ARRÊT DU CONSEIL D'ETAT
Conseil d'Etat
Statuant au contentieux
Cette décision sera mentionnée dans les tables du Recueil LEBON
N° 214393
ASSOCIATION DES CONTRIBUABLES ASSOCIES
M. Ménéménis, Rapporteur
M. Courtial, Commissaire du gouvernement
Séance du 12 juin 2002
Lecture du 3 juillet 2002
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 9ème et 10ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 9ème sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête, enregistrée le 15 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'ASSOCIATION DES CONTRIBUABLES ASSOCIES, dont le siège est 42, rue des Jeûneurs à Paris (75002) ; l'Association demande au Conseil d'Etat
1°) d'annuler l'ordonnance en date du 14 septembre 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Paris a rejeté comme tardive sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris du 22 octobre 1998 rejetant sa demande d'annulation des décisions des 16 mai et 31 juillet 1997 par lesquelles la direction nationale des vérifications de situations fiscales lui a refusé la possibilité d'établir des reçus fiscaux prévue par l'article 200 du code général des impôts ;
2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 22 octobre 1998, ensemble les deux décisions susmentionnées ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 20 000 F en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative;
Après avoir entendu en séance publique
- le rapport de M. Ménéménis, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Nicolay, de Lanouvelle, avocat de l'ASSOCIATION DES CONTRIBUABLES ASSOCIES,
- les conclusions de M. Courtial, Commissaire du gouvernement;
Considérant qu'il ressort des pièces produites par l'ASSOCIATION DES CONTRIBUABLES ASSOCIES devant le Conseil d'Etat que la lettre recommandée avec demande d'avis de réception, qui contenait sa requête, a été présentée par les services postaux le 19 avril 1999 au greffe de la cour administrative d'appel de Paris ; que cette lettre n'a été enregistrée par le greffe que le 20 avril 1999 ; qu'à la date du 19 avril 1999, le délai de deux mois ouvert à l'association pour faire appel du jugement dont elle avait reçu notification le 18 février précédent n'était pas expiré ; que, par suite, l'association requérante est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête comme tardive ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, lors de la vérification de la comptabilité de l'ASSOCIATION DES CONTRIBUABLES ASSOCIES au titre des exercices 1994 et 1995, l'inspecteur de la direction nationale des vérifications de situations fiscales a indiqué à celle-ci dans la notification de redressements qui lui a été adressée le 16 mai 1997 et dans la réponse qui lui a été envoyée le 31 juillet 1.997 à la suite de ses observations, qu'elle ne remplissait pas les conditions définies par l'article 200 du code général des impôts pour que les dons effectués à son profit ouvrent droit, pour leurs auteurs, à une réduction d'impôt et qu'elle ne pouvait donc établir au profit de ceux-ci des reçus fiscaux leur permettant de bénéficier de cet avantage ;
Considérant qu'en adressant à l'association concernée, à l'initiative de l'administration, une lettre qui contenait une telle prise de position, l'inspecteur de la direction nationale des vérifications de situations fiscales a pris, eu égard à la nature et à la portée des termes utilisés, une décision faisant grief à cette association; qu'ainsi, c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a jugé que l'association n'était pas recevable à déférer les décisions litigieuses au juge de l'excès de pouvoir et a rejeté, pour ce motif, sa demande, que le jugement du tribunal administratif de Paris du 22 octobre 1998 doit dès lors être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par l'ASSOCIATION DES CONTRIBUABLES ASSOCIES devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'aucune disposition ne prévoit que les oeuvres ou organismes susceptibles de recevoir des dons qui ouvrent à leurs auteurs droit à la réduction d'impôt prévue par l'article 200 du code général des impôts fasse l'objet d'une habilitation ou d'une reconnaissance de la part de l'administration; que, dès lors, en indiquant à l'ASSOCIATION DES CONTRIBUABLES ASSOCIES qu'elle n'était pas en droit d'établir des reçus fiscaux prévus par l'article 200 du code général des impôts, l'inspecteur de la direction nationale des vérifications de situations fiscales a méconnu sa compétence ; que l'association requérante est, par suite, fondée à demander l'annulation des décisions en date des 16 mai et 31 juillet 1997 de cet inspecteur lui déniant le droit de délivrer de tels reçus fiscaux ;
Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à verser à l'ASSOCIATION DES CONTRIBUABLES ASSOCIES, en remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens, la somme de 2 200 euros ;
DECIDE :
Article 1er : L'ordonnance du président de la cour administrative d'appel de Paris en date du 14 septembre 1999 est annulée.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 22 octobre 1998 et les décisions de l'inspecteur de la direction nationale des vérifications de situations fiscales en date des 16 mai et 31 juillet 1997 déniant à l'ASSOCIATION DES CONTRIBUABLES ASSOCIES le droit de délivrer les reçus fiscaux mentionnés à l'article 200 du code général des impôts sont annulés.
Article 3 : L'Etat versera à l'ASSOCIATION DES CONTRIBUABLES ASSOCIES la somme de 2 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION DES CONTRIBUABLES ASSOCIES et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.