Le Quotidien du 13 septembre 2022 : Peines

[Brèves] Confiscation douanière : règles spécifiques d'individualisation et de motivation de la peine et indifférence de la qualification de « peine complémentaire » retenue, à tort, par les juges du fond

Réf. : Cass. crim., 7 septembre 2022, n° 21-85.236, F-B N° Lexbase : A18788HZ

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N2526BZL

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[Brèves] Confiscation douanière : règles spécifiques d'individualisation et de motivation de la peine et indifférence de la qualification de « peine complémentaire » retenue, à tort, par les juges du fond. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/88097777-0
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par Helena Viana

le 21 Septembre 2022

► Le délit douanier d’exportation sans déclaration de marchandises prohibées n’exige pas, pour être caractérisé, de faire le constat que lesdites marchandises ont franchi une frontière douanière, l’omission de mentionner sur les déclarations à l’export les marchandises prohibées suffit à caractériser l’élément matériel. De plus, la qualification à tort de « peine complémentaire », par les juges du fond, de la mesure de confiscation douanière n’entraîne pas la cassation de l’arrêt. Les sommes saisies demeurent confiscables au titre de l’article 414 du Code des douanes, lequel n’est pas soumis aux principes d’individualisation et motivation de la peine, mais aux dispositions spécifiques de l’article 369 du Code des douanes.

Faits et procédure. Le gérant d’une société ayant pour objet l’affrètement et l’organisation de transports a déclaré à l’export des containers à destination de Madagascar. Entre le 14 décembre 2012 et le 30 janvier 2014, lesdits containers ont fait l’objet d’un contrôle par les services de douanes, contrôle ayant conduit à la saisine de plusieurs tonnes de batteries automobiles usagées non dépolluées avant leur départ pour l’île rouge.

Une information judiciaire a été ouverte sur dénonciation du procureur de la République de faits d’exportation de marchandises prohibées. Le prévenu a été renvoyé devant le tribunal correctionnel à l’issue de l’information. Par arrêt en date du 28 septembre 2018, le tribunal l’a déclaré coupable du délit douanier de violation d'une prohibition légale ou réglementaire d'exportation de marchandises, fait réputé exportation sans déclaration de marchandises prohibées. L’intéressé a été condamné à quinze ans d’emprisonnement avec sursis, au paiement de plusieurs amendes douanières et s’est vu confisqué la somme de 9 690 euros, saisie à son domicile.

Procureur et prévenu ont relevé appel de la décision.

En cause d’appel. La cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, par arrêt en date du 8 avril 2021, a confirmé la condamnation et a requalifié les faits en exportation en contrebande de marchandises prohibées en violation d'une prohibition légale ou réglementaire de marchandises prohibées prévue par l’article 428, 1 du Code des douanes N° Lexbase : L1904H3W. La cour l'a condamné à un emprisonnement délictuel de quinze mois ainsi qu'à trois amendes solidairement avec d'autres mis en cause et a ordonné la confiscation, à titre de peine complémentaire, de tous les objets saisis et des scellés.

L’intéressé a formé un pourvoi en cassation.

Moyens du pourvoi. L’arrêt de la cour d’appel était critiqué par deux moyens. Le premier moyen soutenait que, pour caractériser le délit d’exportation sans déclaration de marchandises prohibées, la cour aurait dû constater le franchissement de la frontière douanière vers ou depuis la France, le simple constat de la présence de containers dans la commune étant insuffisant.

Le demandeur au pourvoi soutenait dans son deuxième moyen que, d’une part, le prononcé de la confiscation des sommes d’argent à titre de peine complémentaire n’était pas prévu par l’article 430 du Code des douanes N° Lexbase : L1036ANP, et que, d’autre part, l’arrêt avait méconnu les principes d’individualisation et de motivation des articles 132-1, alinéa 2 et 3 N° Lexbase : L9834I3M et 130-1 du Code pénal N° Lexbase : L9806I3L et 593 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L3977AZC, en se bornant à énoncer « qu'en application de l'article 414, alinéa 1, du Code des douanes, la peine complémentaire de confiscation est confirmée ».

Décision de la Cour. La Chambre criminelle rejette les deux moyens du pourvoi.

Sur le premier moyen, la Haute juridiction reprend la motivation de la cour d’appel et estime qu’elle a justifié sa décision. En effet, elle a constaté l’omission de mention sur les déclarations à l’export des batteries usagées placées dans les containers, constat suffisant pour caractériser l’élément matériel du délit prévu à l’article 428, 1 du Code des douanes. La Cour rejette donc l’ajout d’un élément constitutif du délit, à savoir le franchissement d’une frontière douanière par la marchandise.

Sur le second moyen, la Cour de cassation relève que la cour d’appel a qualifié à tort la mesure de confiscation de « peine complémentaire ». Pour autant, elle rappelle que l’article 414 alinéa 1er du Code des douanes N° Lexbase : L3192LC9 autorise la confiscation du produit direct ou indirect de l’infraction douanière, « peu important » la qualification des juges du fond.

De plus, s’agissant des principes d’individualisation et de motivation de la peine tels que prévus aux articles 132-1 du Code pénal et 485 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L9916IQC, elle énonce que ces principes ne s’appliquent pas à la confiscation douanière de l’article 414 du Code des douanes, lequel, affirme-t-elle, est soumis aux dispositions spécifiques de l’article 369 du Code des douanes N° Lexbase : L1699IZX.

Il semble qu’il faille retenir de cet arrêt que, lorsque les juges du fond prononcent une peine sur le fondement d’une disposition applicable au cas d’espèce, il importe peu qu’ils lui ai attribué une mauvaise qualification. Opportunément, cette solution s’entend, l’inverse aurait conduit à devoir procéder à la restitution des sommes, mais théoriquement, elle sème le doute sur la nature de la peine qui, pourtant, devrait être comprise par l’auteur pour inciter à une prise de conscience et produire son effet dissuasif.

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