Le Quotidien du 3 février 2022 : Santé et sécurité au travail

[Brèves] Responsabilité civile : immunité du médecin du travail salarié ayant agi dans les limites de sa mission et n’ayant pas commis de faute intentionnelle

Réf. : Cass. soc., 26 janvier 2022, n° 20-10.610, FS-B N° Lexbase : A53237KD

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par Lisa Poinsot

le 02 Février 2022

► Le médecin du travail, en qualité de salarié, qui agit dans les limites de sa mission et ne commet pas de faute susceptible de revêtir une qualification pénale ou de procéder à une intention de nuire, peut invoquer l’immunité dont bénéficie le préposé pour ne pas engager sa responsabilité civile personnelle dans une action exercée à son encontre par un salarié de la même entreprise.

Faits et procédure. Un salarié est placé en arrêt maladie en 2002 puis est reconnu invalide en 2005 pour être enfin mis à la retraite à 60 ans en 2010. Il demande au tribunal de grande instance (aujourd’hui tribunal judiciaire) de condamner le médecin du travail salarié au versement d’une indemnité du préjudice pour le préjudice qu’il estime avoir subi.

La cour d’appel (CA Metz, 16 novembre 2017, n° 16/01491 N° Lexbase : A2497WZI) déclare sa demande irrecevable du fait que le médecin du travail, dès lors qu’il a la qualité de salarié de l’employeur et qu’il agit sans excéder les limites de sa mission, n’engage pas sa responsabilité civile personnelle. En tant que préposé, le médecin du travail bénéficie d’une immunité, sauf en ce qui concerne les actes d’harcèlement moral et celui de violation du secret professionnel. En conséquence, les juges du fond n’ont pas retenu l’existence d’une faute intentionnelle de la part du médecin du travail pour les faits reprochés par le salarié.

Le salarié forme dès lors un pourvoi en cassation en soutenant que le médecin du travail doit répondre personnellement de ses fautes, peu important qu’il soit salarié de l’employeur, surtout lorsqu’il commet une faute intentionnelle à l’origine du dommage, ce qui écarte l’argument de l’immunité du préposé.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le salarié sur le fondement de l’article 1384, alinéa 5 N° Lexbase : L1016KZN, devenu 1242, alinéa 5, du Code civil N° Lexbase : L0948KZ7. Elle considère que le médecin du travail salarié peut invoquer l’immunité due au préposé sauf pour les actes d’harcèlement moral et de violation du secret professionnel. Elle ajoute que ne sont pas des fautes intentionnelles susceptibles d’écarter l’immunité du préposé, le refus délibéré d’appliquer la procédure prévue par le Code du travail relative au constat de l’inaptitude, le compérage, l’aliénation de son indépendance professionnelle ou encore le défaut de soins.

Pour aller plus loin :

  • Il est de jurisprudence constante que l’employeur, en qualité de commettant, engage sa responsabilité civile pour toute faute non intentionnelle de la part du médecin du travail salarié qui agit dans le cadre de sa mission. Il en ressort une immunité en faveur du médecin du travail salarié : v. notamment Ass. plén., 25 février 2000, n° 97-17.398 N° Lexbase : A8154AG4 et n° 97-20.152 N° Lexbase : A8155AG7, Cass. soc., 30 juin 2015, n° 13-28.201, FS-P+B N° Lexbase : A5460NM8 et Cass. civ. 1, 9 novembre 2004, n° 01-17.908, FS-P+B N° Lexbase : A8043DDL ;
  • v. ÉTUDE : L’incidence de la faute dans la réalisation de l’accident de travail ou de la maladie professionnelle, La réparation de la faute intentionnelle de l’employeur ou de l’un de ses préposés, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E3137ETD.

 

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