Réf. : CA Rennes, 10 décembre 2021, n° 21/01807 (N° Lexbase : A91857EW)
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par Marie Le Guerroué
le 10 Janvier 2022
► La délibération modifiant les dispositions concernant le domicile professionnel du règlement intérieur du barreau de Nantes est annulée en ce qu'elle a prévu la faculté pour l'avocat de partager ses locaux qu'avec des professionnels exerçant l'une des professions visées à l'article 31-3 de la
Faits et procédure. Le règlement intérieur du barreau de Nantes avait été modifié le 3 septembre 2019, notamment en ses dispositions concernant le domicile professionnel. Un avocat avait saisi le Bâtonnier de l'Ordre des avocats du barreau de Nantes d'une réclamation concernant les modifications du règlement, estimant que certaines modifications n'étaient pas conciliables avec les dispositions de l'article 165 du décret du 27 novembre 1991 (N° Lexbase : L8168AID) et 15-1 du Règlement Intérieur National (N° Lexbase : L4063IP8).
Sur l'interdiction de partager son domicile professionnel avec d'autres occupants n'exerçant pas l'une des professions visées à l'article 31-3 de la loi du 31 décembre 1990 (N° Lexbase : L7803AIT). En limitant le partage de locaux aux seules professions juridiques et judiciaires, le conseil de l'Ordre a, pour la cour, posé une limite injustifiée et que la loi ne prévoit pas, commettant ainsi un excès de pouvoir qui justifie l'annulation de la condition.
Sur le caractère préalable du contrôle avant toute installation. Selon la Cour, si le conseil de l'Ordre veille au respect par l'avocat de ses obligations, aucune disposition ne lui permet de soumettre à son homologation préalable l'installation d'un avocat dans le bureau qu'il a choisi sous sa seule responsabilité avec les conséquences qui en découlent en cas de non-conformité. En édictant dans le règlement intérieur cette restriction, le conseil a, à l'évidence, outrepassé ses pouvoirs. Il convient donc d'annuler l’alinéa concerné, mais uniquement en ce qu'il précise que le contrôle exercé par le conseil de l'Ordre est préalable, celui-ci pouvant être, suivant la situation, préalable ou n'intervenir que postérieurement à l'installation de l'avocat dans les locaux qu'il a choisis.
Sur les conséquences du refus comme du retrait d'homologation. Un article du règlement attribue deux effets à la décision de refus d'homologation, d'une part, le sursis à statuer sur l'ensemble des demandes administratives de l'avocat et, d'autre part, l'interdiction d'exercer dans les locaux concernés. Les requérants contestent ces effets comme constitutifs de véritables sanctions, ce qu'aucun texte ne prévoit. La critique développée est, pour la cour, fondée. En effet, si le conseil de l'Ordre a pour mission de veiller au respect par les avocats de leurs devoirs et obligations (en l'occurrence en matière de domicile professionnel), aucun texte ne lui donne le pouvoir d'en tirer les conséquences et de sanctionner d'une manière ou d'une autre ce que constitue incontestablement une interdiction d'exercice, étant rappelé que l'existence d'un domicile professionnel est une condition de l'exercice. Son pouvoir, à cet égard, est limité et seul le Bâtonnier (sous réserve des pouvoirs du procureur général) peut prendre l'initiative de mettre l'avocat en demeure de satisfaire à ses obligations déontologiques et d'engager, le cas échéant, des poursuites disciplinaires. L’article litigieux en ce qu'il dispose que la décision de non-homologation des locaux professionnels emporte des effets ne peut qu'être annulé.
Annulation. Les recours sont donc, pour la cour, partiellement bien fondés dans la limite des contestations admises. Les annulations ne remettent pas en cause le surplus de la délibération adoptée.
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