Réf. : Cass. com., 29 septembre 2021, n° 19-25.112 (N° Lexbase : A0478489)
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par Vincent Téchené
le 11 Octobre 2021
► D’une part, l'exigence d'un procès équitable n'implique pas le droit pour la personne contre qui il est demandé le prononcé d'une sanction professionnelle, ou son avocat, d'avoir la parole en dernier avant la clôture des débats ;
D’autre part, le fait de n'avoir pas tenu de comptabilité ne peut être sanctionné par une mesure de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer que si les textes applicables font obligation de tenir une comptabilité.
Faits et procédure. Un groupement forestier a été mis en redressement puis liquidation judiciaires les 27 juin et 19 décembre 2014. Le liquidateur a demandé qu'une mesure de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer soit prononcée contre son gérant.
La cour d’appel (CA Versailles, 27 mars 2018, n° 17/07360 N° Lexbase : A9770XHC) ayant prononcé une mesure d'interdiction de gérer, le dirigeant a formé un pourvoi en cassation.
Décision. En premier lieu, le dirigeant soutenait que l'exigence d'un procès équitable implique qu'en matière de sanction, l'intéressé ou son avocat soit entendu à l'audience et puisse avoir la parole en dernier et que mention en soit faite dans la décision.
La Cour de cassation rejette purement et simplement ce moyen. Elle retient ainsi que l'exigence d'un procès équitable, issue de l'article 6 de la CESDH (N° Lexbase : L7558AIR), n'implique pas le droit pour la personne contre qui il est demandé le prononcé d'une sanction professionnelle, ou son avocat, d'avoir la parole en dernier avant la clôture des débats.
En second lieu, le dirigeant faisait valoir que les groupements forestiers sont des sociétés civiles régies par les articles 1832 (N° Lexbase : L2001ABQ) à 1844-17 (N° Lexbase : L2037AB3) du Code civil qui ne sont pas astreintes à la tenue d'une comptabilité. Ainsi, en retenant néanmoins, pour prononcer une interdiction de gérer qu’il ne produisait aucune pièce comptable, la cour d'appel aurait violé les articles L. 123-12 (N° Lexbase : L5570AI7), L. 653-5, 5° (N° Lexbase : L7346IZ4) et L. 653-8 (N° Lexbase : L2082KG9) du Code de commerce.
Sur ce point, l’argument du demandeur au pourvoi emporte l’adhésion de la Cour de cassation qui censure l’arrêt d’appel au visa de l’article L. 653-5, 6° du Code de commerce. Selon la Cour, il résulte de ce texte que le fait de n'avoir pas tenu de comptabilité ne peut être sanctionné par une mesure de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer que si les textes applicables font obligation de tenir une comptabilité.
Or, elle relève que pour prononcer la sanction de l'interdiction de gérer, l'arrêt d’appel a retenu que les commerçants personnes physiques et morales doivent tenir une comptabilité et que le groupement forestier n'a produit ni grand livre, ni balance, ni journal, mais seulement un projet de bilan.
Dès lors, pour la Haute juridiction, en se déterminant ainsi, par des motifs erronés tirés de la qualité de commerçant du groupement forestier, qui est une société civile, et sans rechercher si les textes applicables lui imposaient la tenue d'une comptabilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Précisions. La Cour de cassation avait déjà retenu que les juges ne peuvent prononcer la faillite personnelle sans s'expliquer sur la qualité de commerçant de l'intéressé que ce dernier conteste et qui constitue la condition pour retenir à son encontre le défaut de tenue d'une comptabilité régulière (Cass. com., 1er décembre 2009, n° 08-17.187, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A2873EP4).
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les règles spécifiques à la faillite personnelle, La non-tenue de comptabilité conforme, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase (N° Lexbase : E3922EXK). |
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