CONSEIL D'ETAT
Statuant au contentieux
N°
350709
GEIE EUROPENNE DE MEDIAS
M. Jean-Luc Matt, Rapporteur
Mme Claire Legras, Rapporteur public
Séance du 20 mars 2013
Lecture du
8 avril 2013
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 9ème et 10ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 9ème sous-section de la Section du contentieux
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juillet et 7 octobre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le groupement européen d'intérêt économique (GEIE) Européenne de Médias, dont le siège est ZI de Saint Arnoult B.P. 55 à Chateauneuf-en-Thymerais (28170) ; le GEIE Européenne de Médias demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 10NC00417 du 12 mai 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0700640 du 21 janvier 2010 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne rejetant sa demande en décharge des cotisations de taxe professionnelle auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le règlement (CEE) n° 2137/85 du Conseil du 25 juillet 1985 ;
Vu le code de commerce ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Luc Matt, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la GEIE Européenne de Médias,
- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la GEIE Européenne de Médias ;
1. Considérant qu'aux termes du I de l'article 1447 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée " ; qu'il s'en déduit que ne sont pas assujetties à la taxe professionnelle les personnes qui se livrent à une exploitation ou effectuent des opérations, même à titre habituel, de caractère non lucratif ; qu'ainsi, un groupement d'intérêt économique, dont le but est " de faciliter ou de développer l'activité économique de ses membres " selon l'article L. 251-1 du code de commerce, est assujetti à la taxe professionnelle à raison de son activité propre, exercée dans un but lucratif, sauf s'il exerce directement une activité exonérée de taxe professionnelle ; qu'il en va de même pour un groupement européen d'intérêt économique, auquel l'article 3 du règlement du Conseil du 25 juillet 1985 relatif à l'institution d'un groupement européen d'intérêt économique assigne le même but ; que, toutefois, quel que soit le domaine d'activité dans lequel il intervient et les conditions dans lesquelles il fournit des prestations, un groupement dont la gestion est désintéressée et dont les membres, quel que soit leur statut, n'exercent pas une activité à but lucratif ne saurait être regardé comme exerçant lui-même une telle activité ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le GEIE Européenne de Médias, qui exécute des prestations de routage, de publipostage et de mise sous pli pour le compte des associations et organismes à but non lucratif qui en sont membres, a contesté son assujettissement à la taxe professionnelle au titre des années 2005 et 2006 ; que, pour confirmer, par l'arrêt attaqué du 12 mai 2011, le jugement du 21 janvier 2010 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne rejetant sa demande en décharge de cette imposition, la cour administrative d'appel de Nancy a jugé que la circonstance que les membres du groupement ne seraient pas eux-mêmes assujettis aux impôts commerciaux du fait du caractère non lucratif de leur activité était sans incidence pour caractériser l'exercice à titre habituel par ce groupement d'une activité professionnelle non salariée, au sens de l'article 1447 du code général des impôts ; qu'il résulte de ce qui vient d'être dit qu'elle a, ce faisant, commis une erreur de droit ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ;
3. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement au GEIE Européenne de Médias d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : L'arrêt du 12 mai 2011 de la cour administrative d'appel de Nancy est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nancy.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros au GEIE Européenne de Médias au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au GEIE Européenne de Médias et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré dans la séance du 20 mars 2013 où siégeaient : M. Jacques Arrighi de Casanova, Président adjoint de la Section du Contentieux, présidant ; M. Thierry Tuot, M. Jean-Pierre Jouguelet, Présidents de sous-section ; M. Marc Perrin de Brichambaut, M. Alain Christnacht, M. Jean-François Mary, M. Philippe Josse, M. Pierre Collin, Conseillers d'Etat et M. Jean-Luc Matt, Maître des Requêtes-rapporteur.