CONSEIL D'ETAT
Statuant au contentieux
N°
348892
Mme A.
Mme Maïlys Lange, Rapporteur
Mme Claire Legras, Rapporteur public
Séance du 22 avril 2013
Lecture du
17 mai 2013
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 9ème et 10ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 9ème sous-section de la Section du contentieux
Vu le pourvoi, enregistré le 2 mai 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour Mme B., demeurant. ; Mme A.demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 08MA04669 du 10 mars 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté son appel contre le jugement n° 0603619 du 13 octobre 2008 du tribunal administratif de Marseille, en tant qu'il avait rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge de son obligation au paiement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles le foyer fiscal qu'elle formait avec son ex-mari a été assujetti au titre des années 1991 à 1995 et des pénalités correspondantes ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code civil ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Maïlys Lange, Auditeur,
- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Hémery, Thomas-Raquin, avocat de Mme A. ;
1. Considérant qu'aux termes du 2 de l'article 1685 du code général des impôts, alors en vigueur : " Chacun des époux est tenu solidairement au paiement de l'impôt sur le revenu. (.) Chacun des époux peut demander à être déchargé de cette obligation " ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le trésorier de Gardanne a, le 19 janvier 2006, fait délivrer à Mme A.un commandement de payer une somme de 814 853, 37 euros, au titre de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de pénalités auxquelles son ex-mari et elle-même avaient été assujettis et au paiement de laquelle elle était solidairement tenue ; que Mme A. a formé opposition à ce commandement devant le trésorier de Gardanne, qui l'a rejetée ; que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille du 13 octobre 2008 qui ne l'avait que partiellement déchargée de l'obligation de payer la somme en litige ;
3. Considérant qu'en jugeant que la solidarité instituée par l'article 1685 du code général des impôts n'était pas subordonnée à la condition que les époux vivent sous le même toit et que les dispositions de cet article ne faisaient aucune distinction selon leur régime matrimonial, la cour a, implicitement mais nécessairement, répondu au moyen de Mme A., qui soutenait qu'elle ne pouvait, par application du 4 de l'article 6 du code général des impôts, être solidairement tenue au paiement des cotisations supplémentaires et pénalités en litige au motif qu'elle était, lors des années d'imposition au titre desquelles ces cotisations avaient été émises, séparée de biens de son ex-mari et que celui-ci ne vivait plus au domicile conjugal ; qu'en statuant ainsi, la cour a cependant commis une erreur de droit dès lors que, si les dispositions qui figuraient alors au 2 de l'article 1685 du code général des impôts autorisent le comptable du Trésor à poursuivre indifféremment auprès de l'un ou l'autre des époux le recouvrement de la totalité de l'impôt sur le revenu et des pénalités mis à la charge du foyer fiscal, la solidarité ainsi établie ne concerne que la période d'imposition commune des époux ;
4. Considérant, toutefois, qu'en vertu de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, les contestations relatives au recouvrement des impôts ne peuvent porter sur un motif remettant en cause l'assiette et le calcul de l'impôt ; que, comme le relève le ministre en défense, le moyen tiré de la violation du 4 de l'article 6 du code général des impôts remet en cause l'assiette de l'impôt dont le paiement est réclamé à MmeA. ; qu'ainsi, celle-ci ne pouvait se prévaloir de ces dispositions à l'appui d'une contestation portant sur le recouvrement de l'impôt, régie par l'article L. 281 du livre des procédures fiscales ; que ce motif, qui n'implique l'appréciation d'aucune circonstance de fait, doit être substitué à celui retenu par les juges du fond ;
5. Considérant, enfin, que si Mme A.soutient que la cour a méconnu les stipulations de l'article premier du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce moyen, qui est nouveau en cassation, ne peut qu'être écarté ;
6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante ;
D E C I D E :
Article 1er : Le pourvoi de Mme A.est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B. et au ministre de l'économie et des finances.