Le Quotidien du 28 avril 2021 : Contrats et obligations

[Brèves] Le dol sur la valeur des diplômes délivrés par un établissement d’enseignement supérieur de droit privé

Réf. : Cass. civ. 1, 8 avril 2021, n° 19-14.737, F-D (N° Lexbase : A12174PR)

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[Brèves] Le dol sur la valeur des diplômes délivrés par un établissement d’enseignement supérieur de droit privé. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/67399350-0
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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)

le 27 Avril 2021

► Est caractérisé le dol commis par un établissement d’enseignement supérieur de droit privé délivrant un diplôme intitulé « Master » ; l’élément intentionnel est constitué par l’usage de la dénomination de cet intitulé alors que l’établissement avait connaissance de l’interdiction pour lui de délivrer un diplôme ainsi intitulé ; la valeur des diplômes est un élément déterminant pour les candidats au diplôme et a été déterminant du consentement du cocontractant ;

S’agissant des restitutions consécutives à l’annulation du contrat de scolarité, le cocontractant de l’établissement n’est tenu d’aucune restitution dès lors que la valeur de la prestation reçue par lui est inexistante, faute d’équivalence des années d’étude ou de débouchés professionnels.

Faits et procédure. Un contrat de scolarité avait été conclu pour une durée de deux ans, période à l’issue de laquelle, le candidat au diplôme se vit proposer un redoublement. Il assigna alors l’établissement d’enseignement supérieur de droit privé en nullité du contrat, arguant pour cela d’un dol. Ce dol fut caractérisé par les juges du fond (CA Paris, 17 janvier 2019). Quant aux conséquences de la caractérisation de dol, ils refusèrent de faire peser sur le candidat au diplôme des restitutions. Ils refusèrent enfin d’indemniser le candidat au titre des frais et emprunts engagés pour la poursuite de ses études et au titre du préjudice scolaire et de la perte de chance.

Solution. La Cour de cassation rejette le pourvoi.

S’agissant de la caractérisation du dol, la première chambre civile approuve les juges du fond d’avoir caractérisé l’intention dolosive de l’établissement, dès lors que ceux avait relevé que « l’interdiction de délivrer un diplôme intitulé "master", correspondant à un diplôme d’État et résultant d’un arrêté du 25 avril 2002 avec possibilité de régularisation jusqu’à au 31 août 2003, était connu de la société Créapole qui n’avait pas pris la décision de cesser l’utilisation de ce terme dans l’ensemble des brochures, guide de présentation, invitations et documents, que ceux-ci ne mentionnaient pas l’absence de reconnaissance du diplôme par l’État et qu’elle n’établissait pas avoir fourni une information lors de l’entretien d’admission de (la candidate au diplôme) ». Ainsi, la preuve que le candidat au diplôme avait été informé que le diplôme n’était pas un diplôme d’État est de nature à faire obstacle à la caractérisation de l’intention frauduleuse. Au-delà de l’intention dolosive, la Cour était également amenée à s’interroger sur le caractère déterminant de la reconnaissance par l’État du diplôme à défaut duquel le dol ne saurait être caractérisé. Or, les juges du fond sont approuvés d’avoir retenu que « la valeur des diplômes décernés était un élément déterminant du consentement des candidats à la formation dispensée, (la cour d’appel) a souverain estimé que le dol invoqué présentait un caractère déterminant de l’engagement (du candidat au diplôme) qui n’aurait pas poursuivi ses démarches d’inscription si elle en avait été informée ». Les conditions du dol étaient donc réunies.

S’agissant des conséquences de la restitution. La Cour de cassation approuve, d’abord, les juges du fond de n’avoir fait supporter aucune restitution au candidat au diplôme, au motif que celle-ci « ne pouvait restituer la prestation dont elle avait bénéficié, la cour d’appel (ayant) souverainement estimé que la valeur réelle de cette prestation était inexistante, faute d’équivalence des années d’étude ou de débouché professionnel ». En l’espèce, toute restitution en nature était impossible, seule une restitution en valeur était donc concevable (v. par ex. Cass. civ. 1, 11 juin 2002, n° 00-15.297, F-P+B N° Lexbase : A8827AYL). C’est dans cette voie que les juges se sont immiscés. Seule était en cause l’évaluation du montant de cette restitution. Or, les juges du fond avaient considéré que cette valeur était « inexistante » en raison de l’absence de reconnaissance du diplôme par l’État. Ainsi, le jeu des restitutions est en pratique entravé. La Cour de cassation approuve, ensuite, les juges du fond d’avoir refusé au candidat au diplôme une indemnisation eu égard aux charges et à l’emprunt souscrits par lui. En effet, ces charges « relevaient de la vie étudiante résultant du choix de poursuivre des études supérieures ». Enfin, l’indemnisation au titre du préjudice scolaire et de la perte de chance est écartée, car le candidat au diplôme avait « abandonné ses études à la suite de la décision de redoublement, antérieurement à la découverte de la valeur réelle des diplômes ».

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