Réf. : TA Nancy, 26 novembre 2021, n° 2103426 (N° Lexbase : A42427ET)
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par Yann Le Foll
le 14 Décembre 2021
► Estimant la mesure générale, absolue et excessive dans le temps, le juge des référés suspend un arrêté préfectoral interdisant, pour la période du 19 novembre 2021 au 2 janvier 2022, les manifestations dans le périmètre du centre-ville de Nancy occupé par les installations et spectacles des fêtes de la Saint-Nicolas.
Faits – antécédents. Le périmètre défini par l’arrêté attaqué a été fixé en référence à la localisation des chalets, marchés, attractions et spectacles déployés au sein de la ville dans le cadre des Fêtes de Saint-Nicolas, pour accueillir environ 300 000 personnes durant toute la durée des festivités dont 100 000 simultanément le 4 décembre 2021 à l’occasion du traditionnel défilé. Il ressort également des pièces du dossier que les manifestations revendicatives, qui ont lieu quasiment hebdomadairement depuis dix-huit semaines sur des itinéraires situés aux limites intérieures de ce périmètre, ont donné lieu à des débordements. Enfin, il appartient à l’autorité compétente d’assurer l'ordre public dans le contexte particulier des fêtes de fin d’année, du niveau « sécurité renforcée risque attentat » du plan Vigipirate et du contexte sanitaire actuel et à venir dans les prochaines semaines.
Position TA. Le tribunal administratif relève que, toutefois, en admettant même que le périmètre défini par l’arrêté attaqué puisse être regardé comme un périmètre de protection au sens de l’article L. 226-1 du Code de la sécurité intérieure (N° Lexbase : L4218L7D), l’interdiction édictée, qui s’étend sur une période particulièrement longue de quarante- cinq jours, excède la durée d’un mois prévue au dernier alinéa de ce même article. Par ailleurs, cette interdiction ne fait aucune distinction en fonction de la nature et de l’objet des manifestations, de leurs modalités d’organisation, des trajets, des jours ou des horaires projetés, ou encore des périodes de faible ou de forte affluence du public aux fêtes de Saint-Nicolas et revêt ainsi un caractère général et absolu.
Bien que limitée dans le temps, elle ne peut être regardée comme une mesure nécessaire et adaptée et, ainsi, proportionnée à l’objectif de préservation de l’ordre public.
En effet, d’une part, les manifestations sur la voie publique sont soumises à une obligation de déclaration préalable en vertu de l’article L. 211-1 du Code de la sécurité intérieure (N° Lexbase : L5202ISH) et sont susceptibles d’être interdites, au cas par cas, en application de l’article L. 211-4 du même code (N° Lexbase : L5205ISL), notamment au vu des informations que comporte cette déclaration ou à l’occasion des échanges avec les organisateurs qu’elle peut susciter, si des troubles à l’ordre public sont avérés (Cass. crim., 16 mars 2021, n° 20-85.603, F-P+I N° Lexbase : A89654LM).
D’autre part, les pièces du dossier ne comportent aucun élément de nature à établir en quoi les circonstances locales rendraient ce dispositif de déclaration préalable et d’examen au cas par cas inapproprié ou inapplicable durant toute la période des fêtes de Saint-Nicolas et nécessiteraient une interdiction de principe des manifestations sur le seul fondement des dispositions de l’article L. 2214-4 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L8591HW4) (voir de même pour la suspension partielle de l’exécution de deux arrêtés « couvre-feu », TA Cergy-Pontoise, 26 août 2019, n° 1910034 N° Lexbase : A4279ZL3 et n° 1910057 N° Lexbase : A4280ZL4).
Décision TA. Les requérants sont donc fondés à soutenir que l’arrêté attaqué porte à la liberté de manifester une atteinte qui n’est ni nécessaire, ni adaptée ni proportionnée et, en conséquence, à en demander la suspension.
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