Le Quotidien du 20 juin 2024

Le Quotidien

Actualité judiciaire

[A la une] Salon de l’armement Eurosatory : la justice ordonne finalement de suspendre le boycott visant les sociétés israéliennes

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par Vincent Vantighem

Le 19 Juin 2024

Il y aura donc désormais deux façons de se rendre compte du savoir-faire des sociétés israéliennes en matière d’armement militaire : regarder à la télévision les images du conflit avec le Hamas ou se rendre à Villepinte, en Seine-Saint-Denis. Après des semaines de débats agités, le tribunal de commerce, saisi en référé, a, en effet, ordonné, mardi 18 juin, de lever l’interdiction faite aux sociétés israéliennes d’exposer lors du salon Eurosatory qui se tient en ce moment même à Villepinte. Sorte de grand-messe de l’armement, Eurosatory réunit en France ce qui se fait de mieux en matière de défense militaire. Cette année, 2 000 exposants et 270 délégations étrangères sont attendus pour cet événement souvent comparé au salon de l’automobile de Genève (Suisse) pour son côté démesuré.

Dans ce domaine-là, on n’aime pas trop parler publiquement. Mais il y a quelques semaines, l’événement avait défrayé la chronique bien malgré lui lorsque la Coges, société qui l’organise, avait révélé que le Gouvernement français avait décidé d’annuler la participation des sociétés d’armement israéliennes après le bombardement du camp de déplacés à Rafah par l’armée israélienne. Il faut dire que celui-ci avait coûté la vie à quarante-cinq civils…

Les cris d’orfraie lancés du côté de Tel-Aviv ou de Jérusalem ont retenti jusqu’en région parisienne. Parce que soixante-quatorze sociétés de l’État hébreu avaient bien l’intention de venir tenir un stand sur ce salon. Mais le boycott semblait bien établi. D’autant plus qu’il avait été validé par le tribunal judiciaire de Bobigny (Seine-Saint-Denis), vendredi 13 juin. Saisi par des ONG, la justice avait validé le dispositif en allant même plus loin, c’est-à-dire en demandant à l’organisateur d’interdire les sociétés israéliennes à exposer ainsi qu’à leurs « intermédiaires ou sous-traitants ». Précision faite que lesdites sociétés n’avaient pas, non plus, le droit de demander asile sur des stands tenus par des sociétés « amies » domiciliées, elles, dans d’autres pays…

Une mesure « discriminatoire » pour le tribunal de commerce

Le salon s’est donc ouvert dans cette drôle d’ambiance lundi 17 juin. Mais le lendemain au petit matin, le tribunal de commerce de Paris a remis un coup de pied dans la fourmilière. Saisi par la Chambre de commerce France – Israël, en référé, le tribunal de commerce a pris une décision radicalement différente de celle du tribunal judiciaire de Bobigny, en ordonnant à la Coges de suspendre le boycott mis en place.

« La Coges doit suspendre l’exécution des mesures adoptées à l’encontre des sociétés israéliennes dont les stands ont été prohibés, indique ainsi le tribunal dans un jugement de cinq pages que Lexbase a pu consulter. Jusqu’à ce qu’il soit statué par le juge du fond sur la légalité de la mesure discriminatoire contestée. »

Et le tribunal de commerce de préciser que tout cette histoire est, en réalité, « discriminatoire ». « Les mesures mises en œuvre par la Coges à compter du 31 mai 2024 opèrent une distinction entre les personnes morales déclarées comme israéliennes, ainsi que leurs filiales, et les autres personnes morales ayant formulé une demande de disposer d'un stand sur le salon. Il est incontestable que cette distinction est fondée sur l'appartenance de ces personnes morales à une nation. En conséquence, les mesures mises en œuvre constituent une discrimination telle que définie à l'article 225-1 du Code pénal ».

Une décision qui satisfait Patrick Klugman, avocat de la Chambre de commerce France – Israël. « C’est logique. On ne peut pas discriminer de cette façon, confie-t-il. D’autant plus que la Coges a expliqué qu’il n’avait fait que suivre les ordre du Gouvernement sans jamais produire la preuve que le Gouvernement lui avait donné cet ordre... » Le salon doit durer jusqu’au vendredi 21 juin.

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Actualité judiciaire

[A la une] Un silure mangeur d’hommes, un requin « sous la Seine » et une procédure en « parasitisme » devant le tribunal judiciaire de Paris

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N9677BZG

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par Vincent Vantighem

Le 19 Juin 2024

Impossible de passer à côté ! Tous ceux qui surfent sur la plateforme Netflix le soir en se demandant quel film regarder pour se vider le cerveau ont forcément vu, d’un œil amusé, la dernière « création originale ». Baptisé Sous la Seine, ce long-métrage raconte l’arrivée d’un requin ayant muté, dans les eaux de Paris, juste avant une compétition de triathlon dans la Seine. Toute ressemblance avec des événements olympiques qui doivent se dérouler prochainement sont voulus. Cliché du genre, le fim déploie tous les effets que l’on en attend : de la peur, du sang, une héroïne qui veut sauver le monde, un policier beau gosse et une musique angoissante. Suffisamment efficace pour l’avoir transformé en carton. C’est, en effet, actuellement le film le plus regardé sur la plateforme.

Cette histoire aurait pu s’arrêter là. Elle aurait même dû s’arrêter là, sans objectif de vouloir marquer l’histoire du septième art. Seulement voilà, il y en a un qui n’a pas digéré le repas du requin. Il s’appelle Vincent Dietschy et il est cinéaste de son métier. Quelques mois avant la sortie du film quand la promotion, à grands renforts d’affiches collées à l’arrière des bus de la RATP, débutait, il a remarqué que Sous la Seine reprenait des éléments d’un de ses vieux scénarios… C’est pourquoi il a décidé de saisir le tribunal judiciaire de Paris, au civil, d’une procédure en « parasitisme ». Normal pour évoquer une histoire de requin et de silure.

Car Vincent Dietschy reproche à Netflix d’avoir repris son histoire exception faite du grand méchant qui, dans sa trame initiale, n’était pas un requin mais un silure, donc, plus accoutumé aux eaux douces que les squales. Selon lui, il avait évoqué ce scénario dès 2015 sans jamais parvenir à le vendre. « Il avait rédigé ce qu’on appelle un "traitement", indique Héloïse de Castelnau, son avocate. C’est-à-dire un scénario non dialogué d’une trentaine de pages… »

Pourquoi ne pas demander à Steven Spielberg ?

D’après lui, Netflix aurait donc pompé son idée en changeant uniquement la figure du monstre. Suffisant à ses yeux pour lancer une procédure en « parasitisme ». Il ne faut pas chercher. Ce délit n’existe pas clairement dans le Code de procédure pénale. Il s’agit d’une notion jurisprudentielle. « On a plutôt l’habitude du plagiat ou de la contrefaçon, explique Héloïse de Castelnau. Mais ici, on évoque une idée de Vincent Diestchy. On ne peut pas comparer son film qui n’est jamais sorti à celui de Netflix. C’est pour cela qu’on invoque le parasitisme. »

Lors de l’audience, vendredi 14 juin, le cinéaste était là pour exprimer toute sa rancœur à l’égard de la plateforme. Et d’évoquer un tableau où il a listé tous les points de comparaison entre Silure et Sous la Seine. De quoi faire bondir l’avocat de la plateforme qui, en guise de défense, a avancé tous les codes inévitables des films catastrophe autour de l’attaque d’un animal sur une population. Partant de ce principe, Steven Spielberg aurait pu, lui-aussi, attaquer Netflix pour s’être fait voler son idée des Dents de la mer.

Reste désormais à arbitrer les débats. Charge au tribunal judiciaire de Paris, statuant en matière civile, de donner tort ou raison à Vincent Diestchy. Celui-ci demande simplement que Sous la Seine soit retiré du catalogue de Netflix. Le délibéré a été fixé au 3 juillet. Il reste donc quelques semaines pour admirer ce « chef d’œuvre ».

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Affaires

[Brèves] Eurosatory : l’exclusion des entreprises israéliennes et de leurs représentants est jugée illicite !

Réf. : T. com. Paris, 18 juin 2024, aff. n° 2024037849 N° Lexbase : A72885IR ; CA Paris, 1-3, 18 juin 2024, n° 24/10503 N° Lexbase : A73325IE

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N9667BZ3

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par Vincent Téchené

Le 20 Juin 2024

► Dans deux décisions rendues en référé le 18 juin, les juges français ont statué sur les modalités de participation des entreprises israéliennes et de leurs représentants au salon de l’armement Eurosatory.

D’une part, le tribunal de commerce juge en substance, que l’interdiction faite aux sociétés israéliennes ou à leurs filiales étrangères de disposer d’un stand constitue un trouble manifestement illicite (T. com. Paris, 18 juin 2024, aff. n° 2024037849).

D’autre part, la cour d'appel de Paris retient que le fait pour l’organisateur du salon de ne pas avoir interdit l’entrée et la participation des industriels de l’armement israéliens et de toute personne salariée ou représentante des entreprises d’armement israéliennes, ne constitue pas une violation évidente de la règle de droit (CA Paris, 1-3, 18 juin 2024, n° 24/10503).

  • Sur l’interdiction faite aux sociétés israéliennes et à leurs filiales de disposer d’un stand au salon  

Le tribunal de commerce de Paris, saisi de la demande de suspension de cette mesure administrative édictée par les autorités étatiques, relève que ni l’État d’Israël, ni ses ressortissants, ni ses entreprises ne font l’objet d’une mesure d’embargo.

En outre, selon le juge, les mesures litigieuses mises en œuvre par Coges (l’organisateur du salon) opèrent une distinction entre les personnes morales déclarées comme israéliennes, ainsi que leurs filiales, et les autres personnes morales ayant formulé une demande de disposer d’un stand sur le salon. Elles constituent de la sorte une discrimination au sens de l’article 225-1 du Code pénal N° Lexbase : L0903MCG. En outre, elles consistent à refuser la fourniture d’un service et à entraver l’exercice normal de leur activité (v. C. pén., art. 225-2 N° Lexbase : L7899LCK).

Par conséquent, les mesures litigieuses sont illicites et pénalement répréhensibles. Le tribunal en conclut qu’elles provoquent donc un trouble manifestement illicite.  

Il ordonne alors à la Coges de suspendre l’exécution des mesures adoptées à l’encontre des sociétés israéliennes dont les stands ont été prohibés jusqu’à la clôture du salon.

  • Sur l’entrée et la participation des industriels de l’armement israéliens et de leurs salariés et représentants

Dans la seconde affaire rapportée, diverses associations ont assigné en référé, devant le président du tribunal judiciaire de Bobigny, la société Coges afin notamment qu’il lui soit ordonné de respecter l’interdiction de permettre l’entrée au salon Eurosatory et la participation sous quelques formes que ce soit, des industriels de l’armement israéliens et de toute personne salariée ou représentante des entreprises d’armement israéliennes, ainsi que de toute personne physique ou morale susceptible d’opérer comme leur courtier ou leur intermédiaire.

Les demanderesses ayant obtenu gain de cause devant le tribunal judiciaire, la Coges a interjeté appel.

Les juges de la cour d’appel constatent d’abord que la décision du Gouvernement français n’est pas dénuée d’imprécision ni d’équivoque quant au périmètre de l’interdiction qui est posée : alors qu’il est fait allusion aux exposants et à leurs stands, il est également mentionné qu’elle s’applique très généralement aux entreprises israéliennes.

Ainsi, le fait pour la société Coges de ne pas avoir interdit l’entrée au salon Eurosatory et la participation des industriels de l’armement israéliens et de toute personne salariée ou représentante des entreprises d’armement israéliennes, ainsi que de toute personne physique ou morale susceptible d’opérer comme leur courtier ou leur intermédiaire ne constitue pas une violation évidente de la règle de droit.

Il est intéressant de noter que la cour d’appel précise que les mesures litigieuses auraient pu être prises par le Gouvernement français, mais elles ne l’ont pas été avec l’évidence requise en référé. Il n’appartient pas au juge judiciaire de compléter une décision politique qui a la nature d’un acte de gouvernement en relation avec la conduite des relations internationales de la France, pour ensuite sanctionner sa violation à l’aide de mesures conservatoires ou de remise en état.

Par ailleurs, il n’est pas démontré qu’un instrument juridique international, directement applicable à la société Coges, avait été violé par celle-ci.

En outre, il n’appartient pas, non plus, au juge des référés, saisi d’une demande fondée sur le trouble illicite caractérisé par le comportement d’un opérateur économique privé, de vérifier si la France a respecté ses engagements internationaux en permettant à cet opérateur d’exercer son activité sur le territoire national.

De tout cela, les juges d’appel déduisent l’absence de trouble manifestement illicite. En outre, aucun dommage imminent n’est caractérisé, les associations intimées se bornant à reprendre l’argumentaire présenté au titre du trouble manifestement illicite pour considérer que celui-ci entraîne des conséquences dommageables.

En conséquence, en l’absence de trouble manifestement illicite ou de dommage imminent, l’ordonnance du premier juge est infirmée.

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Assurances

[Brèves] Perte d’exploitation et Covid-19 : distinction entre « mise en quarantaine » et « confinement »

Réf. : Cass. civ. 2, 30 mai 2024, n° 22-21.574, F-B N° Lexbase : A97695D8

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N9666BZZ

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par Stéphane Brena, Maître de conférences HDR en droit privé, Directeur de l’École de Droit de la Sorbonne au Caire-IDAI (Égypte), Codirecteur du Master droit des assurances de l’Université de Montpellier

Le 20 Juin 2024

► La mise en quarantaine constitue une mesure nominative et la garantie perte d’exploitation, conditionnée à une mise en quarantaine, ne peut jouer en cas de confinement, mesure générale et impersonnelle.

L’affaire portée devant la Cour de cassation était des plus simples. Plusieurs sociétés exploitant des établissements hôteliers avaient souscrit auprès du même assureur (Axa France IARD) des contrats multirisques comportant une garantie « perte d’exploitation ». Cette garantie avait vocation à jouer en cas d’« arrêt d’activité totale ou partielle du fait de mesures administratives résultant d’une décision des autorités sanitaires de mise en quarantaine ». À la suite de la publication, le 15 mars 2020, d’un arrêté interdisant à certains établissements de recevoir du public et du décret n° 2020-260, du 16 mars 2020 N° Lexbase : L5030LW9, interdisant les déplacements de toutes personnes hors de leur domicile, en vue de lutter contre la propagation du virus Covid-19, les assurés sollicitaient la garantie « perte d’exploitation » auprès de l’assureur, dont la résistance les conduisait à agir en justice.

La cour d’appel de Paris, par arrêt du 7 septembre 2022 (CA Paris, 4-8, 7 septembre 2022, n° 21/03373 N° Lexbase : A88138HU), déboutait les assurés de leur demande. Les juges parisiens ont estimé que la notion de « mise en quarantaine » s’entend d’une mesure individuelle, nominative, là où le confinement désigne une mesure générale. Cette interprétation était justifiée par le renvoi, à l’ancien article L. 3131-15 du Code de la santé publique N° Lexbase : L4891L7B, autorisant le Premier ministre à prendre une mesure de quarantaine, au Règlement sanitaire international de l’OMS de 2005 qui, en son article 1er, définit la quarantaine comme « la restriction des activités et/ou de la mise à l’écart des personnes suspectes qui ne sont pas malades ou des bagages, conteneurs, moyens de transport ou marchandises suspects, de façon à prévenir la propagation éventuelle de l’infection ou de la contamination ».

Les assurés se pourvoyaient en cassation, reprochant aux juges du fond d’avoir violé la force obligatoire du contrat et les dispositions de l’article L. 3131-15 du Code de la santé publique, en refusant la qualification de quarantaine à des mesures collectives, non nominatives.

Le problème résidait donc dans la définition de la notion de quarantaine. Plus précisément, il s’agissait de déterminer tout à la fois si le contrat entendait lui donner un tel sens et si les textes ne devaient pas être compris comme faisant de la quarantaine une notion générique, englobant les mesures individuelles et les mesures collectives.

La Cour de cassation se rallie à la position des juges d’appel. Elle adopte une définition restrictive de la notion de quarantaine, « correspondant à la mise à l’écart d’un ou plusieurs personnes spécifiquement identifiées en raison du risque de propagation de maladies qu’elles constituent » et juge que « les conditions de mise en jeu de la garantie n’étaient pas réunies ».

La décision appelle trois observations au moins.

De première part, la quarantaine étant une condition de la garantie (événement permanent affectant le risque couvert) et non une exclusion (circonstance particulière de réalisation du sinistre), la clause échappe à l’exigence de stipulation en caractères très apparents (C. ass., art. L. 112-4 N° Lexbase : L0055AAB). Surtout, la voie d’une neutralisation de la clause pour défaut de caractère formel (clause non sujette à interprétation) et limité (clause ne privant pas la garantie de toute réalité), à tout le moins sur le terrain du droit spécial du contrat d’assurance (C. ass., art. L. 113-1 N° Lexbase : L0060AAH), est close. C’est la raison pour laquelle les juges du fond ont été conduits à interpréter cette clause, et non à l’écarter comme réputée non-écrite.

Précisément, et de deuxième part, l’interprétation, très favorable à l’assureur, de la notion de quarantaine, par référence aux dispositions du Code de la santé publique et du Règlement sanitaire international conclu sous l’égide de l’OMS et modifié en 2005, ne nous semble légitime que sous réserve d’un renvoi à cette source d’interprétation par la police. À défaut, l’application des dispositions de l’article 1190 du Code civil N° Lexbase : L0903KZH devrait conduire à interpréter le contrat, dès lors qu’il est d’adhésion, contre celui qui l’a proposé, en l’occurrence l’assureur. Il convient par ailleurs de noter que les dispositions de l’article L. 3131-15 du Code de la santé publique ont été déplacées à l’article L. 3131-12 N° Lexbase : L5877MDZ… qui ne renvoie plus au Règlement sanitaire international…

De troisième et dernière part, il serait intéressant de questionner la clause sur le terrain de son impact sur l’obligation essentielle de l’assureur, à l’aune de l’article 1170 du Code civil N° Lexbase : L0876KZH, consistant à couvrir le risque de perte d’exploitation liées à une mesure de quarantaine. Plus précisément, il conviendrait de déterminer dans quelle mesure une quarantaine ainsi définie peut avoir un impact notable sur l’exploitation de l’établissement hôtelier assuré.  Cet impact nous paraît pratiquement nul si la mesure de quarantaine a vocation à concerner la clientèle ; auquel cas la limitation de la couverture du risque à la quarantaine pourrait être neutralisée. Le salut de la clause ne pourrait alors provenir que de son application au personnel de l’établissement, dont la mise en quarantaine serait susceptible d’empêcher, totalement ou partiellement, le fonctionnement.

Voilà quoi qu’il en soit une décision qui s’ajoute à la liste des victoires déjà remportées par les assureurs quant à la garantie « perte d’exploitation » à l’épreuve du virus Covid-19 et les mesures d’interdiction de réception du public et de confinement dont il a été à l’origine (clause d’exclusion considérée comme limitée et formelle, v. récemment : Cass. civ. 2, 1er décembre 2022, n° 21-19.341 N° Lexbase : A45408W3, n° 21-19.342 N° Lexbase : A54888W8 et n° 21-19.343 N° Lexbase : A54858W3, FS-B+R ; Cass. civ. 2, 19 janvier 2023, n° 21-21.516, FS-B+R N° Lexbase : A937388N ; Cass. civ. 2, 30 mai 2024, n° 22-20.958, F-D N° Lexbase : A72145EW).

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Avocats/Procédure

[Brèves] « Le droit pour les avocats de communiquer librement avec leurs clients et de leur rendre visite a le caractère d'une liberté fondamentale »

Réf. : CE, 6e ch., 14 juin 2024, n° 477671 N° Lexbase : A13675IH

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par Marie Le Guerroué

Le 20 Juin 2024

► La possibilité d'assurer de manière effective sa défense devant le juge, qui implique le droit pour les avocats de communiquer librement avec leurs clients et de leur rendre visite, a le caractère d'une liberté fondamentale.

Faits et procédure. Un détenu incarcéré depuis novembre 2021 au sein de plusieurs établissements pénitentiaires successifs, avait demandé au juge des référés du tribunal administratif d'enjoindre au directeur du centre pénitentiaire de délivrer à son avocat un permis de visite, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir. Il se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 5 juillet 2023, prise sur le fondement de l'article L. 522-3 du Code de justice administrative N° Lexbase : L3065AL4, par laquelle le juge des référés a rejeté sa demande, au motif que la condition d'urgence n'était pas remplie.

Réponse du CE. La Haute Cour administrative rappelle les textes applicables. Elle en déduit que les détenus disposent du droit de communiquer librement avec leurs avocats et que ce droit implique notamment qu'ils puissent, selon une fréquence qui, eu égard au rôle dévolu à l'avocat auprès des intéressés, ne peut être limitée a priori, recevoir leurs visites, dans des conditions garantissant la confidentialité de leurs échanges. La possibilité d'assurer de manière effective sa défense devant le juge, qui implique le droit pour les avocats de communiquer librement avec leurs clients et de leur rendre visite, a le caractère d'une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du Code de justice administrative N° Lexbase : L3058ALT. Toute personne justifiant, au regard de sa situation personnelle, qu'il y est porté une atteinte grave et manifestement illégale du fait de l'action ou de la carence de l'autorité publique, peut saisir le juge des référés sur le fondement de cet article. Il lui appartient alors de faire état de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour elle de bénéficier, dans le très bref délai prévu par ces dispositions, d'une mesure de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur le fondement de cet article. Dans tous les cas, l'intervention du juge des référés dans les conditions d'urgence particulière prévues par l'article L. 521-2 précité est subordonnée au constat que la situation litigieuse permette de prendre utilement et à très bref délai les mesures de sauvegarde nécessaires.

Toutefois, en l'espèce, si le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté pour défaut d'urgence la demande, il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés qu'à la date d'introduction de cette demande, le détenu avait quitté le centre pénitentiaire de Grasse et avait été transféré vers le centre pénitentaire de Toulon-la-Farlède, dont il a ultérieurement été transféré en décembre 2023 pour le centre pénitentiaire d'Aix-Luynes. Dès lors que le détenu ne séjourne plus dans l'établissement de Grasse et qu'il n'a, en outre, pas fait état de nouvelles difficultés rencontrées pour communiquer avec son avocat, la décision litigieuse de refus de permis de communiquer opposée à l’avocat par le directeur du centre pénitentiaire de Grasse a cessé de produire ses effets. Dans ces conditions, les conclusions tendant à ce qu'il lui soit enjoint de délivrer un permis de visite, sont devenues sans objet. Pour le Conseil d’État, il n'y a, par suite, plus lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi.

 

newsid:489626

Droit des étrangers

[Brèves] Reconnaissance de l’adhésion au principe d’égalité femmes-hommes prépondérant dans un pays de l’Union européenne comme motif d’appartenance à un groupe social

Réf. : CJUE, 11 juin 2024, aff. C-646/21, K N° Lexbase : A13065HT

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N9668BZ4

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par Yann Le Foll

Le 20 Juin 2024

► En fonction des conditions qui prévalent dans le pays d’origine, peuvent être considérées comme appartenant à « un certain groupe social », en tant que « motif de persécution » susceptible de conduire à la reconnaissance du statut de réfugié, les femmes ressortissantes de ce pays, y compris mineures, qui partagent comme caractéristique commune leur identification effective à la valeur fondamentale de l’égalité entre les femmes et les hommes, intervenue au cours de leur séjour dans un État membre.

Faits. K. et L, les requérantes au principal, sont deux sœurs de nationalité iraquienne, nées respectivement en 2003 et en 2005. Elles sont arrivées aux Pays-Bas au cours de l’année 2015, accompagnées de leurs parents et de leur tante. Elles y séjournent depuis lors sans interruption.

Le 7 novembre 2015, leurs parents ont introduit des demandes d’asile en leur nom et au nom de K. et de L., qui ont été rejetées le 17 février 2017. Ces décisions de rejet sont devenues définitives au cours de l’année 2018.

Elles ont introduit des demandes ultérieures, au sens de l’article 2, sous q), de la Directive (UE) n° 2013/32, du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale N° Lexbase : L9263IXD, lesquelles ont été rejetées, comme manifestement infondées.

Position CJUE. L’article 10, paragraphe 1, de la Directive (UE) n° 2011/95, du 13 décembre 2011, concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d'une protection internationale N° Lexbase : L8922IRU énumère, pour chacun des cinq motifs de persécution susceptibles de conduire, conformément à l’article 2, sous d), de cette Directive, à la reconnaissance du statut de réfugié, des éléments dont les États membres doivent tenir compte.

S’agissant, en particulier, du motif de « l’appartenance à un certain groupe social », il ressort de cet article 10, paragraphe 1, sous d), premier alinéa, qu’un groupe est considéré comme un « certain groupe social » lorsque deux conditions cumulatives sont remplies.

D’une part, les personnes susceptibles d’y appartenir doivent partager au moins l’un des trois traits d’identification, qui sont une « caractéristique innée », une « histoire commune qui ne peut être modifiée », ou alors une « caractéristique ou une croyance à ce point essentielle pour l’identité ou la conscience qu’il ne devrait pas être exigé d’une personne qu’elle y renonce ».

En l’espèce, la circonstance que de jeunes femmes ressortissantes de pays tiers ont séjourné dans un État membre d’accueil, pendant une phase de leur vie au cours de laquelle l’identité d’une personne se forge, et que, au cours de ce séjour, elles se sont identifiées effectivement à la valeur fondamentale de l’égalité entre les femmes et les hommes est susceptible de constituer « une histoire commune qui ne peut être modifiée », au sens de l’article 10, paragraphe 1, sous d), premier alinéa, premier tiret, de la Directive (UE) n° 2011/95.

D’autre part, ce groupe doit avoir son « identité propre » dans le pays d’origine « parce qu’il est perçu comme étant différent par la société environnante » (CJUE, 16 janvier 2024, aff. C-621/21, WS N° Lexbase : A16832E3).

Cette seconde condition à laquelle satisfont également des femmes partageant une caractéristique commune supplémentaire, telle que l’identification effective à la valeur fondamentale de l’égalité entre les femmes et les hommes, lorsque les normes sociales, morales ou juridiques ayant cours dans leur pays d’origine ont pour conséquence que ces femmes, en raison de cette caractéristique commune, sont également perçues comme étant différentes par la société environnante (CJUE, 16 janvier 2024, aff. C-621/21, WS, préc.).

Dans ce contexte, il convient de préciser qu’il appartient aux autorités compétentes de l’État membre concerné de déterminer quelle société environnante est pertinente pour apprécier l’existence de ce groupe social. Cette société peut coïncider avec l’ensemble du pays tiers d’origine du demandeur de protection internationale ou être plus circonscrite, par exemple à une partie du territoire ou de la population de ce pays tiers (CJUE, 16 janvier 2024, aff. C-621/21, WS, préc.).

Il s’ensuit que les femmes, y compris mineures, qui partagent comme caractéristique commune l’identification effective à la valeur fondamentale de l’égalité entre les femmes et les hommes, intervenue au cours de leur séjour dans un État membre, peuvent, en fonction des conditions qui prévalent dans le pays d’origine, être considérées comme appartenant à un « certain groupe social », au sens de l’article 10, paragraphe 1, sous d), de la Directive (UE) n° 2011/95 et doivent ainsi pouvoir bénéficier du statut de réfugié.

newsid:489668

Entreprises en difficulté

[Brèves] Résiliation du bail pour défaut de paiements postérieurs au jugement d’ouverture : précisions importantes

Réf. : Cass. com., 12 juin 2024, n° 22-24.177, FS-B N° Lexbase : A48595HG

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N9652BZI

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par Vincent Téchené

Le 20 Juin 2024

► Le juge-commissaire, saisi par le bailleur d'une demande de constat de la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture, doit s'assurer, au jour où il statue, que des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture demeurent impayés.

Faits et procédure. Après la mise en redressement judiciaire d’une société, la bailleresse de locaux commerciaux loués à cette dernière a saisi le juge-commissaire d'une requête aux fins de voir constater la résiliation du bail.

Le tribunal a arrêté le plan de redressement. Le juge-commissaire a rejeté la demande de voir constater la résiliation de plein droit du bail. La bailleresse a donc formé un pourvoi en cassation.

Décision. La Cour de cassation énonce qu’il résulte de l'article L. 622-14, 2° du Code de commerce N° Lexbase : L8845INW, rendu applicable au redressement judiciaire par l'article L. 631-14 du même code N° Lexbase : L9175L7X, et de l'article R. 622-13, alinéa 2 N° Lexbase : L7287IZW, rendu applicable au redressement judiciaire par l'article R. 631-20 N° Lexbase : L1003HZ8, que le juge-commissaire, saisi par le bailleur d'une demande de constat de la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture, doit s'assurer, au jour où il statue, que des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture demeurent impayés.

Or, en l’espèce, la cour d’appel (CA Paris, 5-9, 22 septembre 2022, n° 21/14862 N° Lexbase : A28888LK) a constaté que la débitrice avait payé, le 9 septembre 2020, les loyers échus postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective, que ce paiement avait été reçu le 10 septembre 2020 par le bailleur, qui, le même jour, avait saisi le juge-commissaire d'une demande de constatation de la résiliation de plein droit. Dès lors, la cour d’appel retient exactement que la créance de loyers postérieurs à l'ouverture de la procédure collective étant éteinte pour avoir été acquittée par le preneur, de sorte que la requête du bailleur doit être rejetée.

Observations. La Cour de cassation apporte ici une précision, à notre sens, inédite. Concernant la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges postérieurs au jugement d’ouverture, la Haute juridiction a eu l’occasion de préciser que lorsque le juge-commissaire est saisi sur le fondement de l’article L. 641-12, 3° du Code de commerce, il doit se borner à constater la résiliation du bail si les conditions en sont réunies et ne peut accorder aucun délai de paiement prévu par l’alinéa 2 de l'article L. 145-41 du Code de commerce N° Lexbase : L1063KZE, ni même faire usage de la faculté d’accorder des délais de paiement en application de l’article 1343-5 du Code civil N° Lexbase : L0688KZI (Cass. com., 18 mai 2022, n° 20-22.164, FS-B N° Lexbase : A33907XT, E. Le Corre-Broly, Lexbase Affaires, juin 2022, n° 720 N° Lexbase : N1791BZD). L’arrêt rapporté rééquilibre les rapports bailleur/locataire dans un tel contexte.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les règles spéciales applicables aux baux de locaux professionnels, Les modalités procédurales de la demande de résiliation pour non paiement du loyer et des charges, in  Entreprises en difficulté (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E0294EUG.

 

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Fiscalité locale

[Brèves] TFPB : portée de l’exonération en faveur des groupements de coopération sanitaire

Réf. : CE 3e et 8e ch. réunies, 31 mai 2024, n° 474271, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A37995EG

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N9646BZB

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par Marie-Claire Sgarra

Le 20 Juin 2024

Le Conseil d’État est revenu, dans un arrêt du 31 mai 2024, sur la portée de l’exonération de taxe foncière des propriétés bâties (TFPB) en faveur des groupements de coopération sanitaire (GCS).

Le groupement de coopération sanitaire de moyens « pôle logistique hospitalier Nord Franche-Comté », personne morale de droit public, a été constitué entre deux établissements publics de santé.

Le tribunal administratif de Besançon a rejeté les demandes du groupements de coopération sanitaire tendant à la décharge ou, subsidiairement, à la réduction des cotisations de taxe foncière des propriétés bâties auxquelles il a été assujetti au titre des années 2018, 2019 et 2021 dans les rôles de la commune de Trévenans.

Il résulte de la combinaison des articles L. 6133-1 N° Lexbase : L1710LI8, du 1 du I de l’article L. 6133-3 N° Lexbase : L4710LCG et du premier alinéa de l’article L. 6133-7 N° Lexbase : L8800MK7 du Code de la santé publique ainsi que de l’article 1382 du Code général des impôts N° Lexbase : L1102MLE, qu’au titre de l’année 2018, les groupements de coopération sanitaire (GCS) ne peuvent prétendre au bénéfice de l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) prévue au 1° de l’article 1382 à raison des immeubles non productifs de revenus qu’ils détiennent qu’à la condition que ces groupements constituent eux-mêmes des établissements publics d’assistance.

À compter de l’année 2019, les groupements de coopération sanitaire dotés de la personnalité morale de droit public peuvent également prétendre au bénéfice de l’exonération de taxe foncière des propriétés bâties prévue par ces dispositions, alors même qu’ils ne seraient pas eux-mêmes érigés en établissement de santé, à raison de leurs immeubles ou fractions d’immeubles occupés par ceux de leurs membres qui sont des établissements publics de santé ou affectés à la réalisation d’activités exercées exclusivement pour le compte de tels membres. Le bénéfice de cette exonération est subordonné à l’absence de perception de revenus, fût-ce pour un montant symbolique, par le groupement propriétaire du bien, à l’exclusion de la rémunération des prestations qu’il rend à ses membres.

Il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal administratif que le groupement de coopération sanitaire requérant soutenait devant lui que les locaux de l'ensemble immobilier en litige autres que ceux affectés à son unité de production alimentaire satisfaisaient aux conditions d'exonération. En rejetant en totalité les conclusions qui lui étaient soumises au motif que le respect des conditions auxquelles est subordonné le bénéfice de cette exonération, et notamment celle tenant à l'absence de production de revenus, ne pouvait s'apprécier qu'au regard du pôle logistique dans son intégralité, sans qu'il y ait lieu de distinguer en son sein les immeubles ou fractions d'immeuble qui respecteraient ces conditions, la magistrate désignée du tribunal administratif a commis une erreur de droit.

Le jugement du tribunal administratif de Besançon est annulé.

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Procédure administrative

[Brèves] La décision de placement en quartier de prise en charge de la radicalisation n'implique pas une présomption d'urgence

Réf. : CE 9e-10e ch. réunies, 10 juin 2024, n° 491001, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A23785HK

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N9630BZP

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par Pauline Le Guen

Le 26 Juin 2024

► La décision administrative de placement ou de prolongation en quartier de prise en charge de la radicalisation n'implique pas une présomption d'urgence, qui justifierait la suspension de son exécution par le juge des référés. Il peut dès lors rejeter la requête en annulation par ordonnance motivée.

Rappel des faits et de la procédure. Un détenu a fait l’objet d’un renouvellement de placement en quartier de prise en charge de radicalisation (QPR). Il saisit le juge des référés d’une demande de suspension de l’exécution de cette décision. Par ordonnance, sa demande est rejetée. Le détenu forme alors un pourvoi et demande au Conseil d’État d’annuler l’ordonnance et de faire droit à sa demande. 

Décision. Le Conseil d’État rejette le pourvoi. Pour ce faire, il rappelle tout d’abord les dispositions de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative (CJA) N° Lexbase : L3057ALS, qui prévoient que lorsqu’une décision administrative fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés peut ordonner la suspension de l’exécution de la mesure si l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer un doute sérieux sur la légalité de cette décision. Dans le cas contraire, il peut rejeter la demande par ordonnance motivée, comme le prévoit l’article L. 522-3 du même code N° Lexbase : L3065AL4

Pour rejeter le pourvoi, les magistrats du Palais-Royal rappellent alors que si le placement d’un détenu en QPR implique des contraintes spécifiques, le régime de détention prévu par les articles R. 224-13 et suivants du Code pénitentiaire N° Lexbase : L7030MCD autorise la participation à des activités collectives, ne porte pas atteinte à l’exercice des droits reconnus aux détenus, et prévoit un programme et un suivi adaptés. Ainsi, l’exécution d’une décision de placement en QPR ou sa prolongation n’entraîne pas de conséquences telles qu’elles impliqueraient que soit présumée la condition d’urgence pour que le juge en ordonne la suspension. 

La condition d’urgence n’étant pas remplie en l’espèce, il n’y avait pas lieu de suspendre la mesure, et étant établi qu’il existait un intérêt public à ce que le détenu reste soumis au placement en raison de la persistance d’un profil psychologique fragile, le détenu n’était pas fondé à demander l’annulation de l’ordonnance, prise sur le fondement de l’article 522-3 précité. 

Pour aller plus loin : ÉTUDE, Le juge des référés statuant en urgence, La possibilité d’ordonner la suspension de l’exécution de la décision contestée : le référé-suspensionin Procédure administrative (dir. C. De Bernardinis), Lexbase N° Lexbase : E3109E4W.

 

newsid:489630

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