La lettre juridique n°916 du 15 septembre 2022 : Assurances

[Brèves] Assurance de biens : indifférence d’une prétendue possession frauduleuse du bien par l’assuré !

Réf. : Cass. civ. 2, 31 août 2022, n° 20-16.701, F-B N° Lexbase : A62018GR

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 14 Septembre 2022

► Est cassé l'arrêt qui, pour dire justifié le refus d'un assureur d'indemniser le sinistre causé à un véhicule automobile, retient que les droits de l'assuré sur ce bien, « acquis dans des conditions frauduleuses », sont « éminemment contestables », alors que le souscripteur du contrat d'assurance a intérêt à la conservation la chose assurée et que la qualité de sa possession sur celle-ci est indifférente, de sorte qu'il appartenait à l'assureur d'exécuter l'obligation indemnitaire dont il était tenu envers lui.

Faits et procédure. En l’espèce, suivant déclaration de cession du 29 septembre 2015, un particulier avait acquis auprès d'un garage automobile un véhicule d'occasion de marque BMW, dont il avait pris possession le jour même. Le 28 décembre suivant, une facture attestant du règlement du solde du prix de vente lui avait été délivrée et il avait, d'une part, fait immatriculer le véhicule, d'autre part, souscrit un contrat d'assurance.

Dans la nuit du 31 décembre suivant, le véhicule avait été incendié accidentellement sur la voie publique.

L'assureur ayant refusé sa garantie, aux motifs que le véhicule sinistré aurait été détourné au préjudice d'une société de location polonaise, puis cédé, pour un prix très inférieur à celui du marché, à l’assuré, qui en aurait été receleur de fait, celui-ci l'avait assigné en indemnisation devant un tribunal judiciaire.

Décision CA Bastia. Pour dire justifié le refus de l'assureur d'indemniser le sinistre, la cour d’appel de Bastia (CA Bastia, 12 février 2020, n° 19/00027 N° Lexbase : A66643EK), avait relevé que le véhicule incendié avait été acquis par l’assuré dans des « circonstances obscures », dont témoignaient le décalage entre la prise de possession du bien, le 29 septembre 2015, et son immatriculation en France et son assurance auprès de la MACIF, le 28 décembre suivant, le fait que la déclaration de cession fasse référence à un certificat d'immatriculation n'indiquant ni sa date ni son numéro, et l'absence de justification par l’assuré du versement allégué d'acomptes en espèces pour un montant total de 20 000 euros.

L'arrêt en avait déduit que les droits de l'assuré sur « un véhicule acquis dans des conditions frauduleuses » sont « éminemment contestables ».

Cassation. La décision est censurée au visa des articles L. 121-1, alinéa 1er N° Lexbase : L0077AA4, et L. 121-6, alinéa 1er N° Lexbase : L0082AAB, du Code des assurances, et l'article 1134, devenu 1103 N° Lexbase : L0822KZH, du Code civil. Comme le relève la Cour régulatrice, selon les deux premiers de ces textes, l'assurance relative aux biens est un contrat d'indemnité et toute personne ayant intérêt à la conservation d'une chose peut la faire assurer. Aux termes du troisième, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Aussi, c’est par un motif inopérant tiré de la qualité de la possession sur le véhicule sinistré, que la cour d’appel a violé les textes susvisés, alors qu'elle constatait que l’intéressé était l'assuré, de sorte qu'il appartenait à l'assureur d'exécuter l'obligation indemnitaire dont il était tenu envers celui-ci.

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