La lettre juridique n°160 du 24 mars 2005

La lettre juridique - Édition n°160

Table des matières

Un nouvel instrument juridique : la fiducie, "entre vieux pots et nouvelles confitures"

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N2326AIY

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la rédaction

Le 07 Octobre 2010


Que se soit pour répondre aux canons de la modernisation économique, à l'orthodoxie de l'harmonisation communautaire ou au spectre de la délocalisation, l'affaire semble bien lancée : la fiducie devrait, "enfin", voir le jour, ou du moins être réglementée, prochainement, en France. En effet, "la France ne peut pas rester insensible à la globalisation de cet instrument juridique", comme le soulignent les rapporteurs de la proposition de loi dont il est ici question. Mistigri des tiroirs du Parlement depuis plus d'une dizaine d'année, l'instauration, au sein de la "vie des affaires", de la fiducie, comme contrat particulier réglementant, notamment, toutes les "fiducies innomées" que recèle notre droit, semble répondre à une nécessité croissante : celle d'importer, sous les couleurs communautaires du droit romano-germanique, le régime des trusts anglo-saxons. Rappelons que la fiducie est une convention par laquelle un constituant transfère des droits de toute nature à une personne physique ou morale dénommée fiduciaire, à charge pour elle de les administrer ou d'en disposer au profit d'un ou plusieurs bénéficiaires. Le transfert s'opère, ainsi, dans un patrimoine d'affectation, appelé patrimoine fiduciaire ; le fiduciaire devenant titulaire ou propriétaire fiduciaire des droits transférés. Aussi, les juristes attribuent, d'ores et déjà, à ce contrat, plusieurs finalités pratiques : la fiducie-sûreté permettant de faciliter le recouvrement des créances par l'appropriation directe du bien confié en cas de manquement de la part du débiteur/constituant ; la fiducie-gestion palliant les limites du mandat en instaurant, notamment, une stabilisation des relations entre le propriétaire des biens et le "gestionnaire" ; la fiducie-transmission à titre onéreux permettant le transfert des biens du constituant à un ou plusieurs bénéficiaires après l'écoulement d'un certain temps ou la survenance d'un événement, afin d'échapper, notamment, au régime de l'indivision. Enfin, les défenseurs de ce contrat soulignent les possibilités ainsi offertes aux "personnes en difficulté" ou "personnes vulnérables", mais qui ne bénéficient pas, aujourd'hui, de la possibilité de recourir à la tutelle ou à la curatelle. Entreprises, comme particuliers, sont donc intéressés à ce que la fiducie "à la française" vienne combler notre droit... Il ne restera plus qu'à combattre les obstacles fiscaux et la possible instrumentalisation de cette nouvelle convention aux fins de blanchiment de capitaux. Lexbase Hebdo - édition affaires vous propose de revenir sur cette proposition de loi avec Marie-Elisabeth Mathieu, Maître de conférences à l'Université d'Evry-Val d'Essonne, Membre du Centre de formation professionnelle notariale de Paris, et of counsel JeantetAssociés.

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Contrats et obligations

[Textes] Vers un contrat de fiducie dans le Code civil ? (aspects de droit civil de la proposition de loi sur la fiducie)

Réf. : Proposition de loi instituant la fiducie

Lecture: 9 min

N2228AID

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par Marie-Elisabeth Mathieu, Jeantet Associés, Maître de conférences à l'Université d'Evry-Val d'Essonne

Le 07 Octobre 2010

D'origine romaine, la fiducie ou fiducia était l'un des plus anciens contrats réels. Limitée au droit des biens, elle consistait en un transfert de droit d'une personne à une autre à une fin précise de gestion ou de garantie (V. sur l'origine de la fiducie, Cl. Witz, La fiducie en droit privé français, Economica 1981 ; pour une étude plus récente et comparative entre le trust et la fiducie, Fr. Barrière, La réception du trust au travers de la fiducie, Litec, 2004).
Le concept de fiducie est, aujourd'hui, consacré, en droit positif, dans certains pays européens et étrangers : en Allemagne, en Suisse, au Luxembourg (loi du 27 juillet 2003 relative aux trusts et aux contrats fiduciaires ; v. sur cette loi, A. Prüm, Une fiducie pour les banques?, RDBF, janv.-févr, 2004, p. 3), mais aussi, par exemple, au Québec à l'occasion de la réforme du Code civil en 1994. Le trust, technique proche de la fiducie, l'a, d'ailleurs, précédé dans les pays anglo-américains. Il emporte un dédoublement de la propriété et transfère un droit réel au bénéficiaire de la fiducie. Tel n'est pas le cas de la proposition récente sur la fiducie. S'inspirant du projet de loi -demeuré lettre morte- du 20 février 1992, le Sénateur Philippe Marini a déposé, le 8 février dernier, une proposition de loi pour intégrer, dans le Code civil, le contrat de fiducie. Cette proposition crée un contrat de fiducie, et en précise les effets juridiques, les règles comptables et le régime fiscal (futur article 649 A du Code général des impôts).

La fiducie aurait la nature d'un contrat spécial permettant la réalisation d'un but. C'est une propriété limitée dans le temps et affectée à une finalité. Elle se réalise dans un patrimoine d'affectation. Le propriétaire de cette masse de bien est un propriétaire fiduciaire chargé d'effectuer une mission -gestion, transmission à titre onéreux, garantie- pour laquelle des pouvoirs lui sont transférés. Le texte n'indique pas de transfert de propriété mais un "transfert de droits de toute nature à une personne physique ou morale" (futur article 2062 du Code civil). Le fiduciaire reçoit donc des pouvoirs sur une masse de biens et non la valeur économique de cette masse (V. en ce sens, M. Grimaldi, La fiducie : Réflexions sur l'institution et sur l'avant projet de loi qui la consacre, Répertoire Défrenois, 1991, art. 35085 et art. 35094 ; A. Benabent, La fiducie (analyse d'un projet de loi lacunaire), JCP éd. N, 1993, Doctrine p. 275 ; J.-P. Le Gall, Le concept de fiducie dans le projet de loi sur la fiducie, Gaz. Pal, 1992, p. 507). C'est une propriété instrumentalisée, ou propriété-fonction, d'une toute autre nature que celle instituée par l'article 544 du Code civil (N° Lexbase : L3118AB4).

La pratique future du contrat de fiducie révélera son intérêt, mais certaines de ses applications à venir se devinent. Par exemple, la fiducie-sûreté permettra aux biens faisant office de garantie d'être, avant l'appel en garantie, entre les mains du créancier-constituant, ce qui réduit ses risques en cas de défaillance du débiteur. Si tel est le cas, il suffit au créancier de transférer les biens situés dans le patrimoine d'affectation vers son patrimoine personnel.

Quant à la fiducie-gestion, elle peut permettre à des personnes qui n'entrent pas dans les cas d'incapacité prévus par la loi d'être déchargées de la gestion de leur patrimoine en l'attribuant à une personne de confiance.

Si cette proposition de loi aboutit, le livre troisième du Code civil intitulé "Des différentes manières dont on acquiert la propriété" sera complété par un titre XVI bis intitulé "De la fiducie". Le contrat de fiducie prendra place aux articles 2062 à 2070-7 du Code civil et précisera les éléments caractéristiques du contrat de fiducie (I) et ses effets juridiques (II).

I - L'apparition d'un contrat spécial de fiducie

Le futur article 2062 du Code civil définit la fiducie comme une convention par lequel "un constituant transfère des droits de toute nature à une personne physique ou morale dénommée fiduciaire, à charge pour elle de les administrer ou d'en disposer au profit d'un ou plusieurs bénéficiaires [...]". Le transfert s'opère "dans un patrimoine d'affectation, appelé patrimoine fiduciaire [...] le fiduciaire devenant titulaire ou propriétaire fiduciaire des droits transférés".

Ce contrat suppose l'existence d'un écrit et un accord entre un constituant et un ou plusieurs fiduciaire(s). Les bénéficiaires ont la qualité de tiers au contrat et celui-ci a, en principe, une durée de vie limitée à la réalisation de son objet.

  • Le contrat comporte six mentions obligatoires requises à titre de validité (futur article 2064 du Code civil).

Seront mentionnés :
- les droits, objet du transfert : le constituant transfère des droits quels que soient leur nature. Ce peut être des biens mobiliers ou immobiliers, des contrats et donc leurs aspects passifs et actifs, des créances -la cession de créance sera d'ailleurs opposable aux tiers de manière simplifiée (futur article 2065 du Code civil)- ;
- la finalité de la fiducie et les pouvoirs d'administration et de disposition du fiduciaire. Cette précision est d'importance lorsque le patrimoine d'affectation porte sur un flux de biens. Dans l'hypothèse d'un contentieux, elle permettra au juge d'apprécier la responsabilité éventuelle du fiduciaire ;
- le ou les bénéficiaires ;
- la rémunération du fiduciaire, le cas échéant ;
- les conditions de transfert des droits ;
- la durée du contrat de fiducie : cette durée ne peut excéder 99 ans. Un contrat de fiducie ne pourra être prorogé au-delà de son terme. Mais, ses bénéficiaires ont la faculté, à leur tour, de constituer un nouveau patrimoine fiduciaire par un contrat de fiducie ayant le même objet que le précédent.

  • Il est passé entre un constituant et un ou plusieurs fiduciaire(s) capable(s) (futur article 2067 du Code civil) -personne physique ou personne morale- ; ces deux qualités ne pouvant être réunies sur une même tête contrairement au trust qui autorise qu'un settlor devienne trustee.

Ce contrat étant conclu intuitu personnae, la confiance entre les cocontractants est de la nature même de la fiducie, proche sur ce point de la technique du mandat. Le fiduciaire doit "réaliser personnellement l'objet de la fiducie" (futur article 2070 du Code civil) en bon père de famille. Il évitera tout conflit entre son intérêt personnel et l'intérêt de la fiducie et il est tenu de rendre compte annuellement de l'accomplissement de ses tâches (futur article 2070 in fine du Code civil). En cas de faute, sa responsabilité sera appréciée comme celle d'un mandataire (V. en ce sens les dispositions du futur article 2070-1 du Code civil). Lorsqu'un délai de dix ans s'est écoulé depuis la signature du contrat, il peut solliciter la révision ou la modification du contrat. De telles demandes suivront le régime des clauses d'inaliénabilité du Code civil, régime prévu aux articles 900-1 à 900-8 du Code civil (N° Lexbase : L3542ABS).

  • Le ou les bénéficiaires de la fiducie sont tiers au contrat.

Le mécanisme de la stipulation pour autrui (C. civ., art. 1121 N° Lexbase : L1209ABE) aura donc vocation à s'appliquer. Le droit acquis par le bénéficiaire est cessible. Une mesure de protection est néanmoins offerte au(x) bénéficiaire(s) et au constituant : ils disposent de l'action paulienne en cas de fraude à leurs droits par le fiduciaire (futur article 2070-4 du Code civil).

  • Ce contrat prend fin lorsque sa finalité s'est réalisée -liée ou non à un événement prévu par le contrat ou par la survenance d'un terme-, par exemple, en cas de fiducie-gestion prévue pour un délai déterminé.

En l'absence de bénéficiaire "les droits et le passif du patrimoine fiduciaire font retour au constituant par l'effet d'une transmission universelle" (futur article 2070 alinéa 2). En cas de décès du constituant, cette transmission accroît la succession.

La fiducie peut, également, dans les cas suivants, prendre fin par décision de justice ou de plein droit -en présence d'une clause résolutoire- : renonciation de leurs droits par les bénéficiaires. Le contrat est en réalité caduc : les biens font retour au constituant sauf s'il est établi que le bénéficiaire n'est plus sain d'esprit ; décès, liquidation ou dissolution du ou de l'un des fiduciaires : les biens font retour au constituant à moins d'avoir contractuellement prévu leur transmission au bénéficiaire.

II - Les conséquences du transfert fiduciaire

L'objet du contrat est un transfert de droits (V. en ce sens, Annexe au Procès-verbal de la séance du 8 février 2005 du sénat, disponible sur www.senat.fr). Ce transfert a trois fonctions distinctes (A) donnant naissance à un patrimoine d'affectation (B).

A - Les fonctions de la fiducie

Trois fonctions alternatives ou cumulatives sont prévues :

- La fiducie-gestion : le bénéficiaire et le constituant sont une seule et même personne. La fiducie permet au constituant de faire gérer un bien ou une masse de biens, dans son intérêt, par un tiers. Au terme du contrat, les biens font retour au constituant.

- La fiducie-transmission à titre onéreux : le fiduciaire a pour mission de transférer le ou les bien(s) du constituant à un ou plusieurs bénéficiaires après l'écoulement d'un certain temps ou la survenance d'un événement. La fiducie réalise alors un transfert de propriété faisant parfois échapper le bien au régime de l'indivision. En toute logique, le contrat de fiducie ne peut transmettre une masse de biens ou un bien à titre gratuit (futur article 2063 du Code civil), ceci pour éviter les difficultés fiscales et les risques de fraudes aux droits de mutation à titre gratuit.

- La fiducie-sûreté : le constituant est, en principe, le débiteur du ou des fiduciaire(s) ayant la qualité de(s) créancier(s). Si le débiteur paye sa dette, le ou les bien(s) -qui pourront être des créances futures (futur article 2065 du Code civil)- transférés lui seront restitués. Mais en cas de défaillance du débiteur, ils tomberont dans le patrimoine personnel du ou des fiduciaire(s).

Cette fiducie échappe ainsi à la prohibition du pacte commissoire, le ou les biens affectés étant valablement déposé(s) entre les mains du ou des créancier(s) (V. A Maynadier, La fiducie-sûreté face au pacte commissoire : leurre ou panacée?, JCP éd. E, 1998, p. 932). Elle permet, aussi, le recours à une autre technique que celle de la clause de réserve de propriété tout en utilisant, sous une nouvelle forme, la propriété à titre de garantie. La fiducie-sûreté est une garantie autonome, non accessoire à la créance garantie : elle ne s'éteindra pas avec l'extinction de la créance initiale. Elle pourra se doubler d'une fiducie-gestion permettant de gérer un ensemble de biens non statiques. Pour exemple, des instruments financiers affectés à titre fiduciaire à la garantie d'une créance.

B - La masse de biens transférée constitue un patrimoine d'affectation

Il s'agit donc de placer temporairement un ou des bien(s) dans un patrimoine distinct du patrimoine personnel du fiduciaire et qui sont sortis de celui du constituant. Les droits transférés forment un patrimoine séparé à mi-chemin entre le patrimoine du fiduciaire et celui du ou des bénéficiaires. L'enjeu est d'importance : la séparation protège le bénéficiaire et rend effective la frontière entre les intérêts personnels de chacun et les intérêts, par nature, fiduciaires. Mais, ce transfert ne met pas les risques à la charge du fiduciaire (futur article 2066, alinéa 2). La masse transférée ne fait pas partie de sa succession (futur article 2070-5, alinéa 2) et n'est pas sujette à une procédure collective à son encontre (futur article 2070-5, alinéa 1). Les créanciers personnels du fiduciaire n'exercent aucun droit de gage sur cette masse de biens.

Inversement, si les biens sortent du patrimoine du constituant, ses créanciers ne pourront en principe exercer leur droit de gage sur cette masse. Titulaires d'une sûreté publiée avant la conclusion du contrat de fiducie, les créanciers du constituant pourront néanmoins exercer un droit de suite sur le patrimoine du fiduciaire (futur article 2068 du Code civil). Mais, en principe, les droits transférés ne peuvent être saisis que par "les titulaires de créances nées de la gestion, en ce compris de la conservation, de ces droits par le fiduciaire" (futur article 2068 du Code civil, alinéa 2).

Dans un but de protection des créanciers et pour les biens dont la mutation est soumise à publicité, il est nécessaire de préciser le nom du fiduciaire es qualité (futur article 2068 alinéa 2 du Code civil). A défaut, le transfert de droits est inopposable aux créanciers du constituant -si le nom de celui-ci est toujours inscrit- et/ou aux créanciers personnels du fiduciaire -si le nom du fiduciaire es qualité ne figure pas.

Enfin, il est prévu une modification du Code de commerce, d'une part, en vu de soumettre aux nullités de la période suspecte un contrat de fiducie conclu par un débiteur pour des dettes contractées antérieurement (futur 6° de l'article L. 621-107 du Code de commerce) et, d'autre part, dans le but d'établir une présomption d'action de concert si la fiducie porte sur des droits de vote et si le bénéficiaire a la qualité de constituant (futur 5° de l'article L. 233-10 du Code de commerce).

Cette proposition de loi comporte d'autres aspects. Elle propose d'étendre aux fiduciaires, les dispositions relatives au blanchiment de capitaux du Code monétaire et financier (modification des articles L. 562-1 et L. 562-1-2 du Code monétaire et financier) et un certain nombre de dispositions fiscales sont prévues dans un esprit de transparence et de neutralité : le constituant serait réputé fiscalement titulaire des droits mis en fiducie et donc redevable, à ce titre, de l'impôt (sur l'aspect fiscal de la proposition, lire V. Le Quintrec, Le Parlement ouvre la voie à l'introduction de la fiducie en droit français, Lexbase Hebdo n° 157 du 3 mars 2005 - édition fiscale N° Lexbase : N4809ABQ).

newsid:72228

Rel. individuelles de travail

[Jurisprudence] Le caractère saisonnier d'un emploi

Réf. : Cass. soc., 9 mars 2005, n° 02-44.706, M. Denis Saba c/ Société Brasserie Heineken, FS-P+B, (N° Lexbase : A2507DHC)

Lecture: 6 min

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par Nicolas Mingant, Ater en droit privé à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV

Le 07 Octobre 2010

Les articles L. 124-2-1 (N° Lexbase : L9584GQZ) et L. 122-1-1 (N° Lexbase : L9607GQU) du Code du travail autorisent le recours à des travailleurs temporaires ou en contrat à durée déterminée pour les emplois dits "saisonniers". En l'absence de précision légale sur cette notion d'"emploi saisonnier", c'est la jurisprudence qui en a progressivement défini le contenu. L'espèce commentée du 9 mars 2005 est l'occasion, pour la Cour de cassation, de rappeler les conditions traditionnelles du caractère saisonnier d'un emploi (1). Cette décision apporte, également, des précisions sur la manière dont les juges du fond doivent, au regard de la définition, apprécier le caractère saisonnier d'un emploi (2).

Décision

Cass. soc., 9 mars 2005, n° 02-44.706, M. Denis Saba c/ Société Brasserie Heineken, FS-P+B, (N° Lexbase : A2507DHC)

Cassation (CA Douai, chambre sociale, 31 janvier 2002)

Mots-clés : travail temporaire ; notion d'emploi saisonnier ; nature et date des emplois

Textes visés : C. trav., L. 124-2-1 (N° Lexbase : L5599ACD)

Liens base :


Faits

M. Saba a été mis à la disposition de la société Brasserie Heineken par la société de travail temporaire Adecco pour effectuer différentes missions entre le 4 mars 1991 et le 15 octobre 1999, en raison du remplacement de salariés absents, d'accroissement temporaire de l'activité et du caractère saisonnier de l'activité. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la requalification des contrats de travail temporaire en un contrat de travail à durée indéterminée, ainsi que la condamnation de la société Brasserie Heineken au paiement de diverses indemnités de rupture.

Dans un arrêt du 31 janvier 2002, la cour d'appel de Douai l'a débouté de ses demandes au motif, d'une part, que l'activité de brasserie présentait un caractère saisonnier en ce qu'elle était sujette à des variations liées à la consommation de la bière, aux politiques de la grande distribution amplifiées par les effets de la climatologie et, d'autre part, que selon l'emploi dans la chaîne de production ou de distribution occupé par le travailleur intérimaire, la période de la saison variait et était fonction des effets des conditions climatiques.


Problème juridique

Une cour d'appel peut-elle qualifier un emploi de saisonnier lorsque la tâche accomplie par le salarié ne se répète pas chaque année à des dates à peu près fixes ?


Solution

1. Cassation partielle

2. "Le caractère saisonnier d'un emploi concerne des tâches normalement appelées à se répéter chaque année à des dates à peu près fixes, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs [...] en statuant comme elle l'a fait, sans préciser la nature et la date des emplois ayant donné lieu à la conclusion des contrats saisonniers, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle".


Commentaire

1. Les conditions du caractère saisonnier d'un emploi

  • L'indifférence du secteur d'activités

Selon l'article L. 124-2-1 du Code du travail (N° Lexbase : L5599ACD), une entreprise ne peut faire appel aux salariés des entreprises de travail temporaire que pour des tâches non durables dénommées "missions". Le Code cite parmi ces tâches non durables les "emplois saisonniers".

Selon une circulaire du 30 octobre 1990, les secteurs d'activités à variation saisonnière sont essentiellement l'agriculture, l'industrie agro-alimentaire et le tourisme (circulaire DRT, n° 90-18 du 30 octobre 1990, art 1.3.1, N° Lexbase : L2859AIQ). Mais, cette liste n'est absolument pas limitative et la jurisprudence a précisé que le caractère saisonnier d'un emploi n'était pas nécessairement lié au secteur d'activité dans lequel le salarié était employé (voir, par exemple, pour les contrats saisonniers conclus dans un grand magasin, Cass. soc., 10 janvier 1991, n° 87-45.059, SA Galeries Lafayette c/ Mlle Lopez Hernandez et autre, publié N° Lexbase : A1464AAH).

En l'espèce, la cour d'appel de Douai, dans son arrêt du 31 janvier 2002, avait retenu que l'activité de brasserie présentait un caractère saisonnier "en ce qu'elle était sujette à des variations liées à la consommation de la bière, aux politiques de la grande distribution amplifiées par les effets de la climatologie". L'argumentation de la cour d'appel ne convainc guère car, en principe, pour mettre en évidence le caractère saisonnier d'une activité, il faut démontrer qu'elle est "prévisible, cyclique, régulière". Or, si la variation de l'activité est bien mise en évidence par la cour d'appel, son caractère "prévisible, cyclique, régulier" ne l'est pas.

La Cour de cassation fait, en réalité, bien peu de cas des développements de la cour d'appel tendant à démontrer que l'activité de brasserie revêt un caractère saisonnier. Dans l'espèce commentée du 9 mars 2005, le raisonnement suivi par les juges de la Cour de cassation repose plutôt sur l'idée que le caractère "saisonnier" visé par l'article L. 124-2-1 ne concerne pas principalement l'activité de l'entreprise, mais l'emploi occupé par le salarié.

  • La définition de l'emploi saisonnier

Si la notion d'emploi saisonnier n'est pas explicitée par le législateur français, elle a fait l'objet de plusieurs définitions convergentes.

C'est ainsi que le droit communautaire qualifie de saisonnier le "travail qui dépend du rythme des saisons et qui se répète automatiquement chaque année" (règlement (CE) n° 1408 /71 du Conseil, 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté N° Lexbase : L4570DLT).

Dans la circulaire précitée du 30 octobre 1990, le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Formation professionnelle a qualifié de saisonniers les travaux "qui sont appelés à se répéter chaque année à date à peu près fixe en fonction des saisons ou des modes de vie collectifs".

La Cour de cassation a repris la définition donnée par la circulaire en affirmant que "le caractère saisonnier d'un emploi concerne des tâches normalement appelées à se répéter chaque année à des dates à peu près fixes, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs" (Cass. soc., 12 octobre 1999, n° 97-40.915, Société nouvelle d'exploitation de la Tour Eiffel c/ Mme Gimbert, publié N° Lexbase : A4714AGP).

C'est cette définition traditionnelle (et consensuelle) de "l'emploi saisonnier" que la Cour de cassation reprend, dans son arrêt du 9 mars 2005. Après avoir rappelé cette définition, la Cour de cassation reproche à la cour d'appel de ne pas avoir mis en évidence les éléments permettant de vérifier si l'emploi de M. Saba entrait bien dans le cadre de cette définition.

2. L'appréciation du caractère saisonnier d'un emploi

Pour admettre le caractère temporaire de l'emploi de M. Saba, malgré les dates différentes des contrats saisonniers signés chaque année, la cour d'appel de Douai affirme que "selon l'emploi dans la chaîne de production ou de distribution occupé par le travailleur intérimaire, la période de la saison variait et était fonction des conditions climatiques".

La difficulté était certainement, en l'espèce, que l'emploi de M. Saba entrait difficilement dans le cadre de la définition traditionnelle retenue par la Cour de cassation. Il était certainement délicat de respecter la condition relative à la "répétition des tâches, chaque année, à des dates à peu près fixes, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs".

L'argument selon lequel, au sein de l'entreprise, la période de la saison variait "selon l'emploi occupé dans la chaîne de production ou de distribution" est certainement admissible. On peut tout à fait admettre qu'en fonction de la tâche à effectuer au sein de l'entreprise, la saison à prendre en considération ne soit pas la même. Puisque le caractère "saisonnier" concerne principalement la tâche effectuée et non l'activité de l'entreprise, il est tout à fait possible qu'il puisse y avoir "plusieurs saisons" au sein d'une même entreprise.

Il convient, en revanche, de s'assurer que la tâche considérée se répète chaque année, à des dates à peu près fixes. On ne peut retenir le caractère saisonnier d'une tâche si elle ne se répète pas de manière suffisamment régulière, en fonction d'un cycle à peu près prévisible. Si le cycle n'est pas régulier, on peut tout de même envisager d'avoir recours au travail temporaire, mais le motif sera alors celui du "surcroît temporaire d'activité" et non celui de l'"emploi saisonnier". En l'espèce, la cour d'appel n'avait donné aucune indication sur la nature et la date des emplois occupés par M. Saba. Il était donc impossible pour la Cour de cassation de vérifier s'il y avait bien, pour une tâche donnée, répétition chaque année à des dates à peu près fixes. Il est sans doute exact d'affirmer que la saison, dans les brasseries, est fonction des conditions climatiques et que celles-ci peuvent être changeantes chaque année. Mais, il convient d'en tirer toutes conséquences et d'exclure le recours au travail saisonnier, qui suppose nécessairement qu'un cycle régulier soit respecté.

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Procédures fiscales

[Jurisprudence] L'impartialité de la commission départementale de conciliation

Réf. : Cass. com., 8 mars 2005, n° 01-17.758, M. Yves Geneste c/ Directeur général des impôts, FS-P+B+I (N° Lexbase : A2449DH8)

Lecture: 7 min

N2285AIH

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par Sophie Duval, Juriste-fiscaliste

Le 07 Octobre 2010

A l'occasion d'un litige en matière de droit d'enregistrement, opposant un contribuable et l'administration fiscale, sur la valeur à retenir, pour le calcul de l'impôt, des parts d'une société transmises lors d'une succession, la Cour de cassation vient, par un arrêt en date du 8 mars 2005, de réaffirmer l'importance de l'impartialité de la commission départementale de conciliation en jugeant que la violation de ce principe entraînait la nullité de la procédure. Cette décision s'inscrit dans une tendance générale des tribunaux, judiciaires comme administratifs, au renforcement des garanties du contribuable tout au long de la procédure de redressement contradictoire.

De prime abord, soulignons que l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme (N° Lexbase : L7558AIR) n'est pas applicable à la procédure suivie devant la commission départementale des impôts (CE 9° et 8° s-s., 18 mars 1994, n° 68799, SA "Sovemarco Europe" c/ Ministre de l'Economie, des Finances et du Budget (N° Lexbase : A2246B8P), avant d'envisager la procédure applicable devant celle-ci (1) et la nécessité de respecter les principes fondamentaux d'impartialité et de contradiction (2).

1. La procédure suivie devant la commission départementale de conciliation

Lorsque l'administration fiscale relève une insuffisance des prix ou des évaluations d'après lesquels ont été liquidés soit les droits d'enregistrement, soit la taxe de publicité foncière ou encore l'impôt de solidarité sur la fortune, le redressement qui en résulte est établi en suivant la procédure de redressement contradictoire. Cette procédure prévoit qu'à défaut d'accord amiable, et afin de donner une autre chance aux parties de s'entendre avant la phase contentieuse, le litige peut être soumis à la commission départementale de conciliation, à l'initiative de l'administration ou du contribuable (LPF, art. L. 59 N° Lexbase : L5566G4W). Lorsque c'est le contribuable qui décide de saisir la commission, il doit le faire dans les 30 jours qui suivent la réception de la réponse de l'administration rejetant ses observations. Sa demande peut être adressée soit directement au secrétariat de la commission, mais il a la possibilité, également, de la transmettre à l'administration, qui devra obligatoirement la faire suivre à la commission.

Une fois la commission saisie, la procédure de redressement est suspendue jusqu'à la notification de sa décision au contribuable.

La commission est présidée par un magistrat de l'ordre judiciaire et comprend 8 membres (4 représentants de l'administration, un notaire et 3 représentant des contribuables). Elle ne peut valablement délibérer que si 5 membres au moins sont présents, y compris le président.

Le contribuable doit être convoqué 30 jours au moins avant la réunion de la commission et il est invité à se faire entendre ou à faire parvenir des observations écrites. Il peut se faire assister par une personne de son choix ou désigner un mandataire.

La commission ne rend pas une décision qui s'impose aux parties, mais un simple avis. Celui-ci est formulé à la majorité des voix. En cas de partage, celle du président est prépondérante. L'avis émis par la commission doit absolument être motivé car, à défaut, la procédure d'imposition est irrégulière.

L'avis rendu, la commssion l'adresse à l'administration. Celle-ci la notifie, ensuite, au contribuable accompagné du montant qu'elle se propose de retenir comme base d'imposition. L'avis de la commission ne s'impose ni au contribuable, ni à l'administration. Même si cet avis est favorable aux redressements envisagés, l'administration conserve toujours la charge de la preuve en cas de recours contentieux.

2. Le nécessaire respect des principes d'impartialité et de contradiction

Lorsque le désaccord entre le contribuable et l'administration porte sur un domaine de compétence de la commission, il est toujours intéressant de saisir cet organisme.

En effet, même si l'administration n'est pas liée à la décision rendue par la commission, un avis favorable au contribuable peut aboutir, dans de nombreux cas, à l'abandon de certains redressements et, surtout, cet avis sera très utile pour préparer la phase contentieuse, les magistrats n'étant pas insensibles aux positions prises par la commission. Mais, inversement, un avis défavorable de la commission compromet souvent les chances d'obtenir gain de cause devant les tribunaux. L'avis de la commission est, dans la pratique, loin d'être anodin. Il est, donc, important que le contribuable ait la garantie d'une étude impartiale de son dossier. C'est ce que vient de réaffirmer, sans ambiguïté, la cour cassation dans son arrêt ici commenté.

Dans cette affaire, l'un des représentants de l'administration fiscale avait fait état, lors des réunions de la commission, d'éléments de nature à influencer l'évaluation des parts de la société objet du litige. Ces éléments lui avaient été révélés par la consultation des dossiers fiscaux du contribuable, mais n'avaient jusqu'alors jamais été pris en compte par l'administration. La cour de cassation a, donc, estimé que l'administration n'ayant pas rapporté la preuve que les documents comprenant ces données avaient été transmis au contribuable, les principes d'impartialité et de contradiction n'avaient pas été respectés par la commission pour rendre son avis.

La violation de ces principes a des conséquences considérables, puisque c'est l'ensemble de la procédure de redressement qui est considérée comme irrégulière.

Bien qu'elle n'avait jamais, jusqu'alors, été affirmée aussi clairement la nécessité de l'impartialité de la commission départementale des impôts était, déjà, évoquée dans certains textes administratifs, même si toutes les conséquences et toutes les hypothèses de la violation de ce principe n'avaient pas, alors, été prises en considération. Ainsi, l'instruction administrative du 4 juin 1984 (BOI n° 13 A-1-84 N° Lexbase : X4459AC7), ainsi que celle du 28 septembre 1992 (BOI n° 13-A-2-92 N° Lexbase : X4458AC4) afférentes l'une et l'autre aux relations entre l'administration fiscale et les usagers indiquaient que "le membre d'une commission qui a un intérêt personnel à l'affaire, qui fait l'objet de la réunion, ne doit pas prendre part à la délibération, c'est-à-dire qu'il ne doit pas assister à la séance ou doit se retirer lorsque l'affaire est évoquée. La seule présence de la personne en cause vicie la délibération et entraîne la nullité de l'avis subséquent. Cette sanction s'applique, sauf s'il est établi que la participation du membre intéressé est restée sans influence sur la délibération. Etant donné la difficulté de rapporter cette preuve négative, il est préférable que l'intéressé s'abstienne de siéger".

Par ailleurs, il est à noter que le caractère contradictoire est, lui, expressément prévu par l'article L. 60 du LPF (N° Lexbase : L8191AE4) pour les procédures se déroulant devant la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Les avis ou décisions de cette commission ne sont, ainsi, opposables aux contribuables que dans la mesure où ces derniers ont été mis en situation de connaître et, par suite, de critiquer tous les points sur lesquels cet organisme a eu à se prononcer. A cette fin, l'article L. 60 du LPF précise que le rapport par lequel l'administration soumet le différend à la commission départementale, ainsi que tous les autres documents, dont l'administration fait état auprès de cette commission pour appuyer sa thèse, doivent être tenus à la disposition du contribuable intéressé au secrétariat de la commission. Ce principe du contradictoire a été réaffirmé à plusieurs reprises par le Conseil d'Etat (par exemple, CE 8 s-s., 11 janvier 1967, n° 64596, Ministre des Finances c/ Sieur S. N° Lexbase : A7693B73 ; CE Contentieux, 23 octobre 1989, n° 77816, Mme Léonie Costes c/ Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie N° Lexbase : A1462AQ9).

En subordonnant la régularité de l'avis de la commission départementale de conciliation au respect des principes de la contradiction, la cour de cassation aligne, ainsi, les règles applicables à cette commission sur celles expressément prévues pour la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffres d'affaires. Plus généralement, en affirmant la nécessité de l'impartialité de la commission, elle va dans le sens d'une application globale à la phase précontentieuse des principes et des garanties prévues lors de la phase contentieuse, qui ont pour objet de garantir aux contribuables un procès équitable.

Dans le même sens, la cour de cassation a, déjà, réaffirmé à plusieurs reprises l'importance de l'obligation pour la commission départementale de conciliation de motiver correctement son avis, cette motivation permettant aux parties de poursuivre utilement leur discussion devant le juge au vue des éléments qu'elle a pris en considération. La cour suprême a, ainsi, jugé que l'absence de motivation de l'avis de la commission prévu par l'article R. 60-3 du LPF (N° Lexbase : L2248AEY) constitue l'omission d'une formalité substantielle entraînant l'irrégularité de la procédure d'imposition (Cass. com., 6 mai 2003, n° 01-13.118, F-D N° Lexbase : A7910BSR ; Cass. com., 1 er juillet 2003, n° 01-16.577, F-D N° Lexbase : A0510C9R) ; Cass. com., 8 juillet 2003, n° 00-16.916, M. Patrick Sokolowsky c/ Directeur général des impôts, F-D N° Lexbase : A0851C9E).

Ces différents rappels à l'ordre sur le fonctionnement de la commission par la cour suprême, sont, incontestablement, une bonne nouvelle pour les contribuables, qui voient leur droit à un procès équitable réaffirmé avec force !

Il convient, toutefois, de faire attention. En effet, le principe du contradictoire peut être à double tranchant, car si l'administration doit communiquer en amont les documents qu'elle entend présenter à la réunion de la commission, il en va de même pour le contribuable. Les documents "surprises" présentés au dernier moment devant la commission sont, donc, à proscrire !

newsid:72285

Fiscalité immobilière

[Jurisprudence] Plus-value immobilière : prise en compte dans la détermination du prix d'acquisition de parts de SCI, à prépondérance immobilière, des apports consentis à la société à l'occasion d'une augmentation de capital

Réf. : CE 3° et 8° s-s., 9 mars 2005, n° 248825, Ministre de l'Economie, des Finances et de l'industrie c/ M. Baradé (N° Lexbase : A2029DHM)

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N2267AIS

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par S. D.

Le 07 Octobre 2010

Décision : CE 3° et 8° s-s., 9 mars 2005, n° 248825, Ministre de l'Economie, des Finances et de l'industrie c/ M. Baradé (N° Lexbase : A2029DHM)

Rejet : CAA Lyon, 2ème ch., 16 mai 2002, n° 98LY01018, Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie c/ M. Baradé (N° Lexbase : A7582AZT)

Mots-clés : Plus-value immobilière ; détermination du prix d'acquisition de parts de société de personnes ; augmentation de capital

Textes concernés : CGI, art. 150 A bis et 150 H

Lien base :

Faits

1. Ayant cédé des parts qu'il détenait dans le capital d'une SCI à prépondérance immobilière et dont le capital avait été augmenté à deux reprises, le contribuable avait souscrit une déclaration de plus-value en retenant comme prix d'acquisition des parts cédés celui résultant de leur nouvelle valeur nominale, ajoutant, ainsi, au prix de souscription sa quote-part d'augmentation de capital ;

2. L'administration fiscale avait refusé de prendre en compte ces augmentations de capital, et avait déterminé, en conséquence, la plus-value imposable en fonction d'un prix d'acquisition des parts égal à leur valeur nominale à la date de souscription.

Solution

1. Le prix d'acquisition retenu pour la détermination de la plus-value de cession de parts de SCI doit être calculé en tenant compte du montant des apports consentis à la société à l'occasion de la souscription initiale du capital social, ainsi que de la quote-part des bénéfices soumis à l'impôt entre les mains de l'associé ;

2. Rejet.

Observations

Aux termes des dispositions de l'article 150 A bis du CGI, les gains nets retirés de la cession à titre onéreux de valeurs mobilières ou de droits sociaux de sociétés non cotées, dont l'actif est principalement constitué d'immeubles ou de droits portant sur ces biens, relèvent exclusivement du régime d'imposition prévu pour les biens immeubles.

Il résulte de l'article 150 H du même code que les plus-values provenant de la cession de tels biens, soumises à l'impôt sur le revenu par l'article 150 A du CGI , sont constituées par la différence entre le prix de cession et le prix d'acquisition.

Le régime fiscal des sociétés de personnes soulève le problème de la double taxation des plus-values. En effet, les plus-values sont imposées une première fois à l'occasion de l'aliénation par la société de biens figurant à son actif. Ensuite, dans le cas où la société n'a pas encore réparti entre ses membres le montant de la plus-value, l'associé peut subir une nouvelle imposition s'il vient à céder ses parts sociales. C'est pourquoi, dans le cas où un associé cède les parts qu'il détient dans une société ou un groupement relevant ou ayant relevé de l'un des régimes prévus aux articles 8 , 8 ter , 239 quater B ou 239 quater C du CGI, le résultat de cette opération doit être calculé, pour assurer la neutralité de l'application de la loi fiscale compte tenu du régime spécifique de ces sociétés et groupements, en retenant comme prix d'acquisition de ces parts, au sens de l'article 150 H du CGI, leur valeur d'acquisition, majorée :

  • d'une part, de la quote-part des bénéfices de cette société ou de ce groupement revenant à l'associé qui a été ajoutée aux revenus imposés de celui-ci, antérieurement à la cession et pendant la période d'application du régime ;
  • et d'autre part, des pertes afférentes à des entreprises exploitées par la société ou le groupement en France et ayant donné lieu de la part de l'associé à un versement en vue de les combler.

Puis minorée :

  • d'une part, des déficits que l'associé a déduits pendant cette même période, à l'exclusion de ceux qui trouvent leur origine dans une disposition par laquelle le législateur a entendu conférer aux contribuables un avantage fiscal définitif ;
  • et d'autre part, des bénéfices afférents à des entreprises exploitées en France par la société ou le groupement et ayant donné lieu à répartition au profit de l'associé ;

Par ailleurs, lorsque les parts de la société de personnes faisant l'objet de la cession ont été acquises ou souscrites à des dates différentes, le prix d'acquisition des parts acquises ou souscrites à la même date est calculé distinctement suivant les modalités décrites ci-dessus.

Ainsi, en application de ces règles, la Haute assemblée, à l'instar de la cour administrative d'appel de Lyon, a considéré que le prix d'acquisition retenu pour la détermination de la plus-value de cession des parts, que détenait le requérant dans la SCI à prépondérance immobilière, devait être calculé en tenant compte du montant des apports qu'il avait consentis à la société à l'occasion de la souscription initiale du capital social, ainsi que de sa quote-part des bénéfices sociaux soumis à l'impôt entre les mains des associés.

Il convient de souligner que les gains nets retirés de cessions à titre onéreux de titres de sociétés de capitaux, dont l'actif est principalement constitué d'immeubles ou de droits portant sur ces biens, sont soumis, à compter du 1er janvier 2004, au régime des plus-values de cession de valeurs mobilières et droits sociaux, même s'il s'agit de sociétés non cotées. Toutefois, ces gains nets restent soumis au régime des plus-values immobilières, lorsque les titres ont été acquis avant le 21 novembre 2003 et ont été cédés entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2004.

newsid:72267

Sociétés

[Questions à...] Le contenu du rapport de gestion de nouveau modifié : questions à... Me Guy de Foresta, Avocat au Barreau de Lyon

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N2299AIY

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Le 07 Octobre 2010


Aux termes de l'article L. 225-100 du Code de commerce (N° Lexbase : L5399G74), le conseil d'administration ou le directoire présente à l'assemblée son rapport ainsi que les comptes annuels et, le cas échéant, les comptes consolidés accompagnés du rapport de gestion y afférent. L'ordonnance n° 2004-1382 du 20 décembre 2004 portant adaptation de dispositions législatives relatives à la comptabilité des entreprises aux dispositions communautaires dans le domaine de la réglementation comptable (N° Lexbase : L5031GUU) modifie, également, la rédaction de cet article pourtant issue de l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004, portant réforme des valeurs mobilières (N° Lexbase : L5052DZ7). Cette nouvelle modification relative au rapport de gestion, s'inscrit dans le mouvement d'inflation législative parfois quelque peu désordonné que connaît, notamment, le droit des sociétés depuis un certain temps. La loi NRE du 15 mai 2001, relative aux nouvelles régulations économiques (loi n° 2001-420 N° Lexbase : L8295ASZ) avait introduit l'obligation de mentionner au rapport la rémunération des mandataires sociaux : cette obligation a été finalement réservée aux rapports de gestion des sociétés "cotées" par la loi de sécurité financière du 1er août 2003 (loi n° 2003-706 [LXB=L3556BLB ]). De même, la loi "Houillon" du 29 octobre 2002 est venue apporter des précisons et des corrections sur les règles de cumul des mandats (loi n° 2002-1303 N° Lexbase : L4505A8D) qui venaient pourtant d'être remaniées par la loi NRE. L'ordonnance du 24 juin 2004, portant réforme du régime des valeurs mobilières, venait d'ajouter plusieurs mentions au rapport de gestion, notamment, des informations financières nouvelles, un tableau sur les délégations en cas d'augmentation de capital ainsi qu'un rapport sur l'usage de ces délégations. Moins de six mois après, le rapport de gestion, est de nouveau modifié sur ce premier point par l'ordonnance du 20 décembre 2004 laquelle transpose en droit interne les directives européennes, dites "Juste valeur" et "Modernisation" (n° 2001/65 N° Lexbase : L4710GUY et n° 2003/51 N° Lexbase : L0085BIY). Afin d'en savoir plus sur les modifications intervenues sur le rapport de gestion, Lexbase a rencontré un spécialiste en droit des sociétés, Maître Guy de Foresta, Avocat au Barreau de Lyon au sein du cabinet Bignon Lebray et Associés, qui a bien voulu répondre à nos questions.

Lexbase : L'article L. 225-100 du Code de commerce relatif au rapport de gestion a été de nouveau modifié. Quels sont les changements apportés au rapport de gestion, par rapport à ceux opérés par l'ordonnance du 24 juin 2004 ?

Me Guy de Foresta : Cette nouvelle ordonnance du 20 décembre 2004 complète les précédentes modifications de l'article L. 225-100 du Code de commerce en venant à la fois restreindre et étendre son champ d'application.

En effet, le législateur introduit des seuils relatifs à la taille de l'entreprise afin d'en limiter le périmètre initial mais en même temps, il étend le nouveau dispositif à d'autres formes sociales que les sociétés anonymes (SA) et les sociétés en commandites par actions (SCA) seules visées initialement. En outre, la liste des nouvelles mentions devant figurer dans le rapport de gestion s'allonge singulièrement.

Toutefois, tandis que celles issues de l'ordonnance de juin 2004 sont déjà applicables aux rapports portant sur les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2004, les mentions complémentaires de cette nouvelle ordonnance attendront les rapports 2006, l'ensemble de ces dispositions ne s'appliquant qu'"à partir du premier exercice ouvert à compter du 1er janvier 2005" (Ord. 24 décembre 2004, art. 12 ).

Lexbase : Quelles sont les sociétés concernées par ces nouvelles obligations ?

Me Guy de Foresta : Les formes sociales, jusqu'alors concernées par l'article L. 225-100 du Code de commerce, étaient les sociétés anonymes et les sociétés en commandites par actions. Désormais, le nouveau dispositif étend l'application des alinéas 3, 4, 5 et 6 de l'article L. 225-100 et les nouveaux articles L. 225-100-1 (N° Lexbase : L5400G77) et L. 225-100-2 (N° Lexbase : L5401G78) du Code de commerce, aux sociétés à responsabilité limitée (SARL) et aux sociétés en nom collectif (SNC) dont l'ensemble des parts détenu par des SA, des SCA ou des SARL (C. com., art. L. 221-7, al. 4 N° Lexbase : L5409G7H). L'expression "l'ensemble des parts" est malheureuse. Faut-il la comprendre dans le sens de l'exhaustivité ou de la simple généralité ? Le terme "tous les associés", utilisé par les dispositions de l'article L. 232-21 du Code de commerce (N° Lexbase : L6301AI9) pour obliger les SNC détenues par des SA et/ou des SARL à publier leurs comptes sociaux, aurait évité toute ambiguïté à cet égard.

En revanche, les sociétés par actions simplifiées ne sont pas (encore ?) visées par ce dispositif, et s'agissant des sociétés "cotées", elles sont toutes visées quelles que soient leur forme sociale (C. com., art. L. 225-100-1).

Lexbase : Le législateur indique que les sociétés dépassant certains seuils sont soumises à ce dispositif. Concernant ces seuils, on attend la publication d'un décret d'application. Néanmoins, pouvez-vous nous en dire plus quant à ces derniers ?

Me Guy de Foresta : Il faut avoir à l'esprit trois seuils distincts, lesquels reposent sur les trois mêmes critères : total du bilan, chiffre d'affaires net et effectif (nombre moyen de salariés permanents). Si les chiffres (à fixer par décret) sont dépassés pour au moins deux de ces critères, le seuil est considéré comme atteint.

1/ Le franchissement du premier seuil à fixer par décret et qui selon la revue fiduciaire (RFC, janvier 2005, n° 313) devrait ressortir à : bilan 3,65 M. euros, chiffre d'affaires 7,3 M. euros et effectif 50 salariés (C. com., art. L. 225-100-1), obligera les sociétés concernées à délivrer toutes les nouvelles informations, sauf les informations non-financières (C. com., art. L 225-100-1, l al. 2).

2/ Le second seuil, d'après cette même source, ressortirait à : bilan 14,6 M. euros, chiffre d'affaires 29,2 M. euros, et effectif 250 salariés, et son franchissement obligera les sociétés à inclure la totalité des nouvelles informations dans leur rapport de gestion.

3/ Le troisième seuil, déjà connu, est celui concernant les sociétés tenues d'établir et de publier des comptes consolidés et un rapport sur la gestion du groupe (C. com., art. L. 233-17 N° Lexbase : L6320AIW, D. n° 67-236 du 23 mars 1967, art. 248-14 N° Lexbase : L0729AYN), soit : bilan 15 M. euros, chiffre d'affaires 30 M. euros, et effectif 250 salariés. Le nouvel article L. 225-100-2 du Code de commerce oblige ces sociétés à inclure la totalité des nouvelles informations dans le rapport de gestion consolidé, pour l'ensemble des entreprises comprises dans la consolidation.

Faut-il préciser, enfin, que quels que soient ces seuils ou la forme sociale de l'entreprise, la totalité des nouvelles informations de l'article L. 225-100 du Code de commerce devra être mentionnée dans le rapport de gestion des sociétés dont les instruments financiers sont admis à la négociation sur un marché réglementé.

Lexbase : Nous en venons au contenu du rapport de gestion. L'article L. 225-100 du Code de commerce a été modifié de façon significative (les modifications apportées par l'ordonnance apparaissent en gras) :

"[...]
Le conseil d'administration ou le directoire présente à l'assemblée son rapport ainsi que les comptes annuels et, le cas échéant, les comptes consolidés accompagnés du rapport de gestion y afférent.
Ce rapport comprend une analyse objective et exhaustive de l'évolution des affaires, des résultats et de la situation financière de la société, notamment de sa situation d'endettement, au regard du volume et de la complexité des affaires.
Dans la mesure nécessaire à la compréhension de l'évolution des affaires, des résultats ou de la situation de la société et indépendamment des indicateurs clés de performance de nature financière devant être insérés dans le rapport en vertu d'autres dispositions du présent code, l'analyse comporte le cas échéant des indicateurs clés de performance de nature non financière ayant trait à l'activité spécifique de la société, notamment des informations relatives aux questions d'environnement et de personnel.
Le rapport comporte également une description des principaux risques et incertitudes auxquels la société est confrontée.
L'analyse mentionnée au troisième alinéa contient, le cas échéant, des renvois aux montants indiqués dans les comptes annuels et des explications supplémentaires y afférentes.
Le rapport comporte en outre des indications sur l'utilisation des instruments financiers par l'entreprise, lorsque cela est pertinent pour l'évaluation de son actif, de son passif, de sa situation financière et de ses pertes ou profits. Ces indications portent sur les objectifs et la politique de la société en matière de gestion des risques financiers, y compris sa politique concernant la couverture de chaque catégorie principale de transactions prévues pour lesquelles il est fait usage de la comptabilité de couverture. Elles portent également sur l'exposition de la société aux risques de prix, de crédit, de liquidité et de trésorerie.
Est joint à ce rapport un tableau récapitulatif des délégations en cours de validité accordées par l'assemblée générale des actionnaires au conseil d'administration ou au directoire dans le domaine des augmentations de capital, par application des articles L. 225-129-1 et L. 225-129-2. Le tableau fait apparaître l'utilisation faite de ces délégations au cours de l'exercice.
[...]".

Lexbase : Pouvez-vous à présent nous parler de la nature même de ces informations nouvelles qui devront être mentionnées dans le rapport de gestion ?

Me Guy de Foresta : On peut les regrouper selon les quatre catégories suivantes :

1/ La première concerne les informations "financières" découlant de la première phrase de l'alinéa 3 de l'article L. 225-100 ; "une analyse objective et exhaustive de l'évolution des affaires, des résultats et de la situation financière de la société notamment de sa situation d'endettement".

Cette rédaction issue de l'ordonnance du 24 juin 2004 demeure inchangée, les nouvelles dispositions se bornant simplement à préciser que cette "analyse" peut renvoyer aux montants indiqués dans les comptes annuels (C. com., art. L. 225-100, al. 5). Pour retracer "l'évolution" dans ces triples domaines distincts des "affaires", des "résultats" et de la "situation financière", il convient sans doute d'établir un comparatif, à partir de chiffres sélectionnés, par rapport à l'exercice ou aux exercices précèdent(s), comparatif qui était déjà établi en pratique, du moins quant aux résultats.

Le bilan et les annexes apportent aussi un certain nombre d'informations sur la situation d'endettement de l'entreprise, en particulier, quant aux emprunts en cours et à leur échéance. Il faut à présent aller plus loin, en dégageant par exemple certains ratios : endettement/capitaux propres, endettement/chiffre d'affaires, coût moyen de l'endettement. L'emploi des termes "objectif" et surtout "exhaustif" laisse entendre que le niveau d'information fournie doit être significativement plus élevé que celui relatif à l'exposé habituel de "la situation de la société durant l'exercice écoulé", de son "évolution prévisible" et des "évènements importants" de début d'exercice (C. com., art. L. 232-1, II N° Lexbase : L6281AIH).

Sur ce premier type d'informations, l'application échelonnée dans le temps des deux ordonnances de juin et de décembre 2004 génère une anomalie. Ces informations financières devront figurer dans les rapports de gestion rédigés en 2005 relatifs aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2004 de toutes les SA et SCA, mais ne seront plus nécessaires dans les rapports que ces mêmes sociétés devront rédiger en 2006 au titre de l'exercice en cours, dès lors qu'elles ne dépasseront aucun des deux premiers seuils susvisés (à moins qu'il ne s'agisse de sociétés "cotées"... !).

2/ Ensuite, indépendamment des indicateurs de nature financière et "...dans la mesure nécessaire à la compréhension de l'évolution des affaires, des résultats et de la situation de la société", l'analyse susvisée devra, "le cas échéant", comporter des informations non financières : des "indicateurs clés de performance de nature non financière ayant trait à l'activité spécifique de la société, notamment des informations relatives aux questions d'environnement et de personnel" (C. com., art. L. 225-100, al. 3, phrase 2).

Les précautions rédactionnelles utilisées "dans la mesure où", "le cas échéant" semblent autoriser à penser que le recours à de tels indicateurs non financiers pourrait rester limité. Du reste, cette catégorie d'information ne concerne pas les entreprises n'atteignant pas le premier des trois seuils susmentionnés.

Et de fait, que faudra-t-il mentionner en plus des informations relatives au personnel ou à l'environnement ? Cela peut être très large : les performances qualitatives de la société, ses produits, son image, sa communication... ?

Quant aux informations concernant le personnel et l'environnement, il s'agit d'obligations qui pesaient déjà sur les sociétés "cotées" depuis la loi NRE. L'on pourra donc s'inspirer de la liste donnée par les articles 148-2 et 148-3 du décret n° 67-236 du 23 mars 1967 (N° Lexbase : L2394AH7, N° Lexbase : L2690A87).

3/ La troisième catégorie d'informations concerne la "description des principaux risques et incertitudes auxquels la société est confrontée" (C. com., art. L. 225-100, al. 4). Ces informations sont visées par la directive "Modernisation" du 18 juin 2003 pour les rapports de gestion de groupe. En transposant cette directive pour ces derniers rapports, le législateur l'adapte également aux rapports de gestion sur les comptes sociaux.

Le périmètre de cette information concernant "les principaux risques et incertitudes" va être difficile à délimiter. Une entreprise est confrontée à toutes sortes de risques et d'incertitudes dans des domaines très variés : sa concurrence, ses approvisionnements, ses produits et services, leurs qualités, mais aussi la conjoncture, l'environnement économique. Va-t-il falloir faire de la macroéconomie ?

4/ Enfin, la quatrième catégorie d'informations concerne les instruments financiers, et leur utilisation par l'entreprise. La rédaction de l'alinéa 6 de l'article L. 225-100 du Code de commerce reprend presque intégralement les termes de la directive "Modernisation".

Le rapport devra rendre compte des instruments financiers utilisés, plus particulièrement en terme de gestion des risques financiers : prix, crédit, liquidité et trésorerie, du moins lorsque cela sera pertinent pour l'évaluation de son patrimoine, puisqu'une telle réserve est introduite par le nouveau texte.

Lexbase : Quel est l'accueil de cette réforme par les sociétés concernées ?

Guy de Foresta : Il est encore un peu tôt pour le dire, néanmoins, ce texte va dans les sens d'une plus grande transparence et d'une meilleure appréhension par les actionnaires, par le public, de la gestion de l'entreprise.

S'il est bien confirmé par décret, le franchissement du premier seuil, finalement assez bas, et qui devrait toucher nombre de PME à actionnariat familial, sera nécessairement perçu comme une contrainte supplémentaire, sans véritable contrepartie. Trop d'information ne tue-t-elle pas l'information ?

Pour les rédacteurs des rapports de gestion, eu égard, notamment, au caractère très "ouvert" et général de plusieurs des termes du nouvel article L. 225-100 du Code de commerce -"analyse objective et exhaustive", "indicateurs non financiers", "risques et incertitudes"- l'exercice devient encore plus délicat pour trouver le juste milieu entre la protection légitime de données confidentielles de l'entreprise (stratégie, relation avec certains tiers...) et une certaine transparence du gouvernement d'entreprise tant vis-à-vis de son actionnariat que de ses partenaires et du public.

Propos recueillis par Aurélie Ecuyer
SGR Droit des sociétés

newsid:72299

Fiscalité des entreprises

[Manifestations à venir] La réforme de l'imposition des plus-values à long terme et distributions 2005

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N2292AIQ

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Le 07 Octobre 2010

Dans le cadre d'un colloque organisé par l'association des Avocats Conseils d'Entreprises (ACE), Madame Emmanuelle Fena-agueny (avocat au Cabinet CMS Bureau Francis Lefebvre) et Monsieur Thierry Nicolaides (avocat au Barreau de Paris - ELJ) auront le plaisir d'intervenir, le vendredi 8 avril 2005, sur "la réforme de l'imposition des plus-values à long terme et distributions 2005".
  • Date, heures et lieu :

- Vendredi 8 avril 2005

- 09 H 30 - 11 H 30

- Maison du Barreau - Salle du Barreau, 2 - 4 rue de Harlay 75001 - Paris

  • Droits d'inscription

Ce colloque sera éligible à la formation continue des avocats

- pour les avocats inscrits : 80 euros HT + 15, 68 euros de TVA (19, 60 %), soit 95, 68 euros

- pour les avocats stagiaires : 40 euros HT + 7, 84 euros de TVA (19, 60 %), soit 47, 84 euros

- règlement à libeller à l'ordre de l'ACE

  • Renseignements :

Contact : Mme Sandrine Lagorge
114-116 avenue de Wagram 75017 - Paris
n° de tél. : 01 47 66 30 07 - Fax : 01 47 63 35 78
e-mail : ace@avocatline.com

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