Le Quotidien du 6 septembre 2023 : Avocats/Périmètre du droit

[Brèves] Exercice illégal de l’activité de consultations juridiques et de rédaction d'actes pour un « mandataire d’assuré »

Réf. : CA Nîmes, 7 juillet 2023, n° 23/00910 N° Lexbase : A85391AI

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N6647BZ9

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par Marie Le Guerroué

le 05 Septembre 2023

► Dans un arrêt du 7 juillet 2023, la cour d’appel de Nîmes, statuant en référé, a retenu l’exercice illégal de l’activité de consultation juridique et de rédaction d'actes en matière juridique pour un « mandataire d’assuré » et lui a fait défense, sous astreinte, de se livrer, à nouveau, à cette activité.

Procédure. Le Conseil National des barreaux et l'Ordre des avocats au barreau de Marseille avaient interjeté appel de l’ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire d'Avignon, statuant en référé, ayant notamment constaté que ceux-ci ne démontraient pas que le « mandataire d'assuré » (l’intimé) contrevenait manifestement aux dispositions des articles 54 et 60 de la loi n° 71-1130, du 31 décembre 1971 N° Lexbase : L6343AGZ et les avaient en conséquence déboutés de leurs demandes et prétentions.

Rappel des textes. La cour d'appel rappelle que selon les articles 54 et 60 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée, nul ne peut, directement ou par personne interposée, à titre habituel et rémunéré, donner des consultations juridiques ou rédiger des actes sous seing privé, pour autrui, s'il n'est titulaire d'une licence en droit ou s'il ne justifie, à défaut, d'une compétence juridique appropriée à la consultation et la rédaction d'actes en matière juridique qu'il est autorisé à pratiquer conformément aux articles 56 à 66 (...). Les personnes exerçant une activité professionnelle non réglementée pour laquelle elles justifient d'une qualification reconnue par l'État ou attestée par un organisme public ou un organisme professionnel agréé peuvent, dans les limites de cette qualification, donner des consultations juridiques relevant directement de leur activité principale et rédiger des actes sous seing privé qui constituent l'accessoire nécessaire de cette activité. Ainsi, l'exercice du droit à titre principal est-il réservé aux professions juridiques réglementées. L'exercice du droit à titre accessoire est ouvert aux professions réglementées visées à l'article 59 dans les limites autorisées. Quant aux personnes exerçant une activité professionnelle non réglementée, leur capacité à consulter, dans la limite de leur activité principale, et à rédiger des actes sous seing privé, qui constituent l'accessoire nécessaire de cette activité, est soumise à l'exigence d'une qualification professionnelle reconnue par l'État ou attestée par un organisme public ou agréé. La violation de ces règles est passible de sanctions pénales.
La cour rappelle également que la Cour de cassation a affirmé dans un arrêt du 25 janvier 2017 (Cass. civ. 1, 25 janvier 2017, n° 15-26.353, F-P+B N° Lexbase : A5445TAW) que, même si des dispositions réglementaires autorisent la victime à confier la défense de ses intérêts à toute personne de son choix dans la phase pré-contentieuse, aucune de ces dispositions réglementaires n'autorise un tiers prestataire, autre qu'un professionnel du droit ou relevant d'une profession assimilée, à exercer à titre principal et rémunéré une activité d'assistance à une victime pendant la phase non contentieuse, notamment durant la procédure d'offre obligatoire, si elle comporte des prestations de conseil en matière juridique.
Selon la réponse ministérielle du 8 juin 1992 et un arrêt de la cour d'appel de Paris du 21 mai 2001, toujours d'actualité : « La consultation est une prestation intellectuelle personnalisée qui tend à fournir un avis concourant par les éléments qu'il apporte à la prise de décision du bénéficiaire de la consultation et donc distincte de l'information à caractère documentaire qui consiste à renseigner un interlocuteur sur l'état du droit ou de la jurisprudence relativement à un problème donné ».

Cette définition a été précisée ainsi par un arrêt de la cour d'appel de Versailles du 16 janvier 2018 : « Toute prestation intellectuelle personnalisée qui tend à fournir un avis ou un conseil et qui, fondée sur les règles juridiques applicables, notamment fiscales et sociales, à la situation analysée, constitue un élément de prise de décision pour le bénéficiaire de la consultation » (CA Versailles, 16 janvier 2018, n° 16/03900 N° Lexbase : A5333XAR).

En l'espèce. Il résulte des documents versés au débat que l’intimé propose dans ses « mandats de gestion et procuration » soumis aux victimes désireuses d'obtenir une indemnisation de les représenter dans le processus d'indemnisation et d'assurer toute la gestion administrative du dossier, étant précisé que ce mandat lui donne l'autorisation :

  • de recevoir toutes correspondances et communications et d'y répondre en son nom ;
  • de prendre les décisions relatives à l'organisation des expertises matérielles et corporelles ;
  • de recevoir les offres d'indemnisation, les négocier, les accepter ou les refuser ;
  • de percevoir pour son compte tous les règlements lui revenant par chèques établis au nom d’un cabinet à son nom.

Les courriers produits confirment que ce dernier analyse les propositions d'offres d'indemnisation des assureurs, qu'il rédige les réponses en formulant parfois une contre-proposition, qu'il prend des décisions quant à l'orientation des expertises médicales amiables, qu'il analyse les rapports pour conseiller ses clients sur les suites à donner et qu'il est le seul interlocuteur des assureurs pendant la phase amiable.

Réponse de la CA. Ainsi, pour la cour d’appel, l'intimé ne se limite pas à une simple gestion administrative ou à une discussion purement technique aboutissant à un calcul automatique d'indemnités ; il apprécie en fonction de la situation personnelle de chacun de ses clients et de facteurs multiples l'indemnisation des divers postes de préjudice qui lui apparaît la plus juste en fonction des indemnisations habituellement accordées. Il ne saurait être soutenu qu'il n'effectue pas une appréciation juridique de la situation d'une victime et qu'il ne lui prodigue pas des conseils juridiques lorsque les propositions de l'assureur ne sont pas acceptées et qu'une voie judiciaire est envisagée.
Il exerce cette activité à titre principal et de façon rémunérée, sans remplir les conditions exigées par les articles 54 et suivants précités. L'ancienneté de cette activité étant, pour la cour, sans emport.

Le trouble causé par l'exercice illégal de consultations juridiques et la rédaction d'actes est, selon elle, manifeste. Elle fait défense à l’intéressé de se livrer à une activité de consultation juridique et de rédaction d'actes, dans le délai de 10 jours à compter de la signification du l’arrêt, sous peine d'une astreinte de 1 000 euros par infraction dûment constatée.

Infirmation. L'ordonnance de référé est donc infirmée dans son intégralité.

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