Réf. : CE 8° et 3° ch.-r., 12 mars 2021, n° 438508, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A92914KC)
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par Marie-Claire Sgarra
le 17 Mars 2021
► Les dispositions des articles 1857 (N° Lexbase : L2054ABP) et 1858 (N° Lexbase : L2055ABQ) du Code civil permettent à l'administration des impôts, après en avoir vainement et préalablement poursuivi le paiement auprès de la société elle-même, de constituer les associés d'une société civile débiteurs des dettes fiscales de la société, à proportion de leur part respective dans le capital social à la date d'exigibilité de la créance litigieuse ;
► Dans le cas où la société civile a été dissoute, la notification du titre exécutoire qu'il appartient à l'administration de délivrer à chacun des associés concernés, avant, le cas échéant, d'engager des poursuites en vue du recouvrement des impositions mises à leur charge, doit intervenir dans le délai de prescription de cinq ans à compter de la publication de cette dissolution.
Les faits :
⇒ à l'issue d'une vérification de sa comptabilité, une société civile, détenue à parts égales par les requérants, a été assujettie à des cotisations supplémentaires d’IS et de contributions additionnelles à cet impôt au titre des exercices clos en 1999, 2000, 2001, 2002 et 2003, assorties d'intérêts de retard et de la pénalité pour manquement délibéré,
⇒ ces impositions et majorations ont été mises en recouvrement.
⇒ la société a formé des réclamations contre ces impositions, assorties d'une demande tendant au bénéfice du sursis de paiement,
⇒ par la suite, les requérants ont cédé l'intégralité de leurs parts à une EURL qui a décidé de dissoudre le lendemain la société civile ce qui a entraîné la transmission universelle de son patrimoine à son profit sans liquidation.
Procédure :
⇒ le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande en décharge introduite par la société civile l'administration fiscale a engagé le recouvrement des impositions en litige auprès de la SARL,
⇒ l'administration a émis un AMR portant sur une partie de ces impositions à l'encontre d’un des deux associé,
⇒ le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de ce dernier tendant à obtenir la décharge des sommes correspondantes ; la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé contre ce jugement (CAA Paris, 12 décembre 2019, n° 18PA00524]).
Principes.
✔ À l'égard des tiers, les associés répondent indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social à la date de l'exigibilité ou au jour de la cessation des paiements (C. civ., art. 1857).
✔ Les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale (C. civ., art. 1858).
✔ Toutes les actions contre les associés non liquidateurs ou leurs héritiers et ayants cause se prescrivent par cinq ans à compter de la publication de la dissolution de la société (C. civ., art. 1859 N° Lexbase : L2056ABR).
Solution du Conseil d’État.
👉 Ici l’acte de poursuite notifié à la société cessionnaire a seulement eu pour effet d'interrompre, à l'égard de celle-ci et de toutes les personnes venant à ses droits ou ayant la qualité de débiteur solidaire de ses dettes fiscales, la prescription de l'action en recouvrement prévue par l'article L. 274 du livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L1740DAP).
👉 Cet acte n'a pas interrompu, à l'égard des anciens associés cédants, le délai de la prescription prévue à l'article 1859 du Code civil, lequel est arrivé à échéance cinq ans après la publication de la dissolution de la société civile. Cette prescription quinquennale était donc acquise à la date à laquelle l'impôt a été mis en recouvrement entre les mains de l'associé cédant.
Sur la jurisprudence antérieure : 📌 Le Conseil d’État a jugé que si « les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale », l'administration qui, pour obtenir le paiement des rappels mis en recouvrement, après avoir saisi le stock de vin et les cuves, a procédé à leur vente forcée mais a dû constater le détournement de l'ensemble de la récolte et l'impossibilité de céder les cuves qui appartenaient à un établissement de crédit-bail, et dont les avis à tiers détenteur n'ont permis d'appréhender que de très faibles sommes, avait accompli des diligences suffisantes eu égard aux informations dont elle pouvait disposer, et a établi l'insuffisance d'actif social de la société pour le paiement de la dette fiscale (CE 8° et 3° ssr., 26 janvier 2011, n° 309362, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7455GQ8). 📌 La Cour de cassation a quant à elle confirme le point de départ du délai de cinq ans et précise que l’autorité de la chose jugée attachée à la décision d’admission de la créance au passif de la procédure collective d’une société ne prive pas l’associé, poursuivi en exécution de son obligation subsidiaire au paiement des dettes sociales, d’opposer au créancier la prescription de l’article 1859, distincte de celle résultant de la créance détenue contre la société, et propre à l’action du créancier contre l’associé (Cass. com., 20 mars 2019, n° 17-18.924, F-P+B N° Lexbase : A8924Y4B). Lire en ce sens, C. Lebel, Obligation au paiement des dettes sociales : conditions de l’action contre l’associé de la société en liquidation judiciaire, Lexbase Affaires, avril 2019, n° 590 (N° Lexbase : N8442BXX). |
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