Réf. : CJUE, 6 octobre 2021, aff. C- 717/19, Boehringer Ingelheim RCV GmbH & Co. KG Magyarországi Fióktelepe (N° Lexbase : A9492483)
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par Marie-Claire Sgarra
le 09 Novembre 2021
► La législation européenne, applicable en matière de TVA, s’oppose à une réglementation nationale qui prévoit qu’une entreprise pharmaceutique ne peut déduire de sa base d’imposition à la TVA ajoutée la partie de son chiffre d’affaires provenant de la vente de médicaments subventionnés par l’organisme d’assurance maladie étatique qu’elle reverse à cet organisme, en vertu d’un contrat conclu entre ce dernier et cette entreprise, au motif que les montants versés à ce titre n’ont pas été déterminés sur la base des modalités préalablement fixées par ladite entreprise dans le cadre de sa politique commerciale et que ces versements n’ont pas été effectués dans un but promotionnel ;
► Elle s’oppose également à une réglementation nationale qui subordonne la réduction a posteriori de la base d’imposition à la TVA à la condition que l’assujetti ayant droit au remboursement dispose d’une facture à son nom établissant l’exécution de la transaction donnant lieu audit remboursement, même lorsqu’une telle facture n’a pas été émise et que l’exécution de cette transaction peut être établie par d’autres moyens.
Les faits :
🖊️ Sur la première question préjudicielle : Faut-il interpréter l’article 90, paragraphe 1, de la Directive [TVA] en ce sens que cette disposition s’oppose à une réglementation nationale telle qu’applicable dans l’affaire au principal, en vertu de laquelle une entreprise pharmaceutique qui, en vertu d’une convention dont la conclusion est facultative, reverse à l’organisme d’assurance maladie étatique une partie de son chiffre d’affaires provenant de ses ventes de produits pharmaceutiques et, partant, ne reçoit pas la totalité de la contrepartie de ces produits, n’a pas droit à une réduction ultérieure de sa base d’imposition à la TVA au seul motif que ces versements n’obéissent pas à des modalités fixées à l’avance par cette entreprise dans le cadre de sa politique commerciale et à l’objectif principal de promouvoir les ventes ?
⚖️ La CJUE a déjà eu l’occasion de juger que la Directive TVA (N° Lexbase : L7664HTZ) doit être interprétée en ce sens que la remise accordée, en vertu d’une loi nationale, par une entreprise pharmaceutique à une entreprise d’assurance maladie privée entraîne une réduction de la base d’imposition en faveur de cette entreprise pharmaceutique, lorsque des livraisons de produits pharmaceutiques sont effectuées par l’intermédiaire de grossistes à des pharmacies qui effectuent ces livraisons à des personnes couvertes par une assurance-maladie privée, laquelle rembourse à ses assurés le prix d’achat des produits pharmaceutiques (CJUE, 20 décembre 2017, aff. C‑462/16, Boehringer Ingelheim Pharma GmbH & Co. KG N° Lexbase : A2534W8D).
👉 Une partie de la contrepartie obtenue à la suite de la vente des médicaments par l’entreprise pharmaceutique n’ayant pas été perçue par celle-ci en raison de la contribution qu’elle verse à l’organisme d’assurance maladie étatique, lequel reverse aux pharmacies une partie du prix de ces médicaments, il y a lieu de considérer que le prix de ces derniers a été réduit après le moment où s’est effectuée l’opération.
👉 Les conditions de la réduction a posteriori de la base d’imposition prévues par la législation nationale, en vertu desquelles les versements, qui donnent droit à une telle réduction, doivent être déterminés sur la base des modalités préalablement fixées par cette entreprise dans le cadre de sa politique commerciale et effectués dans un but promotionnel, auraient pour conséquence de priver toutes les entreprises pharmaceutiques, ayant conclu des conventions de prise en charge avec l’organisme d’assurance maladie étatique, de la possibilité de réduire leur base d’imposition à la TVA a posteriori, au titre des contributions versées à cet organisme, alors même qu’il y a effectivement eu une réduction de prix après le moment où s’était effectuée l’opération de la Directive TVA.
👉 Lesdites conditions ne sauraient donc être considérées comme relevant de la marge d’appréciation dont disposent les États membres en vertu de cette disposition.
🖊️ Sur la deuxième question préjudicielle : En cas de réponse affirmative à la première question, faut-il interpréter l’article 273 de la Directive [TVA] en ce sens que cette disposition s’oppose à une réglementation nationale telle qu’applicable dans l’affaire au principal, qui subordonne la réduction a posteriori de la base d’imposition à la condition que l’assujetti ayant droit au remboursement dispose d’une facture à son nom établissant la réalisation de l’opération ouvrant droit à remboursement, dans le cas où il existe d’autres documents témoignant de manière appropriée de l’opération permettant une réduction a posteriori de la base d’imposition, que cette opération repose sur des données vérifiables a posteriori, pour partie publiques et officielles, et qu’elle permet d’assurer l’exacte perception de la TVA ?
Rappelons qu’en cas de réduction de prix après le moment où s’effectue l’opération il est prévu que la base d’imposition est réduite à due concurrence dans les conditions déterminées par les États membres.
Ici, la société ne dispose pas de factures portant sur les versements qu’elle a effectués au bénéfice de l’organisme d’assurance maladie étatique, ce dernier n’ayant émis que des demandes de paiement.
👉 Dans une telle hypothèse, les principes de neutralité de la TVA et de proportionnalité exigent que l’État membre concerné permette à l’assujetti d’établir, par d’autres moyens, devant les autorités fiscales nationales, que l’opération donnant droit à la réduction de la base d’imposition a effectivement été réalisée.
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