre au locataire de renverser la présomption de responsabilité en cas d'incendie édictée par l'article 1733 du Code civil.
Au sens de l'article 606 du Code civil (N° Lexbase : L3193ABU), les réparations d'entretien sont celles qui sont utiles au maintien permanent en bon état de l'immeuble tandis que les grosses réparations intéressent l'immeuble dans sa structure et sa solidité générale.
Tel est l'enseignement d'un arrêt de la Cour de cassation du 13 juillet 2005. En l'espèce, le propriétaire d'un local a conclu un bail commercial stipulant que le preneur prendrait à sa charge toutes les réparations à faire pendant la durée du bail, à la seule exception des grosses réparations visées par l'article 606 du Code civil (|LXB=L3193ABU]) selon lequel "les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières [...], des digues et des murs de soutènement et de clôture". Cet arrêt du 13 juillet 2005 remet en cause la jurisprudence de la Cour de cassation sur le caractère limitatif des travaux énumérés à cet article (Cass. civ. 3, 27 novembre 2002, n° 01-12.816, FS-P+B N° Lexbase : A1263AK4). En reprenant, en effet, la motivation de la cour d'appel, elle consacre une définition large des gros travaux. Elle y inclut, notamment, des éléments qui ne sont pas expressément visés par l'article 606 du Code civil et, particulièrement, la réparation d'une canalisation détruite par le gel qui avait, justement, été exclue de la notion de gros travaux par la Cour de cassation, le 27 novembre 2002.
VI - Le renouvellement du bail commercial
En cas de demande de renouvellement formée par le preneur au cours de la reconduction tacite, le bail renouvelé prend effet à compter du terme d'usage qui suit cette demande, le terme d'usage étant celui qui résulte des usages locaux.
L'article 145-12 du Code de commerce (N° Lexbase : L5740AIG) prévoit, en cas de renouvellement, que "le nouveau bail prend effet à compter de l'expiration du bail précédent, ou, le cas échéant, de sa reconduction, cette dernière date étant soit celle pour laquelle le congé a été donné, soit, si une demande de renouvellement a été faite, le terme d'usage qui suit cette demande". L'arrêt rapporté précise que le terme d'usage visé par ce texte est celui qui résulte des usages locaux, bien que la référence à ces usages "locaux" concerne le congé délivré par le bailleur (C. com., art. L. 145-9 N° Lexbase : L5737AIC).
Le refus du droit au renouvellement pour défaut d'immatriculation de l'un des époux séparés en bien et copropriétaire du fonds de commerce n'est pas contraire à la Convention européenne des Droits de l'Homme.
La règle selon laquelle, en présence de copreneurs, chacun d'eux doit être immatriculé au registre du commerce et des sociétés pour bénéficier du droit au renouvellement n'est pas nouvelle (voir, par exemple, Cass. civ. 3, 11 janvier 1989, n° 87-12.879, Boileau-Beyrie c/ Mazaud et autres N° Lexbase : A8903AAY et également Cass. civ. 3, 18 mai 2005, n° 04-11.985, M. Philippe Degrugillier c/ Société civile immobilière (SCI) La Rotonde de Béthune, FS-P+B N° Lexbase : A3790DI9) et il n'y est dérogé que dans l'hypothèse où les copreneurs sont époux communs en biens ou héritiers indivis (Cass. civ. 3, 5 mars 1997, n° 95-12.472, M. Akli Amrioui et autres c/ M. David Skornik N° Lexbase : A0026AUI). L'arrêt de la Cour de cassation du 18 mai 2005 rappelle cette règle tout en jugeant, aux termes d'un contrôle de conventionalité, qu'elle n'est pas contraire aux dispositions de l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, dans la mesure où les dispositions du Code de commerce relatives au renouvellement du bail commercial réalisent un juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général et les impératifs de sauvegarde des droits fondamentaux de la personne. Ce faisant, la Cour de cassation reconnaît implicitement l'existence d'une atteinte au droit de propriété des preneurs qui porte sur le fonds de commerce mais, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'Homme, elle opère un contrôle de finalité de cette atteinte et de sa proportionnalité pour conclure qu'elle est justifiée.
En affirmant que l'immatriculation en qualité de propriétaire non exploitant du fonds de commerce de l'un des copreneurs suffit pour remplir l'exigence d'immatriculation, la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 15 juin 2005, met un terme à une jurisprudence émanant de certains juges du fond qui avaient pu juger le contraire.
La condition d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés doit être remplie à la date de la demande de renouvellement et à la date d'expiration du bail, mais non pendant le cours de la procédure en fixation du loyer du bail renouvelé.
Les dispositions du statut des baux commerciaux ne précisent pas la date à laquelle la condition d'immatriculation du locataire doit être vérifiée pour lui permettre de bénéficier d'un droit au renouvellement. La Cour de cassation, dans un premier temps très exigeante sur la permanence de cette immatriculation, a ensuite assoupli sa position. Elle avait jugé en effet que "les conditions d'application du statut, et notamment l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés, devaient être remplies à la date de délivrance du congé ou de la demande de renouvellement et pendant toute la procédure de renouvellement ou de fixation de l'indemnité d'éviction sauf si, renonçant au droit au maintien dans les lieux prévu par l'article 20 du décret du 30 septembre 1953 (N° Lexbase : L3432AHL), le locataire décide de restituer les lieux dans les conditions qui l'affranchissent de toutes obligations contractuelles ou statutaires" (Cass. civ. 3, 27 mars 2002, n° 00-21.685, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A3892AYS). Elle a opéré, ensuite, un revirement jurisprudentiel dans un arrêt du 29 septembre 2004 (Cass. civ. 3, 29 septembre 2004, n° 03-13.997, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A4861DDE), en affirmant que "le bénéfice du statut des baux commerciaux ne pouvait être dénié au locataire dont la radiation était intervenue postérieurement à la date d'expiration du bail". L'arrêt du 18 mai 2005 confirme ce revirement en l'étendant à l'hypothèse où le bail était expiré et une instance portant sur la fixation du loyer renouvelé était en cours.
En cas de soumission volontaire au statut des baux commerciaux, l'immatriculation du preneur au registre du commerce et des sociétés n'est pas une condition impérative de son droit au renouvellement (voir, en ce sens, Cass. civ. 3, 19 avril 2000, n° 98-13.396, M. Harold Fitch c/ M. Pierre Chieze N° Lexbase : A9328ATN).
VII - La sous-location
La durée du bail consenti par un emphytéote ne pouvant excéder celle du bail emphytéotique, le sous-locataire ne peut prétendre à l'expiration de celui-ci à aucun droit au renouvellement et, partant, au paiement d'une indemnité d'éviction.
La solution découle de la combinaison, d'une part, de l'article L. 145-3 du Code de commerce (N° Lexbase : L5731AI4) qui prévoit que les dispositions du statut des baux commerciaux "ne sont pas applicables aux baux emphytéotiques, sauf en ce qui concerne la révision du loyer. Toutefois, elles s'appliquent, dans les cas prévus aux articles L. 145-1 (N° Lexbase : L5729AIZ) et L. 145-2 (N° Lexbase : L5730AI3), aux baux passés par les emphytéotes, sous réserve que la durée du renouvellement consenti à leurs sous-locataires n'ait pas pour effet de prolonger l'occupation des lieux au-delà de la date d'expiration du bail emphytéotique" et, d'autre part, de l'article L. 145-32 du même code (N° Lexbase : L5760AI8) qui dispose que "le sous-locataire peut demander le renouvellement de son bail au locataire principal dans la mesure des droits que ce dernier tient lui-même du propriétaire".
VIII - Cession du bail commercial
La loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises a instauré un droit de préemption en faveur des communes en cas de cession de fonds de commerce ou artisanal ou de bail commercial (C. urb., art. L. 214-1 N° Lexbase : L5587HBK). Ces nouvelles dispositions, visant à favoriser le commerce de proximité, ne seront pas applicables tant qu'un décret pris en Conseil d'Etat n'en aura pas précisé les conditions d'application (C. urb., art. L. 214-3 N° Lexbase : L5589HBM)..
IX - Procédure
La notification du mémoire préalable, si elle n'est pas faite sous forme de lettre recommandée avec demande d'avis de réception mais par lettre simple, n'a pas pour effet d'interrompre la prescription.
L'article 29-1, dernier alinéa, du décret n° 53-960 du 30 septembre1953 (N° Lexbase : L3452AHC), prévoit que "les mémoires sont notifiés par chacune des parties à l'autre, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception". Par ailleurs, l'article 33 du même décret (N° Lexbase : L3462AHP) prévoit que la prescription des actions exercées en vertu de ce décret est de deux ans et que les mémoires visés à l'article 29 (N° Lexbase : L3451AHB) sont interruptifs de prescription. Dans l'affaire rapportée, le bailleur avait délivré congé au preneur, avec offre de renouvellement. Les parties ne s'étant pas accordées sur le montant du nouveau loyer, le bailleur avait saisi le juge des loyers commerciaux. La cour d'appel avait, à raison, déclaré son action prescrite. En effet, l'action en fixation du loyer du bail renouvelé est soumise aux règles de prescription prévues à l'article 33 du décret du 30 septembre 1953. Or, en l'espèce, le bailleur avait fait parvenir au conseil du preneur un mémoire en réponse par lettre simple, et non par lettre recommandée. Par conséquent, cet acte n'avait pu avoir d'effet interruptif de la prescription biennale (voir, déjà en ce sens, Cass. civ. 3, 2 octobre 1996, n° 94-18.470, Office public d'aménagement et de construction de la ville de Paris c/ Epoux Mouzon N° Lexbase : A0003AC4).
L'action intentée par le locataire en nullité du congé délivré pour reconstruire l'immeuble loué est soumise au délai de prescription biennale de l'article L. 145 -60 du Code de commerce (N° Lexbase : L8519AID).
Prescription de l'action en paiement des loyers et charges indus : article 113 de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale (N° Lexbase : L6384G49).
L'article 2277 du Code civil (N° Lexbase : L5385G7L), dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, énonce expressément que "se prescrivent également par cinq ans les actions en répétition des loyers, des fermages et des charges locatives".
Il met ainsi fin aux divergences et évolutions jurisprudentielles qui, jusqu'à ce jour, avaient porté sur la question de savoir si les actions en paiement de l'indu, de loyers et charges, étaient soumises à la prescription quinquennale, ou à la prescription trentenaire de droit commun.
La deuxième et la troisième chambre de la Cour de cassation, ainsi que sa Chambre commerciale, s'étaient, en effet, prononcées en faveur de l'exclusion de la prescription quinquennale, au profit d'une prescription trentenaire (voir, par exemple, à propos également d'une action en répétition de charges indues, Cass. civ. 3, 13 octobre 1999, n° 98-10.878, Société Art-Vie c/ Mme Boulan N° Lexbase : A9306ATT). La première chambre et la Chambre sociale retenaient, au contraire, l'application de la prescription quinquennale (voir, par exemple, Cass. soc., 26 octobre 2000, n° 98-21.450, Caisse de mutualité sociale agricole d'Ile-de-France c/ M. Lelong N° Lexbase : A7703AHR).
En affirmant, ultérieurement, que si l'action en paiement des charges locatives, accessoires aux loyers, se prescrit par cinq années, l'action en répétition des sommes indûment versées au titre de ces charges n'est pas soumise à la prescription quinquennale, la Cour de cassation, par un arrêt de chambre mixte (Ch. mixte, 12 avril 2002, n° 00-18.529, Société civile immobilière (SCI) du 32, rue de Seine, publié N° Lexbase : A0398AZR) avait mis fin à cette divergence d'interprétation de l'article 2277 du Code civil entre ses différentes chambres.
Cependant, le législateur, en modifiant l'article 2277 du Code civil, a mis un terme à cette jurisprudence, en posant que les actions en répétition des loyers, des fermages et des charges locatives se prescrivent par cinq ans.
Si le créancier peut poursuivre pendant trente ans l'exécution d'un jugement condamnant au paiement d'une somme payable à termes périodiques, il ne peut, en vertu de l'article 2277 du Code civil, applicable en raison de la nature de la créance, obtenir le recouvrement des arriérés échus plus de cinq ans avant la date de sa demande.
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par Aurélie Serrano, SGR - Droit social
Le 07 Octobre 2010
1 - La qualité de salarié protégé et l'étendue de la protection
Le salarié, représentant des salariés à la procédure de liquidation judiciaire, n'est pas un salarié protégé comme les autres. Il n'est, en effet, protégé que par son mandat et pour la durée de son mandat. C'est le caractère limité de sa protection qu'est venue confirmer la Haute juridiction, en refusant le bénéfice de la protection contre le licenciement au salarié simplement candidat à l'élection.
(Sur ce sujet, lire Stéphanie Martin-Cuénot, Le représentant des salariés à la procédure de liquidation judiciaire ou le "vilain petit canard" des institutions représentatives du personnel, Lexbase Hebdo n° 159 du 17 mars 2005 - édition sociale N° Lexbase : N2037AIB)
Les membres salariés du CHSCT ne siègent pas tous dans l'institution en qualité de représentants du personnel. La loi prévoit ainsi que certains salariés peuvent être membres du CHSCT, avec voie consultative, au titre de leurs compétences techniques particulières. L'article L. 236-11 du Code du travail (N° Lexbase : L6025AC7) réserve, cependant, le bénéfice de la protection spéciale contre le licenciement aux salariés siégeant au CHSCT "en qualité de représentants du personnel". Dans cet arrêt du 18 mai 2005, la Cour de cassation rappelle le choix du législateur consistant à réserver le bénéfice de la procédure spéciale de licenciement à la délégation du personnel, avant de rappeler la solution jurisprudentielle consistant à ne pas reconnaître automatiquement au secrétaire du CHSCT la qualité de membre de la délégation du personnel.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, Le secrétaire du CHSCT non membre de la délégation du personnel n'est pas un salarié protégé, Lexbase Hebdo n° 170 du 2 juin 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4924AI9)
Les décisions rendues par la Chambre sociale de la Cour de cassation en matière de grève sont suffisamment rares pour être signalées et examinées avec la plus grande attention. Pour la première fois, nous semble-t-il, un arrêt publié en date du 2 février 2005 vient apporter deux précisions importantes concernant le régime protecteur mis en place par l'article L. 521-1 du Code du travail (N° Lexbase : L5336ACM). La Haute juridiction précise, en effet, qu'un salarié peut être licencié, dans les conditions du droit commun, postérieurement à une grève dès lors que le motif justifiant le licenciement est antérieur. mais, lorsque le licenciement est annulé, le salarié doit être réintégré, sauf impossibilité matérielle.
(Sur ce sujet, lire Christophe Radé, Seule une impossibilité matérielle peut s'opposer à la réintégration d'un gréviste illégalement licencié, Lexbase Hebdo n° 155 du 17 février 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4618ABN)
La protection accordée par le législateur à tout salarié protégé contre le licenciement n'interdit pas à l'employeur de licencier, dans la mesure où ce licenciement est fondé sur des éléments extérieurs à l'exercice normal de son mandat et qu'il est causé. Dans l'espèce commentée, le salarié croyait que sa qualité de conseiller prud'hommes le rendait intouchable et qu'il bénéficiait, à ce titre, d'une immunité lui permettant de se livrer à des "pratiques douteuses" envers ses collègues féminines. Annulant les décisions concordantes de l'inspecteur du travail et du ministre ayant autorisé le licenciement, les juridictions administratives lui avaient, au premier et second degré, donné gain de cause, jugeant que son comportement n'était pas fautif et qu'il s'agissait uniquement d'agissements regrettables. Cette solution ne fut pas tout à fait au goût de la Haute juridiction administrative, qui a trouvé dans cette espèce l'occasion de rappeler, une nouvelle fois, que dans la mesure où la sanction est indépendante de l'exercice normal des fonctions de représentation et qu'elle repose sur une cause réelle et sérieuse, donc sur une faute de nature à justifier un licenciement, l'autorisation de l'inspecteur du travail et le licenciement qu'elle vient autoriser deviennent incontestables.
(Sur ce sujet, lire Stéphanie Martin-Cuénot, "Protection" ne signifie pas "impunité" !, Lexbase Hebdo n° 168 du 19 mai 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4281AIE)
2 - La rupture du contrat des salariés protégés
Lorsqu'un employeur souhaite congédier un salarié représentant du personnel, il doit obtenir préalablement l'autorisation de l'inspecteur du travail. Le licenciement prononcé en méconnaissance de cette règle est nul et le salarié peut, en principe, obtenir sa réintégration. mais, on sait que la réintégration n'est pas obligatoire (Cass. soc., 10 décembre 1997, n° 94-45.532, M. Coracin c/ Société de gérance du Moulin de Sauveterre, publié N° Lexbase : A1686ACG) et que le salarié peut préférer demander l'indemnisation du préjudice résultant de la rupture de son contrat de travail. Selon la jurisprudence traditionnelle, le salarié cumule alors une indemnité résultant de la méconnaissance de son statut protecteur avec l'indemnité résultant du caractère illicite de son licenciement. Dans l'espèce commentée du 16 mars 2005, la Cour de cassation rappelle ce principe du cumul des indemnités. mais, cette décision est également l'occasion pour la Cour de cassation de préciser les règles spécifiques applicables en matière d'indemnisation du salarié membre du comité d'entreprise européen.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, L'indemnisation du membre d'un comité d'entreprise européen licencié sans autorisation administrative, Lexbase Hebdo n° 161 du 31 mars 2005 - édition sociale N° Lexbase : N2514AIX).
La transaction conclue par un salarié protégé antérieurement à la notification de son licenciement est atteinte d'une nullité absolue d'ordre public. Cette solution, aujourd'hui solidement ancrée dans notre droit positif, doit cependant être strictement entendue à deux points de vue. Tout d'abord, et cela relève de l'évidence, il convient de constater que le salarié bénéficie bien du statut protecteur contre le licenciement. Ensuite, la notification du licenciement n'est pas une simple exigence formelle mais doit être conforme aux prescriptions légales, ce qui implique, d'une part, qu'elle soit faite par lettre recommandée avec accusé de réception et, d'autre part, qu'elle ne peut avoir lieu qu'après obtention de l'autorisation administrative.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Licenciement d'un salarié protégé et conclusion d'une transaction : de l'importance de la chronologie des faits et du respect de la procédure spéciale de licenciement, Lexbase Hebdo n° 160 du 24 mars 2005 - édition sociale N° Lexbase : N2208AIM).
Les représentants du personnel bénéficient d'une protection exceptionnelle et exorbitante du droit commun qui interdit à l'employeur de poursuivre la rupture du contrat de travail par d'autres voies que le licenciement ou les modes de rupture dûment autorisés par le Code du travail. mais cette interdiction vaut-elle également pour le représentant lui-même ? C'est à cette question que la Cour de cassation vient répondre, dans un arrêt en date du 16 mars 2005, pour reconnaître ce droit au salarié. La solution n'était pourtant pas évidente, même si elle s'inscrit dans la droite ligne des décisions rendues ces dernières années.
(Sur ce sujet, lire Christophe Radé, Le représentant du personnel peut demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail, Lexbase Hebdo n° 160 du 24 mars 2005 - édition sociale N° Lexbase : N2298AIX).
En l'absence d'autorisation préalable, le licenciement du salarié protégé est frappé de nullité et l'employeur doit, en principe, procéder à sa réintégration. mais, on sait que le salarié n'est pas obligé de solliciter sa réintégration et qu'il peut préférer demander une indemnisation. Il peut dans ce cas prétendre, non seulement, à l'indemnité forfaitaire due en réparation de la violation de son statut protecteur, mais également, aux indemnités "de droit commun" dues en raison de l'illicéité de son licenciement. Dans l'espèce commentée du 29 mars 2005, la Cour de cassation rappelle le principe du cumul des indemnités versées au salarié protégé licencié sans autorisation préalable. Elle précise, également, que le salarié a automatiquement droit à une indemnisation au titre de l'illicéité de la rupture, sans qu'il y ait lieu d'apprécier l'existence d'une cause réelle et sérieuse.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, L'automaticité de la double indemnisation versée au salarié protégé licencié sans autorisation administrative, Lexbase Hebdo n° 163 du 14 avril 2005 - édition sociale N° Lexbase : N3106AIU).
En application du principe de la séparation des pouvoirs, le juge judiciaire ne peut vérifier la régularité de l'autorisation délivrée par l'autorité administrative et ne peut apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement. Il convient, cependant, de préciser que l'obligation de solliciter l'autorisation de l'Administration ne dispense pas l'employeur de respecter la procédure "normale" de licenciement et, notamment, de notifier le licenciement par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Dans l'arrêt commenté du 5 avril 2005, la Cour de cassation rappelle le traditionnel principe selon lequel l'obtention d'une autorisation administrative de licenciement ne dispense pas l'employeur de notifier et de motiver le licenciement. Elle précise, ensuite, le contenu de l'obligation de motivation lorsque le licenciement notifié a fait l'objet d'une autorisation de l'inspecteur du travail.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, La notification du licenciement autorisé par l'inspecteur du travail, Lexbase Hebdo n° 164 du 21 avril 2005 - édition sociale N° Lexbase : N3352AIY).
On sait que le licenciement des salariés protégés ne peut intervenir qu'après qu'une autorisation administrative ait été donnée à l'employeur par l'inspecteur du travail. Tenu de motiver sa décision, l'inspecteur doit préalablement, en application de l'article R. 436-4 du Code du travail (N° Lexbase : L0360ADP), procéder à une "enquête contradictoire". Les juridictions administratives, compétentes pour apprécier la validité des décisions, ont progressivement précisé les obligations pesant sur l'inspecteur lorsqu'il met en oeuvre l'enquête contradictoire. L'arrêt commenté du 20 avril 2005 affirme que le caractère contradictoire de l'enquête n'implique pas seulement que le salarié puisse être entendu individuellement par l'inspecteur. Ce caractère suppose, également, que le salarié dispose des informations suffisantes pour préparer efficacement sa défense.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, Licenciement des salariés protégés : les caractères de l'enquête contradictoire menée par l'inspecteur du travail, Lexbase Hebdo n° 168 du 19 mai 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4381AI4).
Lorsque l'autorisation de licenciement d'un salarié protégé est devenue définitive, ce dernier peut prétendre au versement d'une indemnité destinée à compenser le préjudice résultant de cette annulation (C. trav., art. L. 425-3, alinéa 4, pour les délégués du personnel N° Lexbase : L6390ACN ; C. trav., art. L. 436-3 pour les membres du comité d'entreprise N° Lexbase : L6454ACZ). La période d'indemnisation varie selon que le salarié sollicite ou non sa réintégration. Elle s'arrête au jour de la réintégration ou, lorsque le salarié ne souhaite pas retourner dans l'entreprise, se poursuit jusqu'à la fin du deuxième mois suivant la notification de la décision d'annulation. Comment en déterminer le montant ? Et, singulièrement, quels sont les éléments de salaire qu'il convient de prendre en compte ? Une prime de fin d'année peut-elle servir de base au calcul ? C'est à cette question qu'avait à répondre la Haute juridiction dans la décision commentée. Pour casser la décision des juges du second degré qui avaient refusé d'intégrer, dans l'assiette de l'indemnité, une prime de fin d'année, elle affirme que l'indemnité devait comprendre la fraction de la prime de fin d'année à laquelle le salarié pouvait prétendre au jour de la rupture de son contrat. Cette solution est totalement logique. Elle répond non seulement à la nature et l'objet de la prime, mais encore à l'effet rétroactif, traditionnellement attaché à la nullité.
(Sur ce sujet, lire Stéphanie Martin-Cuénot, Conséquence de l'annulation hiérarchique de l'autorisation administrative de licenciement sur l'indemnisation du salarié, Lexbase Hebdo n° 170 du 2 juin 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4918AIY).
La question de savoir si l'employeur doit solliciter l'autorisation de l'administration du travail lorsqu'il procède à la mise à la retraite d'un salarié protégé a été tranchée par un arrêt du Conseil d'état du 8 février 1995 (CE Contentieux, 8 février 1995, n° 154364, Crédit lyonnais N° Lexbase : A2775AN4). Le Conseil d'état, suivi par la Cour de cassation (Cass. soc., 5 mars 1996, n° 92-42.490, M. Bourgoin, ès qualités d'administrateur judiciaire de Mme Malibourne c/ M Jouanne, publié N° Lexbase : A3939AA7) pose la règle selon laquelle, au regard du caractère exceptionnel et exorbitant du droit commun de la protection accordée aux salariés investis de fonctions représentatives (voir Chbre mixte, 21 juin 1974, n° 71-91.225, Perrier, publié N° Lexbase : A6851AGT), il est impossible pour l'employeur d'obtenir la rupture du contrat sans mettre en oeuvre la procédure spécifique d'autorisation. Dans l'espèce commentée, le ministre du Travail s'était tout de même déclaré incompétent, au motif que la mise à la retraite était un mode autonome de rupture échappant à la procédure spéciale de licenciement, ce qui avait conduit l'employeur à mettre le salarié à la retraite. Si l'annulation de cette décision était inévitable, il convient de constater que le Code du travail ne prévoit pas de régime particulier pour le cas d'une annulation d'une décision d'incompétence. La Cour de cassation est donc contrainte de choisir un régime juridique pour fixer les principes d'indemnisation du salarié.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, Mise à la retraite du salarié protégé : les conséquences de l'annulation d'une décision d'incompétence prise par l'autorité administrative, Lexbase Hebdo n° 188 du 3 novembre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N0284AKQ).
Quelques semaines seulement après la mise en place du contrat "nouvelles embauches" et de la "super période d'essai" de 2 ans, ces deux arrêts rendus par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 26 octobre 2005, et promis à la plus large publicité, sonnent comme une forme de désaveu. La Haute juridiction décide ici, pour la première fois, que l'employeur ne peut rompre le contrat de travail d'un salarié protégé pendant la période d'essai, sans obtenir l'autorisation préalable de licenciement imposée par leur statut particulier. Ce revirement de jurisprudence est d'une importance pratique et théorique capitale. Il n'emporte toutefois pas notre adhésion sur un plan strictement juridique et la portée de la solution mérite également réflexion.
(Sur ce sujet, lire Christophe Radé, La rupture du contrat de travail du salarié protégé pendant la période d'essai soumise à l'autorisation préalable de l'inspection du travail, Lexbase Hebdo n° 188 du 3 novembre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N0314AKT).
La question du licenciement d'un salarié protégé sans autorisation administrative présente en réalité deux facettes, qu'il convient de distinguer soigneusement. En effet, outre l'hypothèse classique du licenciement prononcé sans autorisation ou malgré un refus d'autorisation, il en est une autre beaucoup plus complexe : l'annulation de l'autorisation délivrée par l'inspecteur du travail à la suite d'un recours hiérarchique ou contentieux. Le sort du licenciement après annulation suscite d'importantes difficultés qui tiennent principalement, sinon exclusivement, à l'indemnisation du salarié et, plus particulièrement, à son montant. De ce point de vue, l'arrêt rendu le 19 octobre 2005 par la Cour de cassation présente un intérêt certain en ce que, sans apporter de solutions novatrices, il offre en quelque sorte un "concentré" des problèmes suscités par cette indemnisation.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Indemnisation du salarié protégé licencié, en cas d'annulation postérieure de l'autorisation de l'inspecteur du travail, Lexbase Hebdo n° 188 du 3 novembre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N0215AK8).
II - Les élections professionnelles
Aux juges du premier degré qui avaient crû pouvoir induire de l'existence d'un constat de carence la nullité des élections et, par conséquent, obliger l'employeur à en organiser de nouvelles, la Cour de cassation vient rappeler que la nullité n'est encourue qu'en cas de manquement par l'employeur à ses obligations d'organiser des élections en vue de la désignation de représentants du personnel.
(Sur ce sujet, lire Stéphanie Martin-Cuénot, Le juge peut-il contraindre l'employeur à organiser de nouvelles élections ?, Lexbase Hebdo n° 191 du 24 novembre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N1055AKB)
En affirmant simplement que l'employeur est tenu de convoquer les "organisations syndicales intéressées" à la négociation du protocole d'accord préélectoral, le législateur n'a pas fait preuve d'une grande précision, suscitant par là-même nombre d'interrogations, spécialement quant aux destinataires de cette invitation. Si la Cour de cassation s'est efforcée de résoudre ces difficultés, certaines incertitudes subsistaient, que l'arrêt rendu le 2 mars 2005 vient, en grande partie, lever. La solution retenue s'avère d'une grande richesse car, si elle a d'abord trait aux destinataires de l'invitation à négocier le protocole d'accord préélectoral, elle permet aussi de préciser quels sont les acteurs de cette négociation. En résumant beaucoup on peut avancer, au vu de cet arrêt et de la jurisprudence antérieure, que si le délégué syndical bénéficie dans cette matière d'une situation privilégiée, il ne jouit d'aucun monopole.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Destinataires de l'invitation à négocier le protocole d'accord préélectoral : nouvelles précisions de la Cour de cassation, Lexbase Hebdo n° 159 du 17 mars 2005 - édition sociale N° Lexbase : N2002AIY).
III - Comité d'entreprise et comité d'établissement
Selon l'article L. 432-5 du Code du travail (N° Lexbase : L6411ACG), "lorsque le comité d'entreprise a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise, il peut demander à l'employeur de lui fournir des explications". La faculté pour le comité d'établissement d'exercer ce "droit d'alerte économique" était une question très disputée en jurisprudence. La Cour de cassation n'avait encore jamais eu l'occasion de se prononcer et les juges du fond retenaient des solutions divergentes. Par un arrêt en date du 1er mars 2002, la Cour de cassation met un terme à cette controverse jurisprudentielle. Elle rappelle d'abord que les comités d'établissement jouissent normalement des mêmes prérogatives que les comités d'entreprise, mais précise que l'exercice du droit d'alerte est soumis à des conditions que le comité d'établissement n'est pas en mesure de respecter.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, L'exercice du droit d'alerte économique refusé au comité d'établissement, Lexbase Hebdo n° 159 du 17 mars 2005 - édition sociale N° Lexbase : N2105AIS).
L'arrêt rendu par la Cour de cassation le 17 décembre 2004 marque-t-il une pause ou un repli ? C'est en ces termes que doit être considéré l'arrêt de la Cour de cassation, rendu en matière de procédure de consultation des représentants du personnel lors d'un licenciement économique donnant lieu à la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi. Jusqu'à présent, la Cour de cassation avait initié un large mouvement, conduisant à l'édification d'un droit prétorien du licenciement économique collectif, favorable aux salariés et exigeant pour les employeurs. mais, la loi du 3 janvier 2003 suspendant la loi de modernisation sociale (loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques N° Lexbase : L9374A8P), a amorcé un repli des dispositifs législatifs et réglementaires, fixant les contours d'un droit du licenciement collectif. La loi de cohésion sociale, adoptée le 20 décembre 2004, a accéléré la procédure, en abrogeant les dispositions de la loi de modernisation sociale (loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002, de modernisation sociale N° Lexbase : L1304AW9) que la loi du 3 janvier 2003 n'avait que suspendues. Le présent arrêt rendu par la Cour de cassation s'inscrit donc dans un contexte juridique particulier, et assez tendu.
(Sur ce sujet, lire Christophe Willmann, Plan de sauvegarde de l'emploi : pour une consultation de bonne foi du comité d'entreprise par l'employeur, Lexbase Hebdo n° 151 du 22 janvier 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4202ABA).
La loi ne prévoit la suppression d'un comité d'entreprise ou d'établissement que par "un accord entre le chef d'entreprise et l'ensemble des organisations syndicales représentatives" ou, à défaut d'accord, par le directeur départemental du travail et de l'emploi "en cas de réduction importante et durable du personnel qui ramène l'effectif au-dessous de 50 salariés" (C. trav., art. L. 431-3 N° Lexbase : L6393ACR). La carence de candidatures, avec rédaction par l'employeur d'un procès-verbal envoyé à l'inspecteur du travail ne provoque pas, légalement, la disparition du comité. Il faut convenir qu'il y a alors non pas suppression mais "mise en sommeil" du comité. Si la loi prévoit explicitement que, dans cette situation, les missions du comité sont temporairement exercées par les délégués du personnel, le législateur n'a pas clairement déterminé qui était le créancier des sommes dues par l'employeur pendant les périodes de mise en sommeil du comité. Dans l'espèce du 13 septembre 2005, la Cour de cassation rappelle que si les missions du comité sont bien dévolues aux délégués du personnel pendant la période de mise en sommeil, le créancier des sommes dues par l'employeur reste bien le comité lui-même.
(Sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, Les conséquences de la mise en sommeil d'un comité d'établissement, Lexbase Hebdo n° 184 du 6 octobre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N9204AIQ).
Si la loi dite "Borloo" a fait l'objet de nombreux commentaires, avant même son adoption définitive, ceux-ci ont été essentiellement centrés sur les modifications apportées par cette réforme au régime du licenciement économique. Si celles-ci ne sauraient évidemment être minimisées, elles ne doivent pas conduire à laisser dans l'ombre d'autres aspects de la loi tout aussi novateurs. Ainsi, la loi prévoit apporte des tempéraments à la règle posée par le Code du travail qui prévoit que l'ordre du jour des réunions du comité d'entreprise est arrêté conjointement par le président et le secrétaire du comité. En effet, désormais, que "lorsque sont en cause des consultations rendues obligatoires par une disposition législative, réglementaire ou par un accord collectif de travail, elles [...] sont inscrites de plein droit [à l'ordre du jour] par l'un ou par l'autre", soit le chef d'entreprise ou le secrétaire du comité. En outre, le législateur introduit un nouvel article dans le Code du travail disposant que "par dérogation à l'article L. 431-5, le chef d'entreprise n'est pas tenu de consulter le comité d'entreprise avant le lancement d'une offre publique d'achat ou d'une offre publique d'échange portant sur le capital d'une entreprise. En revanche, il doit réunir le comité d'entreprise dans les deux jours ouvrables suivant la publication de l'offre en vue de lui transmettre des informations écrites et précises sur le contenu de l'offre et sur les conséquences en matière d'emploi qu'elle est susceptible d'entraîner". La loi modifie également les règles relatives à l'information du comité sur les contrats aidés. Enfin, le législateur introduit à la fois une obligation de négocier et de nouveaux objets de négociation.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Fiche n° 10 : quelques aspects de la loi de cohésion sociale relatifs aux relations collectives de travail, Lexbase Hebdo n° 152 du 27 janvier 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4354ABU).
IV - Usages et engagements unilatéraux
Depuis la possibilité légale de mandater des salariés pour conclure des accords dans les entreprises, les organisations syndicales représentatives n'ont plus le monopole de la signature des accords collectifs au sens propre du terme. Parallèlement, l'employeur peut conclure des accords atypiques ou adopter des engagements unilatéraux au cours de réunions avec les représentants élus des salariés (comité d'entreprise ou délégués du personnel). Si ces accords suivent un régime propre, ils se rapprochent des accords collectifs au moment d'un transfert d'entreprise : l'employeur repreneur est tenu par les dispositions de l'engagement unilatéral et doit, pour s'en défaire, respecter certaines formalités permettant, le cas échéant, d'engager des négociations. C'est ce que rappelait la décision du 21 septembre 2005, tout en précisant qu'en cas de non-respect de l'engagement unilatéral, le nouvel employeur doit réparer le préjudice découlant de sa propre carence.
(Sur ce sujet, lire Chrystelle Alour, Transfert d'entreprise : dénonciation d'un engagement unilatéral, Lexbase Hebdo n° 184 du 6 octobre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N9230AIP).
L'usage constitue une source à part en droit du travail, et une source en voie de disparition, si l'on en croit les affaires de plus en plus nombreuses dans lesquelles les employeurs tentent de s'en défaire. Une simple dénonciation, conformément aux principes dégagés par la jurisprudence, suffit à y mettre un terme. Les salariés ne peuvent, dans cette hypothèse, ni revendiquer un quelconque avantage, ni s'opposer à cette dénonciation. L'usage régulièrement dénoncé prend fin à l'issue du délai déterminé par l'employeur. En outre, aucune modification du contrat de travail ne peut être retenue dans la mesure où la dénonciation de l'usage n'est pas, directement ou indirectement, attentatoire au contenu du contrat individuel de travail. Ce sont ces principes que la Cour de cassation est venue rappeler aux salariés qui invoquaient la modification de leurs contrats de travail consécutive à la dénonciation de l'usage. Elle affirme, pour ce faire, que "le paiement du temps de pause à titre de temps de travail effectif résultait d'un usage" qui a été dénoncé "à l'issue d'une procédure régulière". La suppression de l'assimilation de ce temps de pause à un temps de travail effectif avec maintien de la rémunération des salariés ne constituait pas une modification unilatérale du contrat de travail et était donc parfaitement opposable aux salariés.
(Sur ce sujet, lire Stéphanie Martin-Cuénot, Les causes de la subsidiarité de l'usage : l'exemple par sa dénonciation, Lexbase Hebdo n° 177 du 21 juillet 2005 - édition sociale N° Lexbase : N6715AIK).
La Chambre sociale rappelle la règle selon laquelle les conventions et accords collectifs conclus dans les établissements médico-sociaux ne peuvent légalement prendre effet qu'après agrément ministériel. Ensuite, et surtout, la Cour de cassation vient décider que sont soumis aux mêmes conditions les engagements unilatéraux de l'employeur à caractère collectif.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Etablissements privés gérant un service social et sanitaire à but non lucratif : l'exigence d'agrément étendue aux engagements unilatéraux de l'employeur, Lexbase Hebdo n° 173 du 23 juin 2005 - édition sociale N° Lexbase : N5632AIG).
A la dénonciation individuelle à laquelle avait procédé l'employeur envers chaque salarié représentant du personnel au comité d'entreprise, la Cour de cassation oppose et impose une information collective donnée en réunion du comité après inscription à l'ordre du jour. Seule cette dénonciation collective permet à l'employeur de se trouver libéré de l'usage. La rigueur dont fait preuve la Haute juridiction envers l'employeur n'a rien de surprenant, elle ne constitue que la stricte application du régime jurisprudentiel de l'usage.
(Sur ce sujet, lire Stéphanie Martin-Cuénot, Rappel du caractère impératif de la dénonciation collective de l'usage, Lexbase Hebdo n° 151 du 22 janvier 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4281AB8).
V - Durée du mandat des représentants du personnel
La loi n° 2005-882 du 2 août 2005 comporte d'importantes dispositions modifiant le Code du travail, non seulement pour les petites et moyennes entreprises, mais pour l'ensemble des entreprises, quelle que soit leur taille. Cette loi porte notamment la durée des mandats de l'ensemble des représentants du personnel est portée de 2 à 4 ans. Ces dispositions s'appliquent à la durée des mandats des membres élus du comité d'entreprise et aux délégués du personnel ainsi qu'aux mandats des membres élus du comité d'établissement, du comité central et aux représentants désignés au comité de groupe. En outre, l'article 96 de la loi impose à l'employeur d'organiser des élections partielles des délégués du personnel si un collège électoral n'est plus représenté, si le nombre de délégués titulaires est réduit de moitié ou plus, à l'exception de l'hypothèse où ces évènements interviendraient moins de 6 mois avant le terme du mandat des délégués du personnel. Cette mesure, rendue nécessaire du fait du doublement de la durée des mandats, n'existait jusqu'à présent que pour les membres élus du comité d'entreprise et non pour les délégués du personnel.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Brefs propos sur l'allongement de la durée du mandat des représentants du personnel, Lexbase Hebdo n° 182 du 22 septembre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N8565AI3 ; lire, également, Marie Laurence Boulanger et Olivier Bach, Présentation des dispositions sociales de la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, Lexbase Hebdo n° 179 du 1er septembre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N7650AI8).
VI - Les avantages individuels acquis
En application de l'article L. 132-8, alinéa 6, du Code du travail (N° Lexbase : L5688ACN), lorsqu'une convention collective qui a été dénoncée n'a pas été remplacée par un accord de substitution, les salariés conservent les avantages individuels qu'ils ont acquis à l'expiration du délai de survie de la convention. La notion d'avantage individuel acquis a suscité bien des interrogations qui n'apparaissent pas véritablement réglées aujourd'hui. Il reste, ainsi, bien difficile de déterminer avec précision où se situe la frontière entre l'avantage individuel et l'avantage collectif. On doit, dès lors, saluer tout effort de la Cour de cassation dans le sens d'une clarification de cette notion. Si l'arrêt rendu par la Chambre sociale, le 1er juin 2005, se situe dans cette perspective et mérite, à ce titre, d'être pris en considération, la solution retenue apparaît pour le moins restrictive.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, La notion d'avantage "individuel", Lexbase Hebdo n° 172 du 16 juin 2005 - édition sociale N° Lexbase : N5394AIM).
VII - Statut réglementaire et statut conventionnel
On sait que le personnel des entreprises publiques à statut est soumis à un statut réglementaire qui laisse a priori peu de place à la négociation collective. C'est ce que confirme le Code du travail en réservant expressément aux conventions et accords collectifs de travail un rôle résiduel quant à la détermination des conditions de travail de ces personnels. Si les principes de solution sont en la matière relativement clairs, leur mise en oeuvre peut être source de difficultés, ainsi qu'en témoigne la décision rendue par la Cour de cassation, le 17 mai 2005.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Entreprises publiques : la prééminence du statut réglementaire sur le statut conventionnel, Lexbase Hebdo n° 170 du 2 juin 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4917AIX).
VIII - Principe de faveur
Aux juges du fond qui avaient refusé de faire application à la salariée de l'indemnité légale de licenciement, au motif que la convention collective ne prévoyait pas le doublement de l'indemnité conventionnelle, la Cour de cassation rappelle que, dans cette hypothèse, les juges auraient dû rechercher entre l'indemnité conventionnelle et l'indemnité légale portée au double, celle qui était la plus favorable pour en faire application à la salariée. Cette solution est logique. Elle résulte, en effet, d'une simple application du principe général de faveur.
(Sur ce sujet, lire Stéphanie Martin-Cuénot, Le principe de faveur a de beaux restes !, Lexbase Hebdo n° 169 du 26 mai 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4600AI9).
IX - Décompte des seuils d'effectifs
L'ordonnance n° 2005-892 du 2 août 2005 relative à l'aménagement des règles de décompte des effectifs des entreprises dispose que certains jeunes nouvellement embauchés ne seront provisoirement pas décomptés dans l'effectif de l'entreprise servant à déterminer les obligations de l'employeur.
(Sur ce sujet lire, Stéphanie Martin-Cuénot, Fiche n° 2 : L'aménagement des règles de décompte des effectifs des entreprises, Lexbase Hebdo n° 179 du 1 septembre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N7764AIE)
Alors que le Conseil d'Etat a pleinement validé la mesure phare (la plus médiatisée) des ordonnances sur l'emploi de cet été 2005, le contrat nouvelles embauches, l'ordonnance n° 2005-892 excluant les jeunes de moins de 26 ans du calcul des seuils d'effectifs connaît, au contraire, un sort judiciaire qui en compromet définitivement la mise en place. Dans un premier temps, le Conseil d'Etat avait, en effet, prononcé un sursis à statuer sur les requêtes déposées par les principaux syndicats de salariés demandant l'annulation de cette ordonnance, jusqu'à ce que la CJCE se soient prononcée sur des difficultés sérieuses d'interprétation. Puis, moins d'un mois plus tard, le Conseil d'Etat statue à nouveau, cette fois-ci sur une demande tendant à la suspension de l'exécution de l'ordonnance n° 2005-892, parce que l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. Dès l'origine, cette ordonnance avait été très discutée, en raison de ses postulats de depart ; sa remise en cause par le Conseil d'Etat n'est pas très surprenante.
(Sur ce sujet, lire Seuils d'effectifs : un arrêt du Conseil d'Etat en demi-teinte, Lexbase Hebdo n° 187 du 27 octobre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N0047AKX ; lire également La mise en oeuvre de l'ordonnance n° 2005-892 relative aux seuils d'effectifs fortement compromise, Lexbase Hebdo n° 193 du 8 décembre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N1713AKN)
X - Droit syndical
L'arrêt rendu le 25 janvier 2005 par la Cour de cassation mérite, à n'en point douter, de retenir l'attention. Il donne, en effet, l'occasion à la Chambre sociale, pour la première fois à notre connaissance, de prendre position sur la question de l'utilisation de la messagerie électronique de l'entreprise par les organisations syndicales, afin de diffuser leurs tracts.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Communications syndicales dans l'entreprise et Internet, Lexbase Hebdo n° 154 du 10 février 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4536ABM).
La décision rendue par la Cour de cassation le 5 janvier 2005 démontre, une nouvelle fois, que celle-ci entend, désormais, placer les relations entre les employeurs et les syndicats sous l'égide du principe constitutionnel d'égalité. Il ressort de la décision en cause (et d'autres avant elle), que ce principe doit gouverner l'amélioration des dispositions légales relatives au droit syndical et à la représentation du personnel.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Relations employeurs-syndicats : la vigueur et la rigueur du principe constitutionnel d'égalité, Lexbase Hebdo n° 151 du 22 janvier 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4274ABW).
Entre représentativité télévisée et représentativité juridique, le Medef balance... La notion de représentativité fait généralement penser au salariat puisqu'elle vient qualifier les organisations syndicales représentatives de ces derniers. La notion de représentativité des organisations patronales est, quant à elle, moins connue. C'est pourtant ce défaut de représentativité du Medef qui a justifié l'annulation de la désignation d'un délégué syndical au CHSCT, fondée sur un accord collectif de branche dans laquelle il n'était pas représentatif. L'importance médiatique que connaît le Medef n'est, en effet, pas suffisante pour laisser présumer de sa représentativité. La présomption légale de représentativité posée par le législateur ne vaut que pour les organisations syndicales de salariés (C. trav., art. L. 412-4 N° Lexbase : L6329ACE ; C. trav., art. L. 423-2 N° Lexbase : L6360ACK ; C. trav., art. L. 433-2 N° Lexbase : L6419ACQ). Les employeurs, en l'absence de disposition légale expresse sont donc tenus, dans toutes les hypothèses, de la prouver.
(Sur ce sujet, lire Stéphanie Martin-Cuénot, L'exclusion du Medef du pouvoir de négocier, Lexbase Hebdo n° 161 du 31 mars 2005 - édition sociale N° Lexbase : N2372AIP).
Si, dans l'entreprise, la concurrence entre syndicats n'est pas rare, elle concerne au premier chef des organisations appartenant à des confédérations différentes. Il arrive aussi, et c'est sans doute plus regrettable, qu'une telle concurrence mette aux prises des syndicats appartenant à une même confédération. L'arrêt rendu le 22 juin 2005 par la Cour de cassation nous donne une illustration particulièrement topique d'une telle situation.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, La désignation concurrente, dans une même entreprise, de délégués syndicaux par deux syndicats appartenant à une même confédération, Lexbase Hebdo n° 175 du 7 juillet 2005 - édition sociale N° Lexbase : N6258AIM).
Dans un arrêt récent, commenté dans ces mêmes colonnes, la Cour de cassation avait été appelée à se prononcer sur la désignation concurrente, dans une même entreprise, de délégués syndicaux par une union départementale et une fédération de syndicats appartenant à la même confédération (Cass. soc., 8 décembre 2004, n° 03-60.445, F-P+B N° Lexbase : A3752DEP, lire La désignation concurrente, dans une même entreprise, de délégués syndicaux par une union départementale et une fédération de syndicats appartenant à la même confédération !, Lexbase Hebdo n° 148 du 23 décembre 2004 - édition sociale N° Lexbase : N4061ABZ). Une décision rendue le 6 avril 2005 par la Chambre sociale nous offre une nouvelle illustration d'une telle problématique qui a trait, en quelque sorte, à la discipline à l'intérieur des organisations syndicales. Etait cette fois en cause le dépôt d'une liste de candidats aux élections à un comité d'établissement, à la fois par un syndicat et la fédération à laquelle il appartient. Dès lors que tous deux sont titulaires d'une telle prérogative se posait, dans le silence de la loi, le délicat problème des rapports entre le syndicat et l'union à laquelle il adhère.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Les titulaires des droits syndicaux dans l'entreprise : qui, du syndicat ou de l'union à laquelle il appartient, doit l'emporter ?, Lexbase Hebdo n° 164 du 21 avril 2005 - édition sociale N° Lexbase : N3252AIB).
Dans cet arrêt en date du 15 mars 2005, la Chambre sociale de la Cour de cassation décide de faire application de la prescription trentenaire à l'action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination syndicale.
(Sur ce sujet, lire Christophe Radé, L'action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination syndicale se prescrit par trente ans, Lexbase Hebdo n° 161 du 31 mars 2005 - édition sociale N° Lexbase : N2499AIE).
Le financement des organisations syndicales de salariés est, dans notre pays, une question récurrente. C'est, plus particulièrement, l'opacité de ce financement qui est régulièrement dénoncée. Aussi, dans un tel contexte, doit-on donner sa juste valeur à l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 4 avril 2005. Par cette décision, en effet, celui-ci vient admettre que les communes peuvent accorder des subventions à des organisations syndicales de salariés. On mesure, par suite, l'importance d'une telle décision qui revient à consacrer, dans une mesure certes relative, un embryon de financement public des syndicats. On ne s'étonnera pas, dès lors, que ce financement soit soumis à de strictes conditions.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Financement des syndicats par une commune : une licéité sous conditions, Lexbase Hebdo n° 168 du 19 mai 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4370AIP).
Le Crédit lyonnais est décidément au coeur de l'actualité judiciaire, ainsi qu'en témoigne à nouveau un arrêt rendu le 30 septembre 2005 par la Cour de cassation. Si on peut supposer que cette décision n'aura pas les honneurs de la grande presse, faute de mettre aux prises la société précitée et une médiatique personne, elle n'en demeure pas moins particulièrement importante ainsi que l'atteste le prestigieux label dont elle est parée (P+B+R+I). La solution retenue par la Chambre sociale peut se résumer en quelques mots en indiquant simplement que celle-ci vient déclarer incompatible la fonction d'administrateur élu et le mandat de permanent syndical. Elle n'en présente pas moins un intérêt certain, ne serait-ce qu'au regard du contentieux extrêmement réduit que suscite la participation des salariés dans les organes de gestion des sociétés anonymes.
(Sur ce sujet, lire Gilles Auzero, Incompatibilité des fonctions d'administrateur élu par les salariés et de permanent syndical, Lexbase Hebdo n° 185 du 13 octobre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N9376AI4).
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par Yolande Sérandour, Professeur à la Faculté de droit de Rennes, Directrice du Master de Droit Fiscal des Affaires de Rennes et du département Droit fiscal du CDA
Le 07 Octobre 2010
1 - Champ d'application matériel
Un Etat membre de l'Union européenne ayant fait usage de la faculté d'accorder à ses contribuables le droit, prévu à l'article 13, C, de la sixième directive-TVA (N° Lexbase : L9279AU9), d'opter pour la taxation de l'affermage et de la location de biens immeubles peut, d'une part, subordonner la taxation de ces opérations à l'obtention préalable d'un agrément de la part de l'administration fiscale et, d'autre part, n'en tirer les conséquences sur le droit à déduction que pour l'avenir. Selon la Cour de Luxembourg : "Les dispositions de l'article 13, C, premier alinéa, sous a), et second alinéa, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, ne s'opposent pas à ce qu'un Etat membre ayant fait usage de la faculté d'accorder à ses assujettis le droit d'opter pour la taxation des opérations d'affermage et de location de biens immeubles adopte une réglementation qui fait dépendre la déduction intégrale de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée en amont de l'obtention d'un agrément préalable, non rétroactif, de la part de l'administration fiscale".
(Sur le sujet, lire : DF 2005, n° 6, comm. 182 ; RJF 12/04, n° 1292. Adde, Yolande Sérandour, L'imposition à la TVA sur option et l'agrément préalable, Lexbase Hebdo n° 149, du jeudi 6 janvier 2005 - édition fiscale [LXB=N 4152ABE]).
La réduction de prix accordée aux membres du personnel d'un hôtel sur la consommation de repas sur les lieux de travail n'entraîne pas application du régime des prestations à soi-même. La CJCE considère, en effet, que "que les articles 2, 5, paragraphe 6, et 6, paragraphe 2, sous b), de la sixième directive-TVA doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale qui considère comme le prélèvement d'un bien ou la prestation de services pour des besoins privés des opérations pour lesquelles une contrepartie réelle est acquittée même si cette contrepartie est inférieure au prix de revient du bien ou du service fourni" (§ 30).
(Sur le sujet, lire : DF 2005, n° 23, comm. 463 ; RJF 4/05, n° 417 ; Adde, Yolande Sérandour, La fourniture de repas moyennant une contrepartie inférieure au prix de revient n'est pas une livraison ou un service à soi-même, Lexbase Hebdo n° 153, du 3 février 2005 - édition fiscale N° Lexbase : N4492ABY).
Un Etat membre de l'Union européenne ne peut pas suspendre l'application d'une exonération de TVA à la licéité de l'activité concurrentielle exercée. L'organisateur de jeux illicites peut échapper à une règle interne en opposant son incompatibilité avec la sixième directive-TVA.
La CJCE affirme que "1) L'article 13, B, sous f), de la sixième directive 77/388 /CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une législation nationale qui prévoit que l'exploitation de tous les jeux et appareils de jeux de hasard est exonérée de la TVA lorsqu'elle est effectuée dans des casinos publics agréés, alors que l'exercice de cette même activité par des opérateurs autres que les exploitants de tels casinos ne bénéficie pas de cette exonération. 2) L'article 13, B, sous f), de la sixième directive 77/388 a un effet direct, en ce sens qu'il peut être invoqué par un exploitant de jeux ou d'appareils de jeux de hasard devant les juridictions nationales pour écarter l'application des règles de droit interne incompatibles avec cette disposition".
(Sur le sujet, lire : DF 2005, n° 12, comm. 315, note T. Georgopoulos ; RJF 5/05, n° 440 ; Adde, Yolande Sérandour, Illicéité et TVA : ne pas confondre fiscalité et prophylaxie, Lexbase Hebdo n° 157, du 3 mars 2005 - édition fiscale N° Lexbase : A7506DG4).
Offrir aux propriétaires de bateaux la possibilité, moyennant contrepartie, d'utiliser une partie délimitée d'un port ou d'un terrain constitue une activité immobilière soumise à la TVA. Le 3 mars 2005, le juge communautaire a dit pour droit que :
"1) L'article 13, B, sous b), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, telle que modifiée par la directive 92/111/CEE du Conseil, du 14 décembre 1992, doit être interprété en ce sens que la notion de location de biens immeubles englobe la location d'emplacements prévus pour l'amarrage de bateaux sur l'eau, ainsi que d'emplacements pour l'entreposage de ces bateaux à terre dans l'aire portuaire.
2) L'article 13, B, sous b), point 2, de la sixième directive 77/388, telle que modifiée par la directive 92/111, doit être interprété en ce sens que la notion de "véhicules" englobe les bateaux".
(Sur le sujet, lire : DF 2005, n° 24, comm. 477 ; RJF 5/05, n° 517. Adde, Yolande Sérandour, L'amarrage et l'hivernage des bateaux soumis au régime du stationnement des véhicules, Lexbase Hebdo n° 161, du 31 mars 2005 - édition fiscale N° Lexbase : A1775DH9).
La fourniture de prestations d'assistance sociale dans le but de réaliser des bénéfices n'est pas incompatible avec la reconnaissance de la qualité d'organisme à caractère social. Il s'ensuit que l'exonération en résultant exclut l'exercice de tout droit à déduction de la TVA ayant grevé les prix de revient.
La CJCE ne tire aucune incompatibilité de la recherche et de la répartition de profits. Elle décide que :
"1) Le terme "charitable" figurant dans la version anglaise de l'article 13, A, paragraphe 1, sous g) et h), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, constitue une notion autonome du droit communautaire qui doit être interprétée en tenant compte de l'ensemble des versions linguistiques de ladite directive.
2) La notion d'"organismes reconnus comme ayant un caractère social par l'Etat membre concerné" mentionnée à l'article 13, A, paragraphe 1, sous g) et h), de la sixième directive 77/388 n'exclut pas des entités privées poursuivant un but lucratif.
3) Il appartient à la juridiction nationale de déterminer, au vu, notamment, des principes d'égalité de traitement et de neutralité fiscale, et en tenant compte du contenu des prestations de services en cause, ainsi que des conditions de leur exercice, si la reconnaissance, en tant qu'organisme ayant un caractère social aux fins des exonérations prévues à l'article 13, A, paragraphe 1, sous g) et h), de la sixième directive 77/388, d'une entité privée qui poursuit un but lucratif et, partant, ne possède pas le statut de "charity" en vertu du droit interne excède le pouvoir d'appréciation accordé par ces dispositions aux Etats membres aux fins d'une telle reconnaissance".
(Sur le sujet, lire : DF 2005, n° 38, p. 1417; RJF 8-9/05, n° 984 ; Adde, Yolande Sérandour, Profits et social sont eurocompatibles selon la CJCE, Lexbase Hebdo n° 175, du 7 juillet 2005 - édition fiscale N° Lexbase : N6142AIC).
Un Etat membre de l'Union européenne ne peut pas assimiler le vol à une livraison taxable, nonobstant l'autorisation d'exiger la TVA avant la vente, en l'occurrence dès l'acquittement des droits d'accises. Selon le juge communautaire :
"1) Le vol de marchandises ne constitue pas une "livraison de biens à titre onéreux" au sens de l'article 2 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, et ne peut donc, en tant que tel, être soumis à la taxe sur la valeur ajoutée. La circonstance que des marchandises, comme celles en cause au principal, sont soumises à un droit d'accises n'a pas d'incidence sur cette analyse.
2) L'autorisation de mettre en oeuvre des mesures facilitant le contrôle de la perception de la taxe sur la valeur ajoutée, accordée à un Etat membre sur le fondement de l'article 27, paragraphe 5, de la sixième directive 77/388, n'habilite pas cet Etat à soumettre à cette taxe d'autres opérations que celles énoncées à l 'article 2 de cette directive. Une telle autorisation ne peut donc donner de base légale à une réglementation nationale soumettant à la taxe sur la valeur ajoutée le vol de marchandises dans un entrepôt fiscal".
(Sur le sujet, lire Yolande Sérandour, Vol et TVA, Lexbase Hebdo n° 182, du 22 septembre 2005 - édition fiscale [LXB=NA1686DKN]).
2 - Champ d'application territorial
La qualification d'un échange économique revêt une grande importance en matière de TVA. En dépendent, l'éventuelle exonération, le taux applicable, la date d'exigibilité et, ainsi que l'illustre l'arrêt "Levob", l'assiette et la territorialité de la TVA. Selon la Cour de Luxembourg :
"1) L'article 2, paragraphe 1, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, doit être interprété en ce sens que, lorsque deux ou plusieurs éléments ou actes fournis par un assujetti à un consommateur, envisagé comme un consommateur moyen, sont si étroitement liés qu'ils forment objectivement, sur un plan économique, un tout dont la dissociation revêtirait un caractère artificiel, l'ensemble de ces éléments ou de ces actes constitue une prestation unique aux fins de l'application de la taxe sur la valeur ajoutée.
2) Tel est le cas d'une opération par laquelle un assujetti fournit à un consommateur un logiciel standard précédemment développé et commercialisé, enregistré sur un support, ainsi que l'adaptation subséquente de ce logiciel aux besoins spécifiques de cet acquéreur, même moyennant paiement de prix distincts.
3) L'article 6, paragraphe 1, de la sixième directive 77/388 doit être interprété en ce sens qu'une prestation unique telle que celle visée au point 2 du présent dispositif doit être qualifiée de "prestation de services" lorsqu'il apparaît que l'adaptation en cause n'est ni mineure ni accessoire, mais qu'elle revêt au contraire un caractère prédominant ; il en est, notamment, ainsi lorsque, au vu d'éléments tels que son ampleur, son coût ou sa durée, cette adaptation revêt une importance décisive aux fins de permettre l'utilisation d'un logiciel sur mesure par l'acquéreur.
4) L'article 9, paragraphe 2, sous e), troisième tiret, de la sixième directive 77/388 doit être interprété en ce sens qu'il s'applique à une prestation de services unique telle que celle visée au point 3 du présent dispositif, rendue à un assujetti établi dans la Communauté, mais en dehors du pays du prestataire".
Un logiciel standard peut devenir un logiciel spécifique. Cette transformation retentit sur la désignation du pays d'imposition.
(Sur le sujet, lire Yolande Sérandour, Le logiciel, bien ou service au regard de la TVA ?, Lexbase Hebdo n° 192, du 1er décembre 2005 - édition fiscale N° Lexbase : N1371AKY).
Il suffit de commercer lors d'une halte avec ou sans formalités de débarquement hors de l'Union européenne pour échapper à la TVA du pays de départ du voyage situé sur le territoire d'un Etat membre. Il est vrai que l'article 8 § 1-c de la sixième directive-TVA exclut la TVA du pays de départ en cas d'escale. Selon la CJCE, la réponse dépend de la question de savoir si les voyageurs peuvent ou non quitter temporairement le moyen de transport. Elle dit en effet pour droit que :
"Les arrêts effectués par un bateau dans des ports de pays tiers, au cours desquels les voyageurs peuvent quitter le bateau, même pour une courte période, constituent des "escales en dehors de la Communauté" au sens de l'article 8, paragraphe 1, sous c), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, dans sa version résultant de la directive 92/111/CEE du Conseil, du 14 décembre 1992, modifiant la directive 77/388 et portant mesures de simplification en matière de taxe sur la valeur ajoutée".
(Sur le sujet, lire Yolande Sérandour, L'escale chasse la TVA, Lexbase Hebdo n° 186, du 20 octobre 2005 - édition fiscale N° Lexbase : N9694AIU).
2 - Exigibilité de la TVA
L'organisateur de parties de pêche, exploitant d'étangs, de buvettes et de parcs d'attractions, qui offre la possibilité de pêcher les truites qu'il a vendues après les avoir déverser dans ses petits étangs bénéficie du taux réduit sur la vente des poissons. Le Conseil d'Etat considère que "la vente au poids ou à la pièce des truites déversées dans les petits étangs pour être pêchées par les clients ; que, dès lors que les clients ont acquis ces truites à des tarifs identiques à ceux pratiqués pour la vente directe, cette activité doit être regardée non comme une prestation de services, mais comme la vente de produits de la pisciculture au sens des dispositions de l'article 278 bis précité du code général des impôts ".
(Sur le sujet, lire : DF 2005, n° 25, comm. 486, concl. S. Verclytte ; RJF 7/05, n° 679 ; Adde, Yolande Sérandour, La truite, l'étang et le taux de TVA, Lexbase Hebdo n° 168, du 19 mai 2005 - édition fiscale N° Lexbase : N4342AIN).
III - Déductibilité de la TVA
1 - Droit à déduction
La cessation d'entreprise ne fait pas perdre à son exploitant le droit de déduire la TVA ayant légitimement grevé les frais supportés après la survenance de cet événement. La CJCE dit pour droit que "l'article 4, paragraphes 1 à 3, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, telle que modifiée par la directive 95/7/CE du Conseil, du 10 avril 1995, doit être interprété en ce sens qu'une personne qui a cessé une activité commerciale, mais qui continue de payer le loyer et les charges afférents au local ayant servi pour cette activité, en raison du fait que le contrat de location contient une clause de non-résiliation, est considérée comme un assujetti au sens de cet article et peut déduire la TVA sur les montants ainsi acquittés, pour autant qu'il existe un lien direct et immédiat entre les paiements effectués et l'activité commerciale et que l'absence d'intention frauduleuse ou abusive est établie".
(Sur le sujet, lire : DF 2005, n° 25, comm. 487 ; RJF 5/05, n° 519 ; Adde Yolande Sérandour, Cessation d'activité et déduction de la TVA, Lexbase Hebdo n° 164, du 21 avril 2005 - édition fiscale N° Lexbase : A1773DH7).
Les dépenses à caractère mixte, pour partie professionnelle et pour une autre personnelle, engagées par des époux en qualité d'indivisaires, sans indication de la répartition sur les factures : ni de la quote-part de chacun, ni du pourcentage d'affectation professionnelle ouvrent droit à déduction de la TVA en proportion de l'affectation professionnelle réelle. La CJCE tient pour droit que : "[...] une personne, qui acquiert ou fait construire une maison aux fins de l'habiter avec sa famille, agit en qualité d'assujetti et bénéficie, donc, du droit à déduction en application de l'article 17 de la sixième directive 77/388, dans la mesure où elle utilise une pièce de cet immeuble comme bureau pour les besoins de l'exercice, fût-ce à titre accessoire, d'une activité économique au sens des articles 2 et 4 de la même directive et qu'elle affecte cette partie de l'immeuble au patrimoine de son entreprise ;
- lorsqu'une communauté résultant d'un mariage, qui n'est pas dotée de la personnalité juridique et n'exerce pas elle-même une activité économique au sens de la sixième directive 77/388, passe commande d'un bien d'investissement, les copropriétaires formant ladite communauté doivent être considérés comme bénéficiaires de l'opération pour les besoins de l'application de cette directive ;
- lorsque deux époux en communauté du fait de leur mariage acquièrent un bien d'investissement dont une partie est utilisée à des fins professionnelles de façon exclusive par l'un des époux copropriétaires, celui-ci bénéficie du droit à déduction pour la totalité de la taxe sur la valeur ajoutée en amont ayant grevé la part du bien qu'il utilise pour les besoins de son entrepris, pour autant que le montant déduit n'excède pas les limites de la quote-part que l'assujetti détient dans la copropriété dudit bien ;
- les articles 18, paragraphe 1, sous a), et 22, paragraphe 3, de la sixième directive 77/388 n'exigent pas que, pour pouvoir exercer le droit à déduction dans des circonstances telles que celles en cause au principal, l'assujetti dispose d'une facture établie à son nom et faisant apparaître les fractions du prix et de la taxe sur la valeur ajoutée correspondant à sa quote-part dans la copropriété. Une facture délivrée indistinctement aux époux en copropriété et sans mention d'une telle ventilation est suffisante à cet effet".
(Sur le sujet, lire DF 2005, n° 46, comm. 735 ; RJF 8-9/05, n° 986 ; Yolande Sérandour, Epoux indivisaires et déduction de la TVA, Lexbase Hebdo n° 166, du 5 mai 2005 - édition fiscale N° Lexbase : A9457DHQ).
Une société peut déduire la TVA qu'elle a acquittée sur des prestations liées à l'émission d'actions car ces dépenses font partie de ses frais généraux, du moins si elle exerce une activité soumise à la TVA. Selon la CJCE :
"1) Une émission d'actions nouvelles ne constitue pas une opération relevant du champ d'application de l'article 2, point 1, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, telle que modifiée par la directive 95/7/CE du Conseil, du 10 avril 1995.
2) L'article 17, paragraphes 1 et 2, de la sixième directive 77/388, telle que modifiée par la directive 95/7, ouvre droit à déduction de l'intégralité de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les dépenses exposées par un assujetti pour les différentes prestations qu'il a acquises dans le cadre d'une émission d'actions dans la mesure où l'intégralité des opérations effectuées par cet assujetti dans le cadre de son activité économique constitue des opérations taxées".
(Sur ce sujet, lire : RJF 8-9/05, n° 982 ; Adde, Yolande Sérandour, La déductibilité de la TVA ayant grevé les frais d'émission d'actions, Lexbase Hebdo n° 172, du 16 juin 2005 - édition fiscale N° Lexbase : A3969DIT).
En cas d'utilisation mixte d'un moyen d'exploitation, un Etat membre ne peut simplifier la gestion fiscale d'un tel bien en excluant définitivement de l'actif professionnel la fraction correspondant à l'usage privé, nonobstant l'existence de cette exclusion avant l'entrée en vigueur de la sixième directive-TVA.
La CJCE dit pour droit que : "Les articles 6, paragraphe 2, et 17, paragraphes 2 et 6, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, telle que modifiée par la directive 95/7/CE du Conseil, du 10 avril 1995, doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une législation nationale telle que celle en cause au principal, adoptée avant l'entrée en vigueur de cette directive, qui ne permet pas à un assujetti d'affecter à son entreprise la totalité d'un bien d'investissement utilisé en partie pour les besoins de l'entreprise et en partie à des fins étrangères à celle-ci et, le cas échéant, de déduire intégralement et immédiatement la taxe sur la valeur ajoutée due sur l'acquisition d'un tel bien".
(Sur le sujet, lire : DF 2005, n° 38, comm. 618 ; Adde, Yolande Sérandour, La non taxation de l'usage privé d'un bien ne justifie pas l'exclusion partielle du système de la TVA, Lexbase Hebdo, n° 180, du 8 septembre 2005 - édition fiscale [LXB=N A1685DK]).
Une subvention ne peut diminuer la TVA déductible de l'assujetti redevable de la TVA sur toutes ses activités dans le champ d'application de la TVA. En cas d'exercice d'activités exonérées, un Etat membre ne peut prévoir un régime de limitation de la TVA déductible plus favorable que celui prévu par la sixième directive-TVA. La CJCE tient pour droit que :
"En prévoyant un prorata de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée supportée par les assujettis n'effectuant que des opérations taxées et en instaurant une règle particulière limitant la déductibilité de la TVA afférente à l'achat de biens ou de services financés au moyen de subventions, le Royaume d'Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du droit communautaire et, notamment, des articles 17, paragraphes 2 et 5, et 19 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, telle que modifiée par la directive 95/7/CE du Conseil, du 10 avril 1995".
"En instaurant une règle particulière limitant la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à l'achat de biens d'équipement en raison du fait qu'ils ont été financés au moyen de subventions, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du droit communautaire et, notamment, des articles 17 et 19 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, telle que modifiée par la directive 95/7/CE du Conseil, du 10 avril 1995".
(Sur le sujet, lire : DF 2005, n° 49, p. 1921, Etude M. Guichard et W. Stemmer ; Adde, Yolande Sérandour, Subvention d'équipement et TVA, Lexbase Hebdo n° 189, du 10 novembre 2005 - édition fiscale N° Lexbase : A6729DKG).
2 - Révision des déductions
La crainte de voir se multiplier les montages destinés à récupérer de la TVA avant l'adoption d'une loi destinée à les combattre justifie une dérogation aux principes communautaires de sécurité juridique et de confiance légitime. La loi interne peut disposer pour l'avenir et, exceptionnellement, être rétroactive. Comme le droit français, mais de manière plus restrictive, la CJCE accepte que la loi nouvelle puisse disposer pour le passé. Le 26 avril 2005, la grande Chambre de la CJCE a, en effet, dit pour droit que :
"Les principes de la protection de la confiance légitime et de la sécurité juridique ne s'opposent pas à ce qu'un Etat membre, à titre exceptionnel, et afin d'éviter que soient utilisés à grande échelle, pendant le processus législatif, des montages financiers destinés à minimiser la charge de la taxe sur la valeur ajoutée contre lesquels une loi de modification vise précisément à lutter, donne à cette loi un effet rétroactif, lorsque, dans des circonstances telles que celles de l'affaire au principal, les opérateurs économiques effectuant des opérations économiques telles que celles visées par la loi ont été avertis de la prochaine adoption de cette loi et de l'effet rétroactif envisagé de manière telle qu'ils soient en mesure de comprendre les conséquences de la modification législative envisagée pour les opérations qu'ils pratiquent.
Lorsque cette loi exonère une opération économique sur un bien immeuble auparavant soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, elle peut avoir pour effet d'annuler la régularisation de la taxe sur la valeur ajoutée intervenue en raison de l'exercice, au moment de l'affectation d'un immeuble à l'opération considérée à ce moment comme taxée, d'un droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée sur la livraison de ce bien immeuble".
(Sur le sujet, lire DF 2005, n° 22, comm. 447, note T. Georgopoulos ; RJF 8-9/05, n° 989 ; Adde, Yolande Sérandour, La déduction de TVA annulable par rétroactivité de la loi, Lexbase Hebdo, n° 170, du 2 juin 2005 - édition fiscale N° Lexbase : A0027DIT).
Devenir assujetti à la TVA ne donne pas naissance à un droit à déduction devant produire ses effets sur des dépenses engagées avant la réalisation d'opérations dans le champ d'application de la TVA. A cet égard, la CJCE affirme pour droit que "un organisme de droit public qui achète un bien d'investissement en tant qu'autorité publique, au sens de l'article 4, paragraphe 5, premier alinéa, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, et par conséquent en qualité de non-assujetti, et qui, par la suite, vend ce bien en qualité d'assujetti ne bénéficie pas, dans le cadre de cette vente, d'un droit à régularisation fondé sur l'article 20 de cette directive, en vue d'opérer une déduction de TVA acquittée lors de l'achat dudit bien". La qualité d'assujetti acquise après réalisation d'une dépense n'efface pas l'absence de la qualité d'assujetti lors de son engagement.
(Sur le sujet, lire : RJF 8-9/05, n° 991. Adde, Yolande Sérandour, Pas de régularisation positive de la TVA sans la qualité initiale d'assujetti, Lexbase Hebdo n° 178, du 28 juillet 2005 - édition fiscale [LXB=NA4883DIP]).
IV - En bref
Selon l'article 211 ancien de l'annexe II au CGI, la TVA devenue déductible du fait de la vente ou de l'apport ou de l'exportation se heurtait à un butoir : la TVA exigible ou fictivement exigible sur l'exportation. Des auteurs contestaient ce butoir qu'ils jugeaient non conforme à la sixième directive-TVA. Le décret n° 2005-1285 du 11 octobre 2005 supprime ce butoir.
(Sur le sujet, lire R. Delfaud et O. Cortez, Cessions taxables de biens d'investissement initialement non entièrement détaxés : Le butoir institué par l'article 211, dernier alinéa, de l'annexe II au CGI est-il compatible avec la sixième directive ?, DF 2003, p. 350 ; Pour la compatibilité à CAA Paris, 14 oct. 2004, Sté française d'assurance crédit : RJF 8-9/05, n° 860).
L'article 257-8°,1, a, du CGI exclut des livraisons taxables "les prélèvements effectués pour les besoins de l'entreprise pour donner des cadeaux de faible valeur et les échantillons. Le montant à retenir pour l'imposition des prélèvements correspondant aux cadeaux de faible valeur est fixé par arrêté. Cette limite s'applique par objet et par an pour un même bénéficiaire". Cette limite ne vise expressément que les cadeaux de faible valeur, pas les échantillons et spécimens. L'article 23 N de l'annexe IV au CGI fixe une limite de 31€ TTC, limite portée, par arrêté du 12 octobre 2005, à 60 euros à compter du 1er janvier 2006.
Cette limite fera l'objet d'une réévaluation au 1er janvier 2011, puis tous les cinq ans, proportionnellement à la variation de l'indice mensuel des prix à la consommation, hors tabac, de l'ensemble des ménages. La sixième directive-TVA ne prévoit pas de limite quantitative.
Cette réforme va retentir sur l'application de l'article 238, 1°, de l'annexe II au CGI , lequel dispose "n'est pas déductible la taxe ayant grevé [...] des biens cédés sans rémunération ou moyennant une rémunération très inférieure à leur prix normal [...] sauf quand il s'agit de biens de très faible valeur". L'administration fiscale se réfère à l'article 23 N de l'annexe IV au CGI modifié.
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par Daniel Faucher, Consultant au CRIDON de Paris
Le 07 Octobre 2010
1 - Successions
Une décision du 8 novembre de la Cour de cassation est venue considérablement simplifier la preuve en matière de récompenses tant pour les héritiers que pour l'administration fiscale. Lorsque, par exemple, le conjoint survivant entendra déduire de l'actif de communauté une récompense à son profit, au motif que la communauté a encaissé le prix de vente d'un bien qui lui était propre, il ne sera plus nécessaire de démontrer que la communauté a profité effectivement de cet encaissement, ce dernier suffisant pour justifier de la déduction. En effet, parachevant un revirement opéré par la Chambre civile, la Chambre commerciale de la Haute juridiction a précisé que l'administration fiscale, lorsqu'elle fonde un redressement de droits de mutation par décès sur l'existence d'une récompense due à la succession par la communauté, doit établir que les deniers provenant du patrimoine propre du défunt ont profité à celle-ci et que, sauf preuve contraire, le profit résulte, notamment, de l'encaissement de deniers propres par la communauté, à défaut d'emploi ou de remploi.
La doctrine de l'administration, qui prévoyait que la cession de titres, pour lequel les héritiers avaient demandé à bénéficier du paiement différé prévu aux articles 397 et 404 B de l'annexe III au CGI, entraînait la déchéance du régime de faveur, quand bien même le produit de cession serait réinvesti dans d'autres valeurs, a été rapportée par une instruction du 7 février 2005. Ainsi, prenant en compte la particularité de la gestion d'un portefeuille démembré à la suite d'un décès, puisque le juge autorise l'usufruitier à le gérer seul, sans demander au préalable l'accord du nu-propriétaire, l'administration précise que la déchéance du bénéfice du paiement différé n'est susceptible d'être prononcée que s'il est formellement établi que le produit de cessions de valeurs n'a pas été affecté à l'acquisition de titres nouveaux. Cependant, cette liberté est une liberté "surveillée". Les héritiers nus-propriétaires sont invités, dans la lettre qui les informe de la décision du receveur de leur accorder le paiement différé, à fournir annuellement les relevés mensuels du portefeuille.
2 - Evaluation des immeubles
Pour contester la valeur retenue par les parties pour un bien transmis à titre gratuit, le service, qui a recours dans la plupart des cas à la méthode par comparaison, doit invoquer la cession de "biens intrinsèquement similaires". En effet, l'évaluateur dispose rarement d'éléments de comparaison qui portent sur la cession d'immeubles identiques, comme en cas de transmission à titre gratuit d'un appartement situé dans un grand ensemble immobilier. Le juge a, ainsi, précisé que l'exigence de pertinence des éléments de comparaison retenus par l'administration fiscale n'implique pas que les biens pris en considération soient strictement identiques à ceux qui constituent l'objet du litige. Cette pertinence des éléments de comparaison s'apprécie en tenant compte de la localisation, de la date de construction, du classement cadastral et de la surface habitable. Ainsi, un appartement de 197 m², situé dans un immeuble en pierre de taille, construit en 1906, peut, à juste titre, être évalué en retenant le prix de cessions d'appartements, d'une surface de 140, 217 et 232 m², situés dans le même secteur, dans des immeubles construits en 1880 et 1913 (CA Paris 1ère, B, 21 octobre 2005, n° 03/21809).
II - Impôt de solidarité sur la fortune
L'usufruit légal du conjoint survivant qui résulte de l'application de loi du 3 décembre 2001 (loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral N° Lexbase : L0288A33), concernant les décès intervenus à compter du 1er juillet 2002, relève du principe de la taxation de la pleine propriété, conformément aux dispositions de l'article 885 G du CGI . En raison d'une omission de référence du nouveau texte par l'article 885 G, l'administration met, ainsi, fin à l'imposition séparée, lorsque les droits du conjoint découlaient de certains articles du Code civil, visés, eux, en tant qu'exception au principe d'imposition de la pleine propriété par l'article 885 G. L'administration justifie ce durcissement par la circonstance que l'option du conjoint pour l'usufruit de la totalité de la succession, accordée désormais par la loi civile, n'est que la légalisation des conventions de donation au dernier vivant, qui se pratiquaient avant la loi nouvelle, et qui, elles, étaient exclues en matière d'ISF de toute possibilité d'imposition répartie.
La reconnaissance du caractère animateur de son groupe à une société holding n'impose pas de démontrer que cette dernière dispose de structures importantes pour réaliser l'animation du groupe. Telle est la solution retenue par la Cour de cassation dans un arrêt en date du 27 septembre 2005. Le rôle personnel et prépondérant du dirigeant de la holding peut suffire. Au cas particulier, ce dirigeant assurait pour les filiales des études concernant l'investissement, proposait des augmentations de capital, intervenait sur les contrats commerciaux importants, participait activement à leurs conseils d'administration et embauchait même certains cadres supérieurs. Selon le juge les conditions étaient, donc, remplies pour que la holding soit considérée comme participant activement à la conduite de la politique du groupe et au contrôle de ses filiales, ce qui permet de revendiquer, au regard de l'ISF, la qualité de biens professionnels.
Les titres de placement et les liquidités détenues par une société sont présumées constituer des biens professionnels. Cette présomption, qui s'applique dès lors que les liquidités découlent de l'activité sociale, est une présomption simple et le service des impôts peut, dans certains cas, démontrer que ces liquidités ne sont pas nécessaires à l'accomplissement de l'objet social. Cependant cette preuve apparaît quasi impossible à rapporter. En effet, dans une affaire ayant donné lieu à un arrêt du 18 mai 2005, la Haute Juridiction a considéré que la présomption ne pouvait être utilement combattue. Or, au cas particulier, après avoir cédé son fonds de commerce d'hôtel, la société détenait des liquidités pour un montant de 14,6 millions d'euros, lesquelles étaient restées inutilisées durant plus de quatre ans.
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par Julien Prigent, Avocat à la cour d'appel de Paris
Le 07 Octobre 2010
Le statut des baux commerciaux n'est, en principe, applicable qu'au bail consenti sur un immeuble dans lequel est exploité un commerce. La destination que les parties souhaitent donner à un local n'est pas toujours libre en raison de l'existence de règles d'urbanisme, notamment, celles relatives à l'interdiction du changement d'usage des locaux d'habitation (article L. 631-7 N° Lexbase : L6472G9L et ss. du Code de la construction et de l'habitation). Il est rappelé que le changement d'affectation prohibé est sanctionné par la nullité de la convention contraire et que, dans cette hypothèse, le bailleur, en vertu de son obligation de délivrance, pourrait voir sa responsabilité contractuelle engagée. Il appartient également aux rédacteurs d'acte d'être vigilant sur ce point.
Cette police du changement de l'affectation des locaux à usage d'habitation a récemment fait l'objet d'une réforme par l'ordonnance du 8 juin 2005. Cette réforme a fait l'objet d'un commentaire dans la revue Lexbase Hebdo - édition affaires. Notons que l'arrêté préfectoral portant application à Paris des nouveaux articles L. 631-7 et suivants du Code de la construction et de l'habitation a été récemment publié (arrêté préfectoral n° 2005-335-4 du 1er décembre 2005 portant application à Paris des dispositions des articles L. 631-7 et suivants du Code de la construction et de l'habitation).
(Sur ce sujet, lire J. Prigent, La réforme de la police du changement d'affectation des immeubles, Lexbase Hebdo n° 176 du 14 juillet 2005 - édition affaires N° Lexbase : N6601AIC (1ère partie) et Lexbase Hebdo n° 177 du 21 juillet 2005 - édition affaires N° Lexbase : N6686AIH (2nde partie)).
Le fait qu'une clause déroge au statut des baux commerciaux en conférant un caractère précaire au droit concédé à l'occupant ne suffit pas à lui seul à la qualifier de clause exorbitante du droit commun.
Le statut des baux commerciaux peut s'appliquer à la convention conclue par l'Administration sur son domaine privé dès lors qu'elle entre dans son champ d'application (Cass. civ. 3, 30 janvier 2002, n° 00-17.342, FS-P+B N° Lexbase : A8905AX4). Toutefois, lorsque la convention peut être qualifiée de contrat administratif, l'application du statut doit être écartée (Cass. civ. 3, 31 octobre 2000, n° 98-21.195, Mme Dominique de la Varde et autres c/ Commune de Touques, prise en la personne de son maire en exercice N° Lexbase : A9369AT8). Le critère de qualification du contrat administratif réside dans l'existence de clauses exorbitantes du droit commun (Cass. civ. 1, 3 juin 1969, n° 66-12.454, Mas c/ Société Agathoise de spectacles N° Lexbase : A2927AUX). La Cour de cassation précise, dans cet arrêt du 9 février 2005, que la clause conférant un caractère précaire au droit de l'occupant ne suffit pas à elle seule à permettre de la qualifier d'exorbitante du droit commun et à qualifier le contrat de droit administratif. La solution doit être approuvée dans la mesure où les règles de répartition des compétences entre l'ordre judiciaire et administratif sont d'ordre public et que la solution contraire permettrait à l'Administration d'écarter en toute hypothèse l'application du statut des baux commerciaux dont certaines règles sont également d'ordre public.
La nullité du contrat de location-gérance consenti par le loueur qui ne justifie pas de deux années d'exploitation du fonds fait obstacle à ce que le locataire-gérant demande la requalification de ce contrat en bail commercial.
Le statut des baux commerciaux n'est pas applicable au contrat de location-gérance (voir encore, récemment, Cass. com., 12 avril 2005, n° 02-13.605, Mme Mireille Massiani, agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de M. Gianati c/ M. Giovanni Gianati N° Lexbase : A8586DHH). Ce dernier n'entre, en effet, pas dans le champ d'application du statut dans la mesure où la chose donnée à bail n'est pas un immeuble dans lequel est exploité un fonds de commerce mais le fonds de commerce lui-même. Il arrive, cependant, que le contrat de location-gérance masque en réalité un véritable bail commercial, notamment, lorsque aucune clientèle n'est mise à la disposition du prétendu locataire-gérant. Dans ce cas, le juge donne à la convention sa véritable qualification et le preneur peut prétendre au bénéfice des dispositions du statut des baux commerciaux (Cass. civ. 3, 30 janvier 2002, n° 00-17.342, FS-P+B N° Lexbase : A8905AX4).
L'arrêt rapporté, sur le fondement des règles propres à la location-gérance, trace une limite à cette possibilité de requalification. Un fonds de commerce ne peut, en effet, être donné en location-gérance qu'à la condition, en principe, d'avoir fait l'objet d'une exploitation pendant deux années (C. com., art. L. 144-3 N° Lexbase : L3187DYP), cette règle étant sanctionnée par la nullité qui entraîne "à l'égard des contractants la déchéance des droits qu'ils pourraient éventuellement tenir du statut des baux commerciaux" (C. com., art. L. 145-10 N° Lexbase : L5738AID). A défaut, et c'est l'apport de l'arrêt commenté, le locataire-gérant ne pourra prétendre à la requalification de sa convention et à l'application corrélative du statut des baux commerciaux.
(Sur ce sujet, lire Julien Prigent, Des conséquences de la nullité d'un contrat qualifié de location-gérance sur sa requalification en bail commercial, Lexbase Hebdo n° 171 du 9 juin 2005 - édition affaires N° Lexbase : N5260AIN).
Le statut des baux commerciaux ne s'applique pas au bail portant sur un local situé dans l'enceinte d'un autre établissement si l'exploitant du fonds de commerce est soumis à des contraintes incompatibles avec le libre exercice de son activité.
L'application du statut des baux commerciaux au "commerce intégré", c'est-à-dire au commerce exploité dans l'enceinte d'un autre établissement, n'est pas évidente dans la mesure où la question se pose de savoir si, dans ce cas, le locataire dispose d'une véritable clientèle et, partant, d'un fonds de commerce. La Cour de cassation avait précisé que le locataire exploitant un tel commerce pouvait prétendre à l'application du statut dès lors qu'il dispose, d'une part, d'une clientèle propre, sans qu'il soit exigé que cette dernière soit prédominante à celle reçue de l'établissement accueillant son activité (Cass. civ. 3, 19 mars 2003, n° 01-17.679, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A5367A7W) et, d'autre part, d'une autonomie de gestion (voir, par exemple, Cass. civ. 3, 5 avril 1995, n° 93-14.864, Société Union lainière c/ Groupement d'intérêt économique Le Trident N° Lexbase : A7772ABH et Cass. civ. 3, 1er octobre 2003, n° 02-11.239, FS-P+B (N° Lexbase : A6683C9E). L'arrêt rapporté du 19 janvier 2005 confirme ces solutions avec deux nuances cependant. Tout d'abord, à la notion d'autonomie de gestion est substituée celle d'absence de contraintes incompatibles avec le libre exercice de l'activité. Ensuite, cette décision semble opérer une modification de la charge de la preuve dans la mesure où il appartiendra au bailleur d'apporter la preuve de l'existence de contraintes incompatibles avec le libre exercice de l'activité.
(Sur ce sujet, lire J. Prigent, L'application du statut des baux commerciaux aux commerces intégrés, Lexbase Hebdo n° 156 du 23 février 2005 - édition affaires N° Lexbase : N4757ABS).
II - La durée du bail commercial
La seule circonstance que la durée du bail est fixée pour une période inférieure à deux ans ne suffit pas à caractériser un bail dérogatoire au statut des baux commerciaux. En consentant un bail dont les clauses, charges et conditions résultent d'un bail commercial hormis la durée, le bailleur exprime sa volonté de conférer au locataire, non un bail précaire, échappant au statut des baux commerciaux, mais un bail soumis audit statut.
L'article L. 145-5 du Code de commerce (N° Lexbase : L5733AI8) offre aux parties la possibilité, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, de déroger aux dispositions du statut des baux commerciaux, à la condition que le bail soit conclu pour une durée au plus égale à deux ans. La Cour de cassation avait, semble-t-il, jugé que la seule durée du contrat inférieure à deux années permettait de le qualifier de bail dérogatoire et de faire obstacle à l'application du statut (Cass. civ. 3, 8 novembre 1972, n° 71-13.008, Boudes c/ Choisy N° Lexbase : A6812AGE).
L'arrêt rapporté adopte une solution contraire très claire : la seule durée ne suffit pas à caractériser l'existence d'un bail dérogatoire. Il appartient donc aux parties, et à leurs rédacteurs, qui entendent conclure un tel bail, de spécifier expressément leur intention.
III - La résiliation du bail commercial
1 - La clause résolutoire
NB : aux termes de l'article L. 145-41 du Code de commerce (N° Lexbase : L5769AII), "toute clause insérée dans [un bail commercial] prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai".
La Cour de cassation a rappelé que la nécessité de la délivrance d'un commandement préalable, même lorsque l'infraction est instantanée, en l'espèce, l'absence d'intervention du bailleur à l'acte de cession.
Lorsque le mandat est délivré à la requête du bailleur représenté par le mandataire, il faudra être vigilant sur l'existence, voire l'étendue, des pouvoirs de ce dernier. Il a été jugé, en effet, qu'un tel commandement est nul et que cette nullité peut être invoquée par le locataire, lorsque le mandat de gestion conféré à l'administrateur de biens est nul. Dans cet arrêt, la nullité du mandat, que la Cour de cassation qualifie d'ordre public, trouvait son origine dans l'application des dispositions de l'article 7 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 (N° Lexbase : L7549AIG) qui dispose que "sont nulles les promesses et les conventions de toute nature relatives aux opérations visées à l'article 1er [de la loi du 2 janvier 1970 N° Lexbase : L7537AIY qui ne comportent pas une limitation de leurs effets dans le temps". Le mandat, d'une durée initiale de un an, prévoyait en effet son renouvellement tacite pour la même période, sans limitation de durée.
NB : l'alinéa 2 de l'article L. 145-41 du Code de commerce reconnaît au juge la faculté de suspendre les effets de la clause résolutoire qui ne jouera pas si le débiteur se libère dans les conditions fixées par le juge.
Il a été rappelé que le juge, saisi d'une demande de délai avec suspension des effets de la clause résolutoire, dispose d'un pouvoir discrétionnaire d'appréciation pour refuser de suspendre les effets d'une telle clause.
Si la solution ne faisait guère de doute, notamment par une interprétation a contrario de la dernière phrase de l'article L. 145-41 du Code de commerce, la Cour de cassation a expressément posé la règle selon laquelle le juge doit subordonner les délais accordés et la suspension des effets de la clause résolutoire au règlement des causes du commandement préalable au jeu de la clause résolutoire du bail commercial.
2 - La fin du bail commercial en cas de procédure collective
La loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises modifie les règles applicables au sort du bail commercial en cours à l'ouverture d'une procédure collective à l'égard de l'un des contractants, notamment, à l'égard du preneur. Cette réforme, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2006, suscite de nombreuses incertitudes.
(Sur ce sujet, lire J. Prigent, Réforme des procédures collectives : le sort du bail commercial en cours au jour de l'ouverture de la procédure, Lexbase Hebdo n° 181 du 15 septembre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N8462AIA).
La Cour de cassation a affirmé qu'en présence de copreneurs, la seule volonté d'un locataire de résilier le bail ne pouvait suffire à mettre fin au contrat à l'égard des autres copreneurs.
Les circonstances dans lesquelles cette décision a été rendue sont particulières dans la mesure où la résiliation du bail résultait de l'initiative du liquidateur de la société qui était colocataire du bail. Néanmoins, la solution devrait avoir une portée générale et devrait également trouver à s'appliquer en présence d'un congé qui, à proprement parler, n'entraîne pas la résiliation du bail mais la cessation de ce dernier à sa date d'effet. La Haute cour, dans l'espèce rapportée, réserve néanmoins la possibilité aux parties de prévoir une stipulation expresse contraire au bail.
L'article L. 621-28 du Code de commerce (N° Lexbase : L6880AIN) dispose que le contrat en cours au jour du jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire est résilié de plein droit après une mise en demeure adressée à l'administrateur restée infructueuse plus de un mois sans réponse. En présence d'une liquidation judiciaire, l'article L. 622-12 du Code de commerce (N° Lexbase : L7007AID) reconnaît au liquidateur la faculté d'exiger la continuation des contrats en cours dans les conditions de l'article L. 621-28 précité. La question s'est posée de savoir si le refus de l'organe compétent de continuer un contrat en cours, notamment un bail commercial, peut entraîner également la résiliation de plein droit de ce dernier ou si cet effet devait être réservé à l'hypothèse où une mise en demeure préalable d'avoir à opter lui avait été notifiée. La Cour de cassation s'était prononcée en faveur de la première solution en affirmant "qu'en l'absence de mise en demeure par le cocontractant, la renonciation de l'administrateur à la poursuite du contrat n'entraîne pas la résiliation de plein droit de la convention à son initiative mais confère au seul cocontractant le droit de la faire prononcer en justice" (Cass. com., 19 mai 2004, n° 01-13.542, FS-P+B+I N° Lexbase : A2479DCS).
L'arrêt rapporté du 5 juillet 2005 réitère la solution, en des termes similaires, dans une hypothèse où le débiteur était en liquidation judiciaire. Cette décision est également intéressante en ce que le débiteur était le bailleur et non le preneur, l'application des règles relatives à la continuation des contrats en cours dans une telle configuration étant discutée. Il faut toutefois relever que ce point n'a pas fait, dans cette décision, l'objet d'un débat (sur ces points, voir J. Prigent, Les effets de l'ouverture d'une procédure collective sur le sort du bail commercial en cours, Revue des loyers 2005, n° 861/216).
IV - Le loyer du bail commercial
1 - La clause d'indexation
Il n'est pas rare que les parties stipulent, lors de la conclusion d'un bail commercial, une clause d'indexation automatique du loyer. La validité des clauses d'indexation est soumise à certaines conditions prévues aux articles L. 112-1 (N° Lexbase : L9702DYY) et L. 112-2 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L3375APP). Ainsi, aux termes du second de ces textes, "dans les dispositions [...] conventionnelles, est interdite toute clause prévoyant des indexations fondées sur le salaire minimum de croissance, sur le niveau général des prix ou des salaires ou sur les prix des biens, produits ou services n'ayant pas de relation directe avec l'objet du statut ou de la convention ou avec l'activité de l'une des parties. Est réputée en relation directe avec l'objet d'une convention relative à un immeuble bâti toute clause prévoyant une indexation sur la variation de l'indice national du coût de la construction publié par l'Institut national des statistiques et des études économiques". Le premier proscrit la "prise en compte d'une période de variation de l'indice supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision".
La Cour de cassation a, cette année, dans un arrêt en date du 18 octobre 2005, précisé que la clause qui prévoit une monnaie de paiement étrangère équivaut à une indexation dont la référence n'a aucune relation avec l'une ou l'autre des parties. Elle avait consacré un an auparavant une solution analogue en affirmant que "la stipulation du bail fixant le prix du loyer en dollars n'[ayant] été prévue que comme unité de compte, cette stipulation, en visant à garantir un prix par référence à une monnaie étrangère, constituait une indexation sans rapport avec l'objet du contrat et qu'il s'agissait d'une indexation déguisée prohibée par l'article L. 112-2 du Code monétaire et financier/I>" (Cass. civ. 2, 21 octobre 2004, n° 02-21.664, FS-D N° Lexbase : A6428DDG). Elle pose, désormais, clairement, dans l'arrêt du 18 octobre 2005, que la monnaie de paiement doit être nécessairement le franc ou l'euro.
Elle précise, enfin, la sanction de la stipulation d'une clause d'indexation prohibée : la clause est nulle et la somme versée par le preneur, en application de la clause d'indexation doit être restituée. Il avait déjà été jugé que la nullité d'une telle clause ne pouvait entraîner la nullité du bail en son entier, sous peine de faire échec au droit au renouvellement du locataire (Cass. civ. 3, 9 juillet 1973, n° 72-12.660, Pecquet c/ Plan Cadran N° Lexbase : A6917AGB).
2 - La fixation judiciaire du loyer
En cas de désaccord des parties sur le montant du loyer à l'occasion d'une révision ou, le plus souvent, d'un renouvellement, ces dernières peuvent saisir le juge des loyers afin de voir le prix du bail judiciairement fixé. Sous réserve de l'application du plafonnement ou des modalités de fixation du loyer propres à certains locaux, le loyer est alors fixé à la valeur locative, eu égard aux caractéristiques du local, de sa destination, des obligations des parties, des facteurs de commercialité et des prix du marché. (C. com., art. L. 145-33 N° Lexbase : L5761AI9). La Cour de cassation a de nouveau affirmé, dans un arrêt du 6 juillet 2005, que le juge fixant la valeur locative d'un local commercial renouvelé est libre d'adopter le mode de calcul qui lui parait le meilleur (voir, en ce sens, Cass. civ. 3, 16 octobre 1974, n° 73-12.175, Franchi c/ Mayrihnac N° Lexbase : A6996AG9, Cass. civ. 3, 3 juin 2004, n° 03-12.202, M. Jean Claude Navarre c/ Société civile immobilière (SCI) Fraca, FS-P+B N° Lexbase : A5228DCM). En conséquence, toujours selon cette décision et selon les arguments invoqués au moyen, les juges du fonds pouvaient valablement refuser, en présence d'un loyer dit à l'américaine pour lequel le prix du bail initial, supérieur à la valeur locative moyenne des locaux semblables dans le même secteur, incluait partie du droit au bail, de limiter le montant du loyer du bail renouvelé à la valeur locative technique.
Le loyer du bail commercial renouvelé peut être déplafonné en présence d'une modification notable de certains des éléments de la valeur locative (C. com., art. L. 145-34 N° Lexbase : L5762AIA), dont les facteurs locaux de commercialité (décret n° 53-960 du 30 septembre 1953, art. 23-4 N° Lexbase : L3439AHT).
La cour d'appel de Paris a jugé, à ce propos, que la venue d'enseignes de luxe dans le quartier Saint-Germain-des-Prés n'impliquait pas nécessairement un impact sur la commercialité et une modification corrélative des facteurs locaux de commercialité, cette implantation trouvant sa raison d'être dans la volonté d'une enseigne connue d'être présente à cette adresse.
Le statut des baux commerciaux, en protégeant le locataire et le fonds de commerce de ce dernier, restreint nécessairement les droits du bailleur qui, le plus souvent, est également propriétaire du bien objet du bail commercial. La question s'est donc rapidement posée de la compatibilité entre ces restrictions au droit de propriété et l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme (N° Lexbase : L1625AZ9) qui protège ce droit et en limite les atteintes. L'occasion a été donnée à la cour d'appel d'Amiens de procéder au contrôle de conventionnalité de la règle du plafonnement (C. com. art. L. 145-34). En effet, lorsqu'elle n'est pas écartée, elle aboutit à imposer au bailleur un loyer dont le montant est souvent très inférieur à la valeur du marché. Selon les juges amiénois, la règle de plafonnement n'est pas contraire à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du citoyen dans la mesure où elle n'est pas d'application obligatoire, puisque les parties peuvent décider d'y déroger. Il est vrai qu'il est désormais acquis que les parties peuvent librement, dès la conclusion du bail initial, fixer les modalités de fixation du loyer du bail renouvelé (Cass. civ. 3, 27 octobre 2004, n° 03-15.769, FS-P+B N° Lexbase : A7412DDU). Il n'est d'ailleurs pas certain que la solution eut été contraire même si la règle était d'ordre public, la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme autorisant les Etats, à certaines conditions, à réglementer l'usage des biens et la Cour européenne des droits de l'homme leur accordant sur ce point une grande marge d'appréciation.
Pour la 2ème partie de cet article, lire (N° Lexbase : N6352AKH)
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par D. M.
Le 07 Octobre 2010
I - Etablissement de crédit
La transposition de la Directive concernant l'assainissement et la liquidation des établissements de crédit (n° 2001/24/CE N° Lexbase : L8085AUY), réalisée par voie d'ordonnance le 21 octobre 2004 (n° 2004-1127 (N° Lexbase : L3705GUR), a introduit les articles L. 613-25 à L. 613-31 dans le Code monétaire et financier (N° Lexbase : L8072G3D) (lire : Assainissement et liquidation des établissements de crédit communautaires : transposition de la directive du 4 avril 2001 N° Lexbase : N3366ABB). Le décret d'application de cette ordonnance (décret n° 2005-468 du 12 mai 2005 N° Lexbase : L4620G8M) définit, en cinq articles, les mesures de protection et d'information des autorités compétentes et des créanciers.
L'exercice de la profession de banquier fait l'objet d'un monopole (C. mon. fin., art. L. 511-5 N° Lexbase : L9481DYS) et suppose l'obtention d'un agrément (C. mon. fin., art. L. 511-10 N° Lexbase : L8132G3L). Néanmoins, aucun texte ne prévoit de sanction civile au défaut d'agrément. La jurisprudence a, donc, dû palier cette carence législative, et, dans un très important arrêt, largement commenté, l'Assemblée plénière (Ass. plén., 4 mars 2005, n° 03-11.725, M. Hubert Van Haare Heijmeijer c/ Société AXA Bank, N.R N° Lexbase : A2016DH7) a décidé que "la seule méconnaissance par un établissement de crédit de l'exigence d'agrément [...] n'est pas de nature à entraîner la nullité des contrats qu'il a conclu". Le 7 juin 2005, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a été saisie du même contentieux.
(Sur ce sujet, lire Jean-Pierre Arrighi, Le défaut d'agrément bancaire est-il dépourvu de sanction civile ?, Lexbase Hebdo n° 163 du 13 avril 2005 - édition affaires N° Lexbase : N3082AIY ; D. Mancel, Contrats conclus par un établissement de crédit non agréé : une jurisprudence entérinée, Lexbase Hebdo n° 173 du 23 juin 2005 - édition affaires N° Lexbase : N5769AII).
Le 19 septembre 2005, le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (CECEI) s'est prononcé sur la désignation des dirigeants responsables des établissements de crédit et des entreprises d'investissement et a confirmé son souhait d'éviter, au sein de ces établissements, une augmentation du nombre des dirigeants et une dilution de leurs responsabilités. Le CECEI se prononce sur la désignation de tout nouveau dirigeant responsable, au sens des articles L. 511-13 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L3959APC) pour les établissements de crédit et L. 532 -2 du même code (N° Lexbase : L4969DZ3) pour les entreprises d'investissement.
II - Obligations du banquier
1 - Obligation d'information
En matière d'opération spéculative sur le marché à terme, l'établissement de crédit se doit d'informer, préalablement, son client sur les risques qu'il encourt. La Chambre commerciale de la Cour de cassation s'est récemment prononcée sur le manquement à cette obligation pré-contractuelle d'information. Dans l'espèce rapportée, la Chambre commerciale rejette la demande du client, la preuve n'ayant pas été établie qu'un tel manquement aurait été commis sciemment dans l'intention de provoquer, dans l 'esprit du client, une erreur déterminante de son consentement.
Selon l'article L. 313-22 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L2923G97), "les établissements de crédit, ayant accordé un concours financier à une entreprise, doivent informer annuellement les cautions du montant de la dette, du terme de l'engagement ainsi que de la faculté et des conditions de révocation de celui-ci". La Cour de cassation affirme que l'envoi de lettres recommandées précisant les sommes dues en principal, d'une part, et, en intérêts, d'autre part, suffit pour que l'obligation annuelle d'information soit remplie.
(Sur ce sujet, lire A. Le Gars, Constance de la jurisprudence à propos de la date d'appréciation de la valeur d'un droit préférentiel susceptible d'être transmis par subrogation à la caution, Lexbase Hebdo n° 183 du 29 septembre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N8943AI3).
L'absence d'information est sanctionnée par la déchéance du créancier du droit aux intérêts conventionnels échus, en totalité pour les deux prêts, l'arrêt d'appel condamnant la caution à une somme aux échéances impayées sur l'un des prêts, avec intérêts au taux légal. Les magistrats de la Cour de cassation cassent et annulent l'arrêt d'appel, les juges du fond n'ayant pas recherché si les échéances impayées ne comprenaient pas, pour partie, des intérêts contractuels, dont ils avaient prononcé la déchéance.
L'article L. 131-73, alinéa 1er, du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L3089G9B) dispose que le banquier "peut, après avoir informé par tout moyen approprié mis à disposition par lui le titulaire du compte des conséquences du défaut de provision, refuser le paiement d'un chèque pour défaut de provision". Cette nouvelle disposition impose, désormais, aux établissements de crédit une obligation d'information à l'égard du tireur d'un chèque ayant fait l'objet d'un incident de paiement, sans pour autant préciser son régime.
(Sur ce point, Lire J.-P. Arrighi, L'obligation d'information du banquier préalablement à l'interdiction bancaire, Lexbase Hebdo n° 178 du 28 juillet 2005 - édition affaires N° Lexbase : N7080AI3).
2 - Obligation de conseil
Selon la Cour de cassation, les établissements de crédit sont tenus envers l'emprunteur d'une obligation d'information et de conseil qui ne s'achève pas avec la remise de la notice d'information. De plus, la banque commet une faute en remettant aux époux "un tableau d'amortissement incluant les cotisations d'assurances constantes jusqu 'au terme du prêt, créant ainsi l'apparence trompeuse d'une garantie totale jusqu 'à cette date".
Un arrêt de la cour d'appel de Paris vient entériner la traditionnelle jurisprudence selon laquelle le client doit démontrer que la banque aurait eu sur ses revenus, son patrimoine et ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles en l'état escompté de l'opération commerciale entreprise, des informations qu'il aurait lui-même ignorées.
3- Le secret bancaire
Ainsi que l'indique l'article 511-33 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L9509DYT), "le secret professionnel ne peut être opposé ni à la commission bancaire, ni à la Banque de France, ni à l'autorité judiciaire agissant dans le cadre d'une procédure pénale". Dans tous les autres cas, le banquier peut être justifié à opposer le secret bancaire, lorsqu'il lui est demandé de communiquer certains documents professionnels. Lorsque des acquéreurs ne sont pas bénéficiaires de documents et que le secret constitue bien un empêchement légitime opposable au juge civil, la banque est légitimement fondée à opposer le secret bancaire pour refuser la communication sollicitée.
4 - Autres obligations
La Cour de cassation rappelle que la banque est tenue, en tant que gestionnaire de comptes, d'éclairer sa clientèle sur le choix qui s'offrait à elle, entre le recours au crédit et la mobilisation de l'épargne. L'obligation d'information et de conseil du banquier empiète, une fois de plus, sur son devoir de non-ingérence. Dans cet arrêt, les obligations mises à la charge du banquier supposent, donc, que celui-ci conseille sa clientèle sur l'opportunité des opérations réalisées, sans quoi sa responsabilité sera engagée.
Récemment, déjà, la première chambre civile de la Cour de cassation avait retenu la responsabilité de la banque au motif qu'elle avait manqué à son devoir de mise en garde (Cass. civ. 1, 8 juin 2004, n° 02-12.185, M. Jean- Claude Madec c/ Caisse régionale du Crédit agricole mutuel (CRCAM) du Finistère, FS-P+B N° Lexbase : A6123DCR). Récemment, la Cour de cassation a décidé que l'établissement de crédit qui n'a pas, avant d'apporter son concours aux débiteurs, vérifié les capacités financières de ces derniers, emprunteurs profanes, n'a pas rempli son devoir de mise en garde auquel il est tenu à leur égard.
(Sur ce sujet, lire R. Routier, Nouveau contour de l'obligation du prêteur de mettre en garde l'emprunteur profane, Lexbase Hebdo n° 94 du 15 décembre 2005 - édition affaires N° Lexbase : A3277DLX).
Pour les juges d'appel, la banque en se portant contrepartie par personnes interposées et en n'informant pas loyalement son client n'a pas respecté les obligations résultant de son mandat. Dès lors, le préjudice subi par le mandant doit être réparé.
(Sur ce sujet, lire R. Routier, L'obligation de loyauté du banquier mandataire, Lexbase Hebdo n° 184 du 6 octobre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N9275AID).
III - Opération de banque
Aux termes d'un arrêt du 22 février 2005, la Cour de cassation précise que l'établissement de crédit qui propose aux emprunteurs d'adhérer à une assurance pour garantir un emprunt, agit dans le cadre d'une opération de banque qu'il pratique habituellement. De ce fait, la prescription décennale, prévue par l'article L. 110-4-1 (N° Lexbase : L5548AIC) du Code de commerce, est applicable.
L'arrêté portant application de l'article L. 312-1-1 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L9609G7Z) précisant les principales stipulations devant figurer dans les conventions de compte de dépôt, en date du 8 mars 2005, a été publié au Journal officiel du 16 mars. La principale disposition de l'arrêté stipule que "la gestion d'un compte de dépôt, et notamment ses conditions d'ouverture, de fonctionnement et de clôture, est réglée par une convention écrite passée entre le client et son établissement de crédit ou organisme visé à l'article L. 518-1 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L6335DIH)".
Un arrêté, en date du 4 avril 2005, portant application de l'article L. 312-1-1 du Code monétaire et financier fixant les modalités d'information de la clientèle et du public sur les conditions générales et tarifaires applicables aux opérations relatives à la gestion d'un compte de dépôt, a été publié au Journal officiel du 5 avril 2005. L'article premier de l'arrêté précise que "l'information de la clientèle et du public sur les prix des produits et services liés à la gestion d'un compte de dépôt doit se faire par voie d'affichage, de manière visible et lisible, et de dépliants tarifaires en libre-service, dans les locaux de réception du public".
IV - Opération de crédit
1 - Prêt
Pour la Chambre commerciale de la Cour de cassation, "la règle selon laquelle l 'exception de nullité est perpétuelle ne peut être invoquée par l'emprunteur qui agit en annulation du prêt, fût-ce en réponse à un commandement aux fins de saisie immobilière du bien dont l'acquisition a été financée par ce prêt". En revanche, les emprunteurs peuvent obtenir la mise en jeu de la responsabilité de la banque sur le fondement de l'article 1147 du Code civil (N° Lexbase : L1248ABT). Sur ce point, la Haute cour approuve la cour d'appel, celle-ci ayant retenu que la banque avait méconnu ses obligations à l'égard de ses emprunteurs profanes, en ne vérifiant pas leurs capacités financières et en leur accordant un prêt excessif au regard de leurs facultés contributives, manquant, ainsi, à son devoir de mise en garde.
(Sur ce sujet, lire D. Bakouche, L'intensité du devoir d'information et de conseil en matière contractuelle, Lexbase Hebdo n° 190 du 17 novembre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N0756AK9).
"La remise d'un chèque à l'ordre [d'un bénéficiaire ayant reconnu l'existence d'un prêt] établit nécessairement qu'il avait été personnellement destinataire du transfert de fonds que ce chèque avait permis de réaliser ce dont il se déduisait que c'était à l'intéressé d'établir qu'il pouvait ne pas être tenu à restitution". Telle est la solution retenue par la Cour de cassation dans un arrêt du 12 juillet 2005.
Selon l'article 220 du Code civil (N° Lexbase : L2389AB4), "chacun des époux a pouvoir pour passer seul les contrats qui ont pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants : toute dette ainsi contractée par l'un oblige l'autre solidairement. La solidarité n'a pas lieu, néanmoins, pour des dépenses manifestement excessives, eu égard au train de vie du ménage, à l'utilité ou à l'inutilité de l'opération, à la bonne ou mauvaise foi du tiers contractant". Pour la Cour de cassation, les juges d'appel n'ont pas recherché si l'emprunt portait sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante du ménage, ainsi que l'atteste l'article 220 du Code civil.
En matière d'ouverture de crédit et d'obligation aux dettes du mariage, les juges du fond doivent rechercher si l'époux a donné son consentement exprès à l'emprunt et, également, si les fonds empruntés portaient sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante du ménage.
2 - Surendettement des particuliers
Le juge de l'exécution n'a pas à statuer sur la déchéance du bénéfice des dispositions relatives au traitement des situations de surendettement puisqu'il n'a pas été saisi sur ce sujet. Ni le jugement antérieur, ni les pièces de la procédure n'autorisent le juge à fonder sa décision sur des moyens non invoqués par les parties.
Selon l'article L. 331-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L6791AB7), dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2003-710 (N° Lexbase : L3556BLB), "la commission a pour mission de traiter, dans les conditions prévues par le présent chapitre, la situation de surendettement des personnes physiques, caractérisée par l'impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir". Pour la Cour de cassation, il appartient aux débiteurs, sollicitant le bénéfice d'une telle procédure, de fournir tous les éléments de leur actif immobilier. Ainsi, cette recherche permet d'obtenir la valeur des biens et, par leur aliénation, la capacité de faire face ou non à leurs dettes.
Comme l'atteste l'article L. 331-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L6938G74), "seuls peuvent bénéficier de la procédure de surendettement [...] les débiteurs de bonne foi". A ce titre, c'est à la Commission de surendettement et, après recours, au juge de l'exécution, d'apprécier cette bonne foi (Cass. civ. 1, 4 avril 1991, n° 90-04.008, F-P+B N° Lexbase : A4944AHL). Pour les magistrats de la Haute juridiction, le juge de l'exécution aurait dû statuer sur les créances actuelles du débiteur afin d'apprécier la bonne foi du débiteur.
Lorsqu'il rejette une demande de traitement de situation de surendettement, le juge est communément tenu de préciser les éléments susceptibles de caractériser la mauvaise foi du demandeur (Cass. civ. 1, 23 février 1999, n° 97-01.077, F-P+B N° Lexbase : A7432A3N). Pour les magistrats de la Cour de cassation, la demande du débiteur est recevable lorsqu'elle répond aux critères énumérés par la loi. Or, la lettre de l'article L. 330-1 du Code de la consommation dispose que seuls peuvent bénéficier de la procédure de surendettement des articles L. 331-1 et suivants du Code de la consommation (N° Lexbase : L6790AB4), les débiteurs de bonne foi. Aussi, la négligence n'est-elle pas un motif d'irrecevabilité de la demande.
Les procédures de traitement des situations de surendettement, prévues par les articles L. 331-1 et suivants de Code de la consommation (N° Lexbase : L6790AB4), sont réservées aux personnes physiques. Néanmoins, aucune disposition de droit positif n'exige, pour que la demande de traitement d'une situation de surendettement, formée par deux époux, soit recevable, que ceux-ci demeurent dans les liens du mariage lors de l'élaboration du plan.
Les magistrats de la Cour de cassation, dans un arrêt promis aux honneurs du Bulletin annuel, cassent et annulent le jugement du juge de l'exécution, le débiteur n'ayant pas bénéficié du concours d'un avocat alors qu'il avait obtenu, avant le prononcé du jugement, l'aide juridictionnelle qu'il avait sollicitée.
Selon l'article L. 332-3 du Code de la consommation (N° Lexbase : L6804ABM), "le juge saisi de la contestation prévue à l'article L. 332-2 (N° Lexbase : L6803ABL) prend tout ou partie des mesures définies à l'article L. 331-7 (N° Lexbase : L6796ABC) ou à l'article L. 331-7-1 (N° Lexbase : L6797ABD). Dans tous les cas, la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage est déterminée comme il est dit au deuxième alinéa de l'article L. 331-2 (N° Lexbase : L6938G74). Elle est mentionnée dans la décision". Pour la Cour de cassation, les juges d'appel, sont investis de la mission de traiter l'ensemble de la situation de surendettement des débiteurs sans pouvoir écarter des créances qui n'avaient pas été déclarées devant la commission.
3 - Clauses abusives
Sont déclarées abusives et illicites la clause prévoyant la délivrance de l'information exigée par l'article L. 311-9 du Code de la consommation (N° Lexbase : L6734ABZ) et les clauses du contrat prévoyant une clause pénale pour une faute extra-contractuelle. En effet, la cour d'appel a parfaitement fondé sa décision en retenant l'action préventive de clauses abusives ouverte aux associations des consommateurs agréées en application des dispositions de l'article L. 421-6 du Code de la consommation (N° Lexbase : L6513ABT).
La Commission des clauses abusives (CCC) a eu l'occasion, le 15 avril dernier, de se prononcer sur le caractère abusif d'une clause résolutoire insérée dans des contrats de crédit permanent. La clause selon laquelle "le contrat sera résilié et les sommes dues seront immédiatement, et de plein droit, exigibles, s'il convient au prêteur, dans les cas prévus par la loi et dans les cas suivants : renseignements ou documents fournis faux ou inexacts ; non-respect de l'un quelconque des engagements de l'emprunteur résultant du contrat, notamment de règlement à son échéance d'une mensualité ; décès de l'emprunteur, d'un co-emprunteur solidaire ou d'une caution ; interdiction légale ou judiciaire d'émettre des chèques ; règlement amiable ou redressement judiciaire civil de l'emprunteur", ne présente pas de caractère abusif, en ce qu'elle prévoit la résiliation de plein droit du contrat, d'une part, en cas de défaut de règlement d'une mensualité à son échéance et, d'autre part, en cas de décès de l'emprunteur. En revanche, elle considère que la clause litigieuse présente un caractère abusif pour les autres causes de résiliation de plein droit qu'elle prévoit, et qui sont étrangères au manquement, par l'emprunteur, à son obligation essentielle ou se rapportent à des informations qui ne sont pas de nature à éclairer le prêteur sur le risque de défaillance de l'emprunteur.
(Sur ce point, lire D. Mancel, L'égalité "forcée" dans le contrat de prêt personnel, Lexbase Hebdo n° 181 du 15 septembre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N8367AIQ).
Aux termes de l'article 1229 du Code civil (N° Lexbase : L1343ABD), "la clause pénale est la compensation des dommages et intérêts que le créancier souffre de l 'inexécution de l'obligation principale", l'article 1152 du même code (N° Lexbase : L1253ABZ) permettant au juge d'en atténuer le montant si celle-ci lui apparaît excessive. La Cour de cassation refuse de reconnaître dans la clause contestée (clause prévoyant qu'en cas de retrait de fonds ou de transfert dans un autre établissement, le souscripteur perdait une partie des intérêts versés, cette sanction diminuant en même temps que la durée de souscription augmentait) une clause pénale dans la mesure où "le transfert constituait une faculté ouverte à l'épargnant, en sorte que l'indemnité forfaitaire convenue par avance ne sanctionnait pas l'inexécution d'une obligation contractuelle".
(Sur ce point, lire D. Bakouche, La clause prévoyant une diminution des intérêts en cas de transfert de fonds d'un établissement bancaire à un autre n'est pas une clause pénale, Lexbase Hebdo n° 178 du 28 juillet 2005 - édition affaires N° Lexbase : N6953AID).
4 - Forclusion
La Cour de cassation rappelle, une nouvelle fois, la règle selon laquelle le point de départ d'un délai à l'expiration duquel une action ne peut plus s'exercer se situe à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance (C. consom., art. L. 311-37 N° Lexbase : L6496AB9).
Lorsque les parties sont convenues d'un découvert en compte d'un montant limité, le dépassement de ce découvert manifeste la défaillance de l'emprunteur et constitue le point de départ du délai biennal de forclusion. Par conséquent, le dépassement de découvert est considéré comme une échéance impayée et l'action de la banque, introduite plus de deux ans après celui-ci, ne peut être recevable.
Ainsi que l'atteste l'article L. 311-37 du Code de la consommation (N° Lexbase : L6496AB9), le délai biennal de forclusion court, dans le cas d'une ouverture de crédit, d'un montant déterminé et reconstituable, assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à compter du moment où le montant du dépassement maximum convenu n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident qui caractérise la défaillance de l'emprunteur. La Cour de cassation, tout comme les juges d'appel, interprète différemment la lettre de l'alinéa 1er de l'article L. 311-37 du Code de la consommation. Ainsi, à partir du moment où le montant du dépassement n'est pas régularisé, l'incident de paiement est caractérisé et l'emprunteur est déclaré défaillant.
(Sur ce point, lire R. Routier, Tolérance du prêteur : gare à la forclusion !, Lexbase Hebdo n° 165 du 28 avril 2005 - édition affaires N° Lexbase : N3558AIM).
5 - Intérêts
Dans un arrêt en date du 15 mars 2005, la Cour de cassation rappelle au visa de l'article 1907, alinéa 1er, du Code civil (N° Lexbase : L2132ABL) que "l'intérêt est légal ou conventionnel".
Selon l'article L. 313-1, alinéa 2, du Code de la consommation (N° Lexbase : L6777ABM), "les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d'officiers ministériels ne sont pas compris dans le taux effectif global défini [au premier alinéa de l'article L. 313-1 du même Code], lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat". La Cour de cassation, en s'appuyant sur l'article L. 313-1 du Code de la consommation, précise qu'à la date de la constitution du contrat, les frais de notaire et d'inscription hypothécaire étaient déterminables. Ainsi, ces charges sont bien comprises dans le taux effectif global puisque déterminables au moment de la conclusion définitive du contrat.
Selon l'article L. 313-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L6778ABN), "le taux effectif global déterminé comme il est dit à l'article L. 313-1 (N° Lexbase : L6777ABM) doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt". En l'espèce, l'indication du taux effectif global appliqué sur les relevés de comptes de débiteurs et le fait que les intéressés n'aient jamais prétendu ni démontré que les modalités de calcul de ce taux et ses bases de référence auraient été modifiées postérieurement sans qu'ils en soient préalablement informés, incitent la Haute juridiction à rejeter le pourvoi.
V - Instruments de paiement
1- Chèque
Il ne peut y voir de rupture brutale de crédit, l'établissement de crédit ayant ainsi la possibilité de rejeter des chèques litigieux sans délai, que lorsqu'il suspecte son client de procéder à un circuit d'effets de complaisance constituant un comportement gravement compréhensible.
Les faux ordres de paiement revêtus, dès l'origine, d'une fausse signature, même parfaitement imitée, n'ont pas la qualité légale de chèques et le banquier, s'il les paye, ne peut en débiter le montant du compte de son client (Cass. com., 26 novembre 1996, n° 94-19.071, M. Succar c/ Société générale N° Lexbase : A2528ABA). Le banquier a une obligation de vigilance et peut, donc, engager sa responsabilité s'il ne la remplit pas.
(Sur ce sujet, lire R. Routier, Devoir de vigilance en matière de chèque : méfiez-vous des contrefaçons !, Lexbase Hebdo n° 177 du 20 juillet 2005 - édition affaires N° Lexbase : N6579AII).
Selon l'article 1236 du Code civil (N° Lexbase : L1349ABL), "l'obligation peut être acquittée par un tiers qui n'y est point intéressé, pourvu que ce tiers agisse au nom et en l'acquit du débiteur, ou que, s'il agit en son nom propre, il ne soit pas subrogé aux droits du créancier". La Cour de cassation casse et annule le jugement, les juges du fond n'ayant pas statué sur la circonstance selon laquelle le chèque aurait été émis par un tiers.
La Chambre commerciale de la Cour de cassation, condamnant le banquier à indemniser le client qui a été privé, pendant un certain temps, de l'accès à son coffre, quand bien même l'entrave serait-elle due à un évènement extérieur à la volonté du banquier.
(Sur ce sujet, lire R. Routier, Coffre-fort et incendie : le banquier est-il toujours responsable ?, Lexbase Hebdo n° 191 du 24 novembre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N0982AKL).
2- Blanchiment
Le 20 septembre 2005, le Conseil des ministres a adopté la Directive relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme. C'est la troisième Directive anti-blanchiment qui est destinée à remplacer la Directive 91/308/CEE, du 10 juin 1991, relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux (N° Lexbase : L7622AUT). Elle étend le champ d'application de cette dernière au financement du terrorisme ainsi qu'aux personnes et aux institutions qui ne sont pas couvertes actuellement. La Directive sera applicable aux personnes physiques ou morales qui vendent des biens contre paiement en espèces de 15 000 euros au moins, que la transaction soit effectuée en une seule fois ou qu'elle comporte plusieurs opérations. Elle concernera, également, les établissements de crédit et autres établissements financiers, les commissaires aux comptes, les experts-comptables externes et les conseillers fiscaux, les membres des professions juridiques indépendantes, les prestataires de services aux sociétés et fiducies, les agents immobiliers et les casinos. Chaque pays de l'Union établira une cellule de renseignement financier chargée de recevoir et d'analyser des informations concernant des activités éventuelles de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme, en vue d'informer les autorités compétentes.
Le 26 octobre 2005, M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire, a présenté un projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers. Si la majorité des dispositions intéresse le droit pénal général, le chapitre VI prévoit des dispositions relatives à la lutte contre le financement des activités terroristes, en instaurant une procédure de gel des avoirs. En l'absence d'un dispositif permettant de geler également les avoirs des résidents communautaires, la France n'est pas en conformité avec la recommandation spéciale III du GAFI relative au gel et à la confiscation des biens terroristes et selon laquelle chaque pays doit mettre en oeuvre des mesures pour geler, sans délai, les fonds ou autres biens des terroristes et de ceux qui financent le terrorisme et les organisations terroristes.
3 - Virement
La cour d'appel de Paris vient rappeler la nature juridique du virement en énonçant, comme l'avait fait la Cour de cassation dernièrement (Cass. com., 3 novembre 2004, n° 01-16.238, FS-P+B+I N° Lexbase : A7538DDK), que "le banquier à qui son client donne un ordre de virement agit en vertu d'un contrat de mandat". Par ailleurs, la conséquence directe de cette nature est l'obligation incombant au banquier de rendre compte de l'exécution de cet ordre en justifiant, si la demande en est faite, de l'inscription de la somme virée au compte du bénéficiaire ou du banquier de celui-ci. Dès lors, le banquier, ne pouvant apporter la preuve que cette somme eu été inscrite au crédit du bénéficiaire du virement, se doit de la restituer.
Une banque, en pratiquant une saisie sur les avoirs figurants sur le compte en francs, a fait fonctionner les comptes litigieux comme des comptes indépendants. Par conséquent, elle aurait dû accéder à la demande de virement de la société. Pour la Cour de cassation, la banque n'a pas respecté la convention d'unité de compte après avoir mis en demeure la société de payer le solde débiteur du compte en dollars.
VI - Responsabilité du banquier
La Chambre commerciale de la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 22 mars 2005, rappelle que la caution, ne saurait engager la responsabilité du banquier dispensateur de crédit, dès lors qu'il n'est pas établi que le crédit ait été accordé, dans des conditions anormales, ni qu'aucune faute ait été commise par la banque.
Selon la jurisprudence, la banque engage sa responsabilité si, par son soutien elle a maintenu artificiellement l'activité de la société au détriment de ses créanciers, et a contribué à la présenter sous un jour faussement favorable (Cass. com., 5 mars 1996, n° 94-13.583 N° Lexbase : A1389AB3). Toutefois, sa responsabilité ne saurait être engagée, dès lors qu'il n'est pas démontré qu'elle a trompé les tiers sur la situation financière de l'emprunteur.
L'article L. 131-70 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L3464APY) pose le principe selon lequel tout banquier qui, ayant provision et en l'absence de toute opposition, refuse de payer un chèque régulièrement présenté, est tenu responsable du dommage résultant, pour le tireur, tant de l'inexécution de son ordre que de l'atteinte portée à son crédit. Le banquier doit, donc, exécuter l'ordre de paiement, lorsque le chèque est régulier, provisionné et sans opposition. Toutefois, les faits de certaines espèces peuvent présenter des difficultés quant à la mise en jeu automatique de la responsabilité d'une banque qui ne respecterait pas cette obligation de paiement.
La rupture brutale des conventions bancaires, de la part de la banque, est souvent synonyme de responsabilité, spécifiquement lorsque le cocontractant est un profane. La jurisprudence est, à l'égard du dispensateur de crédit, particulièrement sévère (Cass. com., 17 février 1987, n° 84-16.057, Société marseillaise de crédit c/ Me Peltier N° Lexbase : A6155AA9). En témoigne, une nouvelle fois, un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, promis aux honneurs du Bulletin annuel. Pour les magistrats de la Cour de cassation, la réception sans protestation des relevés d'opération, adressés par l'établissement teneur de compte, fait seulement présumer l'accord du client sur les éléments qui y figurent et qu'il est en mesure d'apprécier. A l'inverse, la clôture litigieuse et le transfert sont intervenus à la seule initiative de la Caisse, sans ordre des époux, engageant, ainsi, la responsabilité de la banque.
L'octroi abusif de crédit est un terrain privilégié d'action pour les plaideurs désireux de voir leur créancier condamné à leur verser des dommages-intérêts. Pourtant, si la jurisprudence apparaissait, antérieurement très sévère à l'égard des établissements de crédit, elle semble assouplir sa position comme en témoigne un arrêt de la Chambre commerciale du 12 juillet 2005.
(Sur ce sujet, lire R. Routier, Nouveau contour de l'obligation du prêteur de mettre en garde l'emprunteur profane, Lexbase Hebdo n° 194 du 15 décembre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N1885AKZ).
Depuis 1993, la jurisprudence sanctionne le soutien abusif. Il se caractérise par le fait, pour une banque, d'accorder des crédits à une entreprise, dont la situation est irrémédiablement compromise, de manière à lui permettre de se maintenir en survie artificielle et d'avoir une apparence de solvabilité (Cass. com., 15 juin 1993, n ° 91-17.660, Société Stampa Tessuti Artistici et autres c/ Société RLB et autres, FS-P+B N° Lexbase : A6475ABG). La Cour de cassation, en retenant, en premier lieu, que la banque ne pouvait ignorer la situation irrémédiablement compromise de la société, retient que l'établissement de crédit s'est immiscé dans la gestion de l'opération immobilière et a, ainsi, engagé sa responsabilité.
VII - Effets de commerce
Au titre de l'article L. 313-24 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L9257DYI), "même lorsqu'elle est effectuée à titre de garantie et sans stipulation d'un prix, la cession de créance transfère au cessionnaire la propriété de la créance cédée". La créance, même si son montant et son exigibilité ne sont pas déterminés au jour de la cession, est, néanmoins, sortie du patrimoine du cédant au jour de la cession.
Le tiers saisi, souscripteur d'un billet à ordre, dispose bien d'un intérêt à agir pour s'opposer au paiement d'une créance cambiaire par nature insaisissable et dont il pourrait avoir à répondre.
(Sur ce point, lire J.-P. Arrighi, Le tiers-saisi peut-il exciper de l'insaisissabilité d'une créance cambiaire ?, Lexbase Hebdo n° 190 du 17 novembre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N0887AK3).
VIII - Services financiers
La Directive relative à la commercialisation à distance de services financiers (Directive CE n° 2002/65 du Parlement européen et du Conseil du 23 septembre 2002, concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs N° Lexbase : L9628A4D) a été transposée par la voie d'une ordonnance prise en application de la loi de simplification du droit (loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 (N° Lexbase : L4734GUU). Cette ordonnance modifie les règles de bonne conduite pesant sur les démarcheurs (C. mon. fin., art. L. 341-11 et suiv. N° Lexbase : L2571DKG), et les étend à toute fourniture à distance de services financiers.
(Sur ce point, lire M.-E. Mathieu, Commercialisation en ligne des services financiers : un droit récent issu de l'ordonnance du 6 juin 2005 à la frontière du droit des contrats électroniques, Lexbase Hebdo n° 176 du 14 juillet 2005 - édition affaires N° Lexbase : N6513AI3).
Le 26 novembre 2005, le décret n° 2005-1450 du 25 novembre 2005, relatif à la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs, a été publié au Journal officiel. La partie réglementaire du Code monétaire et financier est modifiée puisque, désormais, une section s'intitulera "Ventes de biens et fournitures de prestations de services à distance".
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par Vincent Téchené, SGR - Droit des affaires
Le 07 Octobre 2010
L'article 24 de la "loi Breton" publiée au Journal officiel le 27 juillet dernier (loi du 26 juillet 2005, n° 2005-842, pour la confiance et la modernisation de l'économie) a habilité le gouvernement à légiférer par ordonnance pour réformer le droit des sûretés. La réforme envisagée est, toutefois, moins ambitieuse que le projet qui prévoyait une refonte totale. L'habilitation exclut, en effet, de la réforme certains pans du droit des sûretés, notamment le cautionnement. Le texte ne vise donc plus que cinq points :
- l'introduction, dans le Code de commerce, de dispositions permettant le nantissement de stocks des entreprises et la modification des dispositions du Code civil pour simplifier la constitution des sûretés réelles mobilières et leurs effets, l'extension de leur assiette et l'autorisation du gage sans dépossession ;
- la modification des dispositions pour améliorer le fonctionnement de l'antichrèse et pour développer le crédit hypothécaire, notamment, au profit des particuliers, en permettant le crédit hypothécaire rechargeable et le prêt viager hypothécaire, et en simplifiant la mainlevée de l'inscription hypothécaire ;
- l'insertion à droit constant, dans le Code civil, des dispositions relatives à la clause de réserve de propriété permettant la reprise, par la loi, de décisions jurisprudentielles importantes ;
- l'apport d'une base légale à la garantie autonome, ainsi qu'au droit de rétention qui permet au créancier qui détient une chose qu'il doit remettre d'en refuser la délivrance tant qu'il n'a pas reçu le complet paiement ;
- la réforme des dispositions relatives à l'expropriation forcée et à la procédure de distribution du prix de vente des immeubles.
En outre, le même texte prévoit que les ordonnances doivent être prises dans un délai de neuf à douze mois suivant la publication de cette loi.
(Sur ce sujet, lire M.-E. Mathieu, Vers quelles nouvelles formes de sûretés réelles (propos sur la réforme du droit des sûretés réelles issue de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005) ? Lexbase Hebdo n° 186 du 19 octobre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N9698AIZ).
A l'occasion de l'adoption de la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises a été inséré dans le Code civil un nouvel article 1387-1, destiné à protéger le conjoint du chef d'entreprise qui s'est porté caution des dettes de celle-ci, aux termes duquel, "lorsque le divorce est prononcé, si les dettes ou sûretés ont été consenties par les époux, solidairement ou séparément, dans le cadre de la gestion d'une entreprise, le tribunal de grande instance peut décider d'en faire supporter la charge exclusive au conjoint qui conserve le patrimoine professionnel, ou, à défaut, la qualification professionnelle ayant servi de fondement à l'entreprise".
(Sur ce sujet, lire D. Bakouche, Droit des sûretés : le nouvel article 1387-1 du Code civil, Lexbase Hebdo n° 183 du 28 septembre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N8872AIG)
II - Cautionnement
1 - Formation du cautionnement : le double consentement de l'article 1415 du Code civil
En l'espèce, M. B., marié sous le régime de la communauté universelle, a souscrit sans le consentement de son épouse, un nantissement de titres dématérialisés, entrés dans la communauté, en garantie d'une dette contractée pour un tiers auprès d'une banque. Mme B. a, alors, assigné la banque en main levée du nantissement. La demanderesse faisait valoir que la garantie offerte par son époux constituait un cautionnement réel auquel s'appliquait la règle du consentement des deux époux de l'article 1415 du Code civil (N° Lexbase : L1546ABU) pour voir engager les biens communs. La Cour de cassation rejette cette analyse estimant que la constitution pour autrui d'une sûreté est une sûreté réelle non soumise à la règle du double consentement. Cette solution permet de clarifier la situation après que la Chambre commerciale de la Cour de cassation (Cass. com., 24 septembre 2003, n° 00-20.504, F-D N° Lexbase : A6189C94) a considéré que le nantissement d'un fonds de commerce pour un tiers est une sûreté réelle, rompant avec la jurisprudence jusque là rendue sur le sujet par la première chambre civile (Cass. civ. 1, 15 mai 2002, trois arrêts n° 00-13.527, FP+B+R+I N° Lexbase : A6541AYW, n° 00-15.298, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A6550AYA et n° 99-21.464, FP+B+R+I N° Lexbase : A6722AYM) qui appliquait au cautionnement réel le principe contenu à l'article 1415 du Code civil.
En l'espèce, par jugement du 15 octobre 1998, le tribunal a prononcé le divorce de deux époux mariés sous le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts et homologué la convention définitive portant règlement des effets du divorce. Le 30 mars 1999, une banque créancière du mari en sa qualité de caution d'une société a inscrit une hypothèque judiciaire sur un immeuble et a assigné les époux aux fins de voir ordonner les opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision existant entre eux sur l'immeuble et sa vente sur licitation. Les juges d'appel saisis du litige ont retenu que les droits de propriété de l'épouse sur l'immeuble litigieux ne sont devenus opposables aux tiers que le 14 décembre 1999, date de la publication à la conservation des hypothèques du jugement portant attribution du bien, de sorte que, le 30 mars 1999, date à laquelle la banque a inscrit son hypothèque sur le bien susmentionné, celui-ci était indivis entre les anciens époux, rejetant ainsi la demande de la banque. Mais, la Cour de cassation ne se place pas sur le terrain de la publicité foncière pour sanctionner la décision de la cour d'appel. En effet, elle relève seulement que les juges du fond n'ont pas vérifié l'accord de la femme à l'engagement de son mari.
En l'espèce, une banque avait accordé diverses facilités à une société dont les époux N., mariés sous le régime de la communauté légale, étaient associés, Mme N. étant en plus gérante. Par actes distincts, chacun des époux s'est porté caution solidaire de la société envers la banque et Mme N. a nanti au profit de cette dernière deux bons de caisse, constituant des biens communs, en garantie des mêmes engagements. Pour ordonner l'attribution à la banque du produit de cession des bons de caisse nantis, la cour d'appel énonce que, si, sur chacun des actes, le consentement de l'autre conjoint n'est pas recueilli, chaque époux a accordé sa sûreté pour le paiement de la même dette, celle de la société que tous deux animaient, que, par des mentions identiques, les époux N. ont engagé leurs biens communs et que les dispositions de l'article 1415 du Code civil (N° Lexbase : L1546ABU) n'ont pas lieu d'être appliquées, étant précisé que chacun des actes stipule que les garanties apportées s'ajoutent ou s'ajouteront à celles qui pourront être fournies par tout tiers. L'arrêt est annulé par la Haute juridiction qui reproche aux juges du fond de ne pas avoir relevé une approbation des époux N. de leurs engagements réciproques de cautionnement personnel, et de ne pas avoir recherché si les dispositions de l'article 1415 étaient applicables au nantissement donné par Mme N.
2 - L'étendue du cautionnement
Le créancier qui bénéficie d'un nantissement sur le fonds de commerce, en garantie du paiement de sa créance, doit être informé, par le propriétaire de l'immeuble loué, de la demande de résiliation du bail commercial (C. com., art. L. 143-2 [LXB=L5694AIQ ]). Cette information lui permettra, notamment, d'échapper aux conséquences de la résiliation en payant le propriétaire à la place du locataire (Cass. civ. 3, 4 mars 1998, n° 95-18.900, Caisse régionale de Crédit mutuel d'Ile-de-France [LXB=A2416ACH ]). La Cour de cassation approuve la cour d'appel d'avoir retenu que la banque était titulaire de deux créances à l'encontre de la société, l'une au titre du solde du prêt, et l'autre au titre des loyers qu'elle avait pris en charge, et que seule la première était garantie par les cautions. De plus, en application de l'article 1256 du Code civil (N° Lexbase : L1373ABH), le paiement effectué par le liquidateur devait s'imputer sur la dette que celui-ci avait le plus d'intérêt à s'acquitter, en l'espèce, le solde du prêt.
En l'espèce, des cautions, dirigeantes de la société débitrice, faisaient valoir que la concomitance des actes de cautionnement et de prêt démontrait leur volonté de ne garantir que le remboursement de ce dernier. Mais la Cour de cassation approuve la position de la cour d'appel, estimant que c'est dans son pouvoir souverain qu'elle a pu constater que l'acte comportant la garantie des cautions pour tous les engagements de la société à l'égard de la banque était bien un cautionnement omnibus valable.
3 - Cautionnement disproportionné
En l'espèce, une société, liée à une autre société par un contrat de franchise, a conclu deux contrats de crédit-bail, dont le paiement était cautionné par les co-gérants du débiteur principal. A la suite de la liquidation judiciaire du débiteur, la crédit-bailleresse a assigné les cautions en paiement, ces dernières recherchant la responsabilité de leur créancier. La Cour de cassation approuve la cour d'appel d'avoir diminué le montant de la condamnation des cautions, au motif qu'un professionnel du crédit ne pouvait que déduire des éléments contenus dans le dossier transmis par le franchiseur l'échec probable de l'opération, la crédit-bailleresse détenant, alors, des informations que les cautions ignoraient par suite de circonstances exceptionnelle. Pour la Cour de cassation, la banque devait s'assurer que les garants avaient connaissance des éléments qui lui avaient été transmis par le franchiseur.
Avec l'arrêt "Macron" (Cass. com., 17 juin 1997, n° 95-14.105, M. Macron c/ Banque internationale pour l'Afrique occidentale et autres, P N° Lexbase : A1835ACX) est née, en dehors du droit de la consommation (C. consom., art. L. 313-10 N° Lexbase : L6786ABX), une exigence de proportionnalité entre le montant de la garantie et les ressources de la caution. La Cour en a, par la suite, limité la mise en oeuvre, en excluant de son champ d'application les cautions intégrées (Cass. com., 8 octobre 2002, n° 99-18.619, FP-P N° Lexbase : A9624AZH). Ce principe de proportionnalité a été repris et généralisé par la "loi Dutreil" du 1er août 2003 (loi n° 2003-721 N° Lexbase : L3557BLC), qui crée, notamment, un article L. 341-4 dans le Code de la consommation (N° Lexbase : L8753A7C), selon lequel "un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus". A ce sujet, la Cour de cassation a rendu, le 10 mai 2005, un important arrêt. Tout d'abord, la Cour confirme l'application des règles prétoriennes acquises depuis l'arrêt "Macron" aux cautionnements souscrits antérieurement à l'entrée en vigueur de la "loi Dutreil". Mais, surtout, elle étend cette jurisprudence en l'appliquant à un "créancier professionnel", en l'espèce une SCI, ayant consenti un crédit pour le paiement de l'immeuble vendu. La Cour ne limite, donc, pas la notion de "créanciers professionnels" aux seuls professionnels du crédit.
(Sur ce sujet, lire D. Bakouche, L'exigence de proportionnalité dans le cautionnement, Lexbase Hebdo n° 170 du 1er juin 2005 - édition affaires N° Lexbase : N4829AIP).
4 - Obligation d'information de la caution par la banque
En l'espèce, par acte notarié, une banque a consenti à une société civile immobilière un prêt destiné à l'acquisition de trois appartements. M. et Mme D. se sont portés cautions solidaires du remboursement de ce prêt. La SCI ayant été défaillante, la banque a engagé une procédure de saisie attribution à l'encontre de M. D. Ce dernier a, alors, fait valoir que la banque n'avait pas respecté son obligation d'information, obligation prévue par l'article L. 313-22 du Code monétaire et financier ([LXB=L2923G97 ]). En effet, aux termes de ce texte, "les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement [...]". La cour d'appel rejette sa demande, aux motifs que la SCI, de par sa forme et son objet, constitution d'un patrimoine immobilier à usage locatif, ne pouvait être assimilée à une entreprise, faute d'activité commerciale. L'arrêt est cassé par la Haute juridiction, qui énonce que le fait que la banque ait consenti un crédit à la SCI en vue de l'acquisition de biens immobiliers destinés à la location, caractérisait bien l'octroi d'un concours financier à une entreprise.
5 - Le recours personnel de la caution
Aux termes de l'article 1166 du Code civil (N° Lexbase : L1268ABL), "les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur, à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la personne". Ce texte permet, donc, à une personne d'exercer l'action oblique, c'est-à-dire de se substituer à son débiteur négligent. De plus, l'article 2032-1° du même code (N° Lexbase : L2267ABL) permet à la caution d'agir contre le débiteur, avant d'avoir payé, lorsqu'elle est poursuivie en justice pour le paiement. C'est au visa de ces deux textes et en les combinant que la Cour de cassation a accepté la recevabilité de l'action oblique d'une caution, elle-même actionnée en payement, au motif que, la caution "disposait avant d'avoir payé, d'une créance personnelle d'indemnité contre les héritiers [de la débitrice principale], de sorte que, du chef de cette créance, elle était recevable à agir [sur la base de l'article 1166 du Code civil] contre la compagnie d'assurance en exécution du contrat d'assurance auquel [le créancier] avait adhéré".
6 - Le recours subrogatoire de la caution
En l'espèce, une société s'est portée caution d'un débiteur à l'égard d'une société, cet engagement étant garanti par la caution d'une banque à concurrence de 7 622,45 euros. A la suite de la mise en liquidation judiciaire du débiteur principal, la banque a déclaré sa créance au passif de celui-ci. Ayant été rejetée par le juge-commissaire, la banque a demandé son admission en tant que créancier subrogé dans les droits de la société caution à concurrence de 7 622,45 euros. La cour d'appel a, alors, admis, au passif du débiteur principal, la créance de la banque en tant que créancier subrogé dans les droits de l'autre caution. La Haute juridiction, en approuvant cette décision, reconnaît l'existence de deux fondements à la déclaration de la créance du certificateur de caution au passif du débiteur principal en liquidation judiciaire.
En l'espèce, une banque avait consenti un prêt à une société, prêt pour lequel M. G. s'était porté caution solidaire de la société au profit de la banque à concurrence d'un certain montant. Mme S., sous-caution, s'est portée caution solidaire et hypothécaire envers M. G.. La société ayant été mise en redressement judiciaire, la banque a déclaré sa créance et a mis en demeure la caution de payer. M. G. a versé une certaine somme et s'est engagé à payer le solde par mensualités. Par ailleurs, ce dernier, sans avoir déclaré sa créance, s'est retourné contre la sous-caution, à laquelle il a fait délivrer un commandement aux fins de saisie-immobilière. Le tribunal de grande instance et la cour d'appel ayant rejeté l'opposition à commandement formée par la sous-caution et ordonné la continuation de la procédure de vente, la sous-caution s'est pourvue en cassation. La Haute juridiction accueille le pourvoi et annule l'arrêt de la cour d'appel aux visas des articles 1251-3° du Code civil (N° Lexbase : L1368ABB) et L. 621-43 du Code de commerce (N° Lexbase : L6895AI9). Pour la Cour de cassation, à défaut de déclaration par la caution de sa créance, celle-ci est éteinte à l'égard de la sous-caution qui garantit, non la créance du créancier à l'égard du débiteur principal mais celle de la caution à l'égard de ce débiteur. En conséquence, le créancier initial qui n'est titulaire d'aucun droit à l'égard de la sous caution, ne peut, par l'effet de la subrogation, lui transmettre sa créance déclarée.
(Sur ce sujet, lire M.-E Mathieu, Caution, sous caution, débiteur : une trilogie particulière, Lexbase Hebdo n° 169 du 25 mai 2005 - édition affaires N° Lexbase : N4539AIX).
Dans un arrêt du 18 octobre 2005 la première chambre civile de la Cour de cassation a estimé que la caution actionnée en paiement était recevable à opposer la nullité, tant du contrat principal que des cautionnements qu'elle avait souscrits mais qu'il appartenait, alors, à la caution exerçant son recours subrogatoire, d'appeler en cause les créanciers originaires. En l'espèce, à la suite de la défaillance du débiteur de deux prêts, les créanciers ont actionné en paiement l'une des deux cautions solidaires. Celle-ci ayant payé, elle a reçu quittance subrogative de ces remboursements et a exercé un recours contre son cofidéjusseur. Celui-ci lui a, alors, opposé la nullité des actes de prêt et des cautionnements souscrits. La cour d'appel a déclaré irrecevables ces moyens de défense et a condamné le cofidéjusseur actionné, estimant qu'elle ne saurait prononcer les nullités demandées en l'absence des organismes bancaires, parties aux actes dont la nullité est arguée. Mais la Haute juridiction casse, au visa de l'article 1251 du Code civil (N° Lexbase : L1368ABB), la décision des juges d'appel.
7 - L'effet du cautionnement entre les cofidéjusseurs
En l'espèce, une banque a consenti une ouverture de crédit à une société, garantie par plusieurs cautionnements solidaires et une hypothèque grevant un bien appartenant à l'un des cofidéjusseurs. L'une des cautions, après avoir payé le créancier à la suite de la défaillance de l'emprunteur, a engagé une procédure de saisie-immobilière et a fait délivrer une sommation de payer à l'acquéreur de l'immeuble hypothéqué. Or, le notaire ayant reçu l'acte de vente a oublié de faire état de l'hypothèque. Son assurance a, alors, versé à l'acquéreur une indemnité, utilisée pour désintéresser la caution ayant payé la banque. L'assureur, se prétendant subrogé dans les droits de l'acquéreur, a assigné en paiement les cautions solidaires. L'une d'elles a contesté cette action, estimant que l'assureur n'était ni débiteur de la caution s'étant acquittée du paiement originel, ni caution du débiteur principal. Toutefois, la Cour de cassation approuve la cour d'appel d'avoir relevé que l'acquéreur de l'immeuble était subrogé dans les droits de la caution, créancière, à la suite du paiement utile à son désintéressement. L'assureur ayant versé l'indemnité réparatrice du préjudice subi par l'acquéreur à la suite de la faute commise par le notaire, et cette indemnité ayant servi à désintéresser cette caution créancière, il est lui-même subrogé dans les droits de l'acquéreur. Il peut, de ce fait, agir contre les cofidéjusseurs.
8 - Bénéfice de cession d'action ou de subrogation
Selon l'article 2037 du Code civil, (N° Lexbase : L2282AB7), "la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier, ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opérer en faveur de la caution". Ce texte a donné lieu à une abondante jurisprudence laissant apparaître une opposition entre la Chambre commerciale et la première chambre civile. Ainsi, la Chambre commerciale (Cass. com., 13 mai 2003, n° 00-15.404, FS-P N° Lexbase : A0109B78) a énoncé que, "si l'attribution du gage [...], ne constitue qu'une faculté pour le créancier, ce dernier [...] commet une faute [...] si, en s'abstenant de demander cette attribution, il prive la caution d'un droit qui pouvait lui profiter". Au contraire, pour la première chambre civile (Cass. civ. 1, 8 juillet 2003, n° 01-03.177, F-D N° Lexbase : A0973C9W), le créancier qui n'a pas formé une demande d'attribution de son gage n'engage pas sa responsabilité à l'égard de la caution, car il n'est pas tenu d'effectuer une telle demande. Face à ces divergences, la Chambre commerciale, saisie d'un litige similaire, a ordonné le renvoi devant la Chambre mixte. En l'espèce, une banque a accordé un prêt, garanti dans le même acte, par un nantissement sur le matériel et un cautionnement. A la suite de la mise en liquidation judiciaire du débiteur principal, le créancier a accordé la mainlevée du nantissement et a assigné la caution en paiement. La Cour rejette le pourvoi, estimant qu'"en retenant que la banque avait renoncé au bénéfice du gage, la cour d'appel en a exactement déduit que la caution était déchargée de son obligation".
(Sur ce sujet, lire M.-E. Mathieu, Un excès de sûretés tue toute sûreté ?, Lexbase Hebdo n° 180 du 7 septembre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N8070AIQ).
En l'espèce, une banque a consenti deux prêts à une société, dont l'un est garanti par le cautionnement solidaire du dirigeant du débiteur et de son épouse, ainsi que par des hypothèques sur des immeubles appartenant au débiteur. Celui-ci n'ayant pas rempli son obligation, la banque a mis en demeure les cautions d'exécuter leur engagement. A la suite de la mise en liquidation judiciaire du débiteur principal, la banque déclare sa créance, et la caution demande sa décharge, reprochant, notamment, au créancier de ne pas avoir renouvelé ses hypothèques. La cour d'appel n'accueille pas la demande des cautions, retenant que, compte tenu des collocations auxquelles ont donné lieu les distributions des prix de ventes des immeubles hypothéqués, le défaut de renouvellement n'avait eu aucune incidence sur la dette des cautions. En effet, le créancier hypothéqué se trouvait primé par des créances de rang préférentiel, empêchant son désintéressement. Toutefois, la Cour rejette cette analyse et casse l'arrêt d'appel, rappelant que "la valeur du droit pouvant être transmis par subrogation doit s'apprécier à la date de l'exigibilité de l'obligation de la caution, c'est à dire à la date de défaillance de la société débitrice principale" (voir, déjà, Cass. civ. 1, 24 février 1987, n° 85-12.406, Mlle Dinant c/ Société anonyme Cofibail N° Lexbase : A6395AA4).
9 - La preuve du cautionnement
Depuis plus de quinze ans, il est acquis que la règle posée à l'article 1326 du Code civil (N° Lexbase : L1437ABT), selon lequel l'acte juridique par lequel une seule partie s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent doit être constaté dans un titre comportant la signature de celui qui s'engage, ainsi que, la mention écrite par lui-même de la somme en lettres et en chiffres, est une règle de preuve, ayant pour finalité la protection de celui qui s'engage (Cass. civ. 1, 15 novembre 1989, n° 87-18.003, M. Delous c/ Société Europe computer systèmes N° Lexbase : A8588AHK). Se prononçant sur des reconnaissances de dettes, la même chambre opère un revirement en 2002 (Cass. civ. 1, 18 septembre 2002, n° 99-13.192, F-P+B N° Lexbase : A4423AZT et Cass. civ. 1, 19 novembre 2002, n° 00-21.196, F-P+B N° N° Lexbase : A0644A4M), estimant que "l'omission de la mention manuscrite en chiffres n'a pas pour effet de priver l'écrit de sa force probante dès lors qu'il comporte la mention de la somme en toutes lettres". Statuant de nouveau sur la question, la première chambre civile de la Cour de cassation est revenue à sa position antérieure, précisant que, faute du montant en chiffres de la somme cautionnée, l'acte ne peut constituer qu'un commencement de preuve par écrit.
(Sur ce sujet, lire D. Bakouche, Retour sur le contenu de la mention manuscrite de l'article 1326 du Code civil, Lexbase Hebdo n° 172 du 15 juin 2005 - édition affaires N° Lexbase : N5363AIH).
10 - Extinction du cautionnement
En l'espèce, les cautions solidaires d'un contrat de crédit-bail immobilier ont été assignées en paiement d'une certaine somme correspondant aux loyers, indemnités d'occupation et primes d'assurance, à la suite d'opération d'absorption de la société créancière et de la société débitrice principale. La cour d'appel rejette cette demande, retenant que la fusion de la société créancière dans une personne morale nouvelle ou son absorption constituent un changement de créancier à l'égard de la caution, libérant celle-ci de ses obligations si elle n'a pas manifesté sa volonté de s'engager envers le nouveau bailleur. La Haute juridiction casse cette décision au visa de l'article L. 236-3 du Code de commerce (N° Lexbase : L6353AI7). La jurisprudence retient, en principe, que lors d'une fusion de la société créancière avec une autre société, l'obligation de couverture s'éteint et seule l'obligation de règlement de la caution est transmise à la nouvelle société, sauf si la caution en a manifesté expressément la volonté contraire (Cass. com., 4 juin 2002, n° 98-23.280, Banque du bâtiment et des travaux publics (BTP) c/ Société Locamion, F-D N° Lexbase : A8436AY4). Or, opérant un revirement dans l'arrêt rapporté, c'est la solution inverse qui est retenue, appliquant à la fusion de sociétés la solution de la transmission du cautionnement des loyers déjà retenue en cas de vente de l'immeuble donné à bail (Ass. plén., 6 décembre 2004, n° 03-10.713, P N° Lexbase : A3249DE3).
En cas de dissolution d'une société par voie de fusion-absorption par une autre société, l'engagement de la caution garantissant le paiement des loyers consenti à la première demeurant pour les obligations nées avant la dissolution de celle-ci, le bailleur pouvait demander à la caution le paiement des loyers impayés dans la mesure où le contrat de bail, en exécution duquel étaient dus les loyers, avait été souscrit par la société débitrice avant sa dissolution, et qu'ainsi, la dette était née avant la fusion, peu important qu'elle n'ait pas été exigible à cette date. Telle est la solution retenue par la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 8 novembre 2005. En l'espèce, une SCI a loué des locaux à usage de bureaux à la société A devenue la société B, qui avait, au préalable, cédé les baux à une société C, se portant, à cette occasion, caution solidaire au profit du bailleur du paiement des loyers et charges, pour la durée des baux. La société C, titulaire des baux, a, par la suite, fait l'objet d'une fusion-absorption par la société D. La SCI a assigné en résolution des baux et en paiement cette dernière et la caution. La cour d'appel de renvoi statuant dans le sens de l'arrêt de cassation (Cass. civ. 3, 16 février 2000, n° 98-15.148 N° Lexbase : A3122AU8) ne fait pas droit à ces demandes, retenant que la fusion ayant entraîné la disparition de la société cautionnée, la caution devait donc, obligatoirement, réitérer son engagement au profit de la société absorbante, pour que la créancière puisse lui réclamer le paiement des loyers impayés du chef de cette dernière. La Cour de cassation, saisie d'un pourvoi, casse l'arrêt d'appel au visa des articles 2015 du Code civil (N° Lexbase : L2250ABX) et L. 236-3 du Code de commerce (N° Lexbase : L6353AI7).
En l'espèce, le propriétaire d'une maison donnée à bail, en 1995, pour trois ans, a obtenu en garantie du paiement des loyers et des charges par ses locataires, un cautionnement solidaire. A la suite du non-paiement de loyers au cours de l'année 2001, le propriétaire a assigné le locataire et sa caution en référé. La Cour de cassation approuve, en application de l'article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989 (loi n° 89-462 tendant à améliorer les rapports locatifs N° Lexbase : L4398AHD) la cour d'appel d'avoir constaté, qu'en l'espèce, l'engagement de la caution ne comportant aucune indication de durée et la caution n'ayant pas résilié son engagement, il n'y avait pas de contestation sérieuse pouvant empêcher le juge des référés d'allouer une provision pour le paiement des loyers et des charges impayés.
11 - Cautionnement et procédures collectives
Aux termes de l'article L. 621-48, alinéa 2, du Code de commerce (N° Lexbase : L6900AIE), le jugement d'ouverture du redressement judiciaire suspend, jusqu'au jugement arrêtant le plan de redressement ou prononçant la liquidation, toute action contre les cautions personnelles personnes physiques. L'alinéa 3 du même texte prévoit, néanmoins, que les créanciers bénéficiaires de cautionnements peuvent prendre des mesures conservatoires. Cependant, l'article 215 du décret du 31 juillet 1992 (décret n° 92-755, 31 juillet 1992 N° Lexbase : L3625AHQ) dispose, qu'à peine de caducité, le créancier doit, dans le mois qui suit l'exécution de la mesure conservatoire, introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire. Apportant une solution explicite au problème d'harmonisation de ces deux textes, la Cour précise, que l'instance engagée tendant à l'introduction d'une procédure ou l'accomplissement des formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire, dans le mois qui suit l'exécution de la mesure conservatoire contre une caution personnelle personne physique, est suspendue jusqu'au jugement arrêtant le plan de redressement ou prononçant la liquidation judiciaire du débiteur principal. Elle estime, alors, que les juges du fond devaient vérifier si le créancier était en droit de reprendre les poursuites à l'encontre de la caution, à la suite de la décision homologuant le plan de cession du débiteur principal. Ainsi, la suspension des poursuites semble jouer à l'égard de l'instance et non à l'égard du délai d'un mois comme l'avait prôné le gouvernement (Rép. min. n° 00572, Claude Haut, JO SEQ, du 11 décembre 1997, p.3477 [LXB=L1469AXP ]).
En l'espèce, le 18 décembre 1991, le gérant d'une société s'est porté caution des engagements de cette société envers une autre société. Le débiteur ayant été mis en liquidation judiciaire, le 9 décembre 1996, le créancier a déclaré sa créance, puis a engagé des poursuites contre la caution. Le 12 septembre 1997, le tribunal a condamné cette dernière à payer une certaine somme. Le créancier a, par la suite, pratiqué une saisie des rémunérations de la caution, laquelle a saisi le tribunal d'une demande tendant à faire juger que la créance litigieuse était éteinte pour avoir été déclarée tardivement au passif du débiteur principal. Le 14 mai 2002, le tribunal a déclaré cette demande irrecevable et le demandeur a relevé appel de ce jugement et du jugement ayant validé la saisie des rémunérations. Le 26 juin 2003, la cour d'appel, après avoir joint les instances, a infirmé le jugement du 14 mai 2002, déclaré la demande de la caution recevable, dit que le jugement du 12 septembre 1997 n'était pas revêtu de l'autorité de la chose jugée s'agissant de l'éventuelle extinction de la créance pour déclaration tardive. Approuvée par la Cour de cassation, la cour d'appel a, par la suite, débouté la caution.
12 - Le cautionnement légal
En l'espèce, un maître d'ouvrage a chargé un entrepreneur de réaliser le gros oeuvre d'immeubles. Une banque s'est, alors, portée caution pour le montant de la retenue légale. Le chantier étant resté inachevé après la mise en redressement judiciaire de l'entrepreneur, le maître de l'ouvrage a assigné la banque. La troisième chambre civile approuve la cour d'appel d'avoir rejeté les prétentions du maître de l'ouvrage. En effet, la Haute juridiction relève que la retenue légale de l'article 1er de la loi du 16 juillet 1976 (loi n° 71-584 du 16 juillet 1971 N° Lexbase : L1799DNX) vise à garantir la levée des réserves et non la bonne fin du chantier. De ce fait, le cautionnement apporté par la banque en substitution de cette garantie, ne peut garantir, à son tour, que l'exécution des travaux de levée des réserves. Le maître de l'ouvrage ne rapportant pas la preuve d'une liste de réserves et du quantum de la créance, la Cour en conclut, logiquement, qu'il ne peut pas se prétendre créancier de la banque garante.
La Cour de cassation impose aux juges du fond, de vérifier l'existence du cautionnement au jour de la conclusion du contrat de sous-traitance, peu important la cause pour laquelle le cautionnement n'a pas été fourni, même si celle-ci est le fait du sous-traitant.
III - Hypothèque
1 - Hypothèque judiciaire
A inversé la charge de la preuve et a, ainsi, violé l'article 217 du décret du 31 juillet 1992 (décret n° 92-755 N° Lexbase : L3627AHS), la cour d'appel qui a débouté le demandeur de la mainlevée d'une hypothèque estimant qu'il "ne justifiait pas de la survenance d'un élément nouveau remettant en cause de manière évidente et sans contestation possible le principe de sa créance". Telle est la solution retenue par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 6 octobre 2005.
2 - Hypothèque et procédure collective
S'agissant du champ d'application des articles L. 621-43 (N° Lexbase : L6895AI9) et L. 621 -46 (N° Lexbase : L6898AIC) du Code de commerce, la cour d'appel de Colmar (CA Colmar, 29 mai 2001, Sparkasse Hanauerland c/ Maitre Gall-Heng N° Lexbase : A9327A7L) avait précisé que le créancier garanti par une hypothèque sur un immeuble du dirigeant de la société débitrice ne peut se prévaloir de l'absence d'un avertissement régulier d'avoir à déclarer, cette sûreté n'étant pas constituée sur le patrimoine de cette dernière. Interrogée sur cette question, la Cour de cassation rend une décision identique à celle retenue par la cour d'appel de Colmar.
3 - Effets de l'hypothèque
En l'espèce, une banque a consenti un prêt pour l'acquisition d'un immeuble en indivision, à un couple marié sous le régime de la séparation de biens, en garantie duquel elle a obtenu une hypothèque. A la suite de leur divorce et de la mise en liquidation judiciaire du mari, la banque a déclaré sa créance et a demandé la licitation du bien indivis. La cour d'appel, ayant décidé que le créancier hypothécaire pouvait poursuivre la saisie et la vente du bien indivis hypothéqué avant le partage de l'indivision, l'ex épouse forme un pourvoi en cassation. La Cour de cassation rejette le pourvoi approuvant la cour d'appel d'avoir déduit que l'hypothèque, ayant été constituée par tous les coïndivisaires sur un bien dont le caractère indivis préexistait à l'ouverture de la procédure collective de l'un d'eux, le créancier hypothécaire peut poursuivre la saisie et la vente de ce bien avant le partage de l'indivision.
La Cour de cassation s'appuie sur ce principe pour approuver une cour d'appel d'avoir déclaré un acte d'apport en société d'un bien grevé inopposable au créancier hypothécaire, cet acte prévoyant que les emprunts et dettes des débiteurs devraient être remboursés par eux seuls, stipulations contraires à l'article 2167 du Code civil (N° Lexbase : L2449ABC), et faisant réserve à leur profit d'un droit viager d'usage et d'habitation ayant pour conséquence de porter atteinte à la valeur du bien et d'entraver l'exécution en nature de l'obligation.
IV - Le gage
1 - La réalisation du gage
Le gage, ayant été réalisé au moyen de l'inscription de sommes en espèces sur un compte d'épargne rémunéré dont la stabilité devait permettre l'obtention d'exonérations fiscales et d'une prime d'épargne, les sommes déposées n'étaient ni consomptibles, ni fongibles. Ainsi, la propriété de ces sommes n'avait pas été transmise au créancier et un pacte commissoire n'aurait pu avoir pour objet que d'autoriser la compensation. Telle est la solution retenue par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 15 novembre 2005.
Le créancier, ayant obtenu du juge-commissaire, par une décision devenue irrévocable, l'attribution devenue définitive de son gage sans avoir sollicité son estimation par experts, il se déduit de la position du créancier qu'il a implicitement admis que la valeur des actions nanties était égale à leur valeur nominale.
2 - Les effets du gage
Rendue en matière de nantissement d'assurance vie, le principe énoncé dans cet arrêt semble avoir une portée générale en matière de gage. En l'espèce, le titulaire de trois contrats d'assurance vie, libellés en unités de compte et adossés à différents supports entre lesquels le souscripteur pouvait choisir, tout au long du contrat en utilisant sa faculté d'arbitrage, a contracté un prêt auprès d'une banque. En contrepartie, il a consenti à son créancier un nantissement sur ses polices d'assurance. Le souscripteur a, ensuite, donné instruction à son assureur de changer le support de ses polices. Le créancier s'opposant, alors, à cette opération, en faisant valoir que le nouveau support risquait fortement de réduire la valeur de son gage, l'assureur n'a pas donné de suite aux instructions du souscripteur. Ce dernier, après avoir mis fin aux contrats, a mis en cause la responsabilité de l'assureur et de la banque. La Cour de cassation approuve, donc, la cour d'appel d'avoir retenu leur responsabilité dans la mesure où en l'absence de stipulation expresse dans l'acte de nantissement, le créancier ne peut pas s'opposer au choix de la répartition des versements entre les différents supports d'un contrat d'assurance vie donné en gage.
Le créancier gagiste de bonne foi bénéficie d'un droit de rétention ; la bonne foi de celui-ci qui est présumée s'apprécie à la date de la prise du gage. Telle est la solution retenue par la cour d'appel de Paris dans un arrêt du 28 juin 2005.
V - Les garanties autonomes
1 - La qualification des garanties autonomes
(sur ce sujet, lire M.-E. Mathieu, Propos autour de la nature autonome de la garantie à première demande justifiée Lexbase Hebdo n° 182 du 21 septembre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N8102AIW).
En l'espèce, sur ordre de la société Leygafinance, importatrice de matières premières, et pour permettre à la société Caisoon, avec laquelle elle envisageait de conclure un contrat de fourniture, de financer son propre approvisionnement au moyen de facilités de caisse que devait consentir à celle-ci le Crédit lyonnais Luxembourg, le Crédit lyonnais France a souscrit, en faveur de ce dernier, une garantie à première demande, que la société Leygafinance a contregarantie. Le contrat de fourniture n'ayant jamais été conclu, mais la garantie ayant été appelée par le Crédit lyonnais Luxembourg, la société Leygafinance, appelée elle-même à exécuter son propre engagement, a demandé judiciairement la nullité de la garantie à première demande pour absence de cause . Cette demande a été rejetée par la cour d'appel, dont la position a été approuvée par la Haute juridiction.
(sur ce point, lire D. Bakouche, La cause de l'engagement du garant à première demande, Lexbase Hebdo n° 166 du 4 Mai 2005 - édition affaires N° Lexbase : N3844AI9).
VI - La promesse de porte-fort
Aux termes d'un arrêt rendu le 25 janvier 2005, la Haute juridiction a rappelé que la promesse de porte-fort était un engagement autonome personnel d'une personne qui promet à son cocontractant d'obtenir l'engagement d'un tiers à son égard.
VII - Les privilèges
La saisie conservatoire d'un navire n'appartenant plus au débiteur ne peut être autorisée que si le saisissant se prévaut d'une créance privilégiée au sens de la loi du for, en l'espèce, en vertu de l'article 31 de loi du 3 janvier 1967 (loi n° 67-5 N° Lexbase : L1798DNW). Or, la Haute juridiction relève que le saisissant n'étant pas créancier du propriétaire actuel du navire, son privilège s'était éteint par la vente en justice de celui-ci. En effet, si les privilèges prévus à l'article 31 suivent le navire en quelques mains qu'il passe, l'article 40 de la loi du 3 janvier 1967 retient trois cas d'extinction de cette sûreté dont la vente en justice du navire.
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