Le gérant qui a remis à son employé un équipement présentant des défauts de conformité à la réglementation et qui n'a pas pris les mesures permettant d'éviter l'abaissement incontrôlé de la benne ayant entraîné la mort de son employé, alors qu'il en connaissait le risque, contribue à créer la situation ayant permis la réalisation du dommage, violant ainsi de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité. Telle est la solution dégagée par la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 9 décembre 2014 (Cass. crim., 9 décembre 2014, n° 13-85.937, FS-P+B
N° Lexbase : A6004M7I).
Dans cette affaire, M. C., salarié en qualité de conducteur a été écrasé, alors qu'il se trouvait entre le châssis et la benne d'un camion appartenant à l'entreprise, lors que cette benne, qui était levée, est redescendue. Il est décédé des suites de ses blessures. Le gérant a été cité devant le tribunal correctionnel des chefs, notamment, d'homicide involontaire dans le cadre du travail et de mise à disposition d'un équipement de travail ne permettant pas de préserver la sécurité car non conforme à plusieurs normes de sécurité, en l'espèce, un camion benne, et il a été déclaré coupable de ces délits. Le prévenu a interjeté appel de ce jugement.
La cour d'appel retient que, selon le rapport dressé par l'APAVE, la benne en cause présentait de nombreux manquements aux obligations prévues par le Code du travail et qu'ainsi n'étaient pas prévenus les risques d'un abaissement incontrôlé de cette benne et d'un écrasement du châssis bas qui pouvait en résulter. La cour d'appel déduit la connaissance que le gérant avait des risques présentés, pour le salarié, par cet équipement de travail lorsqu'il l'avait remis à M. C., de ce qu'il faisait obligation aux salariés de placer une cale sous la benne dès que celle-ci était levée. Elle relève également que, même si les circonstances de l'accident sont restées incertaines, la benne qui a écrasé M. C. n'a pu descendre inopinément qu'en raison de la manipulation du levier permettant de passer d'une utilisation "benne" du dispositif hydraulique à une utilisation "grue" de ce même dispositif. Elle énonce que la faute ayant consisté, pour le gérant, à remettre à M. C. l'équipement présentant les défauts de conformité à la réglementation précise rappelée ci-dessus a contribué au dommage. Il en résulte que le prévenu, qui a contribué à créer la situation ayant permis la réalisation du dommage et n'a pas pris les mesures permettant de l'éviter, a violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, au sens de l'article 121-3, alinéa 4, du Code pénal (
N° Lexbase : L2053AMY). Débouté de ses demandes par la cour d'appel, le gérant s'est pourvu en cassation.
La Haute juridiction rejette son pourvoi et accueille l'arrêt de la cour d'appel (cf. l’Ouvrage "Droit du travail"
N° Lexbase : E3433ETC).
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