Le Quotidien du 14 avril 2021 : Droit pénal des mineurs

[Brèves] Le mineur entendu par le service de la protection judiciaire de la jeunesse doit être informé de son droit de se taire

Réf. : Cons. const., décision n° 2021-894 QPC, du 9 avril 2021 (N° Lexbase : A89634NB)

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par Adélaïde Léon

le 13 Avril 2021

► En ne prévoyant pas que le mineur entendu par le service de la protection judiciaire de la jeunesse doit être informé de son droit de se taire, l’alinéa premier de l’article 12 de l’ordonnance n° 45-174, du 2 février 1945, relative à l’enfance délinquante, porte atteinte à ce droit et doit être déclaré contraire à la Constitution ;

Jusqu’à la date de l’abrogation de ces dispositions, le service de la protection judiciaire de la jeunesse devra informer le mineur, entendu par elle en application de l’article 12 de l’ordonnance du 2 février 1945, de son droit de se taire.

Rappel de la procédure. Le Conseil constitutionnel a été saisi par la Cour de cassation (Cass. crim., 13 janvier 2021, n° 20-84.861 N° Lexbase : A72314CS) d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur le premier alinéa de l’article 12 de l’ordonnance n° 45-174, du 2 février 1945, relative à l’enfance délinquante, (N° Lexbase : L4662AGR) dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1547, du 18 novembre 2016 (N° Lexbase : L1605LB3), lequel est relatif au recueil de renseignements socio-éducatifs par le service de la protection judiciaire de la jeunesse.

Motifs de la QPC. Les requérants estimaient que les dispositions en cause méconnaissaient le principe fondamental reconnu par les lois de la République en matière de justice des mineurs ainsi que les droits de la défense dans la mesure où elles ne prévoyaient pas que le mineur, entendu par le service de la protection judiciaire de la jeunesse dans le cadre d’un recueil de renseignements socio-éducatifs, soit préalablement informé de son droit à l’assistance d’un avocat et de son droit de se taire. Selon les requérants, une telle information s’imposerait dès lors que le mineur peut être amené à faire des déclarations sur les faits qui lui sont reprochés et que celles-ci peuvent être consignées dans le rapport établi.

Décision. Le Conseil constitutionnel déclare les dispositions litigieuses contraires à la Constitution.

Le Conseil rappelle les dispositions de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen (N° Lexbase : L1373A9Q) desquelles résulte le droit de ne pas s’accuser soi-même, dont il découle le droit de se taire.

La Haute juridiction souligne qu’au terme de l’article 12 de l’ordonnance du 2 février 1945, le service de la protection judiciaire de la jeunesse peut notamment être sollicité, pour établir le rapport et les propositions mentionnés aux dispositions litigieuses, dans les cas suivants :

  • avant toute réquisition de placement en détention provisoire ;
  • avant toute décision de placement en détention provisoire ;
  • avant toute décision de prolongation de la détention provisoire ;
  • avant toute décision du juge des enfants ou du tribunal pour enfants dans certains cas où ils sont saisis aux fins de jugement.

Le Conseil constitutionnel précise qu’à cette occasion, le service de la protection judiciaire de la jeunesse a la faculté d’interroger le mineur sur les faits qui lui sont reprochés. L’intéressé peut alors être amené à reconnaître sa culpabilité par des déclarations qui seront susceptibles d’être consignées dans le rapport et donc d’être portées à la connaissance du magistrat ou de la juridiction compétents.

En ne prévoyant pas l’information du mineur de son droit de se taire lorsqu’il est entendu par le service de la protection judiciaire de la jeunesse, l’alinéa 1 de l’article 12 de l’ordonnance du 2 février 1945 porte atteinte à ce droit.

Conséquences de la déclaration d’inconstitutionnalité. Estimant que l’abrogation immédiate des dispositions litigieuses aurait pour effet de supprimer la possibilité pour l’autorité judiciaire de faire procéder à un recueil de renseignements socio-éducatifs, le Conseil reporte la date d’abrogation au 30 septembre 2021.

En outre, considérant que la remise en cause des mesures ayant été prise sur le fondement des dispositions contestées méconnaîtrait les objectifs de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public et de recherche des auteurs d’infractions ainsi que le principe fondamental reconnu par les lois de la République en matière de justice des mineurs le Conseil décide que les mesures prises avant la publication de sa décision ne peuvent être contestées sur le fondement de l’inconstitutionnalité déclarée.

En revanche, la Haute juridiction juge que jusqu’à la date de l’abrogation des dispositions déclarées inconstitutionnelles, le service de la protection judiciaire de la jeunesse devra informer le mineur entendu par elle en application de l’article 12 de l’ordonnance du 2 février 1945 de son droit de se taire.

Cette décision intervient dans un contexte de consécration, par le Conseil constitutionnel, du droit au silence dans le cadre de la procédure pénale (v. not., Cons. const., décision n° 2020-886 QPC, du 4 mars 2021 N° Lexbase : A66394IQ et Cons. const., n° 2021-895/901/902/903 QPC, du 9 avril 2021 N° Lexbase : Z443721E).

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