Le Quotidien du 19 mai 2022 : Construction

[Brèves] Risque pour la santé des occupants = gravité décennale

Réf. : Cass. civ. 3, 11 mai 2022, n° 21-15.608, FS-B N° Lexbase : A56527WA

Lecture: 4 min

N1485BZZ

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Brèves] Risque pour la santé des occupants = gravité décennale. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/85042903-breves-risque-pour-la-sante-des-occupants-gravite-decennale
Copier

par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

le 18 Mai 2022

► L’assureur dommages-ouvrage ne garantit les dommages de nature décennale que s’ils sont apparus, dans leur gravité décennale, dans le délai d’épreuve de dix ans à compter de la réception ;
► le risque sanitaire rend l’ouvrage impropre à sa destination.

L’arrêt rapporté présente deux intérêts : celui de rappeler les critères du dommage futur, d’une part, et celui de caractériser la gravité décennale en cas de danger pour la sécurité des personnes, d’autre part.

  • Sur le dommage futur

Le délai décennal est un délai d’épreuve et un délai d’action. En tant que délai d’action, il doit être valablement interrompu, par exemple par une citation en justice, dans le délai de dix ans suivant la réception de l’ouvrage. En tant que délai d’épreuve, les conditions de l’engagement de la responsabilité civile décennale des constructeurs doivent, également, survenir dans le délai décennal. La condition de gravité n’y fait pas obstacle.

Cette double exigence s’accommode mal avec la garantie des dommages futurs, lesquels, pour reprendre les exigences posées par le droit commun, sont des dommages qui vont survenir de façon certaine, dans leur gravité décennale, dans le futur. Autrement dit, à la date de l’interruption du délai décennal, le critère de gravité n’est pas rempli mais il le sera de façon certaine un jour. Toute la question est donc de savoir si ce « jour » doit survenir dans le délai décennal, ce qui serait alors une limitation par rapport au droit commun.

La réponse est, comme le confirme l’arrêt rapporté, positive.

Le dommage futur est réparable sur le fondement de la responsabilité décennale des constructeurs à deux conditions. Il doit, d’une part, être dénoncé dans le délai d’épreuve décennal et, d’autre part, revêtir la gravité décennale dans le délai décennal. La jurisprudence est désormais bien établie (v. pour exemple, Cass. civ. 3, 8 octobre 2003, n° 01-17.868, FS-P+B+I N° Lexbase : A7162C97 ou, plus récemment, Cass. civ. 3, 20 avril 2017, n° 17-23.190, FS-P+B+I N° Lexbase : A5429YES ; Cass. civ. 3, 18 mars 2021, n° 19-20.710, F-D N° Lexbase : A88264LH).

Par voie de conséquence, en l’absence de désordre décennal constaté dans le délai d’épreuve, les demandes formées à l’encontre de l’assureur dommages-ouvrage ne peuvent être accueillies.

  • Sur le risque sanitaire

L’article 1792 du Code civil N° Lexbase : L1920ABQ exige la démonstration d’un dommage d’une particulière gravité. Aux deux cas légaux prévus par cet article que sont, d’un côté, l’atteinte à la solidité de l’ouvrage et, de l’autre, l’impropriété à la destination, la jurisprudence a consacré un troisième cas de gravité décennale : l’atteinte à la sécurité des personnes.

La notion d’impropriété à destination permet de faire entrer de nombreux dommages dans le champ d’application de la responsabilité décennale des constructeurs comme le rapporte la présente décision. En l’espèce, la Haute juridiction a considéré comme étant un dommage de nature décennale, l’absence de raccordements des évents qui provoquent des odeurs nauséabondes présentant un danger pour la santé des personnes.

La solution n’est pas nouvelle et mérite d’être confirmée. L’ « impropriété-dangerosité », comme l’appelle la doctrine, est réparée sur le fondement décennal. Il s’agit des hypothèses où l’ouvrage présente un risque de danger soit pour ceux qui l’habitent, soit pour les passants, comme par exemple, une installation de gaz présentant un risque d’explosion (Cass. civ. 3, 10 mars 1981, n° 80-10.069, publié au bulletin N° Lexbase : A8898CGN), un risque d’éboulement de talus sur une maison (Cass. civ. 3, 12 septembre 2012, n° 11-16.943, FS-P+B N° Lexbase : A7533ISS) ou, encore, une non-conformité à la règlementation parasismique (Cass. civ. 3, 25 mai 2005, n° 03-20.247, FS-P+B N° Lexbase : A4203DII).

newsid:481485

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.