Il appartient aux juridictions des Etats membres, dans le cadre d'une demande de retour d'enfant, de déterminer correctement l'intérêt supérieur de l'enfant et d'examiner l'affaire avec célérité. Telle est la solution retenue par la CEDH dans un arrêt du 21 juillet 2015 (CEDH, 21 juillet 2015, Req. 2361/13,
disponible en anglais). En l'espèce, Mme S., ukrainienne, eut, en 2004, un fils, L., avec M. C., de double nationalité géorgienne et ukrainienne. En 2005, M. C. s'installa en Russie. En 2006, le couple eut un second enfant, qui trouva la mort en tombant par la fenêtre d'un appartement. On diagnostiqua chez L., qui avait assisté à la mort de sa soeur, des troubles d'adaptation. En 2010, M. C. emmena L. en Géorgie pour les vacances d'été et décida de l'y laisser avec sa famille pendant que lui retournerait en Russie. Mme S. engagea une procédure de restitution d'enfant. Deux rapports furent, alors, établis : dans le premier, deux travailleurs sociaux concluaient que L. souffrait de l'absence de contact avec ses parents, dans le second, un psychologue ajoutait que l'enfant souffrait d'une situation compliquée qui était quasiment incompréhensible pour lui. En août 2012, la Cour suprême, s'appuyant sur les deux rapports, conclut que l'intérêt de L. serait mieux protégé s'il demeurait en Géorgie au motif que son retour en Ukraine risquait de l'exposer à un danger psychique puisqu'il avait précisément quitté ce pays en raison du traumatisme qu'il y avait subi lors de la mort de sa petite soeur. Invoquant l'article 8 (
N° Lexbase : L4798AQR) (droit au respect de la vie privée et familiale), la requérante, Mme S., se plaignait du refus des juridictions géorgiennes d'ordonner le retour de son fils ainsi que de la durée de la procédure correspondante. La Cour accueille l'argument du Gouvernement selon lequel l'ingérence dans le droit de M. S. au respect de la vie familiale avait une base légale, à savoir l'article 13 § b de la Convention de La Haye (Convention du 25 octobre 1980, sur les aspects civil de l'enlèvement international d'enfants
N° Lexbase : L0170I8S), lequel dispose qu'un Etat n'est pas tenu d'ordonner le retour d'un enfant lorsqu'il existe un risque grave que ce retour ne l'expose à un danger psychique. La Cour juge, cependant, que l'examen par les tribunaux géorgiens des expertises et autres éléments de preuves présentés lors de la procédure de retour a été déficient. En particulier, lorsqu'ils ont défini l'intérêt supérieur de l'enfant, les tribunaux n'ont pas tenu compte des rapports établis par des travailleurs sociaux et un psychologue, lesquels concluaient que le garçon souffrait d'être privé de contact aussi bien avec sa mère qu'avec son père et d'une situation quasiment incompréhensible. La CEDH retient la solution susvisée et dit, à l'unanimité, qu'il y a eu violation de l'article 8 de la CESDH (cf. l’Ouvrage "L'autorité parentale"
N° Lexbase : E5830EYL).
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