Réf. : Cass. civ. 2, 6 juillet 2023, n° 21-25.789, F-D N° Lexbase : A3006999
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par Marie Le Guerroué
le 06 Septembre 2023
► Dénature les termes clairs et précis d’une convention d’honoraires, le premier président qui retient qu'il était manifeste que les parties, en signant la convention qui stipule un honoraire de résultat sur toutes les sommes « obtenues suite à un jugement et/ou une transaction », n'ont pas eu l'intention de donner un sens strict au mot « jugement », mais le sens de « décision de justice », qu'un arrêt rendu par une cour d'appel est donc assimilable, au sens de cette convention, à un jugement et qui en déduit que l'avocate est fondée à réclamer le paiement d'un honoraire de résultat sur la base d’une prestation compensatoire fixée par la cour d'appel, malgré la rupture de la convention d'honoraires consacrée par le changement d'avocat intervenu pour la procédure d'appel.
Faits et procédure. Une cliente avait confié à une avocate la défense de ses intérêts dans une procédure de divorce. Une convention d'honoraires avait été signée par les parties, laquelle prévoyait un honoraire de résultat sur toutes les sommes obtenues « suite à un jugement et/ou une transaction ». Un juge aux affaires familiales avait prononcé le divorce et attribué à la cliente une prestation compensatoire d'un certain montant. À la suite de cette décision, la cliente avait dessaisi l’avocate et sollicité un autre avocat pour la représenter devant la cour d'appel. La cliente ayant refusé de régler les honoraires de résultat, l'avocate avait saisi le Bâtonnier de son Ordre aux fins de fixation de ses honoraires.
La cliente forme un pourvoi devant la Cour de cassation contre l'ordonnance rendue par le premier président de la cour d'appel de Nancy fixant l’honoraire de résultat.
En cause d’appel. L'ordonnance retient qu'il est manifeste que les parties, en signant la convention qui stipule un honoraire de résultat de 7,5 % HT sur toutes les sommes « obtenues suite à un jugement et/ou une transaction », n'ont pas eu l'intention de donner un sens strict au mot « jugement », mais le sens de « décision de justice », par opposition à la transaction, qui est le résultat d'une décision commune des parties, qu'un arrêt rendu par une cour d'appel est donc assimilable, au sens de cette convention, à un jugement.
Elle en déduit que l'avocate est fondée à réclamer le paiement d'un honoraire de résultat sur la base de la prestation compensatoire fixée par la cour d'appel, malgré la rupture de la convention d'honoraires consacrée par le changement d'avocat intervenu pour la procédure d'appel.
Réponse de la Cour. La Haute juridiction rappelle l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause. Elle en déduit qu’en statuant comme elle l’a fait, alors que la convention stipule que « le client a chargé l'avocat ou sa structure d'occuper dans ses intérêts dans le cadre d'une procédure de divorce par-devant le tribunal de grande instance de Nancy » et que la mission de l'avocat s'achève « à l'expiration du délai de recours contre le jugement prononcé sur le fond », le premier président, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé. La Cour casse et annule, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 25 octobre 2021, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Nancy.
Statuant au fond, elle en conclut que la mission de l'avocate a pris fin à la date de l'appel du jugement de divorce et qu'elle ne peut prétendre à un honoraire de résultat sur les sommes obtenues en appel, de sorte que sa demande à ce titre doit être rejetée.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les honoraires, émoluments, débours et modes de paiement des honoraires, Le dessaisissement de l'avocat et l'honoraire mixte ou palmarium, in La profession d’avocat, (dir. H. Bornstein), Lexbase N° Lexbase : E37613RQ. |
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