Réf. : Cass. crim., 26 janvier 2022, n° 17-87.359, F-D N° Lexbase : A87027KI
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par Marie Le Guerroué
le 02 Février 2022
► Le pouvoir, reconnu aux agents de l'Autorité de la concurrence par l'article L. 450-4 du Code de commerce, de saisir des documents et supports informatiques, trouve sa limite dans le principe de la libre défense, qui commande de respecter la confidentialité des correspondances échangées entre un avocat et son client et liées à l'exercice des droits de la défense.
Faits et procédure. Statuant sur requête du rapporteur général de l'Autorité de la concurrence dans le cadre d'une enquête relative à un système d'ententes prohibées entre les fabricants, les grossistes et les grandes enseignes de détail dans le secteur de la distribution de produits électroménagers, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris avait autorisé des opérations de visite et de saisies dans les locaux d’une société située à Suresnes. Devant la Cour de cassation, la société et l'Autorité de la concurrence forment des pourvois contre l'ordonnance rendue par le premier président se prononçant sur la régularité de ces opérations.
Ordonnance. Pour prononcer l'annulation de la saisie de quatre documents (ainsi que tous les documents en annexe), la décision attaquée énonçait que même si le courriel de la pièce n° 8 n'émanait pas ou n'était pas adressé à un avocat, il reprenait une stratégie de défense mise en place par le cabinet d’avocat, qu'il était constant également que bien que ces pièces n'émanaient pas ou n’étaient pas adressées à un avocat, elles reprenaient une stratégie de défense mise en place (l'avocat ayant étudié la possibilité de recourir au statut de demandeur à la clémence pour l'exclure ensuite) par le cabinet, le même raisonnement pouvant être adopté s'agissant de la pièce n° 10 regroupant les trois courriels saisis dans des messageries. Le premier président retenait que de même, après une analyse in concreto des pièces n° 6 et n° 7, il ne faisait aucun doute que ces éléments se référaient à des opérations de visite et de saisies, notamment aux pratiques prohibées supposées (fixation de prix de revente, restrictions de vente en ligne, distribution sélective), à la « black list », au terme « stock », à la déclaration du gérant du site, et étaient destinés à analyser les pratiques de la société, afin de corriger d'éventuels errements volontaires ou involontaires, et à préparer sa défense dans l'hypothèse d'une future visite inopinée de l'Autorité de la concurrence.
Réponse de la Cour. La Chambre criminelle rend sa décision au visa des articles 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 N° Lexbase : L6343AGZ, et L. 450-4 du Code de commerce N° Lexbase : L6272L43. Elle précise qu’il résulte de ces textes que le pouvoir, reconnu aux agents de l'Autorité de la concurrence par l'article L. 450-4 du Code de commerce, de saisir des documents et supports informatiques, trouve sa limite dans le principe de la libre défense, qui commande de respecter la confidentialité des correspondances échangées entre un avocat et son client et liées à l'exercice des droits de la défense.
Pour la Cour, le premier président, qui, par une appréciation qui relève de son pouvoir souverain, a constaté que les données confidentielles couvertes par le secret des correspondances échangées avec un avocat, et contenues dans les documents saisis, en constituaient l'objet essentiel, a justifié sa décision. Le moyen n'est dès lors pas fondé. La Cour rejette, par conséquent, les pourvois.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La confidentialité des correspondances échangées entre le client et son avocat, in La profession d’avocat, (dir. H. Bornstein), Lexbase N° Lexbase : E34573RH. |
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