Jurisprudence : CE 7 SS, 26-06-2013, n° 363490



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

363490

SAS ATAC

M. François Lelièvre, Rapporteur
M. Gilles Pellissier, Rapporteur public

Séance du 3 juin 2013

Lecture du 26 juin 2013

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 7ème sous-section)


Vu la requête, enregistrée le 19 octobre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SAS Atac, dont le siège est Rue du Maréchal de Lattre de Tassigny à Croix (59170) ; la SAS Atac demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision nos 1448 T / 1449 T du 24 juillet 2012 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a accordé à la SAS Marindis l'autorisation préalable requise en vue de procéder à l'extension de 1 550 m² d'un ensemble commercial, par création d'un supermarché Super U de 1 500 m² et de deux boutiques de 25 m² chacune, à Maringues (Puy-de-Dôme) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 6 juin 2013, présentée par la SAS Atac ;

Vu le code de commerce ;

Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

Vu l'arrêté du 21 août 2009 fixant le contenu de la demande d'autorisation d'exploitation de certains magasins de commerce et de détail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Lelièvre, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;



Sur la légalité externe de la décision attaquée :

1. Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe, que les décisions de la Commission nationale d'aménagement commercial doivent comporter des mentions attestant de la convocation régulière de ses membres ou de l'envoi dans les délais de l'ordre du jour et des documents nécessaires à ses délibérations ;

2. Considérant, en second lieu, qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article R. 752-51 du code de commerce : " Le commissaire du Gouvernement recueille les avis des ministres intéressés, qu'il présente à la commission nationale " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 752-16 du même code : " Pour les projets d'aménagement commercial, l'instruction des demandes est effectuée conjointement par les services territorialement compétents chargés du commerce ainsi que ceux chargés de l'urbanisme et de l'environnement. " ;

3. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que les ministres intéressés, au sens de l'article R. 752-51 du code de commerce, sont ceux qui ont autorité sur les services chargés d'instruire les demandes, soit les ministres en charge du commerce, de l'urbanisme et de l'environnement ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que les avis de ces ministres, qui sont signés par des personnes dûment habilitées à cet effet, ont bien été présentés à la commission ; que le moyen tiré de ce que l'avis d'autres ministres n'a pas été recueilli est inopérant ;

Sur la légalité interne de la décision attaquée :

En ce qui concerne la composition du dossier de demande d'autorisation :

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'autorisation était accompagné d'un compromis de vente à la SAS Marindis de la parcelle devant accueillir le projet ainsi que d'une autorisation émanant de la société Système U centrale régionale Est lui permettant de déposer une demande d'autorisation devant la Commission départementale d'aménagement commercial et valide à la date de dépôt de la demande ; que la commission nationale s'est prononcée en prenant en compte des indications fournies par le pétitionnaire, suffisamment précises pour lui permettre de se prononcer en connaissance de cause, relatives à la délimitation de la zone de chalandise, à la population de cette zone, à l'environnement proche du terrain d'assiette du projet, à l'insertion paysagère de celui-ci et à l'impact global du projet sur les flux de voitures particulières et de véhicules de livraison ; qu'ainsi, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la commission nationale se serait prononcée au vu d'un dossier incomplet ;

En ce qui concerne l'appréciation de la Commission nationale d'aménagement commercial :

5. Considérant, d'une part, qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 : " Les pouvoirs publics veillent à ce que l'essor du commerce et de l'artisanat permette l'expansion de toutes les formes d'entreprises, indépendantes, groupées ou intégrées, en évitant qu'une croissance désordonnée des formes nouvelles de distribution ne provoque l'écrasement de la petite entreprise et le gaspillage des équipements commerciaux et ne soit préjudiciable à l'emploi " ; qu'aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. / Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés " ;

6. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 752-6 du même code, issu de la même loi du 4 août 2008 : " Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission départementale d'aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ; / b) L'effet du projet sur les flux de transport ; / c) Les effets découlant des procédures prévues aux articles L. 303-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 123-11 du code de l'urbanisme ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet ; / b) Son insertion dans les réseaux de transports collectifs. " ;

7. Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce ;

8. Considérant, en premier lieu, que si la société requérante soutient que la Commission nationale d'aménagement commercial a commis une erreur d'appréciation en accordant une autorisation d'extension d'un ensemble commercial alors que le projet consistait en la création d'un tel ensemble, en tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que le projet autorisé prendra place parmi des magasins réunis sur un même site et conçus dans le cadre d'une même opération d'aménagement foncier, de telle sorte qu'ils doivent être regardés comme constituant un ensemble commercial au sens de l'article L. 752-3 du code de commerce ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que s'il ne résulte pas des dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce précitées qu'une stabilité ou une progression de la population au sein de la zone de chalandise figure au nombre des conditions que la commission doit appliquer, il lui est loisible d'en tenir compte pour la mise en œuvre des critères mentionnés par cet article ;

10. Considérant, en troisième lieu, que la SAS Atac ne peut utilement soutenir que le projet méconnaîtrait les dispositions du plan local d'urbanisme ;

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1. Considérant, en quatrième lieu, s'agissant de l'objectif d'aménagement du territoire, que le projet contesté sera implanté sur la zone du Champ Moutier où il prendra place parmi d'autres commerces et entreprises artisanales, contribuant ainsi au confort d'achat des consommateurs ; que sa réalisation permettra de renforcer l'offre de services à la population et qu'il est susceptible de freiner l'évasion de la consommation vers d'autres agglomérations ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet contesté aura pour conséquence de porter atteinte à l'animation de la vie urbaine du centre-ville ; qu'en ce qui concerne les flux de transport, il ressort également des pièces du dossier que le flux additionnel induit par la réalisation du projet sera absorbé par les infrastructures existantes ;

12. Considérant, en dernier lieu, que si la société requérante soutient que le projet n'est pas satisfaisant s'agissant de l'objectif de développement durable, il ressort des pièces du dossier que la société pétitionnaire a notamment prévu la réalisation du bâtiment dans le respect de la réglementation thermique 2012, le recours aux énergies renouvelables tant pour le chauffage que pour la production d'eau chaude, la plantation d'un nombre important d'arbres d'essences locales sur le parc de stationnement, la gestion sélective des déchets et un premier traitement des eaux avant rejet dans le réseau ; que, par suite, ce projet ne méconnaît pas l'objectif de développement durable ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de la SAS Atac doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par la SAS Atac est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SAS Atac, à la SAS Marindis et à la Commission nationale d'aménagement commercial.


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